vendredi 14 décembre 2007

Un concierge kosovar soutenu par (presque) tous ses locataires

Bekim Ademi devrait quitter la Suisse dans quelques jours. Il se bat pour y rester, avec sa femme et ses enfants. Il a le soutien des locataires dont il est le concierge. Un article de Jérôme Ducret dans 24 Heures.


Bekim Ademi, au centre, entouré de son épouse
Gjemile et de leurs deux enfants de sept
et huit ans Shkresa (à gauche) et Shkrep.
A partir de ce samedi, ils n’ont en principe
plus l’autorisation de rester en Suisse.
LAUSANNE, LE 11 DÉCEMBRE 2007.


C’est son avocat, Me Jean Lob, qui lui a conseillé de contacter 24 heures . Bekim Ademi a débarqué en Suisse en 1993. A l’époque, il était venu travailler au noir, durant deux ans, pour une entreprise de la région lausannoise. Quatorze ans plus tard, ce Lausannois d’adoption, sa femme Gjemile et leurs deux enfants Shkresa et Shkrep ont reçu de Berne un avis d’expulsion du territoire suisse, exécutoire ce samedi.

Enfants nés en Suisse
L’homme est originaire du Kosovo. Il avait 24 ans lorsqu’il a posé son premier pied dans la capitale vaudoise. «Je ne veux pas retourner au Kosovo, je n’y ai plus d’attaches, commente Bekim. Nos deux enfants, ils ne savent presque pas ce que veut dire le mot Kosovo. Ils sont nés en Suisse, on leur parle en français, ma femme et moi, c’est leur langue maternelle.»

En 1995, Bekim est devenu un «travailleur au gris», comme il le dit lui-même. Il a obtenu durant quelques années un permis de séjour provisoire. Lorsque la guerre a pris fin dans son pays natal, il a dû y retourner. Il s’est alors retrouvé dans une situation qu’il qualifie de «délicate». Il est revenu en Suisse, avec une nouvelle demande de permis de séjour. Au bout d’une longue procédure, Berne a dit non. Au vu de la situation familiale de ce père de deux enfants scolarisés à Lausanne, le Service cantonal de la population a tenté d’obtenir une exception auprès de l’Office fédéral des migrations. Le fait que Bekim Ademi n’ait pas de casier judiciaire, et qu’il n’ait jamais demandé l’aide sociale, semblaient plutôt favorables. Là encore, après bien des méandres juridiques, la réponse a été négative. Elle a été confirmée récemment par le Tribunal fédéral administratif.

Pour mettre toutes les chances de son côté, Bekim, concierge de trois immeubles au chemin de Florency depuis une année et demie, a obtenu le soutien de son ancien patron – l’entreprise Coppola et Seggio. Il a également fait le tour de «ses» locataires en leur demandant s’ils étaient d’accord de signer une lettre de soutien.

«Les bons, ils s’arrangent pour les mettre à la porte»
«Trente-cinq ont signé, explique le Kosovar. Il y a une personne qui n’a pas voulu. Elle m’a dit qu’elle n’aimait pas les étrangers, qu’elle votait pour Blocher…» «C’est vrai, je lui ai dit que je n’étais pas d’accord, explique la personne en question. Je ne comprends d’abord pas pourquoi la gérance engage quelqu’un qui n’a pas de papiers, et puis il y a beaucoup de gens à Lausanne qui cherchent un appartement et qui n’ont pas sa chance!» «Nous, on a signé, rétorque une locataire. Les bons, ils s’arrangent pour les mettre à la porte de la Suisse, et les mauvais, ils peuvent rester, ça n’est pas logique. Ca va peut-être changer, maintenant que Blocher n’est plus au Conseil fédéral…»

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