Un article de Carole Pantet pour 24 Heures.
Depuis deux ans, Farid et sa famille
vivent dans un quatre-pièces à Yverdon.
Il y a un mois, ils ont appris qu’ils devront
le quitter pour intégrer un centre
d’aide d’urgence. Comme eux, ils sont
près de 800 déboutés vaudois à devoir
déménager, ainsi que l’exige la nouvelle
loi sur l’asile. Les premiers transferts
vont débuter en novembre.
MICHEL DUPERREX
YVERDON, LE 19 OCTOBRE 2007
Pour les citoyens suisses, le passage aux urnes semble lointain. Mais pour les requérants déboutés, c’est le 1er janvier 2008 que la nouvelle loi sur l’asile (Lasi), qui avait récolté 1,5 million de oui en septembre 2006, se concrétisera.
Vendre les meubles
Aujourd’hui, les trois quarts des requérants déboutés vivent en appartements. Ils reçoivent 14 francs par jour et par adulte. Dès le 1er janvier prochain, à l’instar de la famille de Farid, ces 800 personnes n’auront plus accès à ces prestations. Concrètement, cela signifie qu’ils devront vendre leurs meubles et quitter leur appartement pour gagner des centres d’accueil collectif.
«Ce sera très dur, on va perdre toute notre intimité.» Ce Yéménite, ancien pilote militaire, est conscient de ce qui attend sa famille. Pas question néanmoins pour lui de rentrer au pays. «On va faire avec. Aller dans ce centre et se serrer la ceinture. Je n’ai pas le choix. J’étais dans l’opposition et je ne peux pas retourner au Yémen.» Mais c’est surtout pour ses enfants, tous scolarisés à Yverdon depuis deux ans, qu’il a mal. Leur dire qu’ils vont bientôt devoir quitter leurs amis pour vivre dans un centre «qui ressemble à une prison», c’est trop lui demander. Depuis le 1er janvier 2007, les requérants déboutés qui résident depuis plus de cinq ans en Suisse peuvent déposer une demande de régularisation, s’appuyant sur l’article 14 de la Lasi (lire ci-dessous). Les autres, comme la famille de Farid, arrivée en Suisse en octobre 2003, n’ont plus que deux options: l’aide d’urgence ou l’aide au retour. A moins qu’ils ne choisissent la clandestinité. «Il y a des gens qui vont disparaître, soupçonne Pierre Imhof, directeur de la Fareas. On estime aujourd’hui que seules 600 personnes sur les 800 vont demander l’aide d’urgence.» Une fois en centre, les célibataires et les couples bénéficieront uniquement de prestations en nature, soit des repas et des bons pour des vêtements d’occasion, des articles d’hygiène et de la poudre à lessive. Les requérants déboutés sans enfants seront regroupés à Lausanne-Vennes et à Vevey. Pour les accueillir tous, un troisième centre devrait s’ouvrir sur La Côte dès avril prochain. «Pour l’instant, nous n’avons reçu aucune proposition concrète des communes concernées. Une réunion est agendée prochainement et nous continuons à compter sur cette structure dès le printemps», précise le directeur. Les familles et les personnes plus vulnérables seront réparties entre les centres de Bex, de Leysin et de Lausanne-Simplon. Fermé en juin 2006 et inoccupé depuis, ce dernier sera rouvert mi-novembre pour l’accueil des personnes à l’aide d’urgence. Ils y recevront une aide financière de 9?fr.?50 par jour.
Ils n’y croient pas
Le transfert des déboutés vers les centres sera progressif et commencera début novembre, l’objectif étant que les 100% des requérants concernés aient quitté les appartements d’ici à fin 2008. «Ils sont tous au courant de ce qui va se passer, assure Pierre Imhof. Ils ont été informés par le biais de deux courriers déjà, un du canton, l’autre de la Fareas. Un troisième, avec des détails très concrets, partira bientôt.»
Des séances d’information ont été organisées et la Fareas a ouvert un blog spécialement consacré à l’aide d’urgence. «On essaie vraiment d’être le plus transparent possible. C’est important, insiste-t-il. Mais dans le canton de Vaud, beaucoup de décisions ont été prises sans être exécutées. Du coup, certains peinent à croire qu’ils devront vraiment quitter leur appartement.»
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