«Un couloir sans fin, sans la moindre porte de sortie.» C'est la procédure d'asile en Suisse, telle que résumée par la réalisatrice Irene Marty dans son film: Expulsé - l'incroyable histoire de Stanley Van Tha.
Birman, membre d'une minorité chrétienne, Stanley Van Tha arrive en Suisse en 2003 avec des papiers en règle. Son objectif est clair: demander l'asile car son appartenance religieuse et ses activités politiques déplaisent fortement à la junte militaire birmane. Il dit craindre pour sa vie. Les autorités helvétiques ne le croient pas: «Il n'avait pas de motifs politiques pour obtenir le statut de réfugié», insiste Dominique Boillat, le porte-parole de l'Office fédéral des migrations (ODM).
En décembre 2003, son dernier recours est rejeté. L'homme, âgé de 37 ans, doit donc quitter la Suisse. Mais il craint de retourner dans son pays. Il laisse donc courir le délai pour un départ volontaire. En mars, il est arrêté. Deux des collaboratrices du centre où il était hébergé témoignent dans le documentaire: «Quand la police est arrivée, il a dit: je ne prends rien avec moi, sinon tout finira dans les mains des militaires birmans.» Et sa collègue d'ajouter, les larmes aux yeux: «A plusieurs reprises, il a répété: ma vie est finie maintenant.» Il est alors transféré à la prison bernoise de Wintwil. Le jour de l'expulsion arrive, c'est le 14 avril 2004: bâillonné, immobilisé dans une chaise roulante, il est renvoyé à Rangoon encadré par trois policiers bernois. Une fois arrivé sur sol birman, Stanley Van Tha est remis aux autorités militaires. Immédiatement emprisonné, il est condamné fin août à dix-neuf ans de prison. Sa peine se décompose ainsi: sept ans pour activités politiques, sept ans pour avoir demandé l'asile dans un pays étranger et cinq ans pour utilisation d'un «faux passeport».
Cette affaire embarrasse fortement la Suisse. Interpellé, le conseiller fédéral Christoph Blocher a même déclaré en mars 2005 devant le Conseil des Etats: «Il doit avoir été condamné pour vol ou quelque chose du genre.» Le Département fédéral des affaires étrangères est intervenu auprès de la Birmanie, mais sans succès. Rien d'étonnant: selon Amnesty International, 1300 prisonniers politiques étaient détenus fin 2004 en Birmanie.
Malgré ce terrible destin, l'ODM persiste et signe: «En matière d'asile, il n'y a eu aucune décision fausse», insiste Dominique Boillat. «Il y a eu des négligences accumulées, mais pas d'erreur», poursuit-il. Et de lancer un reproche au canton de Berne qui a décidé de le renvoyer sous contrainte. Selon le porte-parole, il aurait fallu l'expulser vers la Thaïlande.
Le cas de Stanley Van Tha est-il unique? «Il n'y a aucun autre cas», assure Dominique Boillat. Une affirmation rejetée par Daniel Bolomey, secrétaire général de la Section suisse d'Amnesty International: «Il y a eu des cas en Syrie et en Libye. Et si la nouvelle loi sur l'asile est acceptée, on va créer des centaines, voire des milliers de Stanley Van Tha car les procédures vont être encore réduites et donc les risques d'erreur encore augmenter.»
L'ODM a finalement décidé de ne plus renvoyer les Birmans. L'an dernier, ils étaient six à demander l'asile en Suisse.
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