L'accord de Schengen? «Un désastre», pour Toni Brunner. Le président de l'UDC suisse tirait hier un bilan négatif de l'accord entre la Suisse et l'Union européenne sur la coopération policière et judiciaire. Deux ans après la levée des contrôles systématiques des personnes aux frontières, le parti souverainiste estime que la faillite est consommée. Il demande donc au Conseil fédéral de renégocier l'accord de Schengen, voire de le dénoncer si Bruxelles n'accepte pas de rediscuter ses termes d'ici à une année. L'UDC noircit-elle le tableau à des fins électoralistes? Tentative de réponse.
Moins de sécurité? Pour le conseiller national UDC Yves Nidegger, les récents braquages dans la région genevoise montrent les lacunes de Schengen: les malfrats de France voisine passent la frontière sans être contrôlés; une fois leur forfait commis, ils échappent facilement à la police cantonale, qui doit, elle, s'arrêter à la frontière; enfin, les policiers français ne peuvent pas intervenir à temps, la faute aux lenteurs dans la communication.
«Nous sommes confrontés à des bandes françaises qui passent la frontière, agissent très vite et repartent dès leurs méfaits commis. Notre police de proximité ne suffit pas à contrer ce phénomène. Les frontières sont trop perméables», confirmait en novembre Christian Varone, commandant de la police cantonale valaisanne. Conseillère d'Etat genevoise en charge de la sécurité, la libérale Isabel Rochat relativisait dans la «Tribune de Genève»: «Il n'y a pas plus de brigandages que dans les années huitante, mais ils sont plus violents. Leurs auteurs ne sont pas des pros et compensent par un surarmement.»
Quant à la communication avec la police française, elle sera améliorée grâce à une fréquence radio unique.
Un peu plus d'arrestations
Malgré des bémols, pour une majorité de policiers ainsi que pour la hiérarchie des gardes-frontière, l'accord de Schengen a fait ses preuves, en particulier grâce au système de recherche de personnes. Entre le 1er janvier et le 30 novembre de cette année, le SIS a permis l'identification en Suisse de 2410 ressortissants d'Etats tiers interdits d'entrée dans l'espace Schengen (essentiellement des migrants illégaux) et de 179 criminels recherchés. «Les chiffres sont un peu plus hauts qu'avant l'entrée dans Schengen», explique Benedikt Scherrer, de l'Office fédéral de la police.
Alors, Schengen espace de sécurité ou d'insécurité? En raison d'un changement de système de comptage, les statistiques de la criminalité ne livrent aucune réponse. L'UDC n'en réclame pas moins le rétablissement des contrôles des personnes à la douane. Du miel aux oreilles de ces gardes-frontière tessinois qui, sous couvert d'anonymat, déclaraient récemment à la NZZ que pour eux, «c'était mieux avant Schengen».
Plus d'immigrés illégaux? Pour l'UDC, la frontière extérieure de Schengen est une passoire, ce dont profiteraient des milliers de migrants clandestins. La fin de l'obligation des visas pour les ressortissants de plusieurs pays des Balkans aurait par ailleurs provoqué la venue en Suisse de nombreux travailleurs au noir. L'UDC demande par conséquent au Conseil fédéral de «rétablir la souveraineté complète de la Suisse en matière d'octroi de visas», à l'image de la Grande-Bretagne et de l'Irlande.
Difficile d'évaluer
L'Office fédéral des migrations réplique que, par nature, il est très difficile d'évaluer l'ampleur de la migration illégale.
Impossible dès lors de faire un lien entre l'évolution du nombre de clandestins et l'accord de Schengen, qui offre «des instruments efficaces et performants pour combattre la migration illégale». La fin des visas pour les Etats des Balkans n'a quant à elle pas soulevé de grande difficulté.
Serge Gumy dans le Nouvelliste
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