mardi 6 décembre 2011

Les refus et les difficultés inquiètent les centres islamiques

Les récents problèmes liés à l'implantation de centres islamiques inquiètent l'Union vaudoise des associations musulmanes. L'UVAM plaide pour le dialogue et la coopération et invite à une table ronde en janvier sur ce sujet.

En avril à Yverdon, en juin à Vevey et en novembre à Payerne, les musulmans ont rencontré des problèmes avec leurs lieux de culte. Qu'il s'agisse d'un bail non renouvelé, de crédits refusés pour la rénovation de la mosquée ou du refus d'un permis de construire, la coopération et le dialogue n'ont pas permis d'aboutir, regrette l'UVAM dans son communiqué.

Face à ces difficultés, l'UVAM rappelle que la compréhension interreligieuse fait partie des priorités du Conseil d'Etat vaudois pour 2009-2012. Dans ce contexte, elle affirme clairement que l'idée de vouloir placer les mosquées dans des zones industrielles, comme il en est question à Payerne, est de nature à isoler et à stigmatiser les musulmans.

Pour contribuer à résoudre les différends, l'Union vaudoise des associations musulmanes organise une table ronde à Payerne le 12 janvier.

ATS

dimanche 27 novembre 2011

Suisse: les populistes de l'UDC reculent

Le parti de la droite populiste suisse, l'Union démocratique du centre (UDC), qui avait subi un sérieux revers au premier tour des élections législatives en octobre, a vu son recul confirmé dimanche au second tour du scrutin. Le deuxième tour des élections -- qui avait lieu dans les cantons de Zurich, de St-Gall, d'Argovie, d'Uri et de Schwytz -- visait à attribuer les six sièges encore vacants au Conseil des Etats, la chambre haute du Parlement helvétique.

L'UDC, opposé à toute adhésion à l'Union européenne et qui a notamment bâti sa campagne électorale sur la lutte contre l'immigration, a essuyé un revers dans quatre des cinq cantons où il s'est présenté, remportant uniquement un siège dans le paradis fiscal de Schwytz (centre), a annoncé l'agence ATS. Plus grave, son président Toni Brunner a été battu dans le canton de St-Gall par le socialiste Paul Rechsteiner. Dans le canton de Zurich, le plus peuplé de la Confédération, la figure de proue de l'UDC, Christoph Blocher, a perdu contre les sortants Vert libéraux et PLR (centre droit).

Pour le parti de Christoph  Blocher, l'échec au second tour du scrutin est "la conséquence logique d'une coalition anti-UDC", selon un communiqué cité par l'ATS.

Le PS Suisse s'est pour sa part félicité d'un "succès majeur" et a qualifié l'issue du scrutin de "résultat historique" avec 11 représentants socialistes siégeant désormais au Conseil des Etats. Au premier tour des élections législatives du 23 octobre, qui visaient à renouveler les députés des deux chambres du Parlement helvétique, les grands partis traditionnels, principalement l'UDC, ont enregistré un recul face à de petits partis comme les Verts libéraux et le parti bourgeois démocratique (PBD), qui est issu d'une scission antérieure de l'UDC. L'UDC n'avait obtenu que 25,9% des voix aux élections du Conseil national (chambre basse), après 28,9% au dernier scrutin de 2007.

La droite populiste, à l'origine de l'interdiction des minarets en Suisse, n'avait contre toute attente pas réussi à dépasser la barre historique des 30% malgré une campagne électorale axée sur un marketing politique choc. L'UDC est devenu la première formation du pays à l'issue de la consultation de 2003. Il avait alors obtenu 26,6% des suffrages et 28,9% il y a quatre ans, doublant quasiment son score par rapport aux années 1990, au détriment des partis du centre dits "bourgeois". Tout au long de la campagne électorale, le mouvement avait appelé à "stopper l'immigration massive" dans la Confédération, qui a vu le nombre d'étrangers, notamment d'Afrique et d'Europe de l'Est, plus que doubler en 20 ans.

Le Figaro

samedi 26 novembre 2011

Le vrai-faux plan de Claude Guéant pour réduire les demandes d’asile

Le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, a annoncé, vendredi 25 novembre, une "réforme" du droit d'asile. Relativement restrictive, elle vise à mettre fin au "détournement" croissant, selon lui, de l'asile par des migrants économiques qui, une fois déboutés, viennent grossir les rangs des étrangers en situation irrégulière. Une hausse, d'après lui, qui embouteille le dispositif national d'accueil et d'hébergement et "pénalise" les "vrais" demandeurs d'asile.

"Notre système d'asile est en danger parce que le dispositif est utilisé pour pénétrer et se maintenir dans notre pays", a ainsi déclaré M. Guéant, Place Beauvau, à Paris, vendredi matin, devant la presse. Des propos réitérés l'après-midi lors d'un déplacement à Montauban (Tarn-et-Garonne) dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA).

Sur le fond cependant, la plupart des mesures annoncées sont floues ou existent déjà en pratique, et suscitent une forte désapprobation des organisations de défense des droits des étrangers. "La hausse de la demande d'asile, même si une part est infondée, ne justifie pas un renforcement des pratiques dissuasives", estime ainsi le bureau parisien du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), aux critiques généralement modérées. Décryptage.

  • Le contexte

Une hausse de la demande d'asile. Pour justifier ses annonces, le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, met en avant une hausse exponentielle de la demande d'asile ces "quatre dernières années". Une hausse, selon le dossier presse distribué aux journalistes, de "55%". D'après les projections du ministère de l'intérieur, quelque 60 000 personnes auront en effet leur demande d'asile en examen d'ici à la fin 2011 – contre 42 600 en 2008.

Or, calculs faits, cela représente bien une hausse importante, mais plutôt d'un peu plus de 40%. De même, cette augmentation ne dépasse pas un pic qui avait été atteint en 2004 : quelque 65 000 demandes étaient alors en traitement à l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra). Par nature, la demande d'asile s'ajuste en effet avec le contexte international et suit une évolution en dents de scie.

Une hausse des "demandes abusives" ? Sur l'ensemble de la demande d'asile, M. Guéant considère qu'une part croissante est à attribuer à des demandes abusives d'étrangers dont les motivations sont d'abord "économiques" – et non liées à des inquiétudes pour leur sécurité dans leur pays. Pour preuve, il en veut le taux "en baisse", selon lui, de reconnaissance de protection : "24,6% en 2011, contre 36% en 2008".

Or, si les demandes d'asile abusives sont un phénomène réel, elles ne sont pas forcément en hausse. Selon Gérard Sadik, juriste spécialiste de l'asile à la Cimade, les chiffres donnés par le ministère sont erronés car ils mélangent le "taux d'activité" annuel de l'Ofpra et de la Cour national du droit d'asile (CNDA) avec leur taux "consolidés". Sur la longue durée (depuis 1993), on constate ainsi que ce taux de reconnaissance de protection varie toujours entre 20% et 35% en moyenne.

  • Les mesures

Dissuader la demande. Alors qu'un grand nombre de demandeurs d'asile qui viennent en France sont originaires du Bangladesh et d'Arménie, M. Guéant a annoncé vouloir classer, début 2012, ces deux Etats – ainsi que la Moldavie et le Monténégro – en pays dits "sûrs". Une qualification qui autorise l'Ofpra à examiner plus vite les dossiers des migrants venant de ces destinations (la procédure est appelée "prioritaire" et en cas de recours, elle n'empêche pas l'expulsion).

Ce système de listes de "pays sûrs" n'est toutefois pas une mesure particulièrement novatrice. Tous les ans, chaque pays européen met à jour sa propre liste – ce qui n'est pas sans occasionner un certain nombre d'incohérences. En France, l'inscription du Bangladesh sur cette liste, prévue début 2012, était envisagée depuis plus d'un an. En début d'année, c'était le Kosovo qui avait été ajouté. A l'époque, c'était lui le pays qui apportait le plus gros bataillon de demandeurs d'asile vers la France. "La politique de l'asile devient la variable d'ajustement des flux migratoires", déplore M. Sadik.

Dans le même esprit, M. Guéant a annoncé vouloir transposer en droit français une directive européenne de 2005 qui instaure un "délai raisonnable" pour déposer sa demande d'asile une fois arrivé sur le territoire européen. Au Royaume-Uni, celui-ci est de "trois jours". M. Guéant souhaiterait qu'il soit en France de "90 jours". Une façon d'empêcher, notamment, que les migrants déposent une demande d'asile alors qu'ils sont placés en rétention en vue de leur éloignement.

Cette transposition juridique nécessiterait toutefois une nouvelle loi. La dernière date seulement du mois de juin. Et avec l'élection présidentielle qui approche, le ministre a reconnu de lui-même, vendredi, qu'elle n'aurait sans doute pas le temps d'être examinée par le Parlement avant cette date.

Ciblage des " déboutés ". Chaque année, entre 70% et 80% des migrants demandeurs d'asile se voient refuser leur demande de protection. Ces "déboutés" doivent alors, en principe, quitter la France dans un délai d'un mois. Cette obligation de quitter le territoire français (OQTF) leur est généralement notifiée par courrier, là où ils sont domiciliés. Mais dans les faits, beaucoup restent en France et rejoignent alors la masse des étrangers en situation irrégulière.

Pour remédier à cette situation, M. Guéant a annoncé, vendredi, avoir demandé à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) d'organiser des visites dans les centres d'hébergement pour demandeurs d'asile (CADA) afin d'inciter les "déboutés" à prendre "l'aide au retour volontaire" : un pécule d'argent (jusqu'à 2000 euros par adulte) accordé à tous ceux décidés à rentrer, sans y être contraints, dans leur pays d'origine. Ce système est toutefois en vigueur depuis le 10 octobre en province. M. Guéant a simplement précisé, vendredi, qu'il allait être étendu "à la région parisienne".

Dans le même esprit, le ministre de l'intérieur a déclaré, vendredi, vouloir multiplier les "accords bilatéraux" avec les pays d'origine et de transit des demandeurs d'asile afin de pouvoir éloigner plus facilement les migrants déboutés. Des accords de ce type - dits de "réadmission" -, la France en signe régulièrement. Mais ils sont longs à négocier. Eric Besson, lorsqu'il était à la tête du défunt ministère de l'immigration et de l'identité nationale, souhaitait déjà les développer.

Durcissements juridiques pour les "dissimulateurs". Vendredi, le ministre de l'intérieur a également annoncé avoir engagé une "réflexion juridique" pour écarter les demandes d'asile de ceux dont les "mensonges" ou les "dissimulations" sont mises en exergue. Notamment dans le cas où les migrants sont suspectés d'avoir volontairement altéré leurs empreintes digitales pour ne pas être renvoyés dans le pays européen qu'ils ont traversé en premier (Système Dublin II). "Un certain nombre de migrants dissimulent des informations sur leur itinéraire ou se mutilent le bout des doigts mais ce n'est pas forcément parce que leur demande est infondée, il arrive souvent qu'ils soient mal conseillés par les passeurs ou leur communauté", prévient William Spindler au HCR, à Paris.

Dans les faits, ces mesures existent déjà malgré tout. Le 3 novembre, le directeur général de l'Ofpra a fait parvenir une note à ses chefs de service pour leur demander de "rejeter" toutes les demandes d'asile des personnes qui se présenteraient avec le bout des doigts mutilés. De même, la notion de demande d'asile "frauduleuse" existe déjà dans le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) - article 741-4 - et a été "précisée" dans la dernière loi immigration, votée le 16 juin, pointe Tahar Khalfoune, juriste à l'association Forum Réfugiés.

Raccourcissement des délais d'examen des dossiers. L'un des principaux objectifs des mesures annoncées par M. Guéant vendredi est de parvenir à un raccourcissement des délais d'examen des demandes d'asile. Aujourd'hui, ces délais sont environ de dix-neuf mois et le ministre souhaiterait les ramener à douze mois en 2012. "D'un point de vue strictement administratif, un mois de délai en moins c'est 15 millions d'euros économisés", souligne Gérard Sadik de la Cimade. Le budget global de l'asile est aujourd'hui d'environ 500 millions d'euros. Mais, interrogé sur les économies éventuelles que sa "réforme" du droit d'asile pourrait apporter, M. Guéant a indiqué, vendredi, que les objectifs n'étaient pas "chiffrés".

Ce qui embouteille le dispositif national d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile, d'après M. Sadik, c'est en réalité "le manque d'agents de l'Ofpra et de la CNDA" ainsi que le nombre croissant de migrants placés en "procédure prioritaire". La demande de ces derniers tend à passer devant les autres et donc à retarder l'examen de leur dossier, assure le juriste.

Reste la saturation des centres d'hébergement pour demandeurs d'asile (CADA). 38% seulement des demandeurs d'asile y ont accès du fait du manque de places. M. Guéant a du coup annoncé vouloir "décentraliser" les demandes d'asile, essentiellement concentrées en Île-de-France. Une réforme déjà initiée depuis plusieurs mois et qui fonctionne mal. A Paris, comme à Limoge, Montauban ou Guéret, tous les CADA et toutes les structures d'urgence tournent déjà à plein.

Elise Vincent dans le Monde

Réfugiés : un constat accablant

Caritas et la Croix-Rouge gèrent dans l'urgence les arrivées des réfugiés et s'inquiètent d'une situation qui empire. Pétange en est le dernier exemple.

Même si c'est le gouvernement qui gère les conteneurs de Pétange, les deux associations connaissent le problème sur le bout des doigts et insistent pour que soit enfin menée au Luxembourg une gestion durable du problème du logement des demandeurs d'asile.

Les conditions de vie terribles des Roms réfugiés à Pétange que nous avons soulignées dans Le Quotidien de vendredi n'est que le dernier maillon d'une chaîne. Celui sur lequel se répercute tous les dysfonctionnements de l'administration en amont. C'est ce qui ressort des constats effectués par Yves Schmidt (Caritas) et Nadine Conrady (Croix-Rouge), tous deux spécialistes de la question de l'accueil des demandeurs d'asile.

«Il faut compter en moyenne une centaine d'arrivants par semaine», annonce Nadine Conrady. Problème: les structures d'accueil sont complètement saturées. La place manque, au point que l'on tombe dans l'absurde: «Nous avons des conteneurs qui sont bien équipés, mais on ne peut pas s'en servir parce que l'on n'a pas de terrains où les mettre», précise-t-elle.

C'est le sens de l'appel commun de la ministre de la Famille, Marie-José Jacobs (qui gère les logements pour les demandeurs d'asile), et des organisations comme la Croix-Rouge et Caritas, il y a quelques semaines déjà. Depuis, pas grand-chose n'a bougé. «Le gouvernement aurait pourtant le droit de réquisitionner des locaux ou des terrains, mais il ne le fait pas. Pourquoi?», questionne Yves Schmidt. «Dans ce dossier, tout le monde a l'air plus frileux que l'hiver...», regrette-t-il.

«On touche à la dignité des personnes»

La Croix-Rouge possède trois centres permanents et un provisoire, qui sont tous complets. Caritas aussi fait le maximum : «Notre centre de 50 places est plein et nous avons réquisitionné un autre de nos bâtiments pour y installer des familles. Nous sommes prêts à installer des conteneurs dans notre cour, mais il faudrait maintenir trouver une solution durable. Les arrivées de demandeurs d'asile ne s'arrêteront pas demain», relève Yves Schmidt.

Actuellement, des bases de scouts (comme à Liefrange) et des centres de vacances sont occupés par les réfugiés. «Ce ne sont que des solutions à court terme qui camouflent plus qu'elles ne résolvent le problème», selon Yves Schmidt.

Au foyer de premier accueil de la Croix-Rouge Don Bosco, à Luxembourg, par où passent tous les nouveaux venus, on sature: «Nous avons logé jusqu'à 290 personnes, alors que nous n'avons que 150places... On ne peut pas faire plus. Nous avons atteint nos limites au niveau de l'hébergement, de l'accueil et de l'encadrement.»

Et malgré ce taux d'occupation au- delà du raisonnable, nombreux sont ceux qui, à Pétange, regrettaient d'avoir été envoyés dans le Sud... «Si on pense qu'en accueillant mal les gens, ça les fera repartir, on touche le problème de la dignité de la personne et là, c'est très grave», s'indigne Yves Schmidt.

Ce qu'il espère, c'est que des travailleurs sociaux pourront accompagner davantage les demandeurs d'asile perdus dans un environnement inconnu. Ce serait d'autant plus indispensable que le taux d'illettrisme est important chez les Roms. «Si un de nos éducateurs veut passer, il faut qu'il demande l'autorisation au ministère puisque les gardes des sociétés privées, qui sont payés par le gouvernement, ont pour consigne de ne pas laisser entrer de personnes extérieures.»

Ces deux acteurs de l'accueil d'urgence des réfugiés pointent le même problème essentiel: le gouvernement est dans la réaction, pas dans l'action. Et à force d'user de mesures provisoires, on repousse le seuil critique sans amener de véritables réponses à un problème national.

Erwan Nonet dans le Quotidien (Luxembourg)

vendredi 25 novembre 2011

Guatemala: Tecun Uman, antichambre du cauchemar mexicain pour les clandestins

Au moment où le crépuscule vient obscurcir les artères poussiéreuses du village guatémaltèque de Tecun Uman, Javier Castillo, un Salvadorien de 17 ans, se prépare discrètement à passer la frontière mexicaine pour poursuivre son périlleux voyage vers l'eldorado américain.

tecun uman

"Plusieurs membres de ma famille se trouvent aux Etats-Unis, ils m'ont aidé à financer le voyage. Maintenant, vu comme les choses se présentent, ça risque ne ne pas être évident d'y arriver", admet Javier, lucide quant aux multiples périls qui le guettent. Sur la rive du large fleuve Suchiate, qui marque la frontière entre les deux pays, les contrebandiers locaux facturent 10 quetzals (environ un euro) la traversée sur des barques de fortune faites de pneumatiques et de troncs d'arbre. Les "capitaines" consentent souvent à surcharger leurs embarcations pour limiter les voyages et augmenter leur bénéfice, s'exposant à un chavirage et au comité d'accueil de douaniers mexicains peu scrupuleux mais gourmands sur le rivage d'en face, à Ciudad Hidalgo.

Mais cette traversée n'est qu'un avant-goût des dangers à venir pour les quelque 140.000 clandestins qui tentent chaque année de gagner la frontière mexico-américaine, selon les estimations des autorités de Mexico. Parmi ces aventuriers, un sur sept tombe aux mains du crime organisé, affirme la Commission nationale mexicaine des droits de l'Homme. Au début, les cartels mexicains se contentaient de dépouiller les clandestins, mais plus récemment, les "narcos" ont trouvé le moyen d'obtenir des rançons de milliers de dollars auprès des familles des clandestins résidant aux Etats-Unis, ou à transformer leurs proies en "mules" pour convoyer de la drogue. D'autres encore moins chanceux sont vendus comme esclaves, les femmes étant en général forcées à se prostituer les hommes à travailler dans les champs. Il peut aussi arriver que certaines organisations, comme le cartel des "Zetas" aillent jusqu'à exécuter ceux qui refusent de rejoindre leurs rangs.

Si Javier ne tombe pas dans leurs mailles, ce seront probablement des propriétaires terriens sans scrupules ou des policiers corrompus qui se chargeront de les détrousser avant - au mieux - de les livrer aux autorités qui les expulseront. Aussi, avant d'entamer ce long périple à travers le Mexique, nombre d'entre eux reprennent leur souffle à Tecun Uman, un village chaud et humide d'apparence tranquille, qui porte le nom d'un héros national maya tué par les Espagnols au XVIe siècle.

Mais cette bourgade du nord-ouest du Guatemala recèle aussi de nombreuses menaces, car ces migrants sont mal vus par la population et se voient déjà exposés au crime organisé mexicain, dont les ramifications s'étendent dans toute l'Amérique centrale. "Tecun Uman est un petit village mais aussi un enfer. Ici les sans-papiers souffrent d'humiliations, sont attaqués, maltraités, frappés...", affirme à l'AFP le père Ademar Barilli, qui dirige un refuge pour clandestins ayant déjà abrité, depuis 1994, plusieurs dizaines de milliers d'entre eux, principalement des Salvadoriens et Honduriens.

Les "droits humains fondamentaux sont bafoués comme jamais et aucun responsable ne prend cette situation au sérieux. Une grand permissivité règne, c'est lamentable!", affirme le père Barilli, qui a déjà reçu plusieurs menaces d'organisations qui exploitent les clandestins. Son refuge représente une forme de havre de paix pour Edmundo Lopez, un Hondurien qui tente l'aventure pour la troisième fois... à l'âge de 65 ans. Pour lui, c'est "la nécessité (qui l')oblige à s'aventurer à tenter d'atteindre les Etats-Unis", faute de perspectives dans son pays frappé par la pauvreté et le chômage. "Les risques existent partout, et je ne crains pas qu'il m'arrive quoi que ce soit de grave au Mexique", assure celui qui vient du pays au taux d'homicide le plus élevé au monde. Cette nuit, Javier et Edmundo tenteront l'aventure ensemble, loin de l'oasis du père Barilli.

AFP

Nouvelle structure d'accueil pour demandeurs d'asile en Valais

Une structure d'accueil pour requérants d'asile sera ouverte dès jeudi en Valais à Vernamiège en remplacement de celle des Collons. La commune du Mont-Noble, dont fait partie Vernamiège, est déçue d'avoir été mise devant le fait accompli et cela dans un délai très court.

Le centre de Vernamiège accueillera environ 60 personnes (principalement des familles) qui auront préalablement été hébergées dans un foyer de premier accueil. "Une école est prévue sur place pour les enfants mais ils ne seront pas intégrés au centre scolaire de Nax", a précisé le président de la commune du Mont-Noble.

"Le bâtiment qui servira de centre d'accueil pour requérants est utilisé en qualité de colonie. On devra donc contacter tous les groupes qui ont réservé pour la saison de ski", a-t-il ajouté.

Moins qu'en 2009

Le nombre de candidats à l'asile attribués par la Confédération ne cesse d'augmenter, a indiqué l'Etat du Valais. A mi-novembre, leur nombre s'élevait en Valais à 1684, contre 1540 pour la même période de 2010, soit une hausse de 9%. Ces chiffres restent toutefois inférieurs à ceux des années 2008 (1768) et 2009 (1706).

Le Département valaisan de la sécurité, des affaires sociales et de l'intégration recherche un autre lieu d'accueil pour les célibataires. La Confédération attribue au Valais 3,9% des requérants d'asile qui sortent des centres fédéraux d'enregistrement et de procédure.

ATS

Auschwitz: le cliché douteux d'un prof vaudois suscite la polémique

Un enseignant vaudois publie sur son mur Facebook un cliché où il pose tout sourire devant l’entrée de l’ancien camp de concentration, en brandissant un paquet de «nasi goreng».

bernard junod

Tout le monde ne partage pas le même humour. Et certaines blagues desservent parfois leur auteur. Bernard Junod, professeur dans le canton de Vaud, a jugé amusant de se faire photographier devant le tragiquement célèbre «Arbeit macht  frei» d’Auschwitz, un paquet de «nasi goreng» à la main, ont révélé hier les sites du Matin.ch et du Temps.ch.

Le jeune homme, également politicien au sein du Mouvement Citoyens Vaudois, a effectué son «gag», alors qu’il participait mercredi à une visite de formation organisée chaque année par la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (CICAD). La découverte d’Auschwitz se faisait en compagnie de 120 enseignants et 60 élèves,

Pointé du doigt par la CICAD, Bernard Junod a présenté ses excuses hier, notamment via son mur Facebook. Et en cas de nécessité, il affirme être prêt à prendre la plume pour demander pardon.

Mais le trentenaire devra aussi se justifier auprès du directeur général de l’Enseignement obligatoire vaudois, Alain Bouquet, qui affirme vouloir ouvrir une procédure contre lui. Celui-ci risque, dans le pire des cas, le licenciement.

L’enseignant, explique dans le Matin.ch qu’il s’agissait «d’une grosse déconnade» et qu’il «n’y avait aucune volonté de profaner quoi que ce soit.» Il justifie l’innocence de son geste, en affirmant avoir une grand-mère juive et en insistant sur le fait qu’il n’a rien contre le peuple juif. Reste que le peu subtil jeu de mot sauce «nasi goreng» peut laisser pour certains un goût amer.

24 Heures

jeudi 24 novembre 2011

Des migrants afghans se résignent à rentrer chez eux

Près de 650 Afghans ont choisi d’accepter un dispositif de retour volontaire dans leur pays proposé par les autorités françaises.

L’Angleterre presque hors d’atteinte depuis la fermeture de la « jungle » de Calais voilà deux ans, l’asile de plus en plus difficile à obtenir : les migrants afghans n’ont plus d’autre choix que d’accepter le « retour volontaire » dans leur pays, assorti il est vrai d’un petit pécule. L’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), chargé d’organiser les rapatriements, verse en effet une « aide au retour » de 2.000 € par adulte et finance le voyage de tous ceux qui optent pour cette solution. En outre, « dans le prolongement de l’évacuation de la “jungle” de Calais, des projets de réinsertion (jusqu’à 7.000 € pour la création d’une activité économique, NDLR) ont été financés au bénéfice d’Afghans en Afghanistan », a indiqué l’Ofii. Il faut dire que malgré la situation dans leur pays, considéré par la France comme étant « en crise » et non « en guerre », les Afghans ont de « faibles chances » d’obtenir la protection dans l’Hexagone, hormis les mineurs non accompagnés qui ne peuvent pas être renvoyés.

L’ombre des talibans

« Les Afghans ne correspondent pas à la population classique des demandeurs d’asile comme les Tchétchènes, qui viennent en famille. Ils sont jeunes, ils viennent pour travailler. Ce sont des migrants économiques », selon l’Ofii. Mais, répondent France terre d’asile et Emmaüs dans une étude mise en ligne mercredi, « la présence de considérations économiques n’exclut pas a priori celle de motifs de persécution de nature conventionnelle et/ou relative à une situation personnelle d’insécurité généralisée en contexte de crise ou de guerre ». Selon l’Office français pour les réfugiés et apatrides (Ofpra), « la demande afghane invoque de plus en plus fréquemment l’obligation faite aux hommes de se rallier aux forces des talibans, et le risque découlant du soutien – réel ou imputé – aux autorités dans les zones contrôlées par ceux-ci ». L’année dernière, l’Ofpra a enregistré 735 demandes de statut de réfugié de la part de ressortissants afghans, dont 242 ont reçu une suite favorable.

France Soir

La Suède, première destination des demandeurs d’asile des Balkans

La Suède est le pays recensant le plus de demandes d’asile provenant des pays des Balkans. C’est ce que rapporte l’agence d’information INA.

Selon les données de la Commission européenne, la Suède a reçu un nombre important de demandes d’asile en 20010, première année du régime de libéralisation des visas. La plupart venait de Serbie, du Kosovo et de Macédoine. Après la Suède viennent l’Allemagne, avec 6 500 demandes, et la France avec 5 800. Par rapport à la première année de mise en application du régime de libéralisation des visas, les demandes sont moins nombreuses cette année. La Macédoine, quant à elle, a adopté certaines mesures afin d’éviter une utilisation abusive de cette mesure de libéralisation.

albinfo.ch

mercredi 23 novembre 2011

La parole aux aumôniers

Dans le film «Vol spécial», les aumôniers sont un peu oubliés. Pourtant, il jouent un rôle essentiel auprès des requérants d'asile.

Depuis quatre ans, Anne-Madeleine Reinmann se partage entre l'Aumônerie genevoise œcuménique auprès des requérants d'asile et des réfugiés (AGORA), l'accueil œcuménique de l'aéroport de Genève et des visites aux détenus du centre de détention administrative de Frambois. Un travail difficile tant les situations des détenus sont parfois dramatiques.

Dans son documentaire «Vol spécial», le réalisateur Fernand Melgar montre le quotidien du personnel de Frambois et des étrangers en situation irrégulière, mais n'aborde pas celui des aumôniers. «Chaque semaine, nous passons beaucoup de temps à écouter les détenus. Nous avons quelquefois des discussions profondes alors que, d'autre fois, ils ont juste besoin de dire leur ras-le-bol», explique Anne-Madeleine Reinmann.

Ecouter et mettre en contact

Les aumôniers sont, avant tout, à l'écoute des requérants d'asile, que ce soit à Frambois ou à l'aéroport: «Nous répondons à leurs besoins en leur achetant par exemple une carte téléphonique. Nous les mettons souvent en contact avec d'autres organismes, comme l'association ELISA-asile, avec laquelle nous collaborons beaucoup. Elle leur apporte une aide juridique en leur expliquant comment présenter leur situation», précise l'aumônier.

La demande pour un accompagnement spirituel est forte, relève Anne-Madeleine Reinmann: «La plupart ont un grand besoin de vivre leur foi. J'achète des bibles à leur demande. Ce n'est pas toujours facile selon leur langue! J'en cherchais une en tigrigna. J'ai contacté un prêtre arrivé comme requérant il y a trois ans. Il a réussi à en faire venir une directement d'Erythrée, que j'ai pu offrir au requérant. Des détenus comparent leur histoire personnelle avec celle de personnages bibliques.»

L'aumônier s'adapte aux besoins de chacun: «Je prie pour ceux qui le souhaitent et avec ceux qui en font la demande. Ils me disent que c'est précieux. Nous prions ensemble lors de cultes ou en petit comité, ce qui correspond mieux à leur spiritualité. Les musulmans sont ouverts sur le fait que je sois une femme et chrétienne. Cela n'a jamais posé de problème.»

Son travail d'aumônier n'est pas toujours facile à vivre. «C'est gratifiant mais il faut aussi pas mal d'humilité. Cela m'inquiète beaucoup de ne pas savoir ce qui arrive aux personnes expulsées, parfois volées voire emprisonnées dès leur arrivée. Quelquefois, le sentiment d'impuissance est insupportable. Il faut vivre avec le fait de ne rien pouvoir faire d'autre qu'offrir un accompagnement qui les aide à tenir le coup. Ma foi est importante, tout autant que le fait de la partager», conclut Anne-Madeleine Reinmann.

Bonne Nouvelle

vendredi 18 novembre 2011

Asylbewerber machen Ferien in der Heimat!

Sie suchten Asyl in der Schweiz, weil sie nach eigenen Angaben verfolgt wurden. Jetzt kommt aus: Hunderte von «Flüchtlingen» machten Ferien in ihrer vermeintlich gefährlichen Heimat.

Seit rund einem Jahr dürfen vorläufig Aufgenommene ohne Angaben von Gründen ins Ausland reisen. Aktuell leben 23 483 Personen hier. 2500 baten um eine Reisebewilligung. Einige von ihnen nutzten die Reisebewilligung aber nicht nur für Ausflüge, sagt Michael Glauser vom Bundesamt für Migration (BfM) zu Radio DRS: «Man hat Missbräuche festgestellt.»

Hunderte der Betroffenen sind offenbar in ihr Heimatland zurückgereist – genau dorthin, von wo sie nach eigenen Angaben Schutz bräuchten. Das stehe im Widerspruch zu ihrem Status in der Schweiz und zur Tatsache, dass vorläufig Aufgenommene zu Beginn oft Sozialhilfegelder bezögen, sagt Glauser. Es geht laut Radio-Recherchen vor allem um Menschen aus dem Irak, der Türkei und den Balkanstaaten. Um derartige Reisen zu unterbinden, reagiert der Bund umgehend. Die Reiseverordnung wird entsprechend geändert.
Flüchtlingshilfe findet Verschärfung «diskriminierend»

Neu soll das Reisen für vorläufig Aufgenommene nur noch in Ausnahmefällen und nach einer genauen Überprüfung der Gründe bewilligt werden. Unzumutbar, findet Beat Meiner, Generalsekretär der Flüchtlingshilfe: «Es ist diskriminierend und eine unzulässige Einschränkung, dass diese Liberalisierung aufgehoben wird. 95 Prozent der vorläufig aufgenommenen Personen bleiben sehr lange in der Schweiz und müssen reisen können, um beispielsweise zurückgelassene Familienangehörige zu besuchen.»

Karin Müller dans le Blick

vendredi 4 novembre 2011

Fatmir K., depuis quinze ans en Suisse et débouté

Le collectif Droit de rester dénonce l’arbitraire dans le traitement cantonal des dossiers des requérants. Et craint un effet Vol spécial , qui pousserait les autorités à multiplier les expulsions.

Fatmir K. (42 ans) figure sur une liste de 37 personnes qui répondent aux critères de l’article 14 de la loi sur l’asile (LAsi), permettant normalement la régularisation de leur situation. Soit une présence en Suisse depuis au moins cinq ans, un lieu de séjour toujours connu des autorités et une intégration «poussée». Pourtant, un seul de ces requérants signalés en juin 2011 par le collectif Droit de rester au conseiller d’Etat en charge de l’asile, Philippe Leuba, a obtenu un permis de séjour depuis.

Ce cas avait-il un meilleur dossier que les autres? «Non, répond Sabine Masson, membre du collectif. Cette décision est complètement arbitraire, comme souvent.» Le collectif accuse le Service de la population (SPOP) de mettre tout le monde dans le même panier. «Certains requérants déboutés ont reçu des courriers types où même le nom n’avait pas été modifié», s’indigne Graziella de Coulon, autre membre du collectif.

Fatmir K. veut encore croire qu’il ne retournera pas en Albanie, qu’il a fuie il y a quinze ans. Il y était agent de police. «Nous étions utilisés comme de la chair à canon, se souvient-il. La Suisse reconnaissait l’urgence d’accueillir les Albanais en 1996.» Depuis 2008, il a pour seul papier d’identité la «feuille blanche» qui indique qu’il touche l’aide d’urgence. Il est l’un des quatorze requérants vaudois que Droit de rester a réussi à faire libérer de Frambois à la suite de la mort d’un Nigérian lors de son renvoi et de la suspension des vols spéciaux. Preuve que l’action civile peut faire bouger les choses, insiste Graziella de Coulon. Aujourd’hui, il est à nouveau menacé d’expulsion par le SPOP.

Y aurait-il un «effet Vol spécial » qui inciterait les autorités à resserrer la vis, s’interroge le collectif? «Le film de Fernand Melgar n’a eu aucun effet sur la pratique du canton, insiste Philippe Leuba. Priorité est toujours donnée au renvoi de requérants possédant un casier judiciaire.» Or Fatmir K. en a bien un. En 2003, il était contrôlé en possession d’un faux billet de 200 francs que lui avait remis une connaissance. Pour ce délit, il avait écopé de 10 jours avec sursis et de 1500 francs d’amende. Assez pour être indésirable? «L’infraction est mise en rapport avec les efforts d’intégration, qui l’emporteront toujours en cas de délit mineur», pondère Philippe Leuba.

«Fatmir K. a toujours travaillé, notamment comme traducteur pour l’EVAM, jouant lui-même un rôle intégratif. Tous ses liens sociaux sont aujourd’hui en Suisse. Je crois que l’on peut parler d’intégration poussée», conclut Sabine Masson.

24 Heures

mardi 1 novembre 2011

Procédure de Dublin accélérée

procédure dublin accélérer

24 Heures

«Même si on enlève sabots et foulards,les gens flairent que l’on est différent»

La hausse spectaculaire des cambriolages à Genève et Vaud est souvent imputée aux gens du voyage de France voisine. Rencontre avec cette communauté appauvrie par la crise.

Un bout de terrain à l’entrée du village médiéval d’Yvoire. La famille de Marcelle, des Tziganes, a posé là ses caravanes depuis plusieurs décennies. La parcelle agricole à l’époque ne coûtait pas cher. Le grand-père a acheté. Pas de toilettes, pas d’eau, la famille se débrouille. «Mais on paie les impôts locaux», lance Marcelle. Sa maman a grandi dans le milieu du cirque. Son papa faisait les fêtes foraines. Des gens du voyage aujourd’hui semi-sédentarisés mais qui ont gardé «l’âme errante».

Marcelle semble attendre la «fameuse» question: sommes-nous des voleurs? Elle est au courant des accusations suisses qui ces derniers mois – encore plus que dans le passé – pèsent contre les Tziganes. Vingt à trente cambriolages chaque jour dans le canton de Genève. On dépasse parfois les 40.

La hausse est constante depuis trois ans. Le quotidien 24 heures rapportait récemment qu’entre le 5 et le 12 septembre la police faisait état de 90 nouveaux cambriolages dans le canton de Vaud, dont 30 à Lausanne, contre respectivement 57 et 17 en 2010. Le gang dit «des Géorgiens» partiellement démantelé en 2009 à Genève semble s’être remis au travail; des Maghrébins tenteraient également de s’implanter sur ce réseau. Mais les gens du voyage seraient les plus actifs.

Jean-François Cintas, un policier genevois en charge de la Brigade des cambriolages, confiait au Temps du 25 juin que le facteur le plus important était l’augmentation du prix de l’or. La spécialité, affirme-t-il, des gens du voyage. «Dans n’importe quel appartement, on trouve 25 à 30 grammes d’or sous forme de chaînettes, gourmettes ou autres. Les Tziganes trient tout sur place. Même les enfants savent le faire», expliquait le policier. Les auteurs viendraient de Haute-Savoie, mais aussi de Lyon, Grenoble voire Paris.

Marcelle sourit et se dit «tellement habituée à tout cela». Elle affirme qu’il n’est pas besoin d’aller jusqu’en Suisse pour être accusé «de tout et n’importe quoi». «Quand il y a un vol dans le coin, la police vient systématiquement chez nous, elle nous interroge, elle fait des recherches d’ADN», dit-elle.

Arrive Marvin, l’un de ses enfants. Il a 22 ans, travaille dans le rempaillage et le ferraillage, «comme le papa». Il raconte les bagarres de jadis dans les cours de récréation à cause du mot manouche et de l’adjectif insultant qui va avec. Il raconte aussi ce récent larcin dans une entreprise dans laquelle il a brièvement travaillé: «La première personne interrogée c’était moi, trois années après! Je suis allé voir mon ancien patron pour lui demander pourquoi il avait donné mon nom, moi qui ne lui ai jamais causé de problème. Il n’était pas fier.»

Marcelle dit qu’elle est suivie dans les magasins, que tout cela ne change pas. «Mon père nous a appris à nous comporter mieux que les autres, à enlever les sabots et les foulards, mais les gens flairent que l’on est différent.»

Jean-Marc Bouvet, chef de service pour le secteur gens du voyage à l’Alap, association qui défend leurs droits en partenariat avec la Préfecture de Haute-Savoie, n’observe pas d’augmentation des délits mais retient que le département est celui qui, en France, draine le plus de gens du voyage après la région parisienne. «La Haute-Savoie est riche, son économie est dynamique avec les marchés et les foires qui attirent les commerçants ambulants, et puis il y a la Suisse tout à côté», argue-t-il.

Ceci expliquerait-il cela? «Il y a des brebis galeuses dans chaque communauté, tempère un policier annécien, une minorité est impliquée dans les délits, moins de 10%.»

Déléguée nationale à l’Union française des associations tsiganes (UFAT), Francine Schutt-Jacob raconte: «Nos parents qui faisaient les marchés se fournissaient dans les usines du nord. Aujourd’hui, tout le monde passe par des grossistes car tout est fabriqué en Chine, cela revient beaucoup plus cher.»

Jean-Marc Bouvet enchaîne: «Cette population est fortement précarisée, beaucoup travaillaient par exemple dans le décolletage dans la vallée de l’Arve, secteur qui a subi de plein fouet la crise, ils ont été souvent les premiers licenciés.»

Francine Schutt-Jacob arpente le département à la rencontre des familles confrontées à des difficultés d’autorité. Elle mise sur la culture traditionnelle pour mieux encadrer les jeunes et n’omet jamais de rappeler certains acquis comme la loi Besson du 5 juillet 2000, qui oblige les communes françaises de plus de 5000 habitants à mettre à la disposition des gens du voyage des aires d’accueil.

«C’est une avancée, même si souvent l’eau et l’électricité sont coupées à l’approche de l’hiver, ce qui oblige les familles à errer ou fuir vers le sud de la France», indique-t-elle. La déléguée de l’UFAT conteste l’appellation administrative «gens du voyage» qui mêle les Roms français, les Roms venus d’Europe de l’Est, les Sintés, les Yéniches, Gitans «et qui crée des amalgames»: «Nous sommes essentiellement des Français qui depuis 1912 devons faire signer tous les trois mois nos carnets de circulation dans les gendarmeries.»

L’UFAT réclame l’abrogation de ce carnet «pour rétablir une vraie citoyenneté». La lutte contre la délinquance passerait aussi par là. Pas facile de dire cela à Elvire, qui vit dans sa vieille caravane à Anthy, près de Thonon. Des inscriptions racistes ont été écrites sur la route près du campement, elle parle de jets de pierres la nuit, et le maire veut la reloger à Evian.

«Mes grands-parents sont enterrés ici et on veut nous installer dans un cimetière, je suis allée et j’ai vu, c’est comme un camp de concentration, avec des barbelés, vous savez ce que ce que les camps de concentration nous rappellent à nous Tziganes? Allez après cela dire à nos hommes de ne pas faire des c…».

Christian Lecomte dans le Temps

Après une manif des radicaux, samedi, la Coordination des organisations islamiques prépare «sa» journée contre l’islamophobie.

Ne plus laisser les musulmans radicaux monopoliser le débat sur l’islam en Suisse: telle est la volonté affichée par la Coordination des organisations islamiques (COIS), en réaction à la très controversée «journée contre l’islamophobie», organisée samedi à Berne.

Contacté hier, Farhad Af­shar, président du COIS, a fait part de son projet d’organiser à son tour un événement sur le thème de l’islamophobie, sans étoiles jaunes ni slogans provocateurs: «Si on veut lutter contre l’islamophobie, il faut le faire en coopérant avec les forces libérales de ce pays, pas par la provocation. C’est pour cela que nous organiserons début 2012 un colloque sur le thème, à Berne ou à Zurich. Il réunira des scientifiques, des représentants des partis, ainsi que des personnalités chrétiennes et juives.»

Une conférence entre gens de bonne compagnie, quand Nicolas Blancho et les siens n’hésitent pas à descendre dans la rue pour défiler? Pour Lucia Dahlab, vice-présidente de l’Union des organisations musulmanes de Genève, la réponse est un peu légère. «Un énième colloque aura une portée limitée. C’est sur le terrain qu’il faut être actif. On pourrait par exemple imaginer une sorte de mosquée itinérante, une caravane qui sillonnerait la Suisse en allant à la rencontre des gens.» Une telle initiative, ajoute-t-elle, a été envisagée récemment par l’Union vaudoise des associations musulmanes (UVAM). Ce que confirme le vice-président de l’UVAM, Pascal Gemperli, qui précise que le projet n’est plus d’actualité. «Il y a d’autres choses à faire que cela, note-t-il. Le meilleur moyen de lutter contre l’islamophobie, c’est d’œuvrer sur le long terme pour la reconnaissance légale de la communauté musulmane.»
Sur ce point, le président de la Coordination des organisations islamiques suisses est d’accord: il est plus que jamais nécessaire de faire en sorte que les musulmans modérés puissent parler d’une seule voix: «Nous travaillons très dur, ces temps-ci, avec la Fédération des associations faîtières islamiques, pour mettre en place un consistoire qui représentera tous les musulmans de Suisse, précise Fahrad Afshar. Les statuts devraient être achevés début 2012. Grâce à lui, l’islam pourra enfin accéder à la normalité. Dès lors, une organisation comme celle de Nicolas Blancho perdra de son utilité.»

Le Matin

lundi 31 octobre 2011

Les Turcs en Allemagne, 50 ans de «mariage blanc»

allemagne communauté turque Angela Merkel célèbre mercredi un demi-siècle d’immigration. Mais l’intégration est en panne.

Petit, le crâne dégarni, l’œil malicieux, Ahmet Bayram, 66 ans, est arrivé en 1971 à Berlin avec un contrat de travail dans une grosse entreprise de machines-outils. Quarante ans après, «je suis pratiquement devenu un Berlinois», sourit-il. Il passe toujours ses vacances «au pays» mais sa vie est ici, au nord du Danube. «Mes trois enfants et mes petits enfants vivent à Berlin», explique-t-il devant les rayons de la librairie turque Kitapçi, tenue par son fils.

«Il y a quarante ans, tout le monde avait du travail. Avec la crise, regrette-t-il, les Allemands ont commencé à nous dire qu’on leur piquait leur boulot et nous ont reproché de rouler en grosse Mercedes, en profitant de leur sécurité sociale.» Ahmet a le passeport allemand mais a conservé sa nationalité turque.

«Cinquante ans de mariage blanc!» La banderole barre l’immeuble à l’entrée de Berlin-Kreuzberg, le «petit Istanbul». C’est le titre d’une pièce de théâtre montée pour le 50e anniversaire des accords du 30 octobre 1961, organisant l’afflux des travailleurs turcs dont l’industrie avait cruellement besoin.

«Nous sommes tolérés»

«Nous restons des gens tolérés», résume Bekir Yilmaz, dans les bureaux voisins de la communauté turque. Il nous montre une lettre anonyme arrivée le matin. «Pourquoi votre association proteste-t-elle contre l’interdiction des grillades dans le Tiergarten (ndlr: le parc central de Berlin, à deux pas de la résidence du président de la République) ? Vos compatriotes sont incapables de se tenir correctement et proprement. Allez à Ankara ou à Istanbul faire vos barbecues! Ici vous êtes seulement des invités tolérés.» L’été, les grillades au Tiergarten étaient une vieille tradition pour les familles de la communauté turque berlinoise.

Bekir Yilmaz a rejoint son père à Berlin en 1977, il était alors âgé de 8 ans. Aujourd’hui père de quatre enfants nés en Allemagne, il se sent citoyen allemand. «Mais je ne suis quand même pas un Allemand. Je ne peux pas renier mon origine, précise-t-il. J’ai eu la chance d’acquérir la nationalité allemande avant 2000.» Depuis, la loi exige le renoncement préalable à la nationalité turque. Faute de l’avoir respectée, 55 000 personnes se sont vu retirer leur «nouveau» passeport de la République fédérale.

Dominant Berlin-Neuköln, la mosquée du cimetière turc dresse ses minarets le long de l’ancien aéroport de Tempelhof. «Nous n’avons aucune difficulté à pratiquer notre religion», souligne Ender Çetin, qui siège à la présidence de la mosquée. Né à Berlin en 1977, il se sent Berlinois à 100%, mais n’a jamais demandé la nationalité allemande. Il lui faudrait pour cela renoncer à sa nationalité turque. Or, rien ne dit qu’il n’ira pas vivre un jour dans le pays de ses parents. «Le racisme, la haine de l’Islam se sont renforcés ces dernières années.»

Serdar Taçi ou Mesut Özil, les étoiles turques de l’équipe de foot nationale, n’y changent rien. Diplôme en poche, nombre de jeunes Turcs nés en Allemagne repartent travailler dans le pays de leurs parents. Cinquante ans après, le solde migratoire s’est inversé.

Le défi de Merkel

Aujourd’hui, il reste néanmoins 2,5 millions de Turcs d’origine vivant en Allemagne, dont 1,5 million ont acquis la nationalité allemande. La communauté a ses artistes, ses millionnaires, ses responsables politiques. Mais la définition même de l’intégration reste contestée. Peut-on devenir Allemand et rester Turc? C’est le défi auquel font face le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan et la chancelière allemande Angela Merkel, qui célébreront le cinquantenaire mercredi à Berlin .

Michel Verrier, Berlin, pour 24 Heures

Condamnés à mort pour cause de mariage, ils vivent en Suisse

Traqué par son propre clan, un couple de Pakistanais entame une nouvelle vie en Suisse. Témoignage.

sami et sara

«Sara* était condamnée à être enterrée vivante. Quand la tribu a su que je l’avais épousée, ils m’ont également condamné à mort», explique Sami* (27 ans). Une traque commence alors dans une grande ville du Pakistan. Elle durera une année. Une année pendant laquelle le couple se fait héberger en changeant d’endroit toutes les semaines. «Ils ont essayé de nous tuer trois fois avec des armes à feu. Nous n’étions en sécurité nulle part.» En avril 2011, quand Sami arrive en Suisse avec sa jeune épouse Sara (21 ans), le couple est aux abois.

L’histoire de Sara et de Sami ressemble à beaucoup d’autres au Pakistan. Les tribunaux tribaux (jirga) condamnent à mort des centaines de femmes chaque année. Le crime de Sara? Refuser d’épouser son cousin. Une affaire d’honneur dans la province du Sindh, où les femmes sont considérées comme des biens d’échange entre les familles. «Ma famille s’est plainte auprès du jirga , raconte Sara. Je suis devenue kari , c’est-à-dire un mouton noir.» Sara parvient à s’échapper, rejoint la ville de la province et contacte Sami, qui a grandi dans son village.

«Personne ne pouvait nous aider, ni la police, ni les autorités, ni les médias, si je n’avais pas une relation officielle avec elle», explique Sami. Ils se marient. Mais cela ne résout rien: il devient à son tour un karo , un mouton noir. Leurs têtes à tous deux est mise à prix. La tribu fait détruire la maison de Sami au village. Ses parents et sa sœur sont blessés. La loi pakistanaise interdit les jugements karo-kari , mais l’influence des clans reste puissante. Les pressions sont immenses: sur les familles pour qu’elles exécutent les sentences elles-mêmes, et sur la police pour qu’elle ferme les yeux.

En danger jusqu’ici

La Fondation Surgir, à Lausanne et à Genève, est alertée de la situation par une ONG asiatique, fin 2010. «Nous avons correspondu pendant trois mois par internet, puis nous avons obtenu un permis humanitaire pour Sara et Sami», explique Jacqueline Thibault, fondatrice et présidente de Surgir. Soutenu par la fondation, le couple loge dans un petit studio, prend des cours accélérés de français. Sami, bardé de diplômes dans son pays, a trouvé un job modeste dans une entreprise de transports. Sara, issue d’une famille riche qui n’avait pas besoin de travailler, fait des ménages. Ils ne retourneront jamais au pays: «Trop dangereux.» Leur vie est ici. Ils évitent de raconter leur histoire, car si la tribu retrouve leur trace, où que ce soit, ils ne seraient pas à l’abri de représailles.

Comme tous les pays occidentaux, la Suisse n’est pas à l’abri des crimes d’honneur. Le pays se souvient de la tragédie survenue à Zurich en mai 2010, où un père pakistanais a tué sa fille de 16 ans à coups de hache.

La Suisse en retard

«Il y a peu de crimes d’honneur officiellement recensés comme tels, mais les menaces sont bien réelles», prévient Jacqueline Thibault. La Fondation Surgir, créée en 2000 sous l’impulsion d’Edmond Kaiser, accueille et aide des victimes de l’étranger, réfugiées en Suisse, en France et en Italie. Environ vingt-cinq personnes et leurs enfants. Elle lutte aussi pour que ce problème soit pris au sérieux par les autorités: «En Grande-Bretagne ou en Belgique, les polices sont formées à décrypter les menaces, les mariages forcés, les crimes maquillés. En Suisse, tout reste à faire.»

La conseillère nationale Bea Heim (PS/SO) a déposé une motion en 2010 pour que la Suisse mette en place une politique de prévention. Sans succès. «La Suisse sous-estime le danger», regrette Jacqueline Thibault, qui vient d’éditer une plaquette sur les crimes d’honneur en Europe. Cette humanitaire, qui a écrit en 2006 Brûlée vive avec Souad (une Palestinienne victime d’un crime d’honneur), se bat pour que l’horreur ne devienne jamais banale. «Il faut que les gens sachent que dans certains pays les chiens sont mieux traités que les femmes, conclut Sami. Ce n’est pas une question de religion, mais de traditions ancestrales .»

* Prénoms d’emprunt

Patrick Chuard dans 24 Heures

Manifestation nationale contre l’islamophobie

2000 personnes ont répondu à l’appel lancé par le Conseil central islamique.

Quelque 2000 personnes ont manifesté samedi sur la place Fédérale pour dénoncer ce que le Conseil central islamique (IZRS) appelle «les discriminations croissantes envers les musulmans». D’autres organisations musulmanes avaient au préalable pris leurs distances avec cette manifestation.

Parmi les orateurs, le président du Conseil central islamique, Nicolas Blancho, a harangué l’assemblée depuis l’estrade où derrière lui figurait en grandes lettres jaunes le mot «islamophobie». Lettres qui ont été renversées une à une lorsque la foule a clamé plusieurs fois «non» à sa question: «Voulez-vous que l’interdiction des minarets soit maintenue?» Les musulmans ne doivent pas être traités comme des citoyens de deuxième classe, a également déclaré Nicolas Blancho. «Nous sommes une partie de la société comme les autres.»

En Suisse, l’interdiction des minarets votée par le peuple ne serait que la pointe de l’iceberg, selon un communiqué de l’IZRS. Ce document évoque des discriminations en hausse dans le monde du travail ou en matière de logement, par exemple. Quant aux agressions verbales, elles sont «quotidiennes», avec une tendance «en forte hausse», écrit le Conseil, qui dit documenter les cas d’islamophobie systématiquement depuis cette année. Le Conseil central islamique appelle la Confédération à prendre des mesures.

La manifestation s’est déroulée sans heurt. Bon nombre de participants portaient une étoile jaune où figurait l’appellation «musulman», rappelant la persécution des juifs par les nazis. Certains se sont agenouillés pour prier entre les discours. Un geste qui ne faisait pas partie de l’autorisation de manifester, a fait savoir la police, qui a contacté les organisateurs. Les autorités municipales qui ont délivré l’autorisation seront averties.

24 Heures et ATS

Un néonazi repenti efface ses tatouages

tatoo nn effacé Bryon Widner, ancien leader d’un groupement prônant la suprématie de la race blanche, a subi vingt-cinq opérations chirurgicales pour faire enlever les inscriptions qui lui couvraient le visage.

Bryon Widner était un Américain extrêmement violent, redouté pour ses actes racistes. Il affichait fièrement son visage recouvert de tatouages nazis. Mais devenir père l’a transformé. Sa femme Julie et lui ont alors quitté les mouvements racistes prônant la suprématie de la race blanche auxquels ils appartenaient. Ses idées avaient totalement changé, mais son corps ne reflétait pas son nouvel état d'esprit. Il ne supportait plus ses nombreux tatouages néonazis. Un rasoir imbibé de sang, des croix gammées ou les lettres du mot «haine» sur chacune de ses phalanges le dégoûtaient de sa propre enveloppe corporelle. Les gens voyaient en lui un voyou menaçant, et non un père de famille aimant.

Il songe à brûler son visage avec de l’acide

D'importants tatouages faciaux comme ceux qu’arborait Bryon sont extrêmement rares et les opérations pour les enlever restent hors de prix. Désespéré, il songea à se brûler le visage avec de l’acide. Julie fit alors quelque chose qui lui aurait paru impensable quelques mois plus tôt: elle contacta un homme de couleur, Daryle Lamont Jenkins, qui se battait contre le racisme. «Je n’ai pas pensé à ce qu’elle avait pu faire auparavant, j’ai simplement vu une femme et une mère prête à faire n’importe quoi pour sauver sa famille», déclara ce dernier au quotidien «Daily Mail». Par l’intermédiaire de Daryle, Julie et Bryon font la connaissance de T.J. Leyden, un ancien néonazi qui se bat désormais pour la tolérance.

Bryon prit son courage à deux mains et suivit le conseil de ses nouvelles connaissances: il contacta le Southern Poverty Law Center (SPLC), une association qui lutte contre le racisme, traquant les groupes auxquels Bryon appartenait autrefois. Joe Roy, inspecteur en chef pour le SPLC, connaissait bien Bryon Widner du temps où celui-ci était actif dans ces derniers. «Les gens qui quittent réellement ces mouvements sont extrêmement rares, explique-t-il. La plupart traversent une crise, mais y retournent par la suite.» Après plusieurs semaines de discussion avec les époux Widner, Joe Roy fut convaincu du changement qui s’était opéré au sein du couple. Bryon collabora avec le SPLC, expliquant de quelle manière fonctionnaient les groupes néonazis, comment ils recrutaient de nouveaux membres, leur façon de se rassembler. La famille reçut de nombreuses menaces de mort de la part de leurs anciennes connaissances.

Des douleurs inimaginables

Touché par le sort de Bryon, Joe Roy finit par trouver un donateur capable d’assurer le financement des opérations chirurgicales nécessaires pour enlever définitivement ses tatouages. Les frais pour les vingt-cinq opérations s’élevèrent à 35'000 dollars. Durant les interventions, réalisées au laser, Bryon souffrait d’une douleur incommensurable: il fallut alors l’anesthésier totalement lors de chaque séance. Plus de vingt opérations en seize mois furent nécessaires pour venir à bout de ces tatouages haineux. Bryon vécut cela comme une épreuve de pénitence. Il donna son accord pour être suivi par une équipe de télévision, afin «d’empêcher d’autres jeunes de commettre les mêmes erreurs que moi».

Le début d’une vie nouvelle

Les bras et le torse de Bryon sont encore couverts de tatouages. Peu à peu, afin de les dissimuler, il les recouvre d’encre. Son cou et ses mains ont subi quelques dommages dus aux pigments, il souffre fréquemment de migraines et ne peut s'exposer au soleil. Mais, dit-il, «c'est un petit prix à payer pour être devenu un nouvel être humain».  Le documentaire «Erasing Hate» consacré à Bryon Widmer peut être visionné sur le site Huffington Post.

20minutes.ch

3700 réfugiés sont toujours bloqués à la frontière tuniso-libyenne

L'Europe doit venir en aide aux réfugiés de Libye. C'est le message adressé par les ONG qui gèrent le camp de Choucha en Tunisie. Situé à proximité du poste frontalier de Ras Jdir, il accueille aujourd'hui encore 3700 réfugiés, originaires de 22 pays.

Euronews

« Pas d’enfants en prison ! »

Samedi soir, un père tchétchène et ses quatre enfants arrêtés à Nancy et menacés d’expulsion étaient remis en liberté. Une première en France.

Le tribunal administratif de Melun (Seine-et-Marne) a remis en liberté samedi un père de famille et ses quatre enfants interpellés mercredi à Nancy et menacés d’expulsion, après leur placement au centre de rétention du Mesnil-Amelot. Ils devaient être renvoyés en Russie, comme des milliers d’autres chaque année.

« C’est une décision importante, les enfants ne doivent pas être en rétention pour des raisons juridiques et humaines », s’est réjouie l’avocate nancéienne de la famille, Me Brigitte Jeannot, après avoir plaidé pendant plus de 2 heures.

La famille sans papiers avait reçu une obligation de quitter le territoire français (OQTF) qui reste valide, mais la décision de rétention a été annulée, les juges s‘étant opposés à l’enfermement des enfants. Une première en France. En effet, une nouvelle loi sur l’immigration mise en place en juin donne la compétence aux tribunaux administratifs. « La rétention est prévue comme une mesure d’éloignement, or les enfants - mineurs - ne peuvent pas être reconduits à la frontière, donc aucune rétention n’est possible pour eux », a expliqué l’avocate, militante de la Ligue des droits de l’Homme.

Arrivés en France en 2006, après avoir transité par l’Allemagne, la famille vit à Nancy. Le père âgé de 35 ans et ses 4 enfants de 4 à 14 ans ont été interpellés chez eux mercredi, avant d’être conduits dans la soirée au Centre de rétention du Mesnil-Amelot. La mère qui suivait un cours de français n’avait pas été arrêtée.

La demande d’asile de la famille a été rejetée par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), mais un recours doit être examiné par la Commission nationale du droit d’asile avec des arguments solides car « Monsieur est recherché par le gouvernement de Kadirov qui le considère comme un traître et la Tchétchénie n’est pas un pays sûr », a plaidé Me Jeannot.

Durant les 4 jours de rétention, les enfants ont vu des détenus s‘automutiler, se battre… « Des choses qu’ils n’auraient jamais dû voir. C’est grave », a dénoncé le sénateur de Seine-et-Marne venu soutenir la famille. « Pas d’enfants en prison ! J’espère que cela fera réfléchir les préfets. »

Corinne Baret-Idatte dans l’Est Républicain

La professionnalisation de l’encouragement de l’intégration continue sur sa lancée

Le bilan de la troisième année de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les étrangers et de la loi révisée sur l’asile fait état d’une consolidation de la collaboration entre la Confédération, les cantons, les villes, les communes ainsi que les responsables du secteur privé en matière d’encouragement de l’intégration. Le rapport annuel 2010 sur l’encouragement de l’intégration par la Confédération révèle que l’offre a été renforcée en tenant compte des besoins croissants et a été davantage ciblée sur les besoins des groupes auxquels elle s’adresse.

Le catalogue de mesures d'intégration proposé par la Confédération et élaboré conjointement par les cantons et quinze services fédéraux a considérablement contribué à l'ancrage de la promotion de l'intégration à l'échelon fédéral – précisément dans les structures existantes telles que la formation professionnelle, l'assurance-chômage et le secteur de la santé – et à une sensibilisation des différents partenaires.

Dans le cadre du programme des points forts pour les années 2008 à 2011, l'Office fédéral des migrations soutient l'encouragement de l'intégration des étrangers. En 2010,  près de 2900 cours ou mesures ont été proposés autour du thème "Langue et formation", rassemblant quelques 57 000 personnes. Trente centres de compétence régionaux de l'intégration ont ainsi pu faire connaître plus en détail leur fonction de services centraux d'accueil et de coordination. Les quinze services d'interprétariat communautaire ont dispensé environ 128 000 heures d'interprétation et ont apporté une contribution précieuse à la compréhension mutuelle lors de situations de dialogue importantes, que ce soit à l'hôpital, à l'école ou auprès des autorités. Le lancement de projets d'intérêt national a été amorcé et accéléré ; on peut notamment citer l'encouragement de l'intégration dans le domaine préscolaire ou les projets de développement de quartier. L'encouragement de l'intégration des réfugiés reconnus et des personnes admises à titre provisoire a été poursuivi, notamment dans les domaines de l'acquisition d'une langue et de l'intégration professionnelle.

Communiqué de l’ODM

Demandeurs d'asile, le "cri d'alerte" de la ville d'Angers

Face à l'afflux persistant de migrants, pour beaucoup venus de pays africains en proie à la guerre ou à la famine, la ville d'Angers sature et appelle au secours: les services d'accueil sont débordés, les centres d'hébergement affichent complet, les points de distributions alimentaires refusent du monde, ce qui crée des tensions.

"En aucun cas, il ne s'agit de stigmatiser les demandeurs d'asile. C'est un cri d'alerte auprès de l'Etat et un appel à une plus grande solidarité territoriale. Nous avons tous atteint les limites", raconte Rose-Marie Véron, adjointe en charge de la solidarité au sein de la municipalité socialiste. "Aujourd'hui, le seuil physique de saturation a été atteint", renchérit Christophe Béchu, sénateur UMP et président du conseil général.

Plus de 800 demandeurs d'asile, principalement venus de Somalie, Soudan ou Erythrée, sont arrivés depuis le début de l'année dans cette ville de 155.000 habitants. Ils étaient 940 l'an passé et un peu plus de 900 (enfants non compris) en 2009. Elus et associations avaient déjà tiré la sonnette d'alarme il y a deux ans, rien n'a changé. "C'est surtout très compliqué car beaucoup relèvent de procédures prioritaires et n'ont droit à rien", appuie Jean-François Fribault, le directeur de l'Abri de la Providence, l'association qui anime la plateforme d'accueil unique du Maine-et-Loire.

Sur les 800 primo-arrivants, 180 sont aujourd'hui en attente d'accompagnement administratif car l'association ne peut assurer le suivi de leurs dossiers. Epuisés, les salariés avaient exercé il y a quelques mois leur droit de retrait, relayant sur la place publique la fatigue et l'inquiétude des responsables de l'accueil d'urgence. Au Point accueil santé solidarité (PASS), un local municipal en centre-ville où les sans-domicile fixe trouvent chaque matin collation et soutien psychologique, social ou médical, le malaise est palpable depuis plusieurs semaines.

L'afflux des demandeurs d'asile y entraîne des tensions avec les habitués, routards et SDF, d'autant qu'au delà de 130 personnes, une mesure de fermeture des portes s'applique automatiquement. Plus grave, un deuxième accueil de jour, expérimenté depuis décembre 2010 avec le soutien de l'Etat, a été fermé ce vendredi, faute de crédits suffisants. "C'est démentiel, on arrive en période hivernale et dans une ville comme Angers, on peut se retrouver sans accueil de jour", dit Hubert, 51 ans, un "vieux routard" en provenance de Caen, pour qui "priorité doit être donnée aux plus précaires".

Au Secours Populaire, aux Restaurants du coeur, on partage le même constat: les conditions d'accueil se dégradent sous le poids de la demande. "La fréquentation a progressé de 20% cet été. Sur les 736 familles, 60 à 70% sont des demandeurs d'asile avec lesquels il n'est pas toujours simple communiquer", constate Jean-Pierre Meriel, un responsable des Restos du coeur. Depuis plusieurs jours, plusieurs dizaines de migrants dorment dehors, sous les arcades de la gare. Arrivée en avion à Paris depuis Addis Abeba (Ethiopie), Huda, une étudiante somalienne de 24 ans, affirme avoir "fui les guerres civiles".

Pourquoi Angers? "J'ai appelé une connaissance avec mon portable", répond Huda qui n'en dira pas plus. Le réseau entre compatriotes joue et la ville semble réputée pour la qualité de ses services d'accueil, selon les responsables locaux. "Il existerait même un site internet en Somalie où l'on conseille de venir à Angers. On voit bien qu'on est dans un cercle vicieux. Il faut que l'accueil reste dans des proportions raisonnables", dit Christophe Béchu. A sa demande, élus et parlementaires angevins rencontreront le ministre de l'Intérieur Claude Guéant le 3 novembre, pour tenter de trouver des solutions.

AFP

vendredi 28 octobre 2011

Une étoile jaune pour dénoncer l’islamophobie

Deux organisations faîtières musulmanes dénoncent l’utilisation de l’étoile jaune dans un appel à manifester contre l’islamophobie.

La nouvelle provocation du Conseil central islamique suisse (CCIS) suscite la colère de deux des principales organisations faîtières musulmanes. Fait rare, la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS) et la Coordination des organisations islamiques de Suisse (COIS) ont publié un communiqué commun dénonçant une manifestation contre l’islamophobie. Celle-ci, organisée par le CCIS, dont le président n’est autre que Nicolas Blancho, a lieu ce samedi à Berne. Or l’annonce de cette manifestation sur le site internet du CCIS fait défiler quatre photos – trois portraits de musulmans et un minaret, tous frappés d’une étoile jaune qui rappelle celle qui discriminait les juifs dans l’Allemagne nazie et ses satellites. Cette étoile, formée de deux carrés entrelacés, et donc de huit branches (l’étoile jaune en compte six), comporte en son centre l’inscription «muslim», calligraphiée à la manière hébraïque.

La FOIS et la COIS dénoncent un acte «tapageur», «non éthique», qui «nuit aux intérêts et à l’image des musulmans de Suisse». «Le fait d’utiliser abusivement ce symbole historiquement lourd de signification à des fins de provocation gratuite blesse nos concitoyens juifs», affirme le communiqué. «Il est exclu d’établir un lien entre les discriminations subies par les musulmans aujourd’hui et le génocide des juifs par les nazis.»

«L’islamophobie est un grand problème en Suisse», dit Farhad Afshar, président de la COIS. «Porter le voile est difficile pour de nombreuses jeunes femmes, et les musulmans peinent à trouver du travail. Mais il faut résoudre ces problèmes par le dialogue avec les partis politiques intéressés à améliorer les conditions de vie des minorités, et avec les instances communales, cantonales et nationales. Les provocations du CCIS sont contre-productives.»

«Un vrai malaise»

Nicolas Blancho balaie ces critiques. «Je ne crois pas que le symbole de l’étoile n’appartient qu’aux juifs. Cette étoile a huit branches, et nous n’avons jamais prétendu que la situation des musulmans était la même que celle des juifs dans l’Allemagne nazie. Nous condamnons l’antisémitisme, mais il y a un vrai malaise. Certaines situations que vivent les musulmans rappellent l’antisémitisme des débuts. Un débat sur l’islamophobie est nécessaire.»

La Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (Cicad) avait déjà déploré durant l’été l’utilisation abusive de l’étoile jaune par le CCIS. Elle se félicite aujourd’hui de la réaction des organisations faîtières musulmanes. «Il appartient aux communautés musulmanes de dénoncer les débordements qui peuvent naître en leur sein. On ne peut que saluer cette initiative», affirme Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la Cicad.

Patricia Briel dans le Temps

dimanche 23 octobre 2011

En Suisse, net recul du parti populiste UDC

Le parti de la droite populiste de l'Union démocratique du centre (UDC) a enregistré un net recul dimanche aux élections du Parlement, mais reste la première formation politique de Suisse, selon une projection nationale de la télévision helvétique.

toni brunner

Le président de l'UDC, Toni Brunner, le 23 octobre à Zurich.AFP/FABRICE COFFRINI

L'UDC, qui a martelé pendant la campagne son discours anti-européen et anti-immigration, a perdu sept sièges au Conseil national (assemblée), obtenant 26,8 % des voix contre 28,9 % au dernier scrutin il y a quatre ans et 26,6% en 2003.

Ce serait la première fois que l'UDC voit son score reculer en 20 ans. Ce résultat est une surprise, puisque à quelques jours du scrutin, l'UDC était encore en légère progression par rapport à 2007, avec quelque 29,3 % d'intentions de vote. Contre toute attente, le parti n'a donc pas réussi à atteindre la barre historique des 30%.

Selon l'estimation nationale diffusée par la télévision, les partis de centre droit gagneraient en revanche du terrain, notamment les Verts libéraux et le Parti bourgeois démocratique, issu d'une scission antérieure de l'UDC. Pour sa part, le Parti socialiste resterait stable, tandis que le parti de la droite traditionnelle PLR (Libéraux radicaux) a cédé 4 sièges.

AFP et Le Monde

jeudi 20 octobre 2011

Pétition pour l’allègement du régime d’aide d’urgence

aide urgence pétition

Le Courrier

“Migrants en Suisse: quelle contribution au développement ?”

migrant débat genève

Le Courrier

“S’en prendre aux enfants est abject”

A propos de la campagne “Stop à l’immigration massive”, réaction d’un lecteur du Courrier.

courrier lecteur migrants enfants

Le Courrier

«Un roi» règne sur le cœur de Corinne Desarzens

Les éditions Grasset (Paris) publient le dernier roman de l’écrivain suisse qui se frotte ici aux requérants d’asile. Un sujet épineux que nous ramène chaque rendez-vous électoral. Cette publication est un hasard, mais elle tombe à point nommé.

Corinne Desarzens, un peu à la Melgar, le militantisme en moins et l’angélisme en plus.

Corinne Desarzens, un peu à la Melgar, le militantisme en moins et l’angélisme en plus. (RDB)

L’immigration. Un sujet épineux que nous ramènent les politiciens à l’occasion de chaque élection. Difficile d’y échapper ces temps-ci, avec le rendez-vous du 23 octobre qui approche à grands pas.
A propos de pas, il y en a qui sont très noirs. Ils écrasent un drapeau rouge frappé de trois mots blancs: «Stopper l’immigration massive!». C’est l’affiche de l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice) – vous l’aurez reconnue – pour l’actuelle campagne électorale. Bien avant, pour une autre campagne, ladite UDC s’était surpassée. A l’époque, «les murs de la ville s’étaient couverts d’affiches représentant des moutons noirs, puis, quelques mois plus tard, de corneilles qui déchiquetaient de beaux passeports rouges», rappelle Corinne Desarzens dans son nouveau roman Un roi (éditions Grasset).
La «ville» dont il est question ici, c’est Nyon où vit la romancière suisse. Quant au «roi» du titre, il est Noir. Inutile de vous dire son nom: il est un et multiple. Originaire d’Erythrée, il aime néanmoins l’Ethiopie qu’il a traversée, comme le Soudan et la Lybie, avant de débarquer à Lampedusa et de poursuivre son chemin jusqu’au pays de la Croix-Rouge. Là, il attend ce que tous attendent: l’asile politique.

Les bons et les méchants

C’est donc un «requérant». Malheur à Corinne Desarzens ! Elle va aimer ce «roi» qu’elle associe à des «princes trempés dans l’encre» qui marchent «comme s’ils avançaient sur une lame, un pied devant l’autre, souples mais précautionneux, tâtant et anticipant l’obstacle». Elle l’aimera sans se soucier des consignes données: garder ses distances avec les requérants d’asile. C’est ce que recommande le centre d’accueil des migrants à Nyon, où elle travaille comme enseignante bénévole. «Qu’ils apprennent, soit, mais sans créer de liens puisqu’ils ne resteront pas». Un destin scellé d’avance.
«Le traitement à réserver à ces migrants figurait sur n’importe quel programme électoral», écrit Corinne Desarzens dans ce livre qui fait penser à La Forteresse, le film du Suisse Fernand Melgar, avec le militantisme en moins et l’angélisme en plus. Car il faut le dire, il y a chez la romancière un côté manichéen qui place un peu trop les pays d’accueil (Suisse et Europe) dans le camp des méchants, et les accueillis dans le camp des bons.
Il n’en reste pas moins que ce «Roi» est touchant. Non pas tant grâce à cette histoire d’amour que l’écrivain effleure ou détaille (c’est selon) avec passion, mais grâce à un va-et-vient étourdissant entre deux civilisations occidentale et africaine, l’une pauvre en sentiments, l’autre en finances. Le Nord versus le Sud, en somme. Deux points cardinaux auxquels Corinne Desarzens ajoute l’Est et l’Ouest, offrant ainsi à son lecteur quatre gros chapitres en guise de charpente à son roman.
Tout commence donc en Suisse, dans ce centre d’accueil pour réfugiés dont le quotidien est rythmé par les cours de français, entre autres, et par l’attente exténuante d’une réponse aux demandes d’asile.

Une fête des sens

Dans les deux autres tiers du livre, éclatent des couleurs magnifiques et une fête des sens aiguillonnée par la curiosité de l’auteur. Desarzens décide de se rendre en Ethiopie afin de connaître un peu mieux ce pays que le «roi» aime, sans pouvoir y régner.
A partir de cet instant, le roman bascule. On entre alors dans un récit de voyage, digne d’un Nicolas Bouvier, où l’Ethiopie, sa dynastie impériale, ses châteaux, ses églises, ses déserts, ses lacs, ses parcs nationaux, ses zèbres et ses crocodiles, ses ethnies aux coutumes ancestrales, rivalise de richesse avec l’Occident des banques, des cartes magnétiques et de toutes les bricoles technologiques.
Au bout du fil, cette question douloureuse: l’intégration est-elle possible, dans un sens comme dans l’autre? Un Africain peut-il comprendre des Occidentaux qui «découpent les heures sur un cadran» alors que pour lui, coule dans le monde «une énergie mystérieuse qui (…) nous donne la force de mettre le temps en mouvement»?
Et inversement: un Occidental peut-il s’accommoder des habitudes sexuelles des Hamers, une ethnie éthiopienne où l’homme, pour conquérir son épouse, «doit à la pleine lune de septembre, escalader les échines du bétail placé flanc contre flanc»?
D’aucuns trouveraient cet exercice barbare. Mais qu’entend-on par barbarie? se demande Corinne Desarzens. Sa réponse, elle l’emprunte à Montaigne: «Chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage».

Ghania Adamo, swissinfo.ch

La force de l’UDC n’est pas due qu’aux «perdants de la mondialisation»

Une étude lausannoise décrit les tribus très diverses qui composent l’électorat du parti populiste. Et pourfend quelques idées reçues.

Pourquoi le succès de l’UDC et, au-delà, des partis populistes en Europe? La question n’a pas fini d’embarrasser les formations politiques traditionnelles, de droite comme de gauche, et de questionner les chercheurs. Les conclusions auxquelles parvient l’étude de deux politologues* de l’Université de Lausanne, Philippe Gottraux et Cécile Péchu, se démarquent d’une explication qui verrait dans la fragilisation d’un électorat populaire, en raison de la mondialisation économique, le principal ressort d’une progression, pour ce qui est de l’UDC, sans précédent dans toute l’histoire de l’Etat fédéral. A partir, principalement, d’entretiens approfondis avec 40 militants, 20 à Genève et 20 à Zurich, les deux universitaires font apparaître des logiques d’engagement beaucoup plus complexes, diversifiées et surprenantes.

Le Temps: Votre étude contredit la thèse qui voit dans la fragilisation des «perdants de la mondialisation» la cause du succès de l’UDC. Pourquoi n’y souscrivez-vous pas?

Philippe Gottraux: Cette thèse se fonde sur des sondages post-électoraux. Or ces analyses, c’est le grand problème, négligent le phénomène de l’abstention, particulièrement forte dans les catégories populaires. Leurs données ne permettent pas de savoir si réellement des électeurs de gauche basculent vers l’UDC plutôt que vers l’abstention. Plus fondamentalement, la thèse que vous citez – que l’on retrouve, en France, pour expliquer le vote en faveur du Front national – repose sur un modèle qui tend à faire mécaniquement de la situation socioprofessionnelle le seul critère déterminant, à l’exclusion d’autres espaces socialisateurs, du parcours de vie, etc... Elle ne prend pas non plus en compte les effets induits par l’offre politique elle-même et sa capacité à imposer des thèmes. L’offre ne crée pas ex nihilo la demande mais contribue très largement à la formater. Notre démarche met en évidence la rencontre entre une offre politique qui peut être très différente selon les cantons, et des individus aux parcours variés. C’est un schéma beaucoup plus complexe que l’explication par les «perdants de la mondialisation».

– Que montre donc votre étude?

– Nous avons constaté qu’à côté de profils qui sont effectivement fragilisés par l’évolution économique, il existe des «gagnants» de la mondialisation qui se reconnaissent aussi dans les valeurs de l’UDC et contribuent à son succès. Qui plus est, ils ne sont pas toujours ni uniquement attirés par le discours néolibéral de ce parti. Ainsi, la suspicion envers les étrangers est transversale, elle est partagée, avec des nuances dans l’expression, par les six catégories de militants que nous avons distinguées, les «populaires», les déclassés, les jeunes anti-européens, les méritants, les libéraux et les idéologues ou moralistes. Chez les libéraux, la suspicion envers les étrangers est certes plus modérée, mais les positions du parti sur ce thème n’en sont pas moins défendues sans conditions. Ce thème semble donc avoir un effet rassembleur.

– Vous soulignez la très relative stigmatisation dont l’UDC serait l’objet, à vos yeux, dans le discours public. Ce constat peut surprendre, dans la mesure où les médias se voient reprocher de contribuer parfois sans discernement à la diabolisation de ce parti…

– Cette stigmatisation peut varier selon les cantons. Nous avons constaté un effet d’autocontrôle de la parole des militants plus fort à Genève qu’à Zurich, où les propos peuvent être assez extrêmes. Mais je pense qu’en Suisse, l’UDC connaît une forme de banalisation élevée pour des raisons historiques. Le thème de l’«Überfremdung» est ancien et présent au-delà de la droite de la droite. Par ailleurs, l’UDC est un parti gouvernemental depuis longtemps, à la différence, par exemple, du Front national en France.

– Comment les médias sont-ils perçus par les militants que vous avez interrogés?

– Ils se montrent méfiants. Les journalistes sont vus comme des gens de gauche qui critiquent l’UDC en permanence. Cette perception tend à renforcer la cohésion entre des militants souvent assez différents les uns des autres. Nous ne leur avons jamais entendu dire en revanche que les médias, en parlant de l’UDC même en termes critiques, lui auraient rendu service.

– Votre étude permet-elle de tirer des enseignements sur ce que les adversaires de l’UDC devraient faire pour la combattre plus efficacement?

– Je souhaite ne pas quitter mon rôle de scientifique pour endosser celui de prescripteur. Je constate simplement que la force de ce parti est d’offrir un programme «à la carte» qui lui permet de rassembler des militants aux profils très variés.

– Quels sont les résultats de votre enquête qui vont ont le plus surpris?

– Nous ne nous attendions pas à découvrir chez les jeunes anti-européens des attitudes a priori très contradictoires. Ce sont chez eux en effet que nous avons constaté le plus d’ouverture sur des questions de société telles que le «pacs» ou les drogues douces, mais en même temps une conception très conservatrice des rapports entre hommes et femmes. Nous avons été surpris également de constater dans les classes supérieures des militants UDC, en particulier chez les femmes, de faibles compétences politiques, peu d’aptitudes à séparer un discours subjectif et émotionnel d’une appréhension proprement politique. Nous nous sommes aussi rendu compte du poids de la culture de l’effort, le refus que l’Etat ponctionne les revenus des particuliers, qui traverse toutes les catégories de militants, même les «populaires». Il s’agit dans ce dernier cas d’accuser «plus petit que soi», requérants d’asile ou bénéficiaires d’aides sociales, de vivre à leur crochet.¨

Denis Masmejan dans le Temps

 

*Philippe Gottraux et Cécile Péchu: «Militants de l’UDC. La diversité sociale et politique des engagés», 2011, Editions Antipodes, 304 p.

Plainte contre une publicité de l’UDC

plainte udc racisme

24 Heures

mercredi 19 octobre 2011

«Le manque de transparence en matière de détention administrative est inquiétant»

Michael Flynn, responsable du «Global Detention Project» à l’Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID), vient de publier un rapport sur la Suisse. Il critique le manque de transparence qui entoure la détention de requérants d’asile déboutés.

Avec son documentaire Vol Spécial, Fernand Melgar a mis sur le devant de la scène la prison de Frambois (GE), centre de détention administrative où des clandestins et requérants d’asile déboutés sont enfermés en vue d’une éventuelle expulsion. Un thème qui intéresse depuis longtemps Michael Flynn. Il vient de publier, avec sa collègue Cecilia Cannon, un rapport sur la détention administrative en Suisse. Entretien.

Le Temps: Votre rapport sur la Suisse s’inscrit dans le cadre d’un projet global sur la détention administrative. Quel est son but?

Michael Flynn: C’est un projet que je mène depuis six ans pour l’IHEID. Comme journaliste d’investigation aux Etats-Unis, je m’intéressais en particulier aux conséquences de la politique d’immigration de mon gouvernement, sur les pays d’Amérique latine notamment. Et la question de la détention administrative est importante. J’ai voulu voir ce qui se passe ailleurs en matière d’incarcération des migrants. Un but important de ce projet, qui récolte des informations sur de nombreux pays, est de faciliter la transparence dans le domaine. Notre rôle n’est pas de dénoncer. Pour la Suisse, nous avons eu des difficultés à récolter les données…

– Justement: qu’est-ce qui vous a le plus frappé?

– L’Office fédéral des migrations nous a dit qu’il ne pouvait pas nous préciser combien de centres de ce type existent en Suisse, la détention administrative et l’exécution des renvois étant de la compétence des cantons. Un rapport du Département fédéral de justice et police fait état de 476 places, mais sans en préciser la répartition. Nous avons donc dû contacter chaque canton. Nous avons eu un problème similaire avec l’Allemagne.

– Et tous les cantons n’ont pas joué le jeu…

– Juste. Nous avons recensé 27 centres de détention administrative, répartis en différentes catégories. Mais seuls 18 cantons ont répondu de manière complète. Ceux de Berne, du Valais et des Grisons n’ont pas répondu; Nidwald a refusé de nous transmettre des informations, Soleure a indiqué que ces données étaient confidentielles et le Tessin et Vaud n’ont que partiellement répondu. Le Jura nous a demandé des informations supplémentaires, mais ne nous a par la suite pas fourni de réponse. Ce manque de transparence est inquiétant.

– Globalement, comment la Suisse se situe-t-elle par rapport aux pays voisins?

– Les pratiques sont très contrastées entre les cantons, donc comparer n’est pas évident. Frambois a par exemple plutôt la réputation d’offrir des conditions correctes: contrairement à d’autres centres de détention administrative, les déboutés ne sont pas enfermés dans leur cellule durant la journée. Mais prenons la durée moyenne de séjour: en Suisse, elle est de 24 jours contre 10 pour la France (chiffres de 2009). En revanche, le chiffre est bien plus élevé pour le Royaume-Uni: il est de 100. Et il n’y existe pas de limite maximum, alors qu’en Suisse, la détention administrative ne peut pas excéder 18 mois.

– Constatez-vous une évolution négative en matière dans le domaine?

– Encore une fois, notre rôle n’est pas de dénoncer. Mais la criminalisation grandissante des violations des lois sur l’immigration m’inquiète. L’Italie a par exemple adopté en 2009 une loi qui qualifie l’immigration clandestine de délit (l’entrée ou le séjour illégaux sont passibles d’une amende de 5000 à 10 000 euros). Une tendance à laquelle la Suisse n’échappe pas. Selon des experts en droits de l’homme, les personnes en détention administrative devraient par ailleurs être retenues dans des structures indépendantes et pas dans les mêmes bâtiments que des détenus relevant du droit pénal. Or ce n’est pas toujours le cas.

Valérie de Graffenried dans le Temps

 

Un antisémite à la tête d’un théâtre de Budapest

L’extrémisme de droite menace la société hongroise. Il occupe de plus en plus le terrain politique et s’immisce désormais sur la scène artistique, suscitant la colère des milieux culturels.

La nomination le 7 octobre à la tête du Nouveau théâtre de Budapest (Uj Szinhaz, en hongrois) de deux personnalités de l’extrême droite a suscité la colère des milieux culturels. La commission avait dans un premier temps décidé de reconduire le directeur sortant, Istvan Marta, mais c’était sans compter l’avis du maire de Budapest, Istvan Tarlos, qui a usé de son droit de veto pour faire passer un tandem controversé: l’acteur György Dörner et le dramaturge et politicien Istvan Csurka.

Contexte délétère

Cette désignation intervient dans un contexte délétère. La première partie de l’année a été marquée par une loi contre la liberté de la presse, que seules les pressions de la communauté européenne ont permis d’amender. Accusé de ne pas faire respecter les droits que garantit pourtant la Constitution européenne, le premier ministre Viktor Orban a préféré reculer pour éviter une confrontation. Ces derniers mois ont vu une recrudescence des violences contre les Roms et la promulgation de nouvelles lois contre la mendicité et le vagabondage. De plus en plus, les extrémistes de droite occupent le terrain politique et ils s’immiscent désormais sur la scène artistique.

György Dörner a longtemps milité au sein du Jobbik, un parti d’extrême droite qui est entré au parlement en mai 2010 avec près de 17% des voix aux législatives. Comédien médiocre, il s’est replié sur le doublage des voix d’acteurs américains connus parmi lesquels Eddie Murphy et Bruce Willis. Ses prises de position contre la dépravation de la scène théâtrale hongroise l’ont assis comme chantre des valeurs nationalistes.

György Dörner a choisi Istvan Csurka comme administrateur. Ce dernier est une figure emblématique de l’extrême droite et dirige le Parti hongrois de la justice et de la vie (MIEP). Il milite en faveur des minorités hongroises séparées de la mère patrie par le traité de Trianon (en 1920) et a fait de ce thème, en tant que dramaturge, le leitmotiv de son théâtre. Ses anathèmes antisémites ont fait sa notoriété.

Dans son dossier de candidature, Istvan Marta, le directeur sortant, a exposé ses priorités et donné sa programmation à venir sur 200 pages: «Je dirige depuis treize ans cette scène, et j’ai réussi à en faire un lieu populaire et, grâce à une gestion scrupuleuse, rentable, c’est un carrefour entre les répertoires magyar et international, entre diverses formes d’art.» De leur côté, Istvan Csurka et György Dörner ont livré leurs propositions politiques dans un pamphlet de 16 pages où le mot «national» revient 34 fois et «magyar» 35. Ils fustigent l’abâtardissement des milieux culturels hongrois et proposent d’en revenir à un art plus proche du cœur campagnard de la Hongrie, «l’arrière-pays». Selon Istvan Marta, au vu des dossiers, il ressort que ce ne sont pas des considérations artistiques qui ont guidé le maire de Budapest dans son choix.

Manifestation et pétition

Des milliers d’écrivains, d’artistes et d’acteurs culturels ont défilé samedi pour dire leur désapprobation et une pétition a circulé pour demander au maire de revoir sa copie. En vain. Istvan Marta s’est rendu chez le maire pour trouver une solution et l’a interrogé sur les raisons de son choix, mais, selon lui, le maire est resté mutique et a refusé de se justifier: «Les rumeurs disent que Viktor Orban est derrière le maire.» D’où qu’elle vienne, cette nomination permet au maire et à son parti, le Fidesz, de flatter les électeurs sensibles aux thèmes nationalistes. D’autre part, elle donne des gages aux partis les plus extrémistes et peut-être même initie un rapprochement opportuniste.

L’extrême droite se félicite de cette nomination. Le Jobbik a pris pour cible les milieux culturels du pays. Il fait pression depuis une année pour que soit révoqué le directeur du Théâtre national de Budapest, Robert Alföldi, dont le mandat court pourtant jusqu’en 2013. Les députés du Jobbik critiquent son manque de patriotisme et, pour railler son homosexualité, l’appellent ouvertement Roberta.

Le responsable de l’Association des communautés juives de Hongrie, Peter Feldmajer, pense qu’une étape a été franchie: «Une passerelle a été jetée entre la droite conservatrice, dont le maire fait partie, et un élément antidémocratique et antisémite, Istvan Csurka.» Tout n’est pas encore perdu pour Istvan Marta. «Le parti LMP a entrepris une démarche légale pour contester la décision du maire. J’espère encore.»

De son côté, György Dörner a annoncé qu’il annulerait les pièces programmées par son prédécesseur. Les spectateurs ne verront peut-être pas la Montagne magique de l’écrivain allemand Thomas Mann, programmée pour la mi-février, en adaptation théâtrale hongroise.

Boris Mabillard dans le Temps