mercredi 24 juin 2009

Un an après: « l'aide d'urgence » opprime toujours les femmes déboutées de l'asile

Une année est vite passée. Elle aura pourtant été longue pour les centaines de femmes de ce canton qui se trouvent toujours soumises au régime dit d'aide d'urgence s'appliquant depuis janvier 2008 à toutes les personnes déboutées de l'asile.

En juin 2008, plusieurs femmes dans cette situation dénonçaient par une lettre ouverte* aux autorités, aux médias et à la population, l'indignité de ce régime qui les détruit. Aujourd’hui, la longue durée de ce système inhumain a aggravé leur état de santé. Plusieurs se trouvent en dépression et doivent ingérer des médicaments. Durant cette année, elles ont continué de subir des pressions aux déménagements forcés: plusieurs fois ballotées ou menacées de l'être, d'un centre à l'autre, d'un appartement vers un centre. Elles ont pâti au quotidien de l'univers semi-carcéral des centres et de la présence intrusive d'hommes de la sécurité. Elles ont continué à vivre dans la peur constante d'interventions policières en vue de leur détention et de leur renvoi.

Elles ont vécu un an de plus sans pouvoir travailler. Exclues de l'aide sociale, elles ne reçoivent de l'aide qu'en nature ou 9.50 francs par jour pour certaines. Elle sont exploitées dans des programmes «d'occupation », comme pour le nettoyage des centres, payé 4 fr. l'heure, représentant néanmoins la seule possibilité de gagner un peu d'argent. Durant une année supplémentaire, sans garderies, elles ont été confinées avec leurs enfants en chambre dans un centre, ou dans des appartements que certaines ont obtenu par leur lutte, mais ces immeubles-ghettos (micros-studios sans meubles dans des quartiers périphériques) ne changent pas le fond du problème.

Notre collectif féministe, les Sorcières en colère, a réagi à leur lettre, en les soutenant par notre « Appel solidaire avec les femmes résidentes des centres d'aide d'urgence ». Et nous le rappelons encore: « l'aide d'urgence », cette mesure de contrainte déguisée en assistance, s'ajoute pour les femmes aux discriminations spécifiques vécues dans leur parcours d'asile, dans la procédure en Suisse et dans les possibilités d'intégration ou de régularisation.

Aujourd'hui nous revenons sur cet appel, pour redire notre indignation, notre solidarité et rappeler à la population, aux médias, aux autorités de ce canton, que les déboutées continuent d'être les victimes d'une politique d'asile irrespectueuse des droits fondamentaux, et en particulier des droits des femmes définis dans la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes (CEDEF), ratifiée par la Suisse.

Ces femmes sont en Suisse depuis des années. Venues pour trouver une vie digne, elles y ont reconstruit un bout d'espoir, des ami·e·s, une famille, et participent de cette société. Elles doivent pouvoir vivre normalement et retrouver les moyens de leur autonomie. Nous continuons d'exiger leur sortie immédiate de l'aide d'urgence, leur droit au travail et leur régularisation.

Sorcières en colère, Lausanne, 25 juin 2009. Contact: infos@sorcieres.org



* « Lettre ouverte des femmes NEM et déboutées résidentes du centre d’aide d’urgence du Simplon », Lausanne, le 30 juin 2008. Voir: www.droitderester.ch

Les étrangers doivent être refoulés en cas de délit grave



Les étrangers qui ont commis une infraction pénale grave doivent être refoulés de manière conséquente. Par ailleurs, l'autorisation d'établissement ne doit être octroyée qu'en cas de bonne intégration. Plus...


(ats) 13:10 24.06.2009

Renvoyer les étrangers condamnés à un an pour un délit très grave

Les criminels étrangers qui écopent d'une peine de prison d'un an au moins pour un délit très grave devraient être renvoyés de Suisse. Le Conseil fédéral a durci son contre-projet à l'initiative populaire de l'UDC à l'issue de la consultation.

Dorénavant, les criminels étrangers qui ont été jugés pour une infraction passible d'une peine privative de liberté d'un an au moins doivent aussi être concernés. Il s'agit toujours de délits très graves comme l'assassinat, le meurtre, le viol, le brigandage qualifié, la prise d'otage ou l'incendie intentionnel, a précisé le Conseil fédéral.

Ce dernier a confirmé dans le même temps que la décision de renvoyer un étranger criminel devra respecter le principe de proportionnalité. Il a également entériné sa volonté de limiter l'octroi d'une autorisation d'établissement aux personnes qui sont bien intégrées.



Office fédéral des migrations
Département fédéral de justice et police

Le Conseil fédéral adopte le message concernant l’initiative sur le renvoi et le contre-projet

Communiqués, DFJP, 24.06.2009

Berne. Aujourd’hui, le Conseil fédéral a adopté le message concernant l’initiative populaire « Pour le renvoi des étrangers criminels (initiative sur le renvoi) » et le contre-projet indirect. Le contre-projet indirect à l’initiative sur le renvoi reprend le souhait des auteurs de l’initiative sans entrer en contradiction avec la Constitution fédérale ni avec le droit international public. Les autorisations relevant du droit des étrangers doivent être systématiquement révoquées en cas d’infraction pénale grave. De plus, l’autorisation d’établissement ne doit plus être octroyée que si l’étranger est bien intégré.

Documents


Le Conseil fédéral estime que l’initiative populaire « Pour le renvoi des étrangers criminels (initiative sur le renvoi) » n’est pas contraire au droit international public impératif et qu’elle peut être interprétée dans le respect du principe de « non-refoulement ». Cependant, appliquer l’initiative entraînerait des conflits avec des garanties inscrites dans la Constitution fédérale, notamment le principe de la proportionnalité ou la protection de la vie privée et familiale. Qui plus est, d’importantes dispositions du droit international public non impératif ne pourraient plus être respectées, par exemple certaines clauses de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et de l’accord sur la libre circulation des personnes conclu avec l’UE. Le Conseil fédéral recommande donc au Parlement de rejeter l’initiative populaire.

Un contre-projet indirect lui est opposé. Il a fait l’objet d’une procédure de consultation du 15 janvier au 15 avril 2009. A quelques exceptions près, les participants à la consultation rejettent l’initiative populaire. Cependant, ils souscrivent, sur le principe, au renvoi des étrangers ayant commis des délits graves. Une nette majorité des cantons, la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP), l’Union des villes suisses et l’Association des communes suisses ainsi que les organisations patronales, notamment, sont favorables au contre-projet. Dans le message qu’il vient d’adopter, le Conseil fédéral maintient les principes du contre-projet indirect mis en consultation.

Révocation des autorisations suite à des délits graves

Le contre-projet indirect vise à uniformiser et simplifier les réglementations concernant la révocation des autorisations relevant du droit des étrangers. En cas de peine privative de liberté de deux ans au moins, le pouvoir d’appréciation des autorités devrait être limité. Par rapport au projet mis en consultation, cette limitation est étendue aux cas où une personne étrangère a été condamnée par un jugement passé en force pour une infraction passible d’une peine privative de liberté d’un an au moins. Il s’agit dès lors toujours d’infractions très graves portant atteinte, notamment, à l’intégrité physique, psychique ou sexuelle de la victime (assassinat, meurtre, viol, brigandage qualifié, prise d’otage, incendie intentionnel, traite d’êtres humains qualifiée, génocide). Demeurent réservés le principe constitutionnel de la proportionnalité des mesures prises par l’autorité et le droit international public.

Octroi de l’autorisation d’établissement seulement en cas de bonne intégration

Selon le contre-projet indirect, l’autorisation d’établissement ne doit plus être octroyée qu’en cas de bonne intégration. Il en va de même pour les conjoints étrangers admis au titre du regroupement familial. Une bonne intégration présuppose le respect de l’ordre juridique suisse, l’adhésion aux valeurs fondamentales de la Constitution fédérale et la volonté de participer à la vie économique et d’acquérir une formation. Les connaissances linguistiques revêtent également une grande importance. Une meilleure évaluation de l’intégration avant l’octroi de l’autorisation d’établissement permet également d’éviter de longues procédures de révocation.

Un permis de séjour biométrique pour les étrangers ?

(ats) 10:35 24.06.2009
Les étrangers en Suisse auront un permis de séjour biométrique

Image © Keystone


Les permis de séjour des étrangers vivant en Suisse seront dotés à l'avenir d'une puce contenant une image du visage et deux empreintes digitales. Ce nouveau développement de l'acquis de Schengen, en consultation jusqu'au 7 octobre, vise à éviter la falsification.

Le Conseil fédéral a approuvé l'avant-projet de modification de la loi sur les étrangers et d'autres dispositions légales. La Confédération a jusqu'au 20 mai 2011 pour émettre un titre de séjour biométrique pour les étrangers. Les futures exigences techniques de ces documents sous forme de carte de crédit sont analogues à celles pour les passeports.

Les données récoltées doivent être enregistrées dans le système d'information central sur la migration (SYMIC). Le travail des autorités responsables sera ainsi facilité, tandis que les étrangers pourront faire prolonger leur permis sans devoir de nouveau se soumettre à la procédure de saisie biométrique et payer une taxe biométrique supplémentaire.

Seules les autorités autorisées à contrôler les titres de séjour peuvent accéder aux données biométriques pour vérifier l'authenticité du document et l'identité de son titulaire. Ce durcissement technique s'inscrit dans l'idée d'améliorer la lutte contre l'immigration illégale.

Les nouveaux éléments de sécurité et les identificateurs biométriques devront être utilisés par tous les Etats participant à Schengen, selon un modèle uniforme de permis pour les étrangers. Par conséquent, ce sésame inclura, en plus de l'écusson suisse, le taureau symbole de l'Union européenne ainsi que le sigle UE. Une perspective qui a déjà fait bondir l'UDC.



Office fédéral des migrations
Département fédéral de justice et police

Introduction de la biométrie dans les titres de séjour pour étrangers : ouverture de la consultation

Communiqués, DFJP, 24.06.2009
http://www.bfm.admin.ch/bfm/fr/home/dokumentation/medienmitteilungen/2009/ref_2009-06-240.html

Berne. Le Conseil fédéral a ouvert aujourd’hui la procédure de consultation relative au développement de l’acquis de Schengen concernant l’introduction de la biométrie dans les titres de séjour pour étrangers. Les modifications nécessaires portent sur la loi fédérale sur les étrangers (LEtr) et sur la loi fédérale sur le système d'information commun aux domaines des étrangers et de l'asile (LDEA).

Le Règlement (CE) n° 380/2008 du 18 avril 2008 constitue un développement de l’acquis de Schengen concernant les titres de séjour. Il vise à déterminer les nouveaux éléments de sécurité et les identificateurs biométriques que les Etats membres doivent utiliser dans un modèle uniforme de titre de séjour pour les ressortissants d’Etats tiers. Afin d’éviter les falsifications, le titre de séjour pour étrangers doit satisfaire à des exigences techniques très élevées. Il s’agit notamment de lutter contre l’immigration illégale et le séjour irrégulier.

Le titre de séjour pour étrangers doit contenir, enregistrées dans une puce, une image faciale, ainsi que deux images d’empreintes digitales de la personne concernée. Seules les autorités autorisées à contrôler les titres de séjour peuvent accéder aux données biométriques pour vérifier l’authenticité du document et l'identité de son titulaire.

Les données biométriques recueillies doivent être enregistrées dans le système d’information central sur la migration (SYMIC), de manière à permettre aux bénéficiaires d’un titre de séjour de le renouveler sans avoir à subir une nouvelle procédure de saisie biométrique et sans devoir s'acquitter d'une taxe biométrique supplémentaire. Le travail des autorités responsables s’en trouve également facilité. Les empreintes digitales d’une personne ne sont pas comparées avec les données centralisées dans SYMIC. Les vérifications nécessaires ne sont effectuées qu’au moyen des données biométriques enregistrées sur la puce du titre de séjour.

La Suisse dispose d’un délai courant jusqu’au 20 mai 2011 pour émettre un titre de séjour biométrique pour étrangers. La Suisse s’étant engagée à reprendre tous les actes juridiques constituant un développement de l’acquis de Schengen, les bases légales qui s’y rapportent devront être adaptées d’ici à cette date. La mise en œuvre du règlement de l’UE requiert une adaptation de la LEtr, de la LDEA et des dispositions cantonales d’exécution concernées.

La procédure de consultation prendra fin le 7 octobre 2009.

Les étrangers aussi devront montrer patte blanche pour obtenir leurs documents.Les étrangers aussi devront montrer patte blanche pour obtenir leurs documents.

Au pays des migrants (6) : au milieu du non-droit, l’information sur les droits

http://dailynord.fr/2009/06/au-pays-des-migrants-6-au-milieu-du-non-droit-linformation-sur-les-droits/

Par Nicolas Montard • 23 juin, 2009 • Catégorie: DailyUne, Réalités Lis moi avec webReader

La nouvelle est tombée à la fin mai. Le Haut commissariat aux réfugiés (dépendant de l'ONU) et France terre d'asile décidaient de s'implanter à Calais. L'objectif : informer le millier de migrants du littoral de leurs droits, souvent méconnus et jetés en pâture par les passeurs. Depuis trois semaines, les deux organismes ont commencé leur action. Dans le cadre de notre grand format, nous les avons retrouvés à l'heure de la distribution du repas aux migrants.

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Un mercredi de fin de printemps. Retour au pays des migrants en début d'après-midi sur le lieu de distribution du repas par l'association La Belle Etoile. A part le soleil, rien n'a vraiment changé depuis notre dernier passage un mois plus tôt (à lire ici). Toujours les bénévoles et leur camion. Toujours les migrants qui peinent à faire les deux files requises. Toujours Patrice, le doyen de La Belle Etoile pour veiller au grain. Seuls les visages des réfugiés évoluent. Car on reconnaît sans peine ceux qui viennent d'arriver. Encore frais et pleins d'espoirs. Et les autres croisés au fil des semaines : regards plus vagues, traits tirés, yeux fiévreux, barbes hirsutes.

« Informer les migrants de leurs droits»

14h et quelques. Une camionnette se gare un peu à l'écart sur ce terrain vague à quelques centaines de mètres du beffroi de Calais. Plusieurs personnes en descendent. Certains avec un chasuble bleu siglé UNHCR (Agence des Nations Unies pour les réfugiés). Ou de larges autocollants France terre d'asile. La nouveauté est là : depuis le début du mois, l'agence des Nations Unies et l'association française disposent d'une permanence quelques jours par semaine à Calais. « C'était une décision mûrement réfléchie, expliquent conjointement Radoslaw Ficek, responsable-adjoint chez France terre d'asile et Marie-Noëlle Thirode, détachée du HCR. Notre objectif est d'informer les migrants de leurs droits. Et des démarches qu'ils peuvent faire.»

La distribution de nourriture suit son cours. Les nouveaux arrivants ne perdent pas de temps. Depuis plusieurs jours déjà, ils profitent de ce moment pour tisser des liens avec les réfugiés. Des liasses de photocopies en main, ils se dirigent vers les différents groupes. Quand ce ne sont pas les migrants qui viennent à eux. « Ils commencent à nous connaître, à savoir qui nous sommes, qui nous représentons, nous confirme-t-on. Et certains commencent à se poser des questions…» A savoir : est-ce que l'Angleterre, but ultime de leur voyage, est finalement une si bonne solution que ça ? Est-ce que certains d'entre eux n'auraient pas intérêt à demander l'aide de la France ? Ou à rentrer chez eux, en témoigne la question de ce Pakistanais à Marie-Noëlle Thirode : « Existe-t-il une aide au retour ?»

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Les mineurs sous la pression familiale

Jean-François, l'un des membres de l'équipe, s'installe par terre en compagnie de deux migrants en train de manger leurs pâtes. Très vite, naturellement, la conversation s'engage en anglais. D'autres Afghans s'en mêlent. Le jeune homme donne les photocopies. Quelques informations sur les droits des réfugiés. L'un d'entre eux hoche la tête, apparemment convaincu par le discours de Jean-François. Car ce que ne savent souvent pas les migrants, c'est que nombre d'entre eux peuvent demander une protection. Eu égard à leur nationalité, Afghans, Erythréens ou Soudanais par exemple. « Si on peut prouver que le réfugié est en danger dans son pays, les conventions internationales doivent s'appliquer sur son cas, résume Radoslaw Ficek. Seulement, peu le savent : les réseaux de passeurs ont bien sûr tout intérêt à discréditer notre action et à désinformer.»

On se glisse derrière l'interprète du groupe. Le voilà qui discute avec un groupe de trois hommes. A priori soucieux : « Il faut le reconnaître : leur première inquiétude, c'est la question des empreintes digitales. Là, il y a un complet manque d'informations.» Inquiétude légitime des migrants : avec Dublin 2, une convention qui détermine les compétences européennes en terme d'asile, si les migrants ont laissé leurs empreintes dans un pays d'Europe avant d'arriver en Angleterre et qu'ils se font prendre de l'autre côté de la Manche, ils seront renvoyés dans ce pays d'origine. A savoir le plus souvent, les portes d'entrées sur l'Europe, l'Italie, peu amène à l'égard des réfugiés, ou la Grèce, un problème plus important selon Radoslaw Ficek et Marie-Noëlle Thirode : « C'est le pays qui nous préoccupe le plus. Il ne respecte pas les mesures internationales. Pour vous dire, il y a deux ans, moins d'1% des demandes d'asiles étaient acceptées là-bas. Aujourd'hui, on a dépassé les 1%… Les réfugiés ont 30 fois plus de chance d'obtenir cet asile en France. Alors qu'ici, ce n'est pourtant pas facile…» Encore plus quand ils sont mineurs, une part de plus en plus importante de la population des migrants : » Le problème avec les mineurs, c'est qu'ils ne prennent pas la décision seuls. Souvent, les familles sont au pays et veulent qu'ils passent en Angleterre.»

« Je veux aller en Angleterre. Je réussirai.»

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Une tape sur notre épaule : Youssaf, un Afghan que nous avions déjà rencontré. « Ça va ? Tu as pu nous faire les photos ?« , nous demande-t-il. On sort le paquet de photos prises lors de notre dernier reportage. Immédiatemment, un petit attroupement. Chacun récupère la sienne, celles des amis ou compagnons d'infortune, au choix. Avant de se réjouir sur l'une d'entre elles : « Lui, tu t'en souviens ? Je crois qu'il a réussi à passer, nous n'avons plus de nouvelles.» Content pour lui ? « Bien sûr ! Bientôt, c'est mon tour.» Car pour lui, pour le moment, HCR, France terre d'asile ou pas, son but, c'est l'autre côté de la Manche et rien d'autre : « Je veux aller en Angleterre. Je réussirai.»

La distribution de nourriture est finie. Les migrants s'éparpillent très vite. Rentrant dans leurs squats ou campements en attendant les passages de la soirée. En reste quelques-uns, au bout de ce terrain vague. Assis autour d'un membre de France terre d'asile. Quelques dernières informations pendant que les responsables essaient de régler la situation d'un Afghan muni d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière. « On va s'en occuper. On va passer un coup de fil à un relais sur place pour qu'il prenne en charge son cas.» Pour le moment, le HCR et France terre d'asile doivent se rendre dans la « jungle» principale. Leur premier contact là-bas, au pays des Afghans. Certainement pas le dernier…

Retrouvez les précédents reportages de ce grand format :
- Au pays des migrants (1) : les étoiles du midi
- Au pays des migrants (2) : les femmes et les enfants dehors
- Au pays des migrants (3) : la "jungle", en attendant
- Au pays des migrants (4) : une vie dans un sac poubelle
- Au pays des migrants (5) : Norrent-Fontes, base arrière vers l'Angleterre

Kosovo: l’ONU et les autorités kosovares doivent d’urgence fermer les camps contaminés

Les Nations Unies et les autorités du Kosovo doivent fermer sans délai les camps contaminés au plomb occupés par des Roms déplacés internes, reloger leurs habitants, et fournir un traitement médical pour l'empoisonnement par le plomb, a indiqué Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui.

Le rapport de 68 pages, « Poisoned by Lead: A Health and Human Rights Crisis in Mitrovica's Roma Camps » (« Contaminés par le plomb : Crise  sanitaire et des droits humains dans les camps roms de Mitrovica »), décrit  l'incapacité de l'ONU et d'autres autorités depuis dix ans à offrir aux Roms un logement et un traitement médical corrects, et les conséquences dévastatrices pour la santé des occupants des camps.

« Les Roms sont coincés dans ces camps contaminés depuis dix ans », a déclaré Wanda Troszczynska-van Genderen, chercheuse pour la Péninsule des Balkans à Human Rights Watch.  « Combien de temps les fonctionnaires de l'ONU et du Kosovo le supporteraient-ils si leurs propres familles étaient forcées de vivre dans un endroit pareil ? »

Le quartier rom de la ville de Mitrovica, dans le nord du pays, a été attaqué par des membres du groupe ethnique albanais en juin 1999. Au 24 juin, le quartier avait été mis à sac et réduit en cendres, et ses 8 000 habitants avaient pris la fuite. Nombre d'entre eux ont été relogés par l'ONU dans des camps situés dans une zone fortement contaminée à proximité d'une mine de plomb désaffectée. Cette réinstallation devait originellement n'être que temporaire, néanmoins environ 670 Roms vivent encore dans des camps proches du site, avec des conséquences préjudiciables à leur santé.

En dépit des degrés élevés de toxicité bien connus dans les zones environnant le complexe minier désaffecté de Trepca (identifiés pour la première fois par l'ONU en 2000), tous les camps roms sauf un se trouvent à proximité immédiate des crassiers. L'autre camp est situé à Leposavic, à 45 kilomètres au nord-ouest. L'emplacement des camps et les médiocres conditions de vie qui y règnent ont porté atteinte à la santé des habitants, en particulier les enfants, qui sont vulnérables à une exposition prolongée au plomb.

« Il est clair que la contamination par le plomb a porté atteinte à la santé des personnes dans les camps », a affirmé Wanda Troszczynska-van Genderen. « Les enfants sont le plus gravement touchés, certains présentant des retards de croissance physique et mentale. »

Un contrôle sur une faible échelle pour la contamination par le plomb et un « traitement par chélation » (traitement ayant pour but d'éliminer le plomb contenu dans le sang), effectués par des médecins et des infirmières, ont eu lieu quelques fois entre 2004 et 2007, principalement sur les enfants. Contrôles et traitements étaient coordonnés par la Mission des Nations Unies au Kosovo et par l'Organisation mondiale de la santé. Mais aucun contrôle ni traitement global n'a jamais été mené à bien.

En 2007, la Mission de l'ONU a décidé d'arrêter le traitement, et le contrôle a été interrompu après la conclusion erronée (basée sur la supposition que les Roms allaient bientôt être déplacés des camps) qu'il n'était plus nécessaire. Des contrôles ultérieurs effectués par l'hôpital nord de Mitrovica, à la demande d'habitants des camps, ont révélé que certains enfants présentaient toujours des taux élevés de plomb dans le sang. Des taux de plomb excessifs dans le corps humains peuvent entraîner des dommages pour les systèmes nerveux et reproducteur, ainsi que des disfonctionnements du rein. Des tauix très élevés de plomb entraînent le coma et la mort. Le plomb est particulièrement nocif pour les enfants, car il peut entraîner des dommages irréversibles pour le cerveau.

Pratiquement aucune attention n'a été accordée à la situation sanitaire d'urgence dans les camps jusqu'en 2004, lorsque des activistes roms locaux et internationaux ont commencé à exprimer leurs préoccupations dans les médias, et ont cherché à obtenir des actions en entamant des procédures juridiques (qui ont finalement échoué) dans les tribunaux du Kosovo et à la Cour européenne des droits de l'homme.

En 2006, sous la pression des organismes des droits humains des Nations Unies et des organisations non gouvernementales ainsi que suite à une couverture médiatique critique, la mission de l'ONU a fermé deux des trois camps les plus contaminés, Zitkovac et Kablare. Environ 450 habitants ont bénéficié d'une aide au retour chez eux à Mitrovica, tandis que d'autres étaient transférés dans un autre camp temporaire (Osterode). Le nouveau camp temporaire, distant de 150 mètres, est largement exposé aux toxines portées par le vent depuis les crassiers des mines de plomb, mais les autorités ont prétendu qu'il était « moins dangeureux en plomb » parce que ses surfaces bétonnées et l'eau courante atténuaient la contamination au plomb.

Le troisème camp (« Cesmin Lug ») est resté, ses habitants hésitant à déménager dans le nouveau camp temporaire parce qu'il est encore dans la zone de contamination.

Peu de choses ont été faites au cours des dix dernières années pour aider les Roms qui demeurent dans les camps à les quitter pour trouver des logements permanents, soit en retournant dans leurs anciens logements à Mitrovica, soit en allant ailleurs. Certains Roms sont retournés à Mitrovica en 2007 lors de la fermeture des deux camps, mais ils se sont rendu compte qu'ils n'y trouvaient pas de travail et qu'ils n'avaient pas accès à l'aide sociale du Kosovo, se retrouvant de ce fait sans moyens de subsistance.

En mai 2008, alors que la mission de l'ONU se préparait à réduire sa présence au Kosovo, elle a transféré sa gestion des camps restants au ministère kosovar des Communautés et des retours, qui n'a aucune stratégie pour lutter contre la crise. De plus, les camps sont situés dans une municipalité sous le contrôle de membres du groupe ethnique serbe, qui n'accepte pas les juridictions du nouveau gouvernement du Kosovo, dirigé par des membres du groupe ethnique albanais.

« L'ONU ne peut pas se laver les mains de ce problème », a insisté Wanda Troszczynska-van Genderen. « Il est vital que la mission de l'ONU et ses partenaires internationaux travaillent avec les autorités au Kosovo, y compris dans les municipalités sous contrôle serbe, pour résoudre la crise. »

Le rapport de Human Rights Watch recommande que l'équipe de l'ONU au Kosovo prenne des mesures pour organiser une solution à long terme, notamment :

  • L'évacuation médicale urgente des habitants actuels du camp vers des logements temporaires acceptables ;
  • La fermeture permanente des camps restants ;
  • Le traitement urgent contre la contamination au plomb de tous les habitants anciens et actuels ;
  • Une solution de logement à long terme basée sur les souhaits des habitants ; et
  • L'accès à l'aide sociale, au traitement médical, à l'éducation et à l'emploi.

Un article trouvé sur le site de Human Rights Watch