lundi 27 juin 2005

"Je ne le licencierai pas !"



«Je ne le licencierai pas!» Il ne s’agit pas ici d’une résistance aux coupes dans le personnel en EMS, que les établissements vaudois devront faire au début 2006, si l’Etat leur impose une seconde tranche d’économies de 12 ou 15 millions. En ce mois de juin 2005, les directeurs d’EMS ont été sommés de licencier les requérants déboutés qui travaillent dans leur maison. Ils s’y refusent, pour certains en tout cas, une réaction toute à leur honneur même si le risque semble minime: une amende de quelques milliers de francs.
Beaucoup de requérants et de réfugiés travaillent en effet en EMS comme aides-infirmiers ou aides-soignants, au terme d’une formation plus poussée. Ils sont bien souvent les soignants les plus proches des résidants puisqu’ils leur servent les repas, les aident à faire leur toilette, leur tiennent lieu de confidents.
Parmi eux, au hasard des rencontres, deux hommes très différents de l’image du requérant a priori suspect. Il y a quatre ans, Ali arrive en Suisse d’un pays du Proche-Orient où il a été torturé pour ses convictions
politiques. Très vite, il s’adapte à un nouveau travail, très éloigné de sa formation commerciale. Il apprend le français, se forme en cours d’emploi et, d’aide-infirmier, devient aidesoignant certifié. Il vient de se marier, un «vrai» mariage d’amour avec une «vraie» Suisse romande. Plusieurs résidants ravis étaient conviés à la noce.
François, lui, vient d’Afrique noire et, après huit ans passés en Suisse, il devrait enfin recevoir son permis B dans quelques mois. Lui aussi jouissait d’un statut social plus élevé dans son pays. Ici, il a multiplié les perfectionnements dans le domaine de la santé, sans pouvoir les faire reconnaître dans un emploi puisqu’il n’a eu jusqu’ici qu’un permis très provisoire.

Aide-soignant en EMS, il a créé une association pour soutenir sa région natale. Il organise des fêtes pour récolter des fonds; une ambulance, des ordinateurs et du matériel médical sont partis vers des personnes de confiance sur place. Déplacer l’action du soutien humanitaire à l’aide au développement sera plus ardu mais François n’en démord pas: il passe ses vacances à envoyer des lettres et solliciter des appuis.
Je les regarde, ces deux hommes en blouse blanche qui, tous deux, s’étaient déjà occupés de personnes âgées dans leur pays. Et j’admire l’évidence toute simple que semble être pour eux le fait d’aider un aîné à faire sa toilette.

Lire l'article complet d'Isabelle Guisan dans 24heures.