mardi 16 novembre 2010

Un ex-juge fédéral menacé de mort

Président du Tribunal fédéral en 2005 et 2006, Giusep Nay a reçu un courrier extrêmement désagréable pour avoir pris position publiquement contre l’initiative de l’UDC.

L’ancien juge fédéral Giusep Nay, qui a présidé la Cour suprême en 2005 et 2006, année où il s’est retiré, a été menacé de mort suite aux critiques publiques qu’il a émises sur l’initiative UDC demandant le renvoi systématique des délinquants étrangers.

L’intéressé confirme au Temps avoir reçu en octobre un courrier anonyme écrit à l’ordinateur dans une langue maîtrisée, lui annonçant qu’il avait été condamné à mort, et que les bourreaux étaient en marche. S’il ne prend pas trop au sérieux la missive, la première du genre dans sa carrière, Giusep Nay a décidé de la rendre publique pour montrer les dérapages et le climat de haine auxquels mènent les campagnes basées sur l’exclusion et la stigmatisation d’une catégorie de la population.

Depuis qu’il l’a fait, il a rencontré plusieurs personnes qui ont subi des actes similaires. Par ailleurs, une lectrice bâloise écrit avoir reçu des courriels et téléphones de menaces pour avoir pris position contre l’UDC, ce qui l’a amenée à être «plus prudente».

Tête de Turc favorite de l’UDC, Georg Kreis, président de la Commission fédérale contre le racisme, a été régulièrement arrosé de menaces de mort, y compris une lettre contenant une poudre inoffensive mais évoquant l’anthrax. Leur nombre a diminué depuis qu’il a retiré son adresse de l’annuaire. Giusep Nay est une cible privilégiée de l’UDC depuis qu’il dénonce le démantèlement progressif de l’Etat de droit par les initiatives du parti sur la naturalisation par les urnes ou contre les minarets.

Jean-Claude Péclet dans le Temps

Initiative UDC, nouvel écueil bilatéral

Micheline Calmy-Rey prévoit, en cas d’acceptation, «des difficultés inéluctables». «Une expulsion automatique des étrangers n’est pas compatible avec l’accord entre la Suisse et la Communauté européenne sur la libre circulation des personnes.»

De passage à Bruxelles pour la célébration du 50e anniversaire de la Mission suisse auprès de l’Union européenne, Micheline Calmy-Rey a choisi d’aborder de front le nouvel écueil bilatéral assuré de survenir si l’initiative soumise à référendum le 28 novembre sur le renvoi des étrangers criminels est adoptée: «Seul un examen de la proportionnalité dans chaque cas d’espèce, tenant notamment compte des circonstances familiales, satisfait aux prescriptions de l’accord, a expliqué, dans son discours, la cheffe des Affaires étrangères. En cas d’acceptation, les difficultés seront inéluctables.»

L’évocation de ce risque d’un nouvel écueil bilatéral est symbolique. «Le sens de ma présence est de faire comprendre comment fonctionnent la Suisse et sa démocratie», a poursuivi la conseillère fédérale, pour qui certaines initiatives sont «préjudiciables lorsqu’elles contreviennent aux engagements internationaux de la Confédération». Une franchise politiquement avisée, après l’émotion déjà suscitée par l’initiative sur l’interdiction des minarets, notamment au sein du Parlement européen, voisin de la Mission suisse à Bruxelles. «Je tenais à évoquer cette question, a justifié la ministre devant la presse, car notre système démocratique et nos institutions sont un facteur identitaire pour une Suisse multiculturelle.»

«Solution horizontale»

Venue spécialement dans la capitale belge, Micheline Calmy-Rey a répété l’attachement de la Confédération à la voie bilatérale et son souhait de voir le groupe de travail institutionnel Suisse-UE conclure ses discussions avant la fin décembre. Les experts des deux parties devraient se réunir encore au moins deux fois. Ils n’accoucheront sans doute pas de propositions communes mais devraient esquisser «un terrain d’entente» pour une «solution horizontale» qui permettrait de rendre plus dynamiques les futurs accords bilatéraux, en intégrant une meilleure prise en compte de l’acquis communautaire.

Ces pourparlers exploratoires devront aussi tenir compte des conclusions que doit rendre, début décembre, le Conseil de l’UE (représentant les pays membres) sur les relations des Vingt-Sept avec la Suisse. Appelant une nouvelle fois de ses vœux des solutions institutionnelles «créatives», Micheline Calmy-Rey a en revanche refusé de se prononcer, au-delà de ce premier tour d’horizon, sur le calendrier des futures négociations.

Richard Werly, Bruxelles, dans le Temps

La mendicité est désormais interdite sur la Riviera

Voté en avril et avalisé par le canton en juin, le règlement intercommunal de police interdit toute mendicité depuis le 1er novembre.

Reportage de La Télé signé Carole Pantet

Sur la Riviera, ils sont une quinzaine. Les mendiants tendent la main à Vevey et Montreux, aux abords des gares CFF surtout. Or depuis le début du mois, ils ne sont plus les bienvenus dans une région qui devient ainsi la première du canton à interdire la mendicité.

Hier pourtant, on mendiait encore à Vevey. «Nous allons prévenir les mendiants de la mise en place de la disposition via un dépliant qui est actuellement en cours d’impression. On va l’avoir encore aujourd’hui ou demain (ndlr: hier ou aujourd’hui)», explique le capitaine Ruben Melikian, chef opérationnel de Police Riviera. Le document, qui affiche un logo explicite, est rédigé en cinq langues: français, italien, allemand, anglais et roumain.

Les agents de Police Riviera appliqueront le nouveau règlement intercommunal. On y lit qu’il est interdit à toute personne de s’adonner à la mendicité, de même que de charger de mendier des mineurs ou des personnes placées sous son autorité. Le document a été avalisé par le Conseil intercommunal de Sécurité Riviera, et par le canton.

Différents contrôles

«Les services de police effectueront un premier contrôle d’identité. Si une récidive est constatée, le contrevenant sera convoqué au poste de police. Puis dénoncé à la commission de police», avertit le policier.

Quelles amendes risquent les contrevenants? Le règlement prévoit 500 francs pour une première contravention, 1000 francs en cas de répétition. «Ce qui ne signifie pas que nous irons jusque-là. Il faut d’abord voir ce qu’ils possèdent sur eux en argent liquide avant de fixer le montant effectif», indique Ruben Melikian.

A noter que les musiciens de rue, ou artistes jugés comme tels, sont au bénéfice d’une patente accordée par la police du commerce et ne sont donc pas assimilés à des mendiants. La notion de mendicité est définie par le Tribunal fédéral comme étant le fait de s’adresser à autrui pour solliciter une aide, généralement financière, sans contre-prestation.

Ceux qui utilisent, quelquefois à tort, un instrument de musique sont convoqués au poste de police. «S’ils sont capables de jouer un ou deux morceaux, ils reçoivent une patente», précise Ruben Melikian.

Clivage droite-gauche

Le débat sur la mendicité fait grand bruit depuis plusieurs années sur la Riviera. Sujet sensible et ô combien émotionnel, il a été intégré, à l’instar de la problématique des caméras de surveillance, dans la réflexion qui a mené à l’élaboration du règlement intercommunal. Objet d’un important clivage droite-gauche, l’article 78 avait été approuvé en avril par 52% des conseillers.

Le règlement avait été attaqué en juin auprès de la Cour constitutionnelle par Dominique Epp, conseiller de l’association de communes et municipal de Saint-Légier au sujet de trois articles relatifs aux animaux. Débouté le 3 novembre, l’édile ne fera pas recours au Tribunal fédéral. En revanche, les trois articles attaqués ne seront applicables qu’à l’issue du délai de recours, soit le 3 décembre.

Christophe Boillat dans 24 Heures