jeudi 16 octobre 2008

Une pétition pour que Nyon soutienne les sans-papiers

Hier matin, le Collectif de soutien et de défense des sans-papiers de La Côte a déposé plus de sept cents signatures à l’administration communale nyonnaise. Un article de Karen Gay des Combes dans 24 Heures.

Le collectif représenté par Philippe Sauvin, Ramush Shabani et Pierre Strauss (de g. à dr.) a remis la pétition à Sarah Huber, secrétaire municipale. GEORGES MEYRAT


«Nous sommes ravis d’avoir re­cueilli autant de signatures en si peu de temps. Cela nous prouve l’ouverture d’esprit des Nyonnais», explique Philippe Sauvin, syndicaliste et membre du Collectif de soutien aux sanspapiers de La Côte. L’asso­ciation demande aux autorités de la ville de soutenir publique­ment la régularisation des tra­vailleurs sans statut légal. De­puis plus d’un mois, les mem­bres du collectif se sont organisés pour aller à la ren­contre des habitants. Résultat: 710 paraphes.
Une action régionale

Suite au succès rencontré, le comité veut réitérer son action auprès des villes de Morges, de Rolle et de Gland. Nyon a été choisie en premier car le collec­tif y est implanté depuis six ans. La volonté affichée est de créer un consensus entre les commu­nes pour faire réagir le canton. «Au niveau vaudois, tout est bloqué, nous espérons donc que si toutes les communes s’asso­cient, les hautes instances ne refuseront plus de régulariser les mille sans-papiers résidant dans la région de La Côte», explique Pierre Strauss, ancien pasteur et membre de l’associa­tion.
Le comité espère une vérita­ble reconnaissance de toutes les personnes en situation d’irrégu­larité de la part des élus, mais aussi de la population.
A titre personnel, le vice-syn­dic Claude Dupertuis estime la requête raisonnable. Mais son éventuelle prise en considéra­tion devra faire l’objet d’une décision collégiale de la Munici­palité.

La Côte cherche désespérément un terrain pour les requérants

Les communes de La Côte sont sous pression pour répondre à l’obligation d’héberger les requérants d’asile. Pour créer le centre d’accueil qui manque à l’ouest du canton, des syndics planchent sur une solution intercommunale et modulable. Un article de Madeleine Schürch dans 24 Heures.

Pour Hans-Rudolf Kappeler,
député, le district de Nyon se doit de créer un centre d’accueil. ALAIN ROUECHE

Au chapitre de l’accueil des requérants d’asile, le district de Nyon fait figure de mauvais élève. Sur les huit centres d’hébergement col­lectif du canton, aucun ne se situe à La Côte. Et pour cause! Dans cette région privilégiée, où le prix du terrain atteint des sommets et les loyers frisent parfois le double de ceux de l’arrière-pays, l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM) peine à trouver des appartements abordables.
Or le nombre des demandes d’asile ayant augmenté de 40% en Suisse entre juillet et sep­tembre, cet organe réclame des mesures urgentes pour répon­dre aux besoins. L’une d’elles vise à réactiver les projets en souffrance dans ce Far West du canton.
«Notre priorité est au­jourd’hui de trouver un terrain pour construire un centre d’ac­cueil », résume le préfet Jean­Pierre Deriaz. La loi sur l’aide aux requérants d’asile obligeant désormais les communes de plus de 2000 habitants à trou­ver des hébergements, un groupe de travail planche de­puis l’an dernier sur le sujet.
Des petites unités
Ce printemps, en compagnie du préfet, le député libéral Hans-Rudolf Kappeler a ainsi repris son bâton de pèlerin pour convaincre les élus du district qu’ils devaient assumer leur part dans un canton qui doit accueillir 8,4% des deman­deurs d’asile. Pour l’occasion, il a ressorti un projet qui lui tient à coeur: l’installation de loge­ments pavillonnaires, modula­bles, sur une parcelle mise à disposition par une ou plu­sieurs communes. «Pour éviter une trop forte concentration et un rejet de la population, l’idéal serait de trouver des sites communs en­tre Nyon, Rolle et Aubonne, permettant de créer deux à trois unités d’accueil pour une cinquantaine de personnes cha­cune », explique celui qui est aussi syndic de Prangins.

MODULAIRE Pour construire à moindres frais dans une région où sévit la pénurie du logement, les élus veulent privilégier une construction préfabriquée et modulaire, comme ici les logements pour étudiants proches de la Bourdonnette. CHRIS BLASER, CHAVANNES-PRÈS-RENENS, LE 29 SEPTEMBRE 2004


En 2005, déjà à la tête d’un groupe de travail, il avait pro­posé de confier à une société privée active en Suisse alémani­que la construction et la ges­tion d’une telle structure. Mais l’Etat avait rejeté cette idée, puisque cette forme de contrat de leasing aurait ouvert une brèche dans le mandat réservé à l’époque à la Fondation vau­doise pour l’accueil des requé­rants d’asile (Fareas).
«La gestion privée, on oublie, mais pas un projet d’habita­tions modulaires, qui serait une excellente solution dans une région minée par la cherté et la pénurie du logement», estime Hans-Rudolf Kappeler.
Du côté de l’EVAM, on est ouvert à toute proposition. «On serait prêt à examiner une telle construction si des communes nous mettent du terrain à dis­position », confirme Patrick Bourquin, responsable de l’en­tité gérance à l’EVAM. La balle est donc dans le camp du dis­trict de Nyon.

Berne va serrer la vis aux criminels étrangers

mixremix peur de tout Le Conseil fédéral recommande de rejeter l’initiative de l’UDC pour le renvoi des délinquants étrangers. Mais il opposera un contre-projet au texte. Un article signé Serge Gumy dans 24 Heures.
L’initiative UDC pour l’ex­pulsion des criminels étrangers produit ses premiers effets. Hier, le Conseil fédéral a annoncé qu’il oppose­rait un contre-projet au texte lancé par le premier parti de Suisse. A vrai dire, il pouvait difficilement rester sans rien faire: plus de 210 000 signatures ont été déposées à Berne en mars dernier, alors que 100 000 suffi­saient à convoquer une votation fédérale!
Concrètement, les services d’Eveline Widmer-Schlumpf vont s’atteler à une révision de la loi fédérale sur les étrangers. Dans quelle direction le Département de justice et police travaillera­t- il? Trop tôt pour le dire, répond sa porte-parole Brigitte Hauser­Suess, qui indique simplement «que le contre-projet doit notam­ment permettre d’unifier la prati­que des cantons et de préciser les motifs de révocation en matière d’autorisations de séjour».
Une décision tactique

Longtemps, pourtant, les ad­versaires de l’UDC ont soutenu que la loi actuelle suffisait ample­ment à obtenir la mise à l’écart des délinquants étrangers. En ac­ceptant d’entrer en matière, le gouvernement donne-t-il raison sur le fond à l’UDC? Pas du tout, répond-on dans son entourage. D’ailleurs, le Conseil fédéral se serait prononcé à l’unanimité contre l’initiative. Selon lui, en effet, le texte ne répondrait à aucun problème majeur dans la pratique. En outre, si elle n’est pas contraire au droit internatio­nal public contraignant, elle pourrait entrer en conflit avec la Constitution fédérale, en exi­geant l’expulsion y compris des délinquants étrangers mineurs.
C’est plutôt pour des raisons tactiques que la ministre de la Justice Eveline Widmer­Schlumpf et ses six collègues ont opté pour un contre-projet. En clair, ils espèrent ainsi diminuer les chances de victoire en vota­tion de l’UDC. Une analyse que partage le vice-président de l’UDC suisse, Yvan Perrin: «Le but du Conseil fédéral n’est pas de faire une contre-proposition applicable, mais de faire échouer notre initiative. Tout le monde a très peur de cette votation, qui pourrait survenir à dix-huit mois des prochaines élections fédéra­les de 2011.»
Radicaux séduits

La manoeuvre tactique du Conseil fédéral plaît en tout cas beaucoup au Parti radical. «Le gouvernement peut maintenant aller vite en se ralliant au texte que nous avons déposé au parle­ment fédéral», claironne le conseiller national argovien Phi­lipp Müller. Lors de la dernière session, le PRD a livré sa solu­tion; il veut que les cantons non seulement puissent, mais doivent expulser les étrangers coupables de crimes graves. Pur suivisme? «Oui, l’UDC a raison et a agi plus vite que tout le monde. Et il faut agir: nous constatons que les atteintes graves à l’intégrité des gens sont en forte hausse», souli­gne Philipp Müller.
Cet argumentaire dépite le président du Parti socialiste suisse, Christian Levrat: «L’ini­tiative de l’UDC angoisse les autres partis de droite et le Conseil fédéral. Expulser les cri­minels étrangers, je suis pour, moi aussi. Mais la loi actuelle suffit.»

Ce que disent la loi actuelle, l’initiative UDC et le projet radical

En s’appuyant sur la loi fédé­rale sur les étrangers, les auto­rités peuvent aujourd’hui déjà décréter l’expulsion d’un délin­quant étranger «condamné à une peine privative de liberté de longue durée» ou qui «at­tente de manière grave ou répétée à la sécurité et l’ordre public en Suisse ou à l’étran­ger, les met en danger ou représente une menace pour la sécurité intérieure ou exté­rieure de la Suisse».
L’initiative de l’UDC baptisée «Pour le renvoi des étrangers criminels» veut pour sa part inscrire dans la Constitution fédérale l’obligation d’expulser automatiquement du territoire suisse les étrangers condamnés pour meurtre, viol ou tout autre délit sexuel grave, bri­gandage, effraction, trafic de drogue ou traite des êtres humains. Pour l’UDC, les abus de l’aide sociale justifient elles aussi le retrait d’une autorisa­tion de séjour.
Enfin, dans une initiative parlementaire signée du conseiller national Philipp Müller, le Parti radical suisse propose de serrer la vis non pas dans la Constitution fédé­rale, mais via la loi sur les étrangers. Les cantons auraient le devoir, et plus seulement la possibilité, de refouler les criminels non suisses. La liste détaillée des délits graves pouvant conduire à une expul­sion ne comprend toutefois pas les abus de l’aide sociale. S. G.

Sur le même sujet, lire l'article de Valérie de Graffenried dans le Temps.


Miss Suisse victime d'insultes racistes

Image_6[1]Sur internet, l’Yverdonnoise Whitney Toyloy est comparée à un «abcès» par un membre du Parti des nationalistes suisses (PNOS). Une procédure pénale a été ouverte.Un article de Nadine Haltiner dans 24 Heures. 
Elle incarne l’ab cès qui est déjà en train de dévorer la Confé­dération libre et indépendante.» Voilà comment Dominic Lüthard, membre du Parti des nationalistes suisses (PNOS), dépeint Whitney Toyloy dans un article publié le 11 octobre sur le site internet de sa section de Langenthal (BE). Des propos que les autorités bernoises n’apprécient guère. Hier, elles ont ouvert une procédure pénale con­tre le parti d’extrême droite. Elles invoquent une éventuelle violation de la norme pénale antiraciste.
Sur la page de garde du site, l’homme n’hésite pas à fustiger vertement la nouvelle Miss Suisse et sa dauphine. En ligne de mire: leur couleur de peau métisse et leurs origines internationales. «A la première place, nous avons Whitney Toyloy, la Suissesse noire qui a vécu à Singapour, en Espa­gne et aux Etats-Unis. Bref, typi­quement Suisse! A la deuxième place, nous avons hérité de Rekha Datta, qui a des origines indien­nes.
Deux personnes qui n’ont pas de racines suisses. Et celles-ci doi­vent représenter le pays? Non.»
Whitney ne s’exprime pas

Whitney Toyloy, qui disait vou­loir incarner la Suisse multicultu­relle, est-elle blessée par ces pro­pos? Peut-être. Mais la Vaudoise ne communiquera pas, prévient le comité de Miss Suisse. «Nous vou­lons éviter toute polémique, expli­que Christoph Locher, son direc­teur. En plus, nous ne souhaitons pas faire de pub à ce groupe politique.» Le père de Whitney ne s’exprimera pas non plus. Nous l’avons joint hier lui avons appris l’existence de ces critiques. D’un ton ferme mais poli, il a préféré éviter tout commentaire.
Nul ne sait si sa fille portera plainte. Le comité de Miss Suisse assure de son côté qu’il n’en fera rien. Il préfère laisser faire la jus­tice. La procédure pénale, ouverte d’office par le Service régional des juges d’instruction de la région Emmental-Oberaargau, devra dé­terminer si les propos de Dominic Lüthard tombent bel et bien sous le coup de la norme antiraciste, au sens de l’article 261bis du Code pénal.
Jusqu’à présent, cet article a surtout été invoqué pour poursui­vre des négationnistes. Rarement pour des propos tenus envers des personnes précises. Mais pour Charles Poncet, l’aboutissement judiciaire ne fait aucun doute. «Ces propos sont dégueulasses, s’offusque l’avocat genevois. Ils remplissent les trois critères per­mettant de conclure à une discri­mination raciale. Premièrement ils sont tenus dans un espace public, deuxièmement ils peuvent être considérés comme un appel à la haine raciale, troisièmement ils portent atteinte à la dignité hu­maine, parce qu’ils comparent les personnes de couleur à des «ab­cès ».
Propos pas retirés

Un avis partagé par Tom Fris­chknecht, spécialiste bernois en droit pénal. Cité hier par la Berner Zeitung, il estime que Dominic Lüthard pourrait être condamné à une peine pécuniaire pouvant al­ler jusqu’à un million de francs au maximum. Une menace qui ne fait pas reculer l’intéressé. «J’ai con­sulté des avocats avant d’écrire ces lignes et je sais que je ne risque rien, affirme le nationaliste. Je ne retirerai donc pas mes propos de notre site tant qu’il n’y aura pas condamnation.» Le parti d’extrême droite, sur­tout actif en Suisse alémanique, n’en est pas à son coup d’essai. Plusieurs de ses adhérents – une centaine au total – ont déjà été condamnés pour des propos racis­tes. Lors de l’élection de Ricardo Lumengo (PS/BE) au Conseil na­tional en 2007, la formation, qui veut «une homogénéité ethnique et culturelle du peuple», avait fus­tigé le fait qu’un Noir puisse repré­senter le pays.

La Cimade voit "un signe encourageant" dans la décision de la justice

Un policier surveille des sans-papiers dans le centre de rétention de Vincennes, le 4 janvier 2008.

L'association Cimade peut souffler un peu. Dans le bras de fer qui l'oppose au ministère de l'immigration sur sa présence dans les centres de rétention, elle vient de marquer un point. A la suite d'un recours déposé par le Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti), la Ligue des droits de l'homme, les Avocats pour la défense des droits des étrangers, le réseau Elena France et le Syndicat des avocats de France, le tribunal administratif de Paris a en effet "enjoint" le ministère de suspendre l'appel d'offres, lancé en août, modifiant le dispositif d'aide aux étrangers dans les centres de rétention administratif (CRA). Jusqu'à présent, seule la Cimade était habilitée à pouvoir intervenir dans les centres de rétention pour venir en aide aux étrangers.

Lire cet article du Monde

"L'Europe n'apporte qu'une réponse frileuse aux réalités migratoires"

En matière d'asile, les Etats de l'Union ont pris conscience que plus d'Europe signifie plus d'efficacité et que, s'ils veulent éviter les effets pervers, comme à Sangatte, il leur faut davantage se coordonner. Cela suppose cependant que les pays aient une politique étrangère commune. Or, pour l'instant, celle-ci n'existe pas. Pour le reste, ce pacte, de forte inspiration sécuritaire, s'inscrit dans la continuité des politiques actuelles, renforçant avant tout la solidarité dans le contrôle des frontières. La réponse aux besoins de main-d'oeuvre est secondaire. Certes, ce texte inscrit la migration dans des projets d'aide au développement. Mais ce volet est pensé comme une réponse à l'immigration d'il y a trente ans, que l'on considérait comme un phénomène provisoire. On ne prend pas en compte les enjeux migratoires du XXIe siècle.

Lire cet entretien accordé au Monde par Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche au Centre d'études et de recherches internationales