vendredi 6 octobre 2006

Blocher persiste et signe

Christoph Blocher a expliqué et défendu les propos qu'il a tenus en Turquie sur la norme pénale antiraciste. Il a confirmé qu'il voulait réviser l'article 261bis du Code pénal.

Le ministre de la justice a constaté qu'il existait "une contradiction entre le principe de la liberté d'expression et la norme pénale antiraciste", selon un communiqué du Département fédéral de justice et police. Or, pour M. Blocher, "la liberté d'expression est une condition importante de la démocratie". C'est pourquoi le conseiller fédéral considère comme "irritant qu'en raison d'une norme pénale, l'opinion d'un professeur turc posant un jugement sur des événements historiques déclenche des poursuites pénales". Il confirme son intention de "vouloir supprimer cette contradiction par une révision de l'article 261bis du Code pénal".

Le ministre de la justice a par ailleurs tiré un bilan positif de son voyage en Turquie. Ainsi, son homologue Cemil Cicek lui a donné "l'assurance que la Turquie était prête à mettre en place une commission composée d'historiens de différents pays qui auraient libre accès aux archives de Turquie et d'Arménie, et que la Turquie accepterait les résultats des investigations".

Concernant les organisations turques "extrémistes", M. Blocher a refusé la demande de la Turquie de les interdire en Suisse. Il a parallèlement assuré que les demandes d'extradition de ressortissants turcs seraient "examinées suite aux garanties écrites données par la Turquie". Le ministre turc de la justice, Cemil Cicek, a accepté l'invitation de M. Blocher de se rendre en Suisse.doivent de toute façon obtenir l'aval du Conseil fédéral, du Parlement et le cas échéant du peuple suisse, a encore noté Christoph Blocher.

Concernant les organisations turques "extrémistes", M. Blocher a refusé la demande de la Turquie de les interdire en Suisse. Il a parallèlement assuré que les demandes d'extradition de ressortissants turcs seraient examinées suite aux garanties écrites données par la Turquie. "Mais je n'ai fait aucune promesse sur leur sort !" a-t-il insisté.

Pour le conseiller fédéral, "les relations entre la Suisse et la Turquie ne sont pas encore bonnes, mais elles se sont améliorées".

© SDA-ATS News Service

Le mépris de Christoph Blocher

Lire l'édito d'Anne Dousse dans le Matin

Insulté pour avoir pris part à «Infrarouge»

Lire l'article de Fanny Oberson dans le Matin
Larbi Guesmi, musulman pratiquant, a retrouvé mercredi soir ses essuie-glaces tordus, accompagnés d'un message raciste faisant référence à l'émission de la TSR...

Les parlementaires sous le choc

Lire l'article d'Anne Dousse dans le Matin
Les propos du ministre de la Justice en visite officielle en Turquie ont soulevé une tempête de protestations, tous partis confondus. Les élus n'ont toutefois pas pu s'entendre sur une déclaration commune

Norme antiraciste: Blocher n'en démord pas

Lire le dossier de la TSR avec des extraits audio
De retour de Turquie vendredi, Christoph Blocher a expliqué et défendu les propos qu'il a tenus dans ce pays sur la norme pénale antiraciste. Il a confirmé qu'il voulait réviser l'article 261bis du Code pénal.

Le juriste Marcel Niggli analyse la conduite 'surprenante' de Christoph Blocher en Turquie.

Lire le dossier de Swissinfo

Toujours chef de bande

Lire l'édito du Temps

Lire l'analyse du Temps publié par le collectif arménien contre le négationisme

CollectifVAN.org
Et si l'on débattait du fond? Si l'on posait franchement la question de la légitimité des dispositions du Code pénal réprimant le négationnisme, comme ont osé le faire récemment plusieurs personnalités françaises insoupçonnables de la moindre inclination pour l'extrême droite?

Toute la journée de jeudi, les réactions ont plu, des Eglises à la Ligue suisse contre le racisme et l'antisémitisme (Licra) et aux partis politiques. Tous ont dénoncé les propos tenus par Christoph Blocher à Ankara, où le ministre de la Justice a dit son hostilité à l'application de la norme pénale contre le racisme à ceux qui nieraient la réalité du génocide arménien.

Et si l'on rappelait que Simone Veil, ancienne ministre de Giscard, rescapée d'Auschwitz, était opposée à la loi Gayssot qui, depuis 1990, punit en France la négation d'un crime contre l'humanité?

Les vitrines du PDC et des radicaux sont caillassées. Les causes de ce vandalisme restent troubles

Tribune de Genève en ligne - www.tdg.ch - Vitrines (06.10)
ui a dit que la politique laissait indifférente? Ni les radicaux, ni le PDC. Jeudi matin, ils ont eu la mauvaise surprise de découvrir les vitrines de leurs partis vandalisées. Celle du PDC a subi les plus gros dégâts. La devanture arbore trois trous étoilés au travers de laquelle passe l'air du matin. «Youppie! C'est ce que je me suis dit en arrivant», raconte en soupirant Eliane Favero, la secrétaire du parti. Il y a neuf mois, le PDC avait subi un cambriolage suite auquel l'ordinateur du secrétaire général avait disparu. Dans son malheur, le PDC a pourtant un peu de chance: un filtre solaire brun en plastique appliqué contre les vitrines a empêché qu'elles n'explosent complètemen...

La Suisse Blochérisée

Le Temps - Courrier des lecteurs

Polémique

24 Heures s'interroge, suite aux dérapages de notre ministre de la Justice, dans l'édito de Thierry Meyer: "Derrière l’outrance, quelques questions gênantes"

Jouer avec la séparation des pouvoirs, avec la collégialité gouvernementale, avec le respect des lois et des décisions du peuple, qui plus est à l’étranger, n’est pas digne d’un ministre de la Justice. Le déferlement de critiques qui s’abattent sur Christoph Blocher est mérité. Son intervention, mercredi en Turquie, est d’autant plus regrettable qu’elle masque quelques questions qui dérangent, qu’il conviendrait de se poser avec discernement.
La norme pénale antiraciste, votée en 1994, peut effectivement constituer un problème si elle sort du cadre strict qui l’a vu naître et qu’elle devient l’instrument du politiquement correct et de la pensée unique. Voici deux ans, n’a-t-on pas vu les Verts brandir l’article 261 bis du Code pénal pour s’en prendre à un éditorial du SonntagsBlick qui attribuait une part de responsabilité à l’islam dans la montée de l’islamisme violent? A plusieurs reprises, les juges fédéraux ont rappelé que la norme antiraciste ne doit pas servir à museler des opinions «qui dérangent la majorité», voire qui paraissent «choquantes», arguant que de tels échanges sont indispensables au bon fonctionnement de la démocratie.
Adversaire déclaré de la loi, Christoph Blocher voulait par ailleurs accommoder une Turquie officielle avec laquelle Berne est en délicatesse. Sa grossière maladresse dessert cette intention. Pourtant, là aussi, quelques questions s’imposent: les tensions avec Ankara n’ont-elles pas été ravivées par les raccourcis historiques d’une autre ministre, Micheline Calmy-Rey? Peut-on unilatéralement considérer tous les Turcs comme des génocidaires perpétuels, et les peuples les entourant comme des anges?
Personne n’aidera la Turquie à sortir de son entêtement à nier le génocide arménien en cherchant à l’humilier, ou en pratiquant systématiquement la discrimination bien-pensante du prisme occidental et chrétien, à l’instar de l’Union européenne. Le génocide arménien est une réalité historique. Mais il est loin d’être le seul du genre, dans une région hélas marquée par la pratique méticuleuse du nettoyage ethnique et des déplacements de peuples entiers.
Toutes proportions gardées, à quoi ressemble le traitement infligé par les Arméniens aux Azéris dans les territoires que les deux pays se disputent? Parce qu’elle a fait un travail remarqué sur sa propre histoire, la Suisse aurait un rôle à jouer dans une réconciliation et une mise à plat des fardeaux du passé.
Cela vaudrait mieux que les déclarations à deux sous d’un chef de parti en campagne électorale. THIERRY MEYER

Le Ministre de la Justice suscite l'indignation

Sur le même sujet, 24 Heures publie un mini-sondage, dont la question était: "Les déclarations de Christoph Blocher à Istanbul contre la norme anti-racisme sont-elles acceptables?"

Nombre de réponses reçues: 469

Les propos tenus en Turquie par Christoph Blocher contre un article du Code pénal provoquent de très nombreuses protestations.Et même des demandes de démission. Non, c’est indigne d’un conseiller fédéral. Que les parlementaires prennent enfin leurs responsabilités et le renvoient au plus vite. GEORGETTE BARRAUD PALÉZIEUX

Il ne faut pas toujours tout dramatiser. M. Blocher a eu une pensée pour ses compatriotes qui ont voté contre cet article. Bientôt, en Suisse, on ne pourra plus parler et on sera obligé de porter une muselière. C’est comme cela que l’on arrive au drame de Zoug. JACQUES GEX LUTRY

En avril 2000, economiesuisse se réjouissait que le parlement ne soit pas entré en matière sur la reconnaissance du génocide arménien par les Turcs. Ceci compte tenu des enjeux économiques… Les propos de Christoph Blocher ne sont que l’expression de ce que pensent les milieux économiques. Les gens qui l’accompagnent dans cette voie sont aussi méprisables que lui. MAURICE BADOUX MONTHEY

Blocher a dit ce que bien des personnes, peut-être des centaines de milliers, pensent mais ne disent pas. ANDRÉ THIBAUD PULLY

Ce n’est pas lui qui est fort mais les autres qui sont faibles. Il faut qu’on demande immédiatement sa démission et qu’il s’excuse auprès du peuple. JEAN AESCHLIMANN SAXON

Dégoût, révolte, honte et crainte, face aux déclarations d’un homme qui se permet de traîner notre tradition démocratique et notre Etat de droit dans la boue. Face à un tel scandale, une seule solution: le front républicain.Suivons l’exemple des partis français ou belges, qui ont le courage de ne jamais traiter avec l’extrême droite. JEAN-CHRISTOPHE SCHWAAB RIEX

En Suisse, la liberté de parole est devenue le monopole des gauchistes, des mondialistes, des indésirables et j’en passe… Si le peuple pouvait revoter, croyez-vous que cet article contre nature passerait? A coup sûr pas! Bientôt, on n’osera plus ouvrir la bouche, même pas pour respirer, de peur que le premier âne passant dans le coin dépose plainte pénale. MIKLOS NAGY LAUSANNE

Nous sommes en train d’assister à un lent et sournois glissement vers plus de racisme et moins de social, institué par M. Blocher.Attention à ne pas se laisser endormir. STEFAN VAGO CLARENS

Blocher a choisi son camp, contre le peuple suisse qui a voté cette loi. Si la volonté du peuple suisse lui fait «mal au ventre», il devrait demander l’asile politique en Turquie. DOMINIQUE SIDLER CULLY

Insoutenable sur le plan démocratique et institutionnel, une telle attitude est surtout hautement inquiétante quant à la perception qu’elle reflète de l’évolution des valeurs de notre civilisation. Combien d’outrances de cette ampleur faudra-t-il encore pour que l’on se rende enfin compte que l’UDC et son leader alimentent constamment le même écran de fumée, espérant ainsi (et y parvenant apparemment pour l’instant…) détourner l’attention d’un système d’organisation de la société orienté exclusivement vers l’augmentation des profits des plus riches et des plus cyniques et fondé sur l’exclusion de la masse des gagne-petit laborieux PIERRE CHIFFELLE VEVEY

Les lois antiracisme ne suppriment pas le racisme mais l’engendrent. Celui qui est protégé peut avoir un sentiment de supériorité et celui qui est réprimé, un sentiment d’infériorité. Cela se vérifie dans le comportement des uns et des autres JEAN-PIERRE GROBET YVERDON-LES-BAINS

A quand une réaction ferme et cinglante du Conseil fédéral pour se démarquer véritablement des prises de position de Blocher? A quand une réaction ferme et cinglante du Parlement, permettant de renvoyer ce Monsieur à ce qu’il n’a cessé d’être: un chef de parti incapable de «lever le nez du guidon» et de voir, et surtout respecter, l’intérêt général? JACQUELINE SCHWAB VUARRENS

Blocher fait son Turc contre l'Islam

«La Turquie saluée par Christoph Blocher est celle-là même qui
fit disparaître les signes extérieurs de la religion musulmane lors de sa
constitution dans les années 20»

NICOLAS VERDAN Chef de la rubrique Monde 24 Heures

Que ne ferait-il pas pour son parti? Les déclarations, ulcérées, de Christoph Blocher sur l’article 261 du Code pénal suisse servent autant les inté­rêts d’industriels pressés de re­trouver un accès privilégié au marché turc que la volonté de l’UDC d’abroger la loi antira­ciste.
Or, le chef du Département fédéral de Police et Justice a fait mieux encore. Sa visite courtoise en Turquie, à 95% musulmane, est paradoxale­ment un encouragement à l’of­fensive de son parti contre l’is­lam en Suisse.
Le 80e anniversaire de l’adoption du Code civil suisse en Turquie était l’occasion rê­vée pour renforcer le discours de l’UDC contre toute manifes­tation publi­que de l’islam, devenue la troisième reli­gion en Suisse. La Turquie saluée par Christoph Blocher est celle-là même qui fit disparaître les signes extérieurs de la religion musulmane lors de sa consti­tution dans les années 20.
Le choix précis des lieux où s’est rendu le conseiller fédéral est sans équivoque. La très laïque Faculté de droit d’An­kara et le mausolée de Mustafa Kemal, dit Atatürk («Turc père») représentent les bas­tions d’une révolution qui relé­gua l’islam turc à la sphère privée: en vrac, suppression du califat, adoption du code vesti­mentaire occidental, interdic­tion du port du hijab et du fez, interdiction de la polygamie, remplacement du calendrier musulman par le grégorien, al­phabet latin en lieu et place de l’arabe, instauration d’une école laïque, mixte et républi­caine.
Bref, un catalogue de mesu­res que ne renierait pas l’UDC aujourd’hui. Bien au contraire! Diable intelligence du tribun populiste Blocher, qui ne se fit pas prier pour reprendre dans son discours, mercredi à An­kara, les propos du premier ministre de la justice que con­nut la République turque: «…il nous faut appeler à la vie une organisation de la justice tur­que entièrement nouvelle, avec un nouveau système juridique, de nouvelles lois et de nou­veaux tribunaux. Quel carac­tère pourrait et devrait avoir cette organisation de la justice, à laquelle les étrangers se­raient aussi soumis. La ré­ponse tient en un mot: laï­que. » Et Blocher de rappeler que ce Mahmud Esad Bozkurt vint étudier le droit en Suisse, plus exactement à Lausanne et à Fribourg. On comprend dès lors mieux cet attrait de notre conseiller fédéral pour cette Turquie kémaliste, qui tenta de modeler un pays ethnique­ment pur et religieusement ho­mogène, là où coexistaient des peuples, des langues et des religions différentes. La ques­tion kurde n’est pas le moindre des avatars de cette construc­tion nationale en éternel mou­vement de fusion-séparation.
Ainsi, avec son voyage, Christoph Blocher a fait plus que rendre un hommage op­portuniste au Traité de paix de Lausanne, au Code civil turc et aux liens traditionnels de la Suisse et de la Turquie. Que l’on ne s’y trompe pas. Toutes ces révérences, son clin d’oeil amical aux fameuses Migros turques développées au milieu des années 50, ses maux de ventre placent sa visite bien au-delà des bons offices com­merciaux. L’enjeu était avant tout politique et intérieur à la Suisse.
Avec un Blocher, la bataille pour la place de l’islam en Suisse s’avère d’ores et déjà redoutable. Mais encore fau­drait- il que les lieutenants de l’UDC soient à la hauteur de leur capitaine. La prestation laborieuse sur la TSR d’Yvan Perrin, vice-président du parti est à l’opposé de la perfor­mance turque de Christophe Blocher. L’absence de connais­sance historique et religieuse du premier contraste avec le sens historique du second. A propos, à quand Blocher et Ramadan sur le même pla­teau?

Blocher a choqué ses alliés

Christoph Blocher s’est recueilli dans le mausolée dédié au fondateur de l’Etat turc moderne, Mustafa Kemal Atatürk, à Ankara. Ses propos sur la norme pénale antiraciste qui lui donne mal au ventre ont provoqué un vent d’incompréhension au Parlement suisse. Il s’en expliquera ce matin à sa descente d’avion, à Kloten. (Keystone/Kusano)