samedi 16 septembre 2006

Opinion d'Hélène Küng dans 24heures

Halte aux abus: deux fois non


La réalité. Des secteurs de l’économie (agriculture, restauration, soins aux personnes âgées ou malades, garde d’enfants…) manquent de main-d’oeuvre. La population suisse et la migration légale ne parviennent pas à combler la demande – malgré le fait du chômage. Et le marché donne du travail, souvent précaire, à des personnes sans permission de séjour.
La réalité. La loi ne prévoit pas de permis de séjour pour des personnes non-européennes venant chercher un travail, re­joindre leur fiancée, leur fa­mille. Pour ne pas être illégales, certaines s’inscrivent pour une demande d’asile, en expliquant leurs raisons. Elles ont l’im­pression de jouer le jeu et ne compren­nent pas qu’on les accuse d’«abuser de notre hospitalité»: c’est la seule entrée légale que la Suisse leur accorde.
La réalité. Des personnes fuyant des persécutions, mais ne pouvant pour cette raison même se procurer des papiers d’identité, ou prendre le risque de porter sur elles, au départ de leur voyage, de quoi les identi­fier.
Cela leur est reproché par notre loi.
La réalité. Des personnes em­prisonnées en «mesures de con­trainte ». Leur seul «délit» est de n’être pas ou plus autorisées à séjourner en Suisse. Leur em­prisonnement, qui coûte très cher, peut durer jusqu’à un an. Et plus l’emprisonnement est long, plus il est inefficace pour organiser le renvoi. C’est un rap­port fédéral qui l’a montré.
Les lois actuelles sont très restrictives pour l’asile et la mi­gration, d’où le grand nombre de refus d’asile ou de séjour, dû non pas à des motivations mau­vaises des personnes, mais au système compte-gouttes de no­tre législation. Et avec toutes ses restrictions, elle ne parvient pas à combattre la clandestinité; elle l’augmente.
Nous, témoins de cette réalité, nous ne pouvons que tomber à la renverse lorsqu’on nous ra­conte que le système est «laxiste» et qu’il faut le durcir! C’est précisément les durcisse­ments des dernières années, les barrières mises au dépôt des demandes d’asile ou de séjour, l’interdiction d’accès au travail, la baisse drastique de moyens de vivre déjà restreints, qui ont augmenté la marginalité, l’inac­tivité, ou la clandestinité.
Ce système actuel insatisfai­sant est néfaste aussi pour la société suisse: sous-enchère des salaires, tensions dues à la mar­ginalité (absence de travail, d’ac­tivité, de perspectives, pouvant dans certains cas faire miroiter l’attrait d’occupations illégales).
Les durcissements ont déjà fait le contraire de leurs pro­messes: non pas halte aux abus et protection des vrais réfugiés, mais mise en danger de réfugiés et encouragement à la clandesti­nité. Et les Lois sur l’asile et les étrangers nous feraient appli­quer les mêmes recettes de dur­cissement mais renforcées, en prétendant que cette fois par miracle ça va résoudre les pro­blèmes au lieu de les empirer comme déjà vu? Non et non!
Doubler le temps d’emprison­nement en mesures de con­trainte, déjà avéré comme coû­teux et inefficace? Barrer l’accès à la procédure d’asile aux per­sonnes n’ayant pas de docu­ments d’identité? Rendre pres­que impossible de chercher lé­galement du travail en Suisse, alors que l’offre et la demande sont là? J’espère que le peuple suisse votera dans son propre intérêt le double non à ces deux lois: non aux mensonges et non à l’irréalisme.
Et dès le 25 septembre, le travail sera à reprendre, pour doter enfin la Suisse de lois cohérentes et rigoureuses en matière d’asile et de migration.

Lire aussi l'avis opposé de Léonard Bender

Adapter nos lois pour répondre aux défis migratoires



Les opposants aux lois sur l’asile et sur les étrangers auront peine à convaincre le peuple. Pour­tant, sur le papier, l’addition des forces qu’ils sont censés représenter (les Gauches, les Eglises, le Comité bourgeois, les grandes villes, les Centrales syndicales, une large part du milieu associatif et culturel) devrait générer, sans pro­blème, une majorité, pour ne pas dire un plébiscite. Or, on le pressent, la réalité sera diffé­rente.
L’immigration est un sujet complexe et délicat. Les pres­sions migratoires ne faibliront pas à l’avenir, tant est grand l’écart de richesses entre pays nantis et pays pauvres, situés dans l’hémisphère Sud notam­ment. De la même manière, la question des réfugiés sera tou­jours liée aux instabilités poli­tiques, aux conflits armés et aux violations, trop nombreu­ses, des droits de l’Homme dans le monde. Nous devons, à l’échelon national aussi, ap­porter des réponses à ces questions, même si, fonda­mentalement, elles ressortis­sent à la politique internatio­nale.
La Suisse a adhéré à l’espace Schengen. Cela veut dire qu’en matière d’immigration, d’une certaine manière, ses frontiè­res ne sont plus à Chiasso, Gondo ou à Genève, mais à Lampedusa, Ceuta ou dans l’archipel des Canaries! C’est pourquoi, il y a nécessité d’adapter – à l’instar d’autres Etats - notre réglementation interne à cette nouvelle réa­lité.
VC6
La lutte contre l’immigra­tion clandestine nous incombe également. Elle doit être me­née avec fermeté et humanité, en collaboration avec tous les pays intéressés. Aucun répit ne saurait être accordé aux filières mafieuses qui exploi­tent sans vergogne la misère humaine. La surveillance des frontières, la coopération poli­cière et judiciaire doivent être améliorées. Et les accords de réadmission favorisés.
Dans le même temps, l’aide au développement et à la réso­lution des conflits ne doit pas faiblir, car une bonne politi­que migratoire n’a de sens que si elle s’inscrit dans une vision globale et durable. A cet égard, voter deux fois Oui le 24 sep­tembre est utile, mais ne suffit pas. Il faudra encore améliorer la concertation européenne et internationale en ces domai­nes et, surtout, donner un coup d’accélérateur à la politi­que d’intégration des étran­gers dans notre pays. Le Parti radical suisse l’a bien compris, en réclamant l’élaboration d’une loi-cadre fédérale sur l’intégration.
Dans son dernier livre, Té­moignage, le ministre français Nicolas Sarkozy résume cette exigence d’équilibre: «La vé­rité est qu’il n’y a pas, d’un côté, les laxistes généreux au grand coeur, et de l’autre, les partisans d’une fermeté inhu­maine. Les deux sentiments cohabitent en chacun de nous.». Et d’ajouter «en ma­tière d’immigration… je suis convaincu qu’on ne peut être ferme sur la durée que si l’on est juste.» Les deux lois sur lesquelles le peuple suisse se prononcera le 24 septembre essaient de faire la part des choses. La nouvelle loi sur les étrangers fournira à notre pays les ins­truments adéquats pour me­ner une politique d’immigra­tion maîtrisée, régulée et da­vantage orientée vers l’inté­gration. Quant à la loi révisée sur l’asile, elle permettra de préserver, dans les faits, notre tradition d’accueil et de géné­rosité à l’égard des réfugiés cherchant protection et récon­fort. Mais elle contient aussi des dispositions renforcées vi­sant à combattre et prévenir les abus patents et nombreux dans ce domaine.

Christa & Sylvia & Mix & Remix, le quarteron qui fait suer Blocher

Une contribution très ironique de Nicolas Martin dans Largeur.com

...Traumatisé, ulcéré, révolté, révulsé, en un mot scandalisé, le tribun. En plus, les agresseurs se sont mis à deux, ou presque. Blocher pris en tenaille entre Mix & Remix...

Etrangers et asile: non à des lois inutiles et indignes

Lire la prise de position très claire d'Adrien Bron dans la Tribune de Genève en ligne
Les lecteurs doivent le savoir: la loi sur l'asile est un OVNI dans l'appareil juridique suisse. Et la version sur laquelle ils se prononcent le 24 septembre aggrave le domaine d'exception que les Suisses tolèrent en la matière.

Le texte est une espèce de scandale législatif. Il flirte avec les limites inférieures des droits de l'homme comme aucune autre loi suisse. Comme si les garanties des textes internationaux étaient moins importantes quand il s'agit des requérants et non des Suisses...

Blocher fait campagne

Lire la lettre de Maria Roth Bernasconi dans la Tribune de Genève

...Ces manœuvres nous rappellent une triste période de l'histoire de l'Europe qu'il s'agit de ne pas oublier. Le pouvoir des pires dictateurs s'est en effet construit de la même manière: en dénigrant la classe politique et en s'appuyant sur le plébiscite.