samedi 18 juillet 2009

Le Collectif vaudois de sans-papiers: «Nous sommes avec Mirta Palma»


L'été s'annonce long pour la blessée de Bel-Air, qui va déposer une demande de permis humanitaire. La solidarité s'organise

Muriel Jarp - le 17 juillet 2009, 22h23
Le Matin

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«En général, nous restons très tranquilles et discrets», explique un ami équatorien, membre du Collectif vaudois de sans-papiers. «Mais, là, nous allons nous battre pour que Mirta puisse rester en Suisse. Nous sommes tous avec elle.» Une communauté effectivement discrète. Ils seraient plus de 6000 sans-papiers équatoriens dans le canton. Et solidaires. «On se connaît tous, on s'aide en cas de coup dur», ajoute-t-il. Alors de savoir que Mirta Palma - la blessée de Bel-Air (VD) - qui s'est toujours énormément engagée dans l'association des Equatoriens de Lausanne, est sommée de quitter le pays d'ici au 15 septembre, cela suscite un grand mouvement de sympathie.

Pas d'assurance perte de gain
Son avocat, Jean-Michel Dolivo, explique qu'une plaine pénale vient d'être déposée, afin que sa cliente puisse prétendre à des dédommagements pour les torts qu'elle a subis dans l'accident de Bel-Air, où elle a eu la jambe broyée sous une voiture. Des torts tant physiques que psychiques. Sans parler du manque à gagner. «Car, évidemment, elle n'a pas d'assurance perte de gain!» ironise son avocat, qui rappelle que cela fait sept ans que cette femme de 53 ans fait des ménages chez des particuliers. Des dédommagements qui devraient être pris en compte soit par la RC de la conductrice de la voiture remorquée, soit par celle du dépanneur, selon l'issue de l'enquête.

Dossier délicat
«Nous allons aussi déposer une demande de permis humanitaire courant août», précise Jean-Michel Dolivo. D'ici là, il s'agit de réunir les documents nécessaires. Un dossier d'autant plus difficile à préparer au vu de la situation illégale de Mirta. «On va essayer de prouver ses revenus. Mais, vous imaginez bien, c'est délicat de demander cela à ses employeurs!» Son avocat compte aussi sur les attestations médicales qui décriraient les séquelles physiques potentielles, rendant un retour au pays d'autant plus compromis.

Jean-Michel Dolivo ne le cache pas, le fait que les filles de Mirta Palma sont restées au pays constitue un point négatif pour le dossier. Une crainte confirmée par le chef du Service de la population du canton de Vaud, Henri Rothen. Or, si retourner en Equateur permettrait à cette mère de retrouver ses filles après sept ans de séparation, cela signifierait surtout une situation économique très précaire pour la famille. Depuis ici, Mirta Palma peut envoyer 500 francs par mois pour soutenir ses filles.

Craintes de l'avocat
L'avocat, célèbre défenseur des sans-papiers, semble déterminé à tout entreprendre pour sauver sa cliente. «Je pense qu'on va lancer une pétition. Et on envisage une manifestation de soutien», précise-t-il.

Reste qu'il est conscient du parcours difficile qui les attend, lui et sa cliente: tout d'abord parce que les conditions de l'administration vaudoise sont très sévères, ensuite parce que Berne applique désormais une politique très restrictive.

Le permis humanitaire, c'est quoi?
Il faut distinguer la protection accordée au requérant d'asile du permis humanitaire, précise Henri Rothen, chef du Service de la population. Un requérant doit être victime de persécution dans son pays pour obtenir le statut de réfugié.

Quant au permis humanitaire (un permis B en fait), il peut être octroyé à ceux qui ont longuement été en Suisse de manière clandestine, et dont le retour au pays serait un «cas d'extrême gravité». «La personne doit être tellement intégrée que son retour serait insupportable», explique Henri Rothen. Si le canton de Vaud juge le dossier recevable, il l'envoie à l'Office des migrations, qui est dernier juge. Depuis 2002, sur 600 dossiers envoyés à Berne, environ 30% ont été acceptés.

Pour y prétendre, il faut remplir les conditions suivantes:

Durée de résidence
Avoir séjourné en Suisse au moins neuf ans sans interruption pour les célibataires, et sept ans pour les personnes qui ont des enfants en âge de scolarité.

L'intégration à la société
Par son réseau social, ses amis, la maîtrise de la langue, etc. Comme Mirta Palma a été présidente de l'association des Equatoriens pendant des années, cela pourrait être considéré comme une intégration, précise Henri Rothen.

Ne pas avoir commis d'infraction
Cela depuis l'arrivée en Suisse.

Avoir des revenus
Donc ne pas dépendre de l'aide sociale.

Bénéficier de circonstances exceptionnelles La situation médicale de Mirta Palma, par exemple.

Des jumelles de 16 ans peuvent rester en Suisse


Tijana et Aleksandra Comagic, leur mère, Olivera, et Regula Thalmann, présidente du Grand Conseil zurichois (de gauche à droite). Jeudi, le Tribunal administratif a annoncé que les deux filles et leur mère resteraient en Suisse. (Keystone)

Tijana et Aleksandra Comagic, leur mère, Olivera, et Regula Thalmann, présidente du Grand Conseil zurichois   (de gauche à droite). Jeudi, le Tribunal administratif a annoncé que les deux filles et leur mère resteraient en Suisse. (Keystone)

Les deux jeunes filles de 16 ans peuvent rester

L’élan de solidarité a atteint son pic en mars dernier. Presque tous les maîtres et les élèves de l’école Lavater, à Zurich, sont présents dans la salle de gym. Ils ont organisé une conférence de presse pour expliquer pourquoi les jumelles Aleksandra et Tijana Comagic, 16 ans, ne doivent pas être expulsées vers la Serbie. La future maire socialiste Corine Mauch et le municipal des Ecoles, le PDC Gerold Lauber, ont envoyé un message de soutien.

Cette mobilisation a porté ses fruits. Jeudi, le Tribunal administratif de Zurich a annoncé qu’il cassait une décision du Conseil d’Etat et autorisait les deux jeunes filles et leur mère à rester en Suisse. Une surprise, après deux ans de procédures balisées de décisions négatives. Car le canton de Zurich est parmi les plus restrictifs en matière de cas de rigueur. Il n’a transmis en quelques années qu’une poignée de demandes à l’Office fédéral des migrations.

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La médiatisation à double tranchant des sans-papiers


Gwenaëlle Reyt dans le Temps

Tijana et Aleksandra Comagic, leur mère, Olivera, et Regula Thalmann, présidente du Grand Conseil zurichois (de gauche à droite). Jeudi, le Tribunal administratif a annoncé que les deux filles et leur mère resteraient en Suisse. (Keystone)

Tijana et Aleksandra Comagic, leur mère, Olivera, et Regula Thalmann, présidente du Grand Conseil zurichois   (de gauche à droite). Jeudi, le Tribunal administratif a annoncé que les deux filles et leur mère resteraient en Suisse. (Keystone)

L’affaire de Mirta Palma, Equatorienne sans-papiers, a été rendue publique pour influencer les autorités. En vain, selon ces dernières

En quelques jours, Mirta Palma a fait la une de24 heures et du Matin. Cette femme équatorienne sans-papiers, victime du médiatisé accident de voiture de Bel-Air à Lausanne le 26 juin dernier, vivait dans la clandestinité depuis sept ans. Découverte à la suite de l’accident, elle a reçu l’ordre de quitter le pays au plus tard le 15 septembre prochain. Sans tarder, son avocat, Jean-Michel Dolivo, a informé le quotidien 24 heures de la situation afin de sensibiliser l’opinion publique. Alors même qu’aucune démarche auprès du Service de la population n’avait encore été faite.

Que ce soit pour Mirta Palma, Adem Salihi à Bassins, Fahad Khammas, héros du film La Forteresse, ou encore les jumelles Comagic à Zurich (lireici), les différents comités de soutien aux sans-papiers utilisent les médias pour faire pression sur les autorités. Cette stratégie est-elle efficace? «Des familles ont été régularisées grâce à une bonne couverture dans la presse et à des pétitions. Si on parle d’immigration d’un point de vue général, c’est abstrait pour la population. Personnaliser la situation de Mirta Palma ou des autres sans-papiers permet de rallier des personnes qui au départ auraient pu nous être défavorables», explique Christophe Tafelmacher, avocat et membre du collectif vaudois de soutien aux sans-papiers.

Un avis que partage Jean-Michel Dolivo, également membre du collectif: «C’est un soutien important. Les circonstances nous ont poussés à répondre de cette manière. Jamais nous n’aurions pensé que les autorités auraient le culot et la brutalité de lui donner cette notification alors qu’elle est encore traumatisée par son accident.»

Cette stratégie de l’urgence ne fait pourtant pas l’unanimité. Pour Pierre Imhof, directeur de l’Etablissement vaudois d’aide aux migrants, la surmédiatisation est à double tranchant. «Etre connu peut être négatif. Dès l’instant où les autorités ont pris connaissance d’une situation, elles doivent entamer une procédure qui peut déboucher sur un renvoi. Mais cela peut aussi aboutir à une régularisation», concède le directeur.

La carte de l’émotionnel

Pour les autorités, qu’il y ait médiatisation ou non, la décision finale doit être objective et éviter de transgresser le principe d’égalité de traitement. «Certains pensent qu’avec la pression le traitement du dossier sera plus clément et qu’il mènera à une régularisation. Alors que pour l’administration, cela complique la prise de décision. C’est difficile à assumer sur le plan émotionnel. Nous parlons de vies humaines et de leur avenir. Quand il faut trancher, cela n’est jamais simple», avoue Andreane Jordan, secrétaire générale du Département de l’intérieur du canton.

Pour Henri Rothen, chef du Service de la population du canton de Vaud (SPOP), les groupes de soutien jouent la carte de l’émotionnel alors que l’administration a un cadre légal à respecter. «Nous passons toujours pour les «méchants» alors que nous devons appliquer des lois votées par le parlement et le peuple. Une situation rendue publique n’a pas plus de raison d’être régularisée qu’une autre, restée anonyme. Les groupes de soutien personnalisent les dossiers pour émouvoir. Nous ne sortons jamais gagnants de cette sorte de rapport de force émotionnel», admet le chef de service. Dans le domaine des permis dits humanitaires, le rôle du SPOP est de donner un préavis à l’Office fédéral des migrations, à qui appartient la décision finale de régularisation ou de renvoi.

Berne peut dire «non»

Contrairement à Jean-Michel Dolivo, Nicolas Mattenberger, avocat et élu socialiste au Grand Conseil, ne veut pas utiliser les médias comme premier recours. «Cela peut avoir des répercussions négatives sur le dossier. Cela n’a pas aidé Adem Salihi, à Bassins. Dans son cas, les autorités ont certainement voulu faire un exemple et monter la fermeté de l’Etat. Finalement, Adem Salihi a trouvé la solution en se mariant. Beaucoup de mes clients ont été régularisés sans que leur histoire soit sortie dans les médias», constate le député socialiste.

Pour lui, le problème est à Berne. «Même quand le canton donne un avis favorable pour un dossier, Berne peut dire «non». Il arrive que je défende deux dossiers très similaires et que l’issue ne soit pas la même. Tout dépend de la personne qui traite le dossier», explique Nicolas Mattenberger. Pour lui, le canton garde toutefois une marge de manœuvre: «Quand on parle d’enfant, cela touche. Même si une famille est refusée au niveau fédéral, c’est le canton qui doit appliquer la décision. Ce n’est pas facile d’aller chercher les gens chez eux pour les mettre dans l’avion. Dans ces cas-là, comme pour Mirta Palma, la médiatisation peut être efficace. De toute façon, elle n’a plus que ce choix maintenant que les autorités l’ont dénoncée.»

Face à un éventuel "crash démographique", l'immigration est nécessaire, par Jacques Barrot

Point de vue

LE MONDE | 17.07.09 | 14h55 • Mis à jour le 17.07.09 | 14h55

'été risque à nouveau d'être le temps des tragédies de l'immigration en mer Méditerranée. Le dernier Conseil européen a mis l'accent sur ce sujet de la plus haute importance, capable de sensibiliser les citoyens à la valeur ajoutée de l'action européenne. Mais la mise en avant de cette question majeure comporte trois risques, qu'il faut à tout prix éviter.

Le premier risque est celui d'une vision négative des flux migratoires, accentuée par un contexte de crise économique. Nous avons besoin de l'immigration pour éviter à l'Europe le "crash démographique" qui menace nos économies et nos systèmes de protection sociale. Le deuxième risque est celui d'une confusion entre immigration et asile, rendu plus grand par le caractère composite des flux de migrants arrivant en Europe. Or l'émigré économique n'est pas le réfugié qui fuit son pays, menacé par les persécutions provoquées par les guerres ou par la terreur à l'encontre des minorités. Le troisième risque est de croire que la gestion des flux migratoires et du droit d'asile peut se résoudre essentiellement au plan national, sans une coordination européenne très étroite. Cette fragmentation des politiques migratoires est une absurdité dans l'espace sans frontières de Schengen.

Nous n'avons pas assez pris la mesure de l'avancée du Pacte européen pour l'immigration et l'asile, adopté sous présidence française. Sous l'impulsion de la Commission et grâce au travail de Brice Hortefeux, des principes communs unissent désormais nos 27 Etats membres. J'y consacre toute mon énergie, en présentant de nombreuses propositions législatives, pour construire l'édifice d'une politique européenne de l'immigration et de l'asile à la fois solidaire et responsable. J'en donnerai deux exemples-clés.

Laboratoire de la réconciliation, l'Europe a vocation à accueillir les persécutés. Les valeurs de respect de la dignité humaine, de tolérance et de liberté qui fondent l'Union le lui commandent. La solidarité européenne doit être double. Solidarité vis-à-vis des réfugiés, qui doivent voir leurs conditions d'accueil améliorées, quel que soit l'Etat membre où ils effectuent leur demande d'asile, et bénéficier à terme d'une procédure unique.

Solidarité entre les Etats membres : il faut redonner de l'oxygène à certains pays qui, par leur position géographique, sont asphyxiés par les migrations. Malte, 400 000 habitants, a vu le nombre de ses demandeurs d'asile croître de 100 % de 2007 à 2008, avec neuf demandes d'asile pour 1 000 habitants, alors que la moyenne européenne est de 0,5.

L'Europe va donc engager un "projet pilote" pour soutenir Malte, basé notamment sur la réinstallation intra-européenne d'un certain nombre de réfugiés. La France a déjà donné l'exemple en acceptant d'en accueillir 99. J'ai proposé la révision du règlement de Dublin, afin qu'un demandeur d'asile puisse faire valoir son droit dans un autre Etat membre que le premier pays d'accueil, si cet Etat croule sous les demandes et n'a plus la capacité de les instruire correctement. Or de nombreux Etats membres sont réticents vis-à-vis de cette révision législative très fortement soutenue par le Parlement européen. Il est pourtant essentiel de réfléchir à un programme volontaire de répartition équilibrée des réfugiés en Europe.

Cette solidarité doit s'accompagner d'un esprit de responsabilité dans la gestion des flux migratoires. Gestion concertée des migrations irrégulières, qui passe par un combat résolu contre les filières criminelles des passeurs qui exploitent la détresse humaine, par une surveillance accrue des frontières imposant une montée en puissance de notre agence Frontex (agence européenne qui assure la gestion et la coopération opérationnelle aux frontières extérieures) et par le développement d'accords de réadmission qui sont la condition de retours dignes.

L'immigration irrégulière fragilise l'intégration des immigrés réguliers. Mais, surtout, de terribles drames humains l'accompagnent. Depuis 2002, au moins 4 000 personnes ont perdu la vie en tentant de traverser la Méditerranée sur des embarcations de fortune.

Nous devons établir d'urgence un dialogue avec les pays d'Afrique de l'Est et d'Afrique du Nord d'où une grande majorité de migrants partent et transitent. Il est estimé que près de 2 millions de candidats au départ se trouvent actuellement en Libye. Lors du dernier conseil des ministres européens de l'intérieur, j'ai souligné l'urgence d'établir avec les Etats de la rive sud de la Méditerranée une coopération beaucoup plus étroite pour combattre efficacement les passeurs et établir des dispositifs d'accueil et de protection des demandeurs d'asile répondant aux normes internationales.

Une politique migratoire responsable, c'est également une gestion concertée de l'immigration régulière entre l'Union et les pays tiers, qui doit aboutir à un bénéfice pour les deux parties. Ce système doit permettre à l'Europe de bénéficier durant un temps des compétences et de la force de travail des immigrés réguliers, qui rejoindront leur pays enrichis de cette expérience. Je présenterai, au mois de septembre, de nouvelles propositions de directives concernant les travailleurs saisonniers. Nous devons convaincre nos partenaires de cette chance partagée de la migration circulaire. Elle est impérative pour éviter le risque de la fuite des cerveaux et de la perte définitive de main-d'oeuvre au détriment des pays tiers.

La politique européenne de l'immigration et de l'asile exige un dialogue sans précédent avec les pays tiers, qui doivent prendre conscience non seulement que l'Europe ne peut ouvrir ses bras à tous, mais surtout que la perte de leur richesse humaine les condamnera eux-mêmes à terme dans la mondialisation. Les Européens doivent tout à la fois manifester une authentique solidarité et appeler à une responsabilité partagée avec les pays d'origine et de transit. Cela implique de lier étroitement l'aide au développement avec la gestion concertée des flux migratoires. Cela impose de faire comporter de manière systématique un volet "migration" à toute politique extérieure de l'Union. Là se trouve la véritable condition d'une réponse face à l'amplification des flux migratoires.


Jacques Barrot est vice-président de la Commission européenne chargé de la justice, de la liberté et de la sécurité.

Immigration : cinq propositions pour sortir du statu quo, par Nebahat Albayrak et Carmelo Mifsud Bonnici

Point de vue

LE MONDE | 17.07.09 | 14h55 • Mis à jour le 17.07.09 | 14h55

'il y a bien un sujet où la collaboration entre les Etats membres de l'UE fait toute la différence, c'est dans le domaine de l'immigration (illégale) et de la protection des réfugiés. Les centres de détention pour immigrants illégaux à Malte et en Grèce sont pleins à craquer d'hommes généralement jeunes qui ont tout quitté pour gagner la zone européenne de liberté, de justice et de sécurité. Cependant, ce problème ne concerne pas seulement Malte et la Grèce. L'Union européenne doit trouver un accord sur les cinq points d'action suivants :

1. L'UE doit investir dans le contrôle des frontières des Etats membres du Sud et de l'Est ; car ces Etats ont besoin d'aide. La capacité opérationnelle de l'agence Frontex, qui assure la gestion extérieure des frontières de L'UE, doit être améliorée. Nous devons investir dans l'excellence de l'enregistrement et partager les informations.

2. Nous devons définir les responsabilités des Etats membres participant aux forces navales dans des opérations menées par Frontex, à l'aide de directives claires et contraignantes. Ces directives doivent être conformes aux obligations internationales des Etats concernés sans en rajouter aux charges disproportionnées auxquelles font déjà face les Etats membres les plus affectés. Nous devons mettre en place un mécanisme d'enquête pour étudier les incidents et y réagir de manière adéquate.

3. Aux frontières extérieures de l'UE, nous avons besoin de procédures d'asile rapides, efficaces et fiables. Cela nous permettra de distinguer entre les demandes d'asile frauduleuses et les migrants ayant vraiment besoin d'une protection. D'autres Etats membres doivent contribuer au développement et au partage de l'expertise des procédures d'asile, des infrastructures d'accueil, des opérations de retour, du contrôle des frontières ainsi qu'à la détection de documents falsifiés.

4. Le retour de ceux dont les demandes sont rejetées doit faire partie intégrante des procédures. La Commission européenne doit obtenir un mandat plus étendu pour conclure des accords de réadmission avec les pays d'origine. A cet égard, nous sommes partisans que le Conseil européen considère comme une priorité les négociations sur les accords de réadmission de la CE avec les principaux pays d'origine et de transit comme la Libye et la Turquie.

5. Les pays de transit doivent être aidés dans leur capacité (institutionnelle) de contrôle des frontières ainsi que dans la protection des réfugiés et la lutte contre l'immigration illégale.

Le Pacte européen sur l'immigration et l'asile, adopté par les chefs de gouvernement européens en 2008, est un pas important dans cette direction. Le programme de Stockholm pour la zone de liberté, de sécurité et de justice pour les années 2010 à 2014 sera le prochain.

Cependant, nous pouvons lancer la réalisation de cet agenda au niveau bilatéral. Les pays ayant de l'expérience dans la gestion des flux de migration et d'asile doivent contribuer à la coopération pratique comme l'évaluation des demandes d'asile, la mise à disposition d'interprètes, des évaluations d'âge et de langue, etc. Cet été, un projet conjoint sur l'immigration est lancé par Malte et les Pays-Bas. Chypre a été invitée à y participer.

Toutefois, nous devrons trouver une manière de partager la charge au niveau européen par un contrôle efficace de nos frontières et la redistribution des réfugiés acceptés et autres bénéficiaires de protection internationale dans les pays de l'UE. Nous soutenons la décision de la Commission de mettre en place un mécanisme pour la redistribution volontaire.

Néanmoins, un mécanisme plus contraignant ne sera possible que dans un système européen unique commun. Le statu quo actuel ne peut pas être maintenu car il attire de plus en plus de migrants illégaux et ébranle le soutien auquel ont droit les réfugiés, en quête de protection internationale dans tous nos pays.


Nebahat Albayrak est secrétaire d'Etat à la justice (Pays-Bas), et Carmelo Mifsud Bonnici est ministre de la justice et des affaires intérieures (Malte).

Le premier ministre belge promet une solution au problème des sans-papiers



LE MONDE | 17.07.09 | 15h35 • Mis à jour le 17.07.09 | 15h35
Bruxelles Correspondant

ls sont encore 22 aujourd'hui à traîner leur ennui, sans-papiers, issus pour l'essentiel du Maghreb, d'Afrique noire et du Brésil. Certains sont là depuis le début de l'occupation de la paroisse Saint-Jean-Curé-d'Ars, à Forest, en avril 2006 : l'une des premières du genre en Belgique. Leur regard est vide, leur corps fatigué. Ils attendent maintenant, comme quelques dizaines de milliers de demandeurs d'asile et de clandestins, le résultat de la négociation politique, qui devrait, prochainement, se dérouler à quelques kilomètres de là, au cabinet du premier ministre belge Herman Van Rompuy.

Celui qui se fait appeler Roger et qui vient du Congo est un oublié qui dit avoir "l'espoir et la conviction" qu'il sera régularisé, comme tous ceux qui campent encore ici. "Moi j'ai envie de la Belgique, je veux bien gérer ma vie et être protégé", dit Roger. Un de ses amis, un Mauritanien qui ne dévoile même pas son prénom, laisse entendre qu'un passeur l'a conduit dans ce pays où il ne connaissait personne. Lui aussi a vu des dizaines de clandestins, hommes, femmes et enfants, passer par la paroisse et, un jour, s'éclipser. Soit parce qu'ils avaient fini par obtenir une régularisation, soit, plus fréquemment, parce qu'il avait décidé d'accepter une fois pour toutes leur statut de sans-papiers et de tenter, malgré tout, leur chance.

Le premier ministre avait envisagé de forcer une solution sur une opération de régularisation avant les élections régionales de juin. Il a renoncé, confronté à l'ampleur des divisions au sein de son gouvernement, où le portefeuille de l'asile était partagé entre une socialiste francophone, Marie Arena, chargé du volet social, et une libérale flamande, Annemie Turtelboom, chargée de la migration.

EVITER UN "APPEL D'AIR"

Aujourd'hui, M. Van Rompuy remet le dossier sur la table. Un remaniement, décidé jeudi 16 juillet, a entraîné la mise à l'écart de la négociation des deux ministres rivales. Et le premier ministre promet désormais une issue pour le 21 juillet, jour de la Fête nationale. Parce que l'affaire entraîne "une énorme pression sociale" et parce qu'il s'agit d'un "vrai problème politique"concernant des gens "plongés dans une situation regrettable", dit-il. Le chef du gouvernement entend également éviter un "appel d'air", ce qui signifie qu'il veut agir vite pour éviter un afflux de demandeurs d'asile supplémentaires.

La situation est devenue intenable, marquée par de nombreuses occupations. Des grèves de la faim très longues ont été menées, forçant parfois Mme Turtelboom à accorder des droits de séjour provisoires. Les centres d'accueil débordent, ce qui force les autorités à loger de très nombreux sans-papiers dans des hôtels, à Bruxelles. Les syndicats, l'ensemble des églises, les recteurs d'université et des ONG appellent ensemble à trouver une solution.

En mars 2008 déjà, le gouvernement fédéral, alors présidé par Yves Leterme, avait fixé des critères de régularisation qui n'ont jamais été traduits dans les faits. Exercer un travail, s'être soumis à une procédure administrative, séjourner depuis longtemps dans le pays, parler l'une de langues nationales, être "ancré localement" : tout cela devait favoriser l'obtention d'un titre de séjour. Les partis au pouvoir ne sont toutefois pas parvenus à s'entendre.

M. Van Rompuy espère réussir là où M. Leterme a échoué. Mais définir les "critères d'ancrage" exige de savoir à qui ils s'appliquent. Or le gouvernement se dit incapable de chiffrer le nombre de personnes régularisables. Les estimations vont de 20 000 personnes, du côté flamand, à 80 000 selon des sources francophones. "La grande opération de régularisation a eu lieu en 2000-2001", souligne de son côté le premier ministre. Sous-entendu : il n'ira pas au-delà. On estime que, à l'époque, 30 000 dossiers avaient été acceptés, soit 50 000 à 70 000 personnes.


Jean-Pierre Stroobants

La deuxième vague de régularisation

Clandestins La Belgique (10,6 millions d'habitants) compterait, selon les estimations, entre 80 000 et 150 000 clandestins. L'année 2001 avait vu la régularisation de 30 000 dossiers, soit de 50 000 à 70 000 personnes.

Nouveaux arrivants En 2008, quelque 12 200 demandes d'asile ont été enregistrées. Elles émanaient essentiellement d'Afghans, d'Irakiens, de Russes, deTchétchènes, de Kosovars et de Guinéens. Depuis le 1er janvier 2009, environ 1 000 personnes ont quitté le pays, dans le cadre d'un programme mis au point avec l'Organisation internationale des migrations.

L'opinion Une enquête officielle publiée en mars 2009 a indiqué que 6 Belges sur 10 étaient hostiles à l'octroi de droits aux illégaux et 4 sur 10 leur dénient ces droits, même s'ils travaillent.