samedi 22 octobre 2005

La Fareas renonce à doper l’accueil aux casernes

24heures dans son édition Nord Vaudois confirme que le nombre de NEM qui utilise les locaux d'Yverdon est bien inférieur à ce qui avait été prévu.

Voici l'article de Frédéric Ravussin:
Les discussions entre la Munici-palité et la Fareas se poursui-vent. Elles ont cependant pris un jour nouveau, puisqu’une augmentation du nombre de places d’accueil pour les per-sonnes frappées d’une non-en-trée en matière (NEM) aux anciennes casernes n’est plus d’actualité. Sous certaines con-ditions — aujourd’hui remplies ( lire encadré) —, les négocia-tions auraient pu reprendre avec la fondation qui souhaitait initialement avoir la possibilité de porter cette capacité à une huitantaine de places. Mais à son grand étonnement, la Fa-reas a constaté que le nombre de NEM demandant un héber-gement n’était pas aussi élevé qu’elle ne l’avait imaginé.
A Yverdon, ils ont été au maximum 56 à passer la nuit aux anciennes casernes, exploi-tées depuis le 16 août. Et au minimum 29. Ces dernières se-maines, les NEM ont été entre 40 et 53 à séjourner sur le site. En moyenne, leur nombre reste donc en deçà du seuil maximum fixé. «Car c’est bien une moyenne plutôt que des pics qu’il s’agit de prendre en considération», affirme le di-recteur de la Fareas, Pierre Imhof.

Départ en janvier confirmé
L’extension de la capacité d’accueil du site sera-t-elle à nouveau à l’ordre du jour d’ici à un mois, quand les nuits se-ront plus fraîches? «On s’est rendu compte à Lausanne que cela n’avait pas d’influence. Mais quoi qu’il en soit, nous serons alors tout proches de la date de départ fixée», poursuit-il.
Pierre Imhof a en effet réaf-firmé hier que la structure yver-donnoise serait libérée, comme convenu, dans le courant du mois de janvier. «Nous plan-chons actuellement sur quel-ques variantes pour accueillir les NEM «yverdonnois» à ce moment-là. Toutes se trouvent à Lausanne.» Le nombre de requérants d’asile — NEM y compris — n’a pas augmenté depuis une année dans la Cité thermale. Au 1er décembre 2004, ils étaient 775 relevant de la Fareas, contre 752 le 1er oc-tobre dernier.

Bientôt moins?

Quoi qu’il en soit, la contri-bution de la Cité thermale est toujours très importante en comparaison avec d’autres vil-les du canton, et notamment de La Côte. A elles seules, Lau-sanne, Vevey et Yverdon hé-bergent le 50% des requérants d’asile vaudois! Mais la donne pourrait bientôt changer, à la faveur de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l’aide aux requérants d’asile et à cer-taines catégories d’étrangers (LARA), l’an prochain. «Je prendrai alors mon bâton de pèlerin pour aller à la rencontre de certaines communes qui col-laborent moins facilement qu’Yverdon», promet le direc-teur de la Fareas.

L'art de fabriquer des faux requérants...

Didier Estoppey en première page du Courrier relève la parution d'une étude d' universitaire stagiaire au CSP qui démontre statistiquement que le système fabrique des "faux requérants" grâce à un "profilage ethnique".

La Côte d'Ivoire, la Guinée, la Guinée Bissau, la Sierra Leone, le Liberia ou le Nigeria: des pays qui n'ont pas précisément l'image de paradis sur terre. Et qui, même s'ils peinent à faire la Une des médias occidentaux, figurent régulièrement en bonne place dans les rapports d'Amnesty international pour les dictatures sanglantes, les guerres civiles ou les violences généralisées qui les rongent. Et qui provoquent leur lot d'exilés, dont certains viennent tenter leur chance en Suisse.
Pour trouver porte close: selon les statistiques officielles, les ressortissants de ces six pays d'Afrique de l'Ouest ne sont que 1 sur 200, en moyenne, à obtenir l'asile, et 3 sur 100 une admission provisoire. Contre un taux moyen d'acceptation, tous pays confondus, de 8% (28 % pour les admissions provisoires).
Inégalité de traitement? «Discrimination», répond Gaétan Nanchen, au terme d'une étude fouillée[1]. Ce jeune licencié en sciences politiques a mis à profit un stage au Centre social protestant de Genève pour se pencher sur les dossiers d'une centaine de requérants ouest-africains. Et chercher d'autres réponses à une question à laquelle l'Office fédéral des migrations (ODM), par ses décisions, semble trancher pour l'affirmative: «Tous les Africains de l'Ouest seraient-ils des menteurs?»
Le chercheur n'exclut pas qu'une proportion de requérants, qu'il ne lui appartient pas de quantifier, affabulent. Mais il n'en reste pas moins frappé par le «décalage extrêmement surprenant» entre des situations qui ne peuvent manquer d'authentiques persécutés et un taux d'acceptation proche du néant. Sur une cinquantaine de pages, il se livre à une analyse serrée des questions auxquelles sont soumis les requérants africains, pour démontrer à quel point elles sont très souvent «ethnocentriques». Les fonctionnaires de l'ODM s'échinent notamment à obtenir des renseignements chronologiques précis, qui échappent souvent à des cultures africaines développant une tout autre notion du temps. De même, les perceptions de l'espace par les requérants sont souvent incompatibles avec des batteries de questions dignes de l'Office topographique fédéral.
Mais il y a plus pervers: en l'absence de réponse précise, les interrogateurs finissent par la formuler eux-mêmes. Et le requérant par acquiescer, au risque d'entrer en contradiction avec des propos tenus plus tôt. «L'expérience générale de la vie» est un autre concept souvent invoqué par l'autorité pour motiver ses refus. Une expérience au nom de laquelle les fonctionnaires peinent souvent à croire, entre autres, que des requérants africains aient pu, comme ils le prétendent, soudoyer leurs gardiens et prendre la poudre d'escampette. C'est pourtant exactement ce qui est arrivé en 1983 avec Licio Gelli à Champ-Dollon, rappelle Gaétan Nanchen...
Reste une dernière option pour les candidats qui auraient su se défaire de toutes ces chausse-trapes: leur donner le choix entre deux options... perdantes. L'auteur cite le cas de deux requérants, l'un étant passé prendre des nouvelles de sa famille entre son évasion de prison et son départ du pays, l'autre pas. On a rétorqué au premier qu'il était invraisemblable qu'il ait pris un tel risque avant de fuir. Et on s'est étonné que le second se soucie si peu des siens...
Une mécanique infernale, conclut Gaétan Nanchen, et qui s'auto-alimente: «Ces rejets massifs et successifs engendrent un processus de généralisation, un effet de système dans lequel l'habitude crée une logique de refus.» Une logique qui porte un nom: le racisme.