mercredi 9 décembre 2009

Renvoi des criminels étrangers: l'initiative de l'UDC attendra

La commission des institutions politiques du Conseil des Etats joue la montre concernant l'initiative de l'UDC pour le renvoi des étrangers criminels. Après la votation anti-minarets, elle veut réexaminer la validité de l'objet et pourrait même présenter un contre-projet direct au texte.

le 09 décembre 2009, 11h37
LeMatin.ch & les agences



Réunie mercredi, la commission a adopté une motion d'ordre demandant de biffer l'objet du menu du Conseil des Etats pour cette session. Sans surprise, une minorité UDC demande au plénum de rejeter cette motion.

Déposée trois jours après le scrutin sur les minarets, la proposition de Theo Maissen (PLR/GR) de déclarer l'initiative nulle et de ne pas la soumettre au Parlement ne fait pas non plus l'unanimité. Le Conseil des Etats tranchera jeudi.

Sa commission a changé son fusil d'épaule. En novembre, elle avait donné la préférence au contre-projet indirect du gouvernement. Par 7 voix contre 3, elle s'était ralliée à l'idée selon laquelle les étrangers ayant commis des infractions pénales graves doivent se voir retirer leur permis de séjour mais estimait nécessaire de préciser les motifs de révocation et de subordonner l'autorisation d'établissement à une intégration réussie.

Contre-projet durci

La commission avait cependant durcit le contre-projet en introduisant une clause d'exception plus sévère. Selon elle, c'est uniquement lorsque l'expulsion viole la constitution fédérale ou le droit international (par exemple l'interdiction de renvoyer une personne dans un pays où elle risque des traitements inhumains) que les autorités doivent pouvoir renoncer à une révocation du permis.

La commission recommandait alors aussi par 10 voix contre 1 au plénum de rejeter l'initiative. Son application entraînerait des conflits par rapport à des droits fondamentaux tel que le principe de proportionnalité ou la protection de la vie privée et familiale. La majorité craint aussi des problèmes au regard de la Convention européenne des droits de l'homme.

Une initiative pour incompatibilité avec les droits de l'homme a déjà été invalidée par le Parlement, en 1996. Il s'agissait du texte des Démocrates suisses "pour une politique d'asile raisonnable".

Depuis l'introduction du droit d'initiative en 1891, trois autres textes ont été déclarés irrecevables par le Parlement, mais pour manque d'unité de matière. Il s'agit de l'initiative socialiste "pour moins de dépenses militaires et davantage de politique de paix" (1995), de l'initiative du Parti du travail "contre la vie chère et l'inflation" (1977) et de l'initiative dite Chevallier en faveur d'une réduction des dépenses militaires (1955).

Amnesty International demande l'invalidation de l'initiative

Berne/Lausanne, le 9 décembre 2009. La Section suisse d'Amnesty
International attend du Conseil des Etats qu'il invalide demain
l'initiative de l'UDC «pour le renvoi des étrangers criminels».
Les sénateurs doivent retenir la leçon de l'initiative sur les
minarets et renoncer à soumettre au vote populaire un texte
clairement contraire à plusieurs normes du droit international et
incompatible avec la Constitution fédérale. Amnesty
International estime que le droit en vigueur est largement
suffisant pour lutter contre les abus et préserver la sécurité
des citoyennes et citoyens.

Le texte de l'initiative «pour le renvoi des étrangers criminels»
qui propose d'expulser de Suisse tous les étrangers criminels,
sans exception possible, est contraire à plusieurs normes du
droit international. Le principe du non refoulement, consacré par
plusieurs conventions internationales et considéré comme une
règle de droit impératif, serait violé le jour où notre pays
devrait renvoyer dans son pays d'origine un réfugié protégé par
la Convention de Genève de 1951.

Le texte de l'initiative est également en contradiction avec la
Convention européenne des droits de l'homme, le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques et l'Accord
de libre circulation conclu avec l'Union européenne.

Telle qu'elle est formulée, l'initiative est clairement contraire
au principe de la proportionnalité, ancré dans la Constitution.
«Un jeune étranger qui aurait commis un délit mineur, par exemple
d'être arrêté avec du haschich, pourrait ainsi être expulsé vers
son pays d'origine, même s'il n'y a jamais mis les pieds et n'y
possède aucune attache», a déclaré Alain Bovard, juriste auprès
de la Section suisse d'Amnesty International. «Une telle mesure
serait totalement disproportionnée.»

La loi actuelle sur les étrangers permet déjà l'expulsion
d'étrangers qui représentent un danger pour l'ordre public, tout
en respectant les normes internationales et la Constitution. Il
n'est nul besoin de légiférer en la matière, estime la Section
suisse d'Amnesty International.

Azzam Tamimi: «Vous êtes un néonazi !»

Oskar Freysinger a débattu hier devant plus de 80 millions de téléspectateurs arabes. Extraits d'un débat tendu...

Textes: Viviane Menétrey et Fabian Muhieddine - le 08 décembre 2009, 23h19
Le Matin


«Vous avez ouvert les portes de l'enfer pour les musulmans en Europe.» L'accusation contre Oskar Freysinger émane du présentateur Faisal al-Qassem de l'émission phare d'Al-Jazira. Le ton est donné.

Oskar Freysinger participait hier soir à 20 heures à un débat en direct avec Azzam Tamimi, l'«apôtre» des attentats suicide. Tout était réuni pour que l'élu UDC dérape sur la chaîne arabe d'informations en continu autour du thème le plus chaud du moment: la montée de l'islamophobie en Europe. C'est donc toute la Suisse qui risquait de pâtir de la colère de plus de 80 millions de téléspectateurs arabes qui suivent régulièrement cette émission. L'ambiance était d'autant plus tendue que des manifestations avaient lieu hier devant plusieurs ambassades helvétiques dans le monde arabe.

Toute la Suisse retenait donc son souffle. Même Micheline Calmy-Rey se faisait du souci. Elle l'a confié hier à «Forum» sur les ondes de la RSR. Oskar Freysinger est arrivé dans les studios du duplex à Berne «briefé» par ses collègues parlementaires - tous bords confondus: «Fais attention, ce soir tu représentes la Suisse.»

Le Valaisan n'avait pas l'intention de se démonter. Et la seule fois où il a paru surpris, c'est lors de l'intervention inattendue d'Ueli Leuenberger, le président des Verts suisses, qui par téléphone s'est mis à expliquer qu'il existe des Suisses qui n'ont rien contre les musulmans: «Un recours à la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg est possible.» Aucune réaction chez Oskar Freysinger: «Ce soir, pour la première fois, on me verra refuser le combat si Azzem Tamimi va trop loin», annonçait-il avant le direct. Face aux attaques répétées de son contradicteur arabe qui n'a eu de cesse de traiter l'UDC de néonazi et de comploteur sioniste, Oskar Freysinger a donc gardé son sang-froid. «Je suis profondément blessé. Votre vision du monde est différente, mais vous êtes un être humain comme moi et on doit respecter son adversaire», s'est-il contenté de rétorquer. A la sortie de l'émission, le Valaisan avouera: «J'ai dû me retenir de lui répondre violemment.» Au final, ce ne sont pas les éventuels dérapages d'Oskar Freysinger qui se sont révélé dangereux, mais la tribune offerte au fondamentalisme d'Azzam Tamimi.

Azzam Tamimi
«Le peuple suisse est inculte»

Démocratie en Suisse

«Comment peut-on voter sur un droit fondamental et constitutionnel comme la liberté de religion?»
«Il y a un certain nombre de choses sur lesquelles on ne peut pas voter.»
«C'est comme si les Suisses avaient voté contre l'existence de la communauté noire en Suisse.»
«La démocratie n'est pas là pour changer les lois fondamentales selon le gré du peuple.»
«Il faut distinguer les élites suisses et le peuple, qui est inculte.»
«J'ai un message pour les Suisses: vous devez vous réveiller. Vous avez un beau pays, accueillant, qui représente la liberté. N'entachez pas sa réputation.»

L'islam en Europe

«Les femmes européennes ont une vie misérable. Elles travaillent du matin au soir, regardent la télé quand elles rentrent. L'islam va les libérer, donner un sens acceptable à leur vie.»
«L'Europe doit accepter la démocratie avec tout ce que cela comporte. Y compris que des réfugiés musulmans aient envie de pratiquer leur foi.»
«Vous me faites rire avec la charia: elle n'est pas appliquée dans 80% des pays islamiques. Les craintes de l'Europe face à l'islam sont fausses.»

Attaques: Hitler et complot sioniste

«Vous êtes comparable à Hitler. Lui aussi a commencé par s'attaquer à des faits mineurs avant de détruire des communautés entières.»
«Vous faites partie d'un mouvement qui veut détruire l'islam en Europe. Or il n'y a pas d'action coordonnée des musulmans pour islamiser l'Europe. Tout ce que nous voulons, c'est bénéficier de la démocratie avec les mêmes droits que vous.
Mais nos enfants n'ont pas beaucoup de droits...»
«Oskar Freysinger est lié aux mouvements sionistes qui veulent combattre et remettre en cause l'Etat palestinien.»

Oskar Freysinger

«Je ne suis pas là pour faire la leçon»

Démocratie en Suisse

«Nous avons débattu pendant des mois et mon parti a gagné. Chez nous, le peuple est souverain, c'est la loi.»
«La démocratie suisse pourrait être un exemple pour les dictatures du monde arabe.»

L'islam en Suisse

«Nous n'empêchons personne de pratiquer sa religion. Mais nous avons un problème avec certains aspects juridiques de l'islam.»
«Nous devons mettre des limites à certaines pratiques religieuses: l'abattage rituel ou l'immolation par le feu chez les hindous sont interdits. Le minaret n'est qu'une interdiction parmi d'autres.»
«S'intégrer veut dire accepter les lois du pays d'accueil. Moi, par exemple, j'enlève mes souliers à la mosquée.»

L'islam en général

«Il n'est pas dans la culture de l'Arabie saoudite de laisser construire des églises, nous ne le demandons pas d'ailleurs. Et aucune manifestation n'a eu lieu en Suisse à ce sujet.»

«L'islam n'a pas assez évolué ces 200 dernières années. Certains sujets ne peuvent pas être abordés.»
«Je ne suis pas là pour faire la leçon au monde musulman.»
«Le droit et la pensée musulmane sont difficilement compatibles avec notre Etat de droit. Par exemple, les mariages forcés, la charia, l'inégalité entre homme et femme.»

Réponses aux attaques

«La Suisse a résisté à la force de l'Axe. Nous sommes un pays libre depuis 700 ans. Pour nous, voter, c'est normal: nous le faisons quatre fois par année.»
«Cela fait plusieurs fois que monsieur Tamimi me blesse, il me compare à la pire bête de l'histoire. Je rappelle que le Grand Mufti de Jérusalem était au début l'allié de Hitler face aux Juifs.»
«Monsieur Tamimi, vous incarnez la vision de l'islam avec laquelle nous sommes en conflit.»

L'OSAR demande à Berne de ne pas renvoyer les requérants srilankais

Officiellement sorti de la guerre civile depuis mai 2009, le Sri Lanka ne jouit pas d'une paix stable et les Tamouls y sont toujours persécutés, selon l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés. L'organisation demande à la Suisse de répondre positivement aux demandes de requérants d'asile, ou au moins par une admission provisoire.

De larges franges de la population tamoule sont toujours victimes de persécutions et de mesures d'expulsion, rapporte l'OSAR. Les Tamouls du Nord et de l'Est du pays peuvent notamment être victimes de violations ciblées des droits de l'homme, risque qui justifie selon l'OSAR l'octroi de l'asile.

Sont notamment visées les individus qui ont travaillé pour le compte des Tigres tamouls ou sont soupçonnées d'avoir sympathisé avec eux. Ces personnes doivent s'attendre à des représailles de la part des forces de sécurité sri-lankaises. L'Etat sri-lankais recherche activement les membres et les sympathisants des Tigres dans toutes les parties du pays.

Les journalistes et les politiciens qui critiquent le gouvernement ou défendent la cause de la population tamoule sont également menacés, ainsi que les personnes actives dans le domaine humanitaire.

Pour beaucoup de requérants d'asile du Sri Lanka, le seul moyen de quitter légalement le pays consiste à adresser une demande à l'ambassade de Suisse à Colombo, ajoute l'OSAR. Cette dernière invite dès lors les autorités suisses à traiter rapidement toutes les demandes.

L'Office fédéral des migrations s'en tient à sa politique de traiter les demandes au cas par cas, a indiqué Marie Avet, porte-parole. Quelque 3900 demandes de requérants d'asile srilankais sont actuellement à l'examen, a précisé Mme Avet.

Depuis le début de l'année, 1894 ressortissants srilankais ont été mis au bénéfice de l'admission provisoire et 160 ont reçu le statut de réfugiés, soit 20% du total des demandeurs.