dimanche 27 novembre 2011

Suisse: les populistes de l'UDC reculent

Le parti de la droite populiste suisse, l'Union démocratique du centre (UDC), qui avait subi un sérieux revers au premier tour des élections législatives en octobre, a vu son recul confirmé dimanche au second tour du scrutin. Le deuxième tour des élections -- qui avait lieu dans les cantons de Zurich, de St-Gall, d'Argovie, d'Uri et de Schwytz -- visait à attribuer les six sièges encore vacants au Conseil des Etats, la chambre haute du Parlement helvétique.

L'UDC, opposé à toute adhésion à l'Union européenne et qui a notamment bâti sa campagne électorale sur la lutte contre l'immigration, a essuyé un revers dans quatre des cinq cantons où il s'est présenté, remportant uniquement un siège dans le paradis fiscal de Schwytz (centre), a annoncé l'agence ATS. Plus grave, son président Toni Brunner a été battu dans le canton de St-Gall par le socialiste Paul Rechsteiner. Dans le canton de Zurich, le plus peuplé de la Confédération, la figure de proue de l'UDC, Christoph Blocher, a perdu contre les sortants Vert libéraux et PLR (centre droit).

Pour le parti de Christoph  Blocher, l'échec au second tour du scrutin est "la conséquence logique d'une coalition anti-UDC", selon un communiqué cité par l'ATS.

Le PS Suisse s'est pour sa part félicité d'un "succès majeur" et a qualifié l'issue du scrutin de "résultat historique" avec 11 représentants socialistes siégeant désormais au Conseil des Etats. Au premier tour des élections législatives du 23 octobre, qui visaient à renouveler les députés des deux chambres du Parlement helvétique, les grands partis traditionnels, principalement l'UDC, ont enregistré un recul face à de petits partis comme les Verts libéraux et le parti bourgeois démocratique (PBD), qui est issu d'une scission antérieure de l'UDC. L'UDC n'avait obtenu que 25,9% des voix aux élections du Conseil national (chambre basse), après 28,9% au dernier scrutin de 2007.

La droite populiste, à l'origine de l'interdiction des minarets en Suisse, n'avait contre toute attente pas réussi à dépasser la barre historique des 30% malgré une campagne électorale axée sur un marketing politique choc. L'UDC est devenu la première formation du pays à l'issue de la consultation de 2003. Il avait alors obtenu 26,6% des suffrages et 28,9% il y a quatre ans, doublant quasiment son score par rapport aux années 1990, au détriment des partis du centre dits "bourgeois". Tout au long de la campagne électorale, le mouvement avait appelé à "stopper l'immigration massive" dans la Confédération, qui a vu le nombre d'étrangers, notamment d'Afrique et d'Europe de l'Est, plus que doubler en 20 ans.

Le Figaro

samedi 26 novembre 2011

Le vrai-faux plan de Claude Guéant pour réduire les demandes d’asile

Le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, a annoncé, vendredi 25 novembre, une "réforme" du droit d'asile. Relativement restrictive, elle vise à mettre fin au "détournement" croissant, selon lui, de l'asile par des migrants économiques qui, une fois déboutés, viennent grossir les rangs des étrangers en situation irrégulière. Une hausse, d'après lui, qui embouteille le dispositif national d'accueil et d'hébergement et "pénalise" les "vrais" demandeurs d'asile.

"Notre système d'asile est en danger parce que le dispositif est utilisé pour pénétrer et se maintenir dans notre pays", a ainsi déclaré M. Guéant, Place Beauvau, à Paris, vendredi matin, devant la presse. Des propos réitérés l'après-midi lors d'un déplacement à Montauban (Tarn-et-Garonne) dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA).

Sur le fond cependant, la plupart des mesures annoncées sont floues ou existent déjà en pratique, et suscitent une forte désapprobation des organisations de défense des droits des étrangers. "La hausse de la demande d'asile, même si une part est infondée, ne justifie pas un renforcement des pratiques dissuasives", estime ainsi le bureau parisien du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), aux critiques généralement modérées. Décryptage.

  • Le contexte

Une hausse de la demande d'asile. Pour justifier ses annonces, le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, met en avant une hausse exponentielle de la demande d'asile ces "quatre dernières années". Une hausse, selon le dossier presse distribué aux journalistes, de "55%". D'après les projections du ministère de l'intérieur, quelque 60 000 personnes auront en effet leur demande d'asile en examen d'ici à la fin 2011 – contre 42 600 en 2008.

Or, calculs faits, cela représente bien une hausse importante, mais plutôt d'un peu plus de 40%. De même, cette augmentation ne dépasse pas un pic qui avait été atteint en 2004 : quelque 65 000 demandes étaient alors en traitement à l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra). Par nature, la demande d'asile s'ajuste en effet avec le contexte international et suit une évolution en dents de scie.

Une hausse des "demandes abusives" ? Sur l'ensemble de la demande d'asile, M. Guéant considère qu'une part croissante est à attribuer à des demandes abusives d'étrangers dont les motivations sont d'abord "économiques" – et non liées à des inquiétudes pour leur sécurité dans leur pays. Pour preuve, il en veut le taux "en baisse", selon lui, de reconnaissance de protection : "24,6% en 2011, contre 36% en 2008".

Or, si les demandes d'asile abusives sont un phénomène réel, elles ne sont pas forcément en hausse. Selon Gérard Sadik, juriste spécialiste de l'asile à la Cimade, les chiffres donnés par le ministère sont erronés car ils mélangent le "taux d'activité" annuel de l'Ofpra et de la Cour national du droit d'asile (CNDA) avec leur taux "consolidés". Sur la longue durée (depuis 1993), on constate ainsi que ce taux de reconnaissance de protection varie toujours entre 20% et 35% en moyenne.

  • Les mesures

Dissuader la demande. Alors qu'un grand nombre de demandeurs d'asile qui viennent en France sont originaires du Bangladesh et d'Arménie, M. Guéant a annoncé vouloir classer, début 2012, ces deux Etats – ainsi que la Moldavie et le Monténégro – en pays dits "sûrs". Une qualification qui autorise l'Ofpra à examiner plus vite les dossiers des migrants venant de ces destinations (la procédure est appelée "prioritaire" et en cas de recours, elle n'empêche pas l'expulsion).

Ce système de listes de "pays sûrs" n'est toutefois pas une mesure particulièrement novatrice. Tous les ans, chaque pays européen met à jour sa propre liste – ce qui n'est pas sans occasionner un certain nombre d'incohérences. En France, l'inscription du Bangladesh sur cette liste, prévue début 2012, était envisagée depuis plus d'un an. En début d'année, c'était le Kosovo qui avait été ajouté. A l'époque, c'était lui le pays qui apportait le plus gros bataillon de demandeurs d'asile vers la France. "La politique de l'asile devient la variable d'ajustement des flux migratoires", déplore M. Sadik.

Dans le même esprit, M. Guéant a annoncé vouloir transposer en droit français une directive européenne de 2005 qui instaure un "délai raisonnable" pour déposer sa demande d'asile une fois arrivé sur le territoire européen. Au Royaume-Uni, celui-ci est de "trois jours". M. Guéant souhaiterait qu'il soit en France de "90 jours". Une façon d'empêcher, notamment, que les migrants déposent une demande d'asile alors qu'ils sont placés en rétention en vue de leur éloignement.

Cette transposition juridique nécessiterait toutefois une nouvelle loi. La dernière date seulement du mois de juin. Et avec l'élection présidentielle qui approche, le ministre a reconnu de lui-même, vendredi, qu'elle n'aurait sans doute pas le temps d'être examinée par le Parlement avant cette date.

Ciblage des " déboutés ". Chaque année, entre 70% et 80% des migrants demandeurs d'asile se voient refuser leur demande de protection. Ces "déboutés" doivent alors, en principe, quitter la France dans un délai d'un mois. Cette obligation de quitter le territoire français (OQTF) leur est généralement notifiée par courrier, là où ils sont domiciliés. Mais dans les faits, beaucoup restent en France et rejoignent alors la masse des étrangers en situation irrégulière.

Pour remédier à cette situation, M. Guéant a annoncé, vendredi, avoir demandé à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) d'organiser des visites dans les centres d'hébergement pour demandeurs d'asile (CADA) afin d'inciter les "déboutés" à prendre "l'aide au retour volontaire" : un pécule d'argent (jusqu'à 2000 euros par adulte) accordé à tous ceux décidés à rentrer, sans y être contraints, dans leur pays d'origine. Ce système est toutefois en vigueur depuis le 10 octobre en province. M. Guéant a simplement précisé, vendredi, qu'il allait être étendu "à la région parisienne".

Dans le même esprit, le ministre de l'intérieur a déclaré, vendredi, vouloir multiplier les "accords bilatéraux" avec les pays d'origine et de transit des demandeurs d'asile afin de pouvoir éloigner plus facilement les migrants déboutés. Des accords de ce type - dits de "réadmission" -, la France en signe régulièrement. Mais ils sont longs à négocier. Eric Besson, lorsqu'il était à la tête du défunt ministère de l'immigration et de l'identité nationale, souhaitait déjà les développer.

Durcissements juridiques pour les "dissimulateurs". Vendredi, le ministre de l'intérieur a également annoncé avoir engagé une "réflexion juridique" pour écarter les demandes d'asile de ceux dont les "mensonges" ou les "dissimulations" sont mises en exergue. Notamment dans le cas où les migrants sont suspectés d'avoir volontairement altéré leurs empreintes digitales pour ne pas être renvoyés dans le pays européen qu'ils ont traversé en premier (Système Dublin II). "Un certain nombre de migrants dissimulent des informations sur leur itinéraire ou se mutilent le bout des doigts mais ce n'est pas forcément parce que leur demande est infondée, il arrive souvent qu'ils soient mal conseillés par les passeurs ou leur communauté", prévient William Spindler au HCR, à Paris.

Dans les faits, ces mesures existent déjà malgré tout. Le 3 novembre, le directeur général de l'Ofpra a fait parvenir une note à ses chefs de service pour leur demander de "rejeter" toutes les demandes d'asile des personnes qui se présenteraient avec le bout des doigts mutilés. De même, la notion de demande d'asile "frauduleuse" existe déjà dans le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) - article 741-4 - et a été "précisée" dans la dernière loi immigration, votée le 16 juin, pointe Tahar Khalfoune, juriste à l'association Forum Réfugiés.

Raccourcissement des délais d'examen des dossiers. L'un des principaux objectifs des mesures annoncées par M. Guéant vendredi est de parvenir à un raccourcissement des délais d'examen des demandes d'asile. Aujourd'hui, ces délais sont environ de dix-neuf mois et le ministre souhaiterait les ramener à douze mois en 2012. "D'un point de vue strictement administratif, un mois de délai en moins c'est 15 millions d'euros économisés", souligne Gérard Sadik de la Cimade. Le budget global de l'asile est aujourd'hui d'environ 500 millions d'euros. Mais, interrogé sur les économies éventuelles que sa "réforme" du droit d'asile pourrait apporter, M. Guéant a indiqué, vendredi, que les objectifs n'étaient pas "chiffrés".

Ce qui embouteille le dispositif national d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile, d'après M. Sadik, c'est en réalité "le manque d'agents de l'Ofpra et de la CNDA" ainsi que le nombre croissant de migrants placés en "procédure prioritaire". La demande de ces derniers tend à passer devant les autres et donc à retarder l'examen de leur dossier, assure le juriste.

Reste la saturation des centres d'hébergement pour demandeurs d'asile (CADA). 38% seulement des demandeurs d'asile y ont accès du fait du manque de places. M. Guéant a du coup annoncé vouloir "décentraliser" les demandes d'asile, essentiellement concentrées en Île-de-France. Une réforme déjà initiée depuis plusieurs mois et qui fonctionne mal. A Paris, comme à Limoge, Montauban ou Guéret, tous les CADA et toutes les structures d'urgence tournent déjà à plein.

Elise Vincent dans le Monde

Réfugiés : un constat accablant

Caritas et la Croix-Rouge gèrent dans l'urgence les arrivées des réfugiés et s'inquiètent d'une situation qui empire. Pétange en est le dernier exemple.

Même si c'est le gouvernement qui gère les conteneurs de Pétange, les deux associations connaissent le problème sur le bout des doigts et insistent pour que soit enfin menée au Luxembourg une gestion durable du problème du logement des demandeurs d'asile.

Les conditions de vie terribles des Roms réfugiés à Pétange que nous avons soulignées dans Le Quotidien de vendredi n'est que le dernier maillon d'une chaîne. Celui sur lequel se répercute tous les dysfonctionnements de l'administration en amont. C'est ce qui ressort des constats effectués par Yves Schmidt (Caritas) et Nadine Conrady (Croix-Rouge), tous deux spécialistes de la question de l'accueil des demandeurs d'asile.

«Il faut compter en moyenne une centaine d'arrivants par semaine», annonce Nadine Conrady. Problème: les structures d'accueil sont complètement saturées. La place manque, au point que l'on tombe dans l'absurde: «Nous avons des conteneurs qui sont bien équipés, mais on ne peut pas s'en servir parce que l'on n'a pas de terrains où les mettre», précise-t-elle.

C'est le sens de l'appel commun de la ministre de la Famille, Marie-José Jacobs (qui gère les logements pour les demandeurs d'asile), et des organisations comme la Croix-Rouge et Caritas, il y a quelques semaines déjà. Depuis, pas grand-chose n'a bougé. «Le gouvernement aurait pourtant le droit de réquisitionner des locaux ou des terrains, mais il ne le fait pas. Pourquoi?», questionne Yves Schmidt. «Dans ce dossier, tout le monde a l'air plus frileux que l'hiver...», regrette-t-il.

«On touche à la dignité des personnes»

La Croix-Rouge possède trois centres permanents et un provisoire, qui sont tous complets. Caritas aussi fait le maximum : «Notre centre de 50 places est plein et nous avons réquisitionné un autre de nos bâtiments pour y installer des familles. Nous sommes prêts à installer des conteneurs dans notre cour, mais il faudrait maintenir trouver une solution durable. Les arrivées de demandeurs d'asile ne s'arrêteront pas demain», relève Yves Schmidt.

Actuellement, des bases de scouts (comme à Liefrange) et des centres de vacances sont occupés par les réfugiés. «Ce ne sont que des solutions à court terme qui camouflent plus qu'elles ne résolvent le problème», selon Yves Schmidt.

Au foyer de premier accueil de la Croix-Rouge Don Bosco, à Luxembourg, par où passent tous les nouveaux venus, on sature: «Nous avons logé jusqu'à 290 personnes, alors que nous n'avons que 150places... On ne peut pas faire plus. Nous avons atteint nos limites au niveau de l'hébergement, de l'accueil et de l'encadrement.»

Et malgré ce taux d'occupation au- delà du raisonnable, nombreux sont ceux qui, à Pétange, regrettaient d'avoir été envoyés dans le Sud... «Si on pense qu'en accueillant mal les gens, ça les fera repartir, on touche le problème de la dignité de la personne et là, c'est très grave», s'indigne Yves Schmidt.

Ce qu'il espère, c'est que des travailleurs sociaux pourront accompagner davantage les demandeurs d'asile perdus dans un environnement inconnu. Ce serait d'autant plus indispensable que le taux d'illettrisme est important chez les Roms. «Si un de nos éducateurs veut passer, il faut qu'il demande l'autorisation au ministère puisque les gardes des sociétés privées, qui sont payés par le gouvernement, ont pour consigne de ne pas laisser entrer de personnes extérieures.»

Ces deux acteurs de l'accueil d'urgence des réfugiés pointent le même problème essentiel: le gouvernement est dans la réaction, pas dans l'action. Et à force d'user de mesures provisoires, on repousse le seuil critique sans amener de véritables réponses à un problème national.

Erwan Nonet dans le Quotidien (Luxembourg)

vendredi 25 novembre 2011

Guatemala: Tecun Uman, antichambre du cauchemar mexicain pour les clandestins

Au moment où le crépuscule vient obscurcir les artères poussiéreuses du village guatémaltèque de Tecun Uman, Javier Castillo, un Salvadorien de 17 ans, se prépare discrètement à passer la frontière mexicaine pour poursuivre son périlleux voyage vers l'eldorado américain.

tecun uman

"Plusieurs membres de ma famille se trouvent aux Etats-Unis, ils m'ont aidé à financer le voyage. Maintenant, vu comme les choses se présentent, ça risque ne ne pas être évident d'y arriver", admet Javier, lucide quant aux multiples périls qui le guettent. Sur la rive du large fleuve Suchiate, qui marque la frontière entre les deux pays, les contrebandiers locaux facturent 10 quetzals (environ un euro) la traversée sur des barques de fortune faites de pneumatiques et de troncs d'arbre. Les "capitaines" consentent souvent à surcharger leurs embarcations pour limiter les voyages et augmenter leur bénéfice, s'exposant à un chavirage et au comité d'accueil de douaniers mexicains peu scrupuleux mais gourmands sur le rivage d'en face, à Ciudad Hidalgo.

Mais cette traversée n'est qu'un avant-goût des dangers à venir pour les quelque 140.000 clandestins qui tentent chaque année de gagner la frontière mexico-américaine, selon les estimations des autorités de Mexico. Parmi ces aventuriers, un sur sept tombe aux mains du crime organisé, affirme la Commission nationale mexicaine des droits de l'Homme. Au début, les cartels mexicains se contentaient de dépouiller les clandestins, mais plus récemment, les "narcos" ont trouvé le moyen d'obtenir des rançons de milliers de dollars auprès des familles des clandestins résidant aux Etats-Unis, ou à transformer leurs proies en "mules" pour convoyer de la drogue. D'autres encore moins chanceux sont vendus comme esclaves, les femmes étant en général forcées à se prostituer les hommes à travailler dans les champs. Il peut aussi arriver que certaines organisations, comme le cartel des "Zetas" aillent jusqu'à exécuter ceux qui refusent de rejoindre leurs rangs.

Si Javier ne tombe pas dans leurs mailles, ce seront probablement des propriétaires terriens sans scrupules ou des policiers corrompus qui se chargeront de les détrousser avant - au mieux - de les livrer aux autorités qui les expulseront. Aussi, avant d'entamer ce long périple à travers le Mexique, nombre d'entre eux reprennent leur souffle à Tecun Uman, un village chaud et humide d'apparence tranquille, qui porte le nom d'un héros national maya tué par les Espagnols au XVIe siècle.

Mais cette bourgade du nord-ouest du Guatemala recèle aussi de nombreuses menaces, car ces migrants sont mal vus par la population et se voient déjà exposés au crime organisé mexicain, dont les ramifications s'étendent dans toute l'Amérique centrale. "Tecun Uman est un petit village mais aussi un enfer. Ici les sans-papiers souffrent d'humiliations, sont attaqués, maltraités, frappés...", affirme à l'AFP le père Ademar Barilli, qui dirige un refuge pour clandestins ayant déjà abrité, depuis 1994, plusieurs dizaines de milliers d'entre eux, principalement des Salvadoriens et Honduriens.

Les "droits humains fondamentaux sont bafoués comme jamais et aucun responsable ne prend cette situation au sérieux. Une grand permissivité règne, c'est lamentable!", affirme le père Barilli, qui a déjà reçu plusieurs menaces d'organisations qui exploitent les clandestins. Son refuge représente une forme de havre de paix pour Edmundo Lopez, un Hondurien qui tente l'aventure pour la troisième fois... à l'âge de 65 ans. Pour lui, c'est "la nécessité (qui l')oblige à s'aventurer à tenter d'atteindre les Etats-Unis", faute de perspectives dans son pays frappé par la pauvreté et le chômage. "Les risques existent partout, et je ne crains pas qu'il m'arrive quoi que ce soit de grave au Mexique", assure celui qui vient du pays au taux d'homicide le plus élevé au monde. Cette nuit, Javier et Edmundo tenteront l'aventure ensemble, loin de l'oasis du père Barilli.

AFP

Nouvelle structure d'accueil pour demandeurs d'asile en Valais

Une structure d'accueil pour requérants d'asile sera ouverte dès jeudi en Valais à Vernamiège en remplacement de celle des Collons. La commune du Mont-Noble, dont fait partie Vernamiège, est déçue d'avoir été mise devant le fait accompli et cela dans un délai très court.

Le centre de Vernamiège accueillera environ 60 personnes (principalement des familles) qui auront préalablement été hébergées dans un foyer de premier accueil. "Une école est prévue sur place pour les enfants mais ils ne seront pas intégrés au centre scolaire de Nax", a précisé le président de la commune du Mont-Noble.

"Le bâtiment qui servira de centre d'accueil pour requérants est utilisé en qualité de colonie. On devra donc contacter tous les groupes qui ont réservé pour la saison de ski", a-t-il ajouté.

Moins qu'en 2009

Le nombre de candidats à l'asile attribués par la Confédération ne cesse d'augmenter, a indiqué l'Etat du Valais. A mi-novembre, leur nombre s'élevait en Valais à 1684, contre 1540 pour la même période de 2010, soit une hausse de 9%. Ces chiffres restent toutefois inférieurs à ceux des années 2008 (1768) et 2009 (1706).

Le Département valaisan de la sécurité, des affaires sociales et de l'intégration recherche un autre lieu d'accueil pour les célibataires. La Confédération attribue au Valais 3,9% des requérants d'asile qui sortent des centres fédéraux d'enregistrement et de procédure.

ATS

Auschwitz: le cliché douteux d'un prof vaudois suscite la polémique

Un enseignant vaudois publie sur son mur Facebook un cliché où il pose tout sourire devant l’entrée de l’ancien camp de concentration, en brandissant un paquet de «nasi goreng».

bernard junod

Tout le monde ne partage pas le même humour. Et certaines blagues desservent parfois leur auteur. Bernard Junod, professeur dans le canton de Vaud, a jugé amusant de se faire photographier devant le tragiquement célèbre «Arbeit macht  frei» d’Auschwitz, un paquet de «nasi goreng» à la main, ont révélé hier les sites du Matin.ch et du Temps.ch.

Le jeune homme, également politicien au sein du Mouvement Citoyens Vaudois, a effectué son «gag», alors qu’il participait mercredi à une visite de formation organisée chaque année par la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (CICAD). La découverte d’Auschwitz se faisait en compagnie de 120 enseignants et 60 élèves,

Pointé du doigt par la CICAD, Bernard Junod a présenté ses excuses hier, notamment via son mur Facebook. Et en cas de nécessité, il affirme être prêt à prendre la plume pour demander pardon.

Mais le trentenaire devra aussi se justifier auprès du directeur général de l’Enseignement obligatoire vaudois, Alain Bouquet, qui affirme vouloir ouvrir une procédure contre lui. Celui-ci risque, dans le pire des cas, le licenciement.

L’enseignant, explique dans le Matin.ch qu’il s’agissait «d’une grosse déconnade» et qu’il «n’y avait aucune volonté de profaner quoi que ce soit.» Il justifie l’innocence de son geste, en affirmant avoir une grand-mère juive et en insistant sur le fait qu’il n’a rien contre le peuple juif. Reste que le peu subtil jeu de mot sauce «nasi goreng» peut laisser pour certains un goût amer.

24 Heures

jeudi 24 novembre 2011

Des migrants afghans se résignent à rentrer chez eux

Près de 650 Afghans ont choisi d’accepter un dispositif de retour volontaire dans leur pays proposé par les autorités françaises.

L’Angleterre presque hors d’atteinte depuis la fermeture de la « jungle » de Calais voilà deux ans, l’asile de plus en plus difficile à obtenir : les migrants afghans n’ont plus d’autre choix que d’accepter le « retour volontaire » dans leur pays, assorti il est vrai d’un petit pécule. L’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), chargé d’organiser les rapatriements, verse en effet une « aide au retour » de 2.000 € par adulte et finance le voyage de tous ceux qui optent pour cette solution. En outre, « dans le prolongement de l’évacuation de la “jungle” de Calais, des projets de réinsertion (jusqu’à 7.000 € pour la création d’une activité économique, NDLR) ont été financés au bénéfice d’Afghans en Afghanistan », a indiqué l’Ofii. Il faut dire que malgré la situation dans leur pays, considéré par la France comme étant « en crise » et non « en guerre », les Afghans ont de « faibles chances » d’obtenir la protection dans l’Hexagone, hormis les mineurs non accompagnés qui ne peuvent pas être renvoyés.

L’ombre des talibans

« Les Afghans ne correspondent pas à la population classique des demandeurs d’asile comme les Tchétchènes, qui viennent en famille. Ils sont jeunes, ils viennent pour travailler. Ce sont des migrants économiques », selon l’Ofii. Mais, répondent France terre d’asile et Emmaüs dans une étude mise en ligne mercredi, « la présence de considérations économiques n’exclut pas a priori celle de motifs de persécution de nature conventionnelle et/ou relative à une situation personnelle d’insécurité généralisée en contexte de crise ou de guerre ». Selon l’Office français pour les réfugiés et apatrides (Ofpra), « la demande afghane invoque de plus en plus fréquemment l’obligation faite aux hommes de se rallier aux forces des talibans, et le risque découlant du soutien – réel ou imputé – aux autorités dans les zones contrôlées par ceux-ci ». L’année dernière, l’Ofpra a enregistré 735 demandes de statut de réfugié de la part de ressortissants afghans, dont 242 ont reçu une suite favorable.

France Soir

La Suède, première destination des demandeurs d’asile des Balkans

La Suède est le pays recensant le plus de demandes d’asile provenant des pays des Balkans. C’est ce que rapporte l’agence d’information INA.

Selon les données de la Commission européenne, la Suède a reçu un nombre important de demandes d’asile en 20010, première année du régime de libéralisation des visas. La plupart venait de Serbie, du Kosovo et de Macédoine. Après la Suède viennent l’Allemagne, avec 6 500 demandes, et la France avec 5 800. Par rapport à la première année de mise en application du régime de libéralisation des visas, les demandes sont moins nombreuses cette année. La Macédoine, quant à elle, a adopté certaines mesures afin d’éviter une utilisation abusive de cette mesure de libéralisation.

albinfo.ch

mercredi 23 novembre 2011

La parole aux aumôniers

Dans le film «Vol spécial», les aumôniers sont un peu oubliés. Pourtant, il jouent un rôle essentiel auprès des requérants d'asile.

Depuis quatre ans, Anne-Madeleine Reinmann se partage entre l'Aumônerie genevoise œcuménique auprès des requérants d'asile et des réfugiés (AGORA), l'accueil œcuménique de l'aéroport de Genève et des visites aux détenus du centre de détention administrative de Frambois. Un travail difficile tant les situations des détenus sont parfois dramatiques.

Dans son documentaire «Vol spécial», le réalisateur Fernand Melgar montre le quotidien du personnel de Frambois et des étrangers en situation irrégulière, mais n'aborde pas celui des aumôniers. «Chaque semaine, nous passons beaucoup de temps à écouter les détenus. Nous avons quelquefois des discussions profondes alors que, d'autre fois, ils ont juste besoin de dire leur ras-le-bol», explique Anne-Madeleine Reinmann.

Ecouter et mettre en contact

Les aumôniers sont, avant tout, à l'écoute des requérants d'asile, que ce soit à Frambois ou à l'aéroport: «Nous répondons à leurs besoins en leur achetant par exemple une carte téléphonique. Nous les mettons souvent en contact avec d'autres organismes, comme l'association ELISA-asile, avec laquelle nous collaborons beaucoup. Elle leur apporte une aide juridique en leur expliquant comment présenter leur situation», précise l'aumônier.

La demande pour un accompagnement spirituel est forte, relève Anne-Madeleine Reinmann: «La plupart ont un grand besoin de vivre leur foi. J'achète des bibles à leur demande. Ce n'est pas toujours facile selon leur langue! J'en cherchais une en tigrigna. J'ai contacté un prêtre arrivé comme requérant il y a trois ans. Il a réussi à en faire venir une directement d'Erythrée, que j'ai pu offrir au requérant. Des détenus comparent leur histoire personnelle avec celle de personnages bibliques.»

L'aumônier s'adapte aux besoins de chacun: «Je prie pour ceux qui le souhaitent et avec ceux qui en font la demande. Ils me disent que c'est précieux. Nous prions ensemble lors de cultes ou en petit comité, ce qui correspond mieux à leur spiritualité. Les musulmans sont ouverts sur le fait que je sois une femme et chrétienne. Cela n'a jamais posé de problème.»

Son travail d'aumônier n'est pas toujours facile à vivre. «C'est gratifiant mais il faut aussi pas mal d'humilité. Cela m'inquiète beaucoup de ne pas savoir ce qui arrive aux personnes expulsées, parfois volées voire emprisonnées dès leur arrivée. Quelquefois, le sentiment d'impuissance est insupportable. Il faut vivre avec le fait de ne rien pouvoir faire d'autre qu'offrir un accompagnement qui les aide à tenir le coup. Ma foi est importante, tout autant que le fait de la partager», conclut Anne-Madeleine Reinmann.

Bonne Nouvelle

vendredi 18 novembre 2011

Asylbewerber machen Ferien in der Heimat!

Sie suchten Asyl in der Schweiz, weil sie nach eigenen Angaben verfolgt wurden. Jetzt kommt aus: Hunderte von «Flüchtlingen» machten Ferien in ihrer vermeintlich gefährlichen Heimat.

Seit rund einem Jahr dürfen vorläufig Aufgenommene ohne Angaben von Gründen ins Ausland reisen. Aktuell leben 23 483 Personen hier. 2500 baten um eine Reisebewilligung. Einige von ihnen nutzten die Reisebewilligung aber nicht nur für Ausflüge, sagt Michael Glauser vom Bundesamt für Migration (BfM) zu Radio DRS: «Man hat Missbräuche festgestellt.»

Hunderte der Betroffenen sind offenbar in ihr Heimatland zurückgereist – genau dorthin, von wo sie nach eigenen Angaben Schutz bräuchten. Das stehe im Widerspruch zu ihrem Status in der Schweiz und zur Tatsache, dass vorläufig Aufgenommene zu Beginn oft Sozialhilfegelder bezögen, sagt Glauser. Es geht laut Radio-Recherchen vor allem um Menschen aus dem Irak, der Türkei und den Balkanstaaten. Um derartige Reisen zu unterbinden, reagiert der Bund umgehend. Die Reiseverordnung wird entsprechend geändert.
Flüchtlingshilfe findet Verschärfung «diskriminierend»

Neu soll das Reisen für vorläufig Aufgenommene nur noch in Ausnahmefällen und nach einer genauen Überprüfung der Gründe bewilligt werden. Unzumutbar, findet Beat Meiner, Generalsekretär der Flüchtlingshilfe: «Es ist diskriminierend und eine unzulässige Einschränkung, dass diese Liberalisierung aufgehoben wird. 95 Prozent der vorläufig aufgenommenen Personen bleiben sehr lange in der Schweiz und müssen reisen können, um beispielsweise zurückgelassene Familienangehörige zu besuchen.»

Karin Müller dans le Blick

vendredi 4 novembre 2011

Fatmir K., depuis quinze ans en Suisse et débouté

Le collectif Droit de rester dénonce l’arbitraire dans le traitement cantonal des dossiers des requérants. Et craint un effet Vol spécial , qui pousserait les autorités à multiplier les expulsions.

Fatmir K. (42 ans) figure sur une liste de 37 personnes qui répondent aux critères de l’article 14 de la loi sur l’asile (LAsi), permettant normalement la régularisation de leur situation. Soit une présence en Suisse depuis au moins cinq ans, un lieu de séjour toujours connu des autorités et une intégration «poussée». Pourtant, un seul de ces requérants signalés en juin 2011 par le collectif Droit de rester au conseiller d’Etat en charge de l’asile, Philippe Leuba, a obtenu un permis de séjour depuis.

Ce cas avait-il un meilleur dossier que les autres? «Non, répond Sabine Masson, membre du collectif. Cette décision est complètement arbitraire, comme souvent.» Le collectif accuse le Service de la population (SPOP) de mettre tout le monde dans le même panier. «Certains requérants déboutés ont reçu des courriers types où même le nom n’avait pas été modifié», s’indigne Graziella de Coulon, autre membre du collectif.

Fatmir K. veut encore croire qu’il ne retournera pas en Albanie, qu’il a fuie il y a quinze ans. Il y était agent de police. «Nous étions utilisés comme de la chair à canon, se souvient-il. La Suisse reconnaissait l’urgence d’accueillir les Albanais en 1996.» Depuis 2008, il a pour seul papier d’identité la «feuille blanche» qui indique qu’il touche l’aide d’urgence. Il est l’un des quatorze requérants vaudois que Droit de rester a réussi à faire libérer de Frambois à la suite de la mort d’un Nigérian lors de son renvoi et de la suspension des vols spéciaux. Preuve que l’action civile peut faire bouger les choses, insiste Graziella de Coulon. Aujourd’hui, il est à nouveau menacé d’expulsion par le SPOP.

Y aurait-il un «effet Vol spécial » qui inciterait les autorités à resserrer la vis, s’interroge le collectif? «Le film de Fernand Melgar n’a eu aucun effet sur la pratique du canton, insiste Philippe Leuba. Priorité est toujours donnée au renvoi de requérants possédant un casier judiciaire.» Or Fatmir K. en a bien un. En 2003, il était contrôlé en possession d’un faux billet de 200 francs que lui avait remis une connaissance. Pour ce délit, il avait écopé de 10 jours avec sursis et de 1500 francs d’amende. Assez pour être indésirable? «L’infraction est mise en rapport avec les efforts d’intégration, qui l’emporteront toujours en cas de délit mineur», pondère Philippe Leuba.

«Fatmir K. a toujours travaillé, notamment comme traducteur pour l’EVAM, jouant lui-même un rôle intégratif. Tous ses liens sociaux sont aujourd’hui en Suisse. Je crois que l’on peut parler d’intégration poussée», conclut Sabine Masson.

24 Heures

mardi 1 novembre 2011

Procédure de Dublin accélérée

procédure dublin accélérer

24 Heures

«Même si on enlève sabots et foulards,les gens flairent que l’on est différent»

La hausse spectaculaire des cambriolages à Genève et Vaud est souvent imputée aux gens du voyage de France voisine. Rencontre avec cette communauté appauvrie par la crise.

Un bout de terrain à l’entrée du village médiéval d’Yvoire. La famille de Marcelle, des Tziganes, a posé là ses caravanes depuis plusieurs décennies. La parcelle agricole à l’époque ne coûtait pas cher. Le grand-père a acheté. Pas de toilettes, pas d’eau, la famille se débrouille. «Mais on paie les impôts locaux», lance Marcelle. Sa maman a grandi dans le milieu du cirque. Son papa faisait les fêtes foraines. Des gens du voyage aujourd’hui semi-sédentarisés mais qui ont gardé «l’âme errante».

Marcelle semble attendre la «fameuse» question: sommes-nous des voleurs? Elle est au courant des accusations suisses qui ces derniers mois – encore plus que dans le passé – pèsent contre les Tziganes. Vingt à trente cambriolages chaque jour dans le canton de Genève. On dépasse parfois les 40.

La hausse est constante depuis trois ans. Le quotidien 24 heures rapportait récemment qu’entre le 5 et le 12 septembre la police faisait état de 90 nouveaux cambriolages dans le canton de Vaud, dont 30 à Lausanne, contre respectivement 57 et 17 en 2010. Le gang dit «des Géorgiens» partiellement démantelé en 2009 à Genève semble s’être remis au travail; des Maghrébins tenteraient également de s’implanter sur ce réseau. Mais les gens du voyage seraient les plus actifs.

Jean-François Cintas, un policier genevois en charge de la Brigade des cambriolages, confiait au Temps du 25 juin que le facteur le plus important était l’augmentation du prix de l’or. La spécialité, affirme-t-il, des gens du voyage. «Dans n’importe quel appartement, on trouve 25 à 30 grammes d’or sous forme de chaînettes, gourmettes ou autres. Les Tziganes trient tout sur place. Même les enfants savent le faire», expliquait le policier. Les auteurs viendraient de Haute-Savoie, mais aussi de Lyon, Grenoble voire Paris.

Marcelle sourit et se dit «tellement habituée à tout cela». Elle affirme qu’il n’est pas besoin d’aller jusqu’en Suisse pour être accusé «de tout et n’importe quoi». «Quand il y a un vol dans le coin, la police vient systématiquement chez nous, elle nous interroge, elle fait des recherches d’ADN», dit-elle.

Arrive Marvin, l’un de ses enfants. Il a 22 ans, travaille dans le rempaillage et le ferraillage, «comme le papa». Il raconte les bagarres de jadis dans les cours de récréation à cause du mot manouche et de l’adjectif insultant qui va avec. Il raconte aussi ce récent larcin dans une entreprise dans laquelle il a brièvement travaillé: «La première personne interrogée c’était moi, trois années après! Je suis allé voir mon ancien patron pour lui demander pourquoi il avait donné mon nom, moi qui ne lui ai jamais causé de problème. Il n’était pas fier.»

Marcelle dit qu’elle est suivie dans les magasins, que tout cela ne change pas. «Mon père nous a appris à nous comporter mieux que les autres, à enlever les sabots et les foulards, mais les gens flairent que l’on est différent.»

Jean-Marc Bouvet, chef de service pour le secteur gens du voyage à l’Alap, association qui défend leurs droits en partenariat avec la Préfecture de Haute-Savoie, n’observe pas d’augmentation des délits mais retient que le département est celui qui, en France, draine le plus de gens du voyage après la région parisienne. «La Haute-Savoie est riche, son économie est dynamique avec les marchés et les foires qui attirent les commerçants ambulants, et puis il y a la Suisse tout à côté», argue-t-il.

Ceci expliquerait-il cela? «Il y a des brebis galeuses dans chaque communauté, tempère un policier annécien, une minorité est impliquée dans les délits, moins de 10%.»

Déléguée nationale à l’Union française des associations tsiganes (UFAT), Francine Schutt-Jacob raconte: «Nos parents qui faisaient les marchés se fournissaient dans les usines du nord. Aujourd’hui, tout le monde passe par des grossistes car tout est fabriqué en Chine, cela revient beaucoup plus cher.»

Jean-Marc Bouvet enchaîne: «Cette population est fortement précarisée, beaucoup travaillaient par exemple dans le décolletage dans la vallée de l’Arve, secteur qui a subi de plein fouet la crise, ils ont été souvent les premiers licenciés.»

Francine Schutt-Jacob arpente le département à la rencontre des familles confrontées à des difficultés d’autorité. Elle mise sur la culture traditionnelle pour mieux encadrer les jeunes et n’omet jamais de rappeler certains acquis comme la loi Besson du 5 juillet 2000, qui oblige les communes françaises de plus de 5000 habitants à mettre à la disposition des gens du voyage des aires d’accueil.

«C’est une avancée, même si souvent l’eau et l’électricité sont coupées à l’approche de l’hiver, ce qui oblige les familles à errer ou fuir vers le sud de la France», indique-t-elle. La déléguée de l’UFAT conteste l’appellation administrative «gens du voyage» qui mêle les Roms français, les Roms venus d’Europe de l’Est, les Sintés, les Yéniches, Gitans «et qui crée des amalgames»: «Nous sommes essentiellement des Français qui depuis 1912 devons faire signer tous les trois mois nos carnets de circulation dans les gendarmeries.»

L’UFAT réclame l’abrogation de ce carnet «pour rétablir une vraie citoyenneté». La lutte contre la délinquance passerait aussi par là. Pas facile de dire cela à Elvire, qui vit dans sa vieille caravane à Anthy, près de Thonon. Des inscriptions racistes ont été écrites sur la route près du campement, elle parle de jets de pierres la nuit, et le maire veut la reloger à Evian.

«Mes grands-parents sont enterrés ici et on veut nous installer dans un cimetière, je suis allée et j’ai vu, c’est comme un camp de concentration, avec des barbelés, vous savez ce que ce que les camps de concentration nous rappellent à nous Tziganes? Allez après cela dire à nos hommes de ne pas faire des c…».

Christian Lecomte dans le Temps

Après une manif des radicaux, samedi, la Coordination des organisations islamiques prépare «sa» journée contre l’islamophobie.

Ne plus laisser les musulmans radicaux monopoliser le débat sur l’islam en Suisse: telle est la volonté affichée par la Coordination des organisations islamiques (COIS), en réaction à la très controversée «journée contre l’islamophobie», organisée samedi à Berne.

Contacté hier, Farhad Af­shar, président du COIS, a fait part de son projet d’organiser à son tour un événement sur le thème de l’islamophobie, sans étoiles jaunes ni slogans provocateurs: «Si on veut lutter contre l’islamophobie, il faut le faire en coopérant avec les forces libérales de ce pays, pas par la provocation. C’est pour cela que nous organiserons début 2012 un colloque sur le thème, à Berne ou à Zurich. Il réunira des scientifiques, des représentants des partis, ainsi que des personnalités chrétiennes et juives.»

Une conférence entre gens de bonne compagnie, quand Nicolas Blancho et les siens n’hésitent pas à descendre dans la rue pour défiler? Pour Lucia Dahlab, vice-présidente de l’Union des organisations musulmanes de Genève, la réponse est un peu légère. «Un énième colloque aura une portée limitée. C’est sur le terrain qu’il faut être actif. On pourrait par exemple imaginer une sorte de mosquée itinérante, une caravane qui sillonnerait la Suisse en allant à la rencontre des gens.» Une telle initiative, ajoute-t-elle, a été envisagée récemment par l’Union vaudoise des associations musulmanes (UVAM). Ce que confirme le vice-président de l’UVAM, Pascal Gemperli, qui précise que le projet n’est plus d’actualité. «Il y a d’autres choses à faire que cela, note-t-il. Le meilleur moyen de lutter contre l’islamophobie, c’est d’œuvrer sur le long terme pour la reconnaissance légale de la communauté musulmane.»
Sur ce point, le président de la Coordination des organisations islamiques suisses est d’accord: il est plus que jamais nécessaire de faire en sorte que les musulmans modérés puissent parler d’une seule voix: «Nous travaillons très dur, ces temps-ci, avec la Fédération des associations faîtières islamiques, pour mettre en place un consistoire qui représentera tous les musulmans de Suisse, précise Fahrad Afshar. Les statuts devraient être achevés début 2012. Grâce à lui, l’islam pourra enfin accéder à la normalité. Dès lors, une organisation comme celle de Nicolas Blancho perdra de son utilité.»

Le Matin