jeudi 17 février 2011

Le mauvais temps stoppe la vague de réfugiés

Le mauvais temps et des contrôles renforcés des autorités tunisiennes sur les côtes ont stoppé le flux de réfugiés vers l'Italie du Sud.

La Suisse a de son côté donné son feu vert à une demande d'aide de Frontex, l'agence de surveillance des frontières européennes.

Pour le troisième jour consécutif, aucune arrivée de réfugiés n'a été enregistrée jeudi sur l'île de Lampedusa, située entre la Sicile et la Tunisie. Le sort d'un bateau transportant 500 migrants supposés avoir quitté la Tunisie mardi restait toutefois ouvert, l'action de recherche lancée par les gardes-côtes étant restée infructueuse.

Au total 1800 migrants se trouvent actuellement à Lampedusa, hébergés dans un camp d'accueil prévu normalement pour 850 personnes. Selon différents médias, des centaines d'entre eux ont entamé une grève de la faim pour protester contre leurs conditions de vie. Ils se plaignent notamment de ne pas assez recevoir de nourriture.

Le maire de l'île Bernardino De Rubeis a mis en garde contre un «effondrement» du territoire si d'autres réfugiés débarquaient.


Feu vert Suisse à une demande de Frontex

L'arrivée massive de migrants a aussi entraîné l'activation de Frontex, l'agence de surveillance des frontières européennes. Celle- ci a envoyé une demande d'aide à ses pays membres, y compris la Suisse, qui y a répondu favorablement, a indiqué jeudi à l'ATS la porte-parole de l'administration fédérale des douanes, Stefanie Widmer.

Il s'agira du premier engagement de gardes-frontières suisses dans le cadre d'une opération Frontex. La Suisse ne peut se joindre à de telles opérations que depuis fin janvier, les derniers accords nécessaires ayant été signés à ce moment.

Au total 30 gardes-frontières ont été formés en vue d'interventions à l'étranger. Seuls cinq d'entre eux peuvent cependant être détachés en même temps.

ATS relayée par 20Minutes

Les « boat people » de Lampedusa mettent l’Europe à rude épreuve

afflux lampedusa tunisiensLampedusa : le nom de ce confetti dans la Méditerranée est devenu tout un symbole, depuis l'arrivée ces derniers jours de quelque 5 000 migrants clandestins sur ses côtes. L'Europe s'est fait surprendre par l'affluence massive de Tunisiens mais le phénomène n'est pas nouveau. Lampedusa est depuis longtemps la première terre sur la route des migrants africains vers le nord.

Les quelque 6 000 habitants de cet îlot de 20 kilomètres carrés ont l’habitude de voir débarquer les migrants sur leurs côtes. Il suffit de regarder une carte pour comprendre : Lampedusa est plus proche de l'Afrique que de l'Europe. Accessible facilement par la mer, l'île est devenue la porte d’entrée idéale pour les migrants en quête d’une meilleure vie. En 2008 déjà, 32 000 « boat people » avaient débarqué dans le port de Lampedusa.

Cette fois-ci, c’est la«révolution de Jasmin» qui a provoqué un départ massif de Tunisiens vers l’Europe. Ce sont les déçus et les impatients du changement de régime qui arrivent, en profitant de la désorganisation des autorités locales. Pour la plupart, ce sont des hommes jeunes qui disent qu’ils ne trouvent pas de travail chez eux. La liberté, c’est bien beau, mais elle ne donne pas à manger, souligne l’eurodéputée du groupe des Verts, Hélène Flautre : « Le régime Ben Ali a considérablement appauvri la population et fermé toute perspective pour la jeunesse. Il faut donc mobiliser toutes nos forces pour soutenir ceux qui aujourd’hui en Tunisie se battent pour le développement du pays ».

Face à l'urgence, Bruxelles a promis de débloquer 17 millions d'euros immédiatement, et 258 millions d'euros d'ici à 2013 pour justement aider la Tunisie.

« Défendre nos frontières »

Au-delà d’une aide financière pour soutenir la transition démocratique et pour développer les régions tunisienne qui souffrent d’une extrême pauvreté, l’Europe devrait mettre en place une approche commune. C’est en tout cas l’avis du secrétaire d’Etat aux Affaires européennes Laurent Wauquiez. Mais quelle politique ? Laurent Wauquiez, lui, se fait l’avocat d’une réponse sécuritaire : « Très clairement, avec le ministre de l’Intérieur , Brice Hortefeux, nous plaidons pour une relance européenne de la défense de nos frontières. Nous devons renforcer les capacités opérationnelles de l’agence Frontex (Agence européenne de surveillance des frontières extérieures) et créer une coordination des différents gardes-frontières ».

Rome est sur la même longueur d’onde que Paris : les Italiens ont demandé un élargissement du rôle de Frontex. Mais cela paraît difficile, tant que les 27 ne lui accordent pas assez de moyens pour acheter des bateaux et des hélicoptères. Aujourd'hui, Frontex n'est doté que de 90 millions d'euros par an.

Dans le passé, l’Europe pouvait compter sur les régimes autoritaires pour empêcher un départ massif des candidats à l’immigration. Aujourd’hui, ce n'est plus le cas. Les régimes s’écroulent les uns après les autres, il faudrait définir une nouvelle politique d’immigration et d’asile. La commissaire européenne aux Affaires intérieures, Cecilia Malmström, n’est pas la seule à la réclamer : « Nous devons établir un système commun d'asile au plus vite. Dans une Union de valeurs partagées, il n'est pas concevable d'avoir de telles différences entre les pays membres. Nous devons protéger les plus vulnérables, nous avons besoin d'un système efficace pour que les gens ne restent pas des mois et même des années dans les centres de rétention. C'est douloureux pour les individus et très cher pour la société. Nous avons besoin d'améliorer cela ».

Bruxelles est impuissant tant que les 27 n’accordent pas leurs violons

Cecilia Malmström et son équipe de la Commission à Bruxelles se disent impuissants tant que les 27 gouvernements n'accordent pas leurs violons. Il faut savoir que nombre de pays - Grande-Bretagne et pays scandinaves en tête - refusent toute solidarité européenne avec les Etats comme l'Italie, la Grèce ou l'Espagne qui sont confrontés régulièrement à un afflux important de migrants et de demandeurs d'asile.

Pendant que les débats continuent, il faudra trouver une solution pour ceux qui ont ces derniers jours choisi Lampedusa pour atteindre l’Europe. Dans un premier temps, le chef de la diplomatie italienne Franco Frattini avait souhaité un rapatriement au plus vite. Le Conseil de l’Europe, lui, exige qu’il n’y ait pas d’expulsion massive, comme le souligne Marc Neville, directeur du département immigration à l'assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. « Le problème est que dans ce groupe, vous trouvez des migrants, des demandeurs d'asile et des refugiés. Vous ne pouvez pas tout simplement les renvoyer tous ensemble. Il y en a qui ont des besoins de notre protection. Il faut donc traiter chaque cas individuellement ».

De toute façon, l’accord bilatéral entre la Tunisie et l’Italie qui permettait des rapatriements, n’est plus appliqué pour le moment. Pas moins de 2 000 migrants se trouvent actuellement à Lampedusa, dans un centre d’accueil qui n'a que 800 places.

Heike Schmidt pour rfi

Royaume-Uni: le dénuement des demandeurs d'asile

Oxfam a ajouté sa voix au choeur grandissant de ceux qui s’inquiètent du système de décision britannique relatif aux demandes d’asile et des souffrances que celui-ci entraîne, dans un rapport sur les demandeurs d’asile sans ressources qui n’ont pas le droit de travailler, mais ne peuvent prétendre aux aides sociales.

Ces hommes et ces femmes qui ont raconté de façon anonyme leur histoire dans « Coping with Destitution [Comment affronter le dénuement] : Les stratégies de survie des demandeurs d’asile au Royaume-Uni », vivent à l’écart, sans un sou et dépendent de la charité d’autrui.
« On te traite sans aucun respect, on abuse de toi, tu deviens « de la nourriture en échange de travail », nettoyer la maison ou faire la lessive… Ce n’est pas facile de vivre avec des amis. Ils commencent à en avoir assez de toi quand tu n’as pas de revenus, » a dit un demandeur d’asile à l’enquêteur d’Oxfam durant un entretien.

« On peut utiliser une carte de bus et y traîner toute la nuit. C’est très risqué parce que tu ne sais pas où tu vas, tu passes du temps aux arrêts de bus pendant la nuit et tu peux te faire ramasser… Et même si tu as un endroit où aller, tu as le sentiment que tes amis ont besoin d’intimité, ou bien tu ne te sens pas à l’aise de rester chez eux, » a dit un autre, soulignant les difficultés de la vie quotidienne.
« J’ai connu quelqu’un qui a travaillé pendant trois mois et à qui on avait promis 35 livres (56 dollars) par jour ; mais quand il a demandé son salaire après trois mois, le patron a dit qu’il ne lui donnerait que 50 livres (80 dollars) pour les trois mois. “Mais c’est 3 000 livres (4 800 dollars) qu’il me faut !” a t-il dit. Mais le patron l’a menacé de le dénoncer aux services de l’immigration ; que pouvait-il faire ? » C’est ce que raconte un demandeur d’asile dans le rapport.  Certains, dont le cas n’a pas encore fait l’objet d’une décision, ont des problèmes administratifs et se voient interdits de travailler mais aussi de demander toute aide publique.

Dilemme et confusion

La plupart de ceux qui sont dans la misère sont des gens qui se sont vu refuser leur demande d’asile, mais préfèrent toutefois vivre sans un sou au Royaume-Uni que de retourner dans leur pays. En 2005, le Bureau national d’audit du gouvernement britannique estimait qu’ils étaient entre 155 000 et 283 000 à vivre dans cette situation, sans aucune source légale de revenus.
L’assistance pour les personnes qui demandent l’asile en Grande-Bretagne n’a cessé de diminuer depuis 10 ans. Il fut un temps où elles avaient droit aux prestations sociales standard et où elles pouvaient demander un permis de travail, si elles devaient attendre plus de six mois la décision concernant leur demande.

Aujourd’hui, les seules aides auxquelles elles peuvent prétendre sont un logement et une indemnité de 35 livres (environ 55 dollars) par semaine, fournis par le Système national d’assistance pour les demandeurs d’asile (NASS).  Une fois que la demande d’asile et les recours ont été refusés, le soutien s’arrête et le demandeur est censé quitter le pays dans les trois semaines. A ce moment-là, beaucoup de demandeurs d’asile tentent de rester, sans aucun moyen de subsistance.  Même dans les cas où il est difficile, voire impossible, pour eux de partir, parce qu’ils n’ont pas les papiers requis, ou que leur pays d’origine est considéré comme trop dangereux, beaucoup choisissent de disparaître plutôt que de rester dans un logement de la NASS, où on pourrait les trouver facilement et les déporter.

Pour Oxfam, couper les aides aux demandeurs d’asile déboutés pour les pousser à rentrer chez eux « ne remplit clairement pas cet objectif. Les demandeurs d’asile qui sont considérés par les autorités comme étant au bout du processus de demande d’asile, ne retournent tout simplement pas dans leur pays d’origine, même s’ils vivent dans des conditions terribles au Royaume-Uni. »  Selon les organisations qui travaillent avec les demandeurs d’asile, ce sont les mauvaises décisions concernant les demandes d’asile qui sont à la source du problème, car des décisions qui sont ressenties comme arbitraires et injustes encouragent les requérants à rester et à tenter leur chance en faisant appel ou en déposant de nouvelles demandes.

Debora Singer, de Asylum Aid, qui fournit une aide juridique aux demandeurs d’asile, a dit à IRIN que la moitié des femmes avec lesquelles elle avait travaillé et dont la demande d’asile avait initialement été rejetée, avaient obtenu une annulation de la décision en faisant appel.  « Ce que cela signifie, » à son avis, « c’est qu’il y a vraiment quelque chose qui ne va pas au stade initial. Les responsables de l’Agence des frontières [Border Agency] qui prennent la première décision, ont des habitudes de méfiance vis-à-vis des demandeurs. Les recours, eux, sont entendus par des juges de l’immigration qui demandent un niveau de preuve différent et voient la crédibilité autrement. »

Pas d’issue
Les femmes demandeurs d’asile sont particulièrement vulnérables. « Il m’est arrivé d’être dans des réunions où toute la pièce était pleine de femmes vivant dans la misère, » a dit Mme Singer. Elle a connu une femme enceinte qui avait dormi pendant trois mois dans une gare de Londres.
Les enquêteurs d’Oxfam ont rencontré des femmes qui avaient eu recours à la prostitution pour pouvoir survivre ; d’autres avaient noué des relations avec des hommes simplement pour avoir à manger et un toit sur la tête.  La misère peut quelquefois devenir insupportable. La Fédération internationale des réfugiés irakiens a dit à IRIN que l’un de ses membres en Grande-Bretagne s’était récemment suicidé, poussé par le désespoir.

En 2010, Osman Rasoul, un Kurde irakien, s’est donné la mort en sautant du septième étage d’un immeuble de Nottingham. Sa demande d’asile avait été rejetée et ses aides arrêtées, aussi dormait-il dans la rue et vivait-il de paquets de vivres et de dons d’un organisme caritatif local, tout en préparant une nouvelle demande.  L’Agence des frontières du Royaume-Uni défend sa rapidité et sa rigueur, et affirme que le pourcentage des décisions annulées en appel est comparable à celui des autres pays européens.  Hugh Ind, directeur régional de l’Agence, a déclaré: « Nous fournissons un soutien financier pendant que les demandes sont examinées, et aucun demandeur d’asile ne doit être sans ressources tant qu’il a une raison valable d’être ici. Mais nous sommes vraiment convaincus que le soutien financier de ceux qui n’ont pas été considérés comme ayant besoin de protection serait un encouragement à abuser du système et à rester au Royaume-Uni. »

Au Royaume-Uni, le soutien aux demandeurs d’asile est un sujet épineux d’un point de vue politique. En Grande-Bretagne, la presse populiste d’extrême droite diabolise les demandeurs d’asile, et soutenir l’idée d’aides publiques pour ceux qui ont vu leur demande rejetée a de grandes chances d’être sujet à controverse.  IRIN a demandé à Helen Longworth, directrice de la politique de lutte contre la pauvreté au Royaume-Uni à Oxfam, si une organisation comme Oxfam devrait réclamer que les demandeurs d’asile déboutés reçoivent de l’argent public, alors qu’ils ne devraient même plus se trouver dans le pays.
« Il ne faut jamais forcer quelqu’un à faire un choix entre la misère et la persécution. Ceux qui se sont tournés vers nous dans l’attente d’une protection sont nombreux à ne pas avoir été traités de façon équitable, » a t-elle dit.  « Si on leur refuse l’asile ici, il ne leur reste plus qu’à vivre sur le canapé chez des amis, à survivre grâce aux dons des associations caritatives, à recourir à des relations clairement transactionnelles et quelquefois au travail illégal, y compris au travail du sexe, » a dit Mme Longworth à IRIN.  « Bref, c’est la politique même du gouvernement qui les force à vivre dans le dénuement. Aucune raison ne peut jamais justifier que notre gouvernement traite quelqu’un de cette façon, quel que soit son “statut”, surtout quelqu’un qui nous a demandé de l’aider. »

Un article publié sur le site de l'IRIN, service du Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires des Nations Unies

La Russie songe à ficher tous les étrangers

Le chef du comité d'enquête russe, principal organe chargé des investigations criminelles, a réclamé jeudi l'instauration d'un fichier d'empreintes digitales et génétiques de tous les immigrés, sur fond de montée du racisme dans le pays.

«Il faut adopter un programme spécial du gouvernement pour établir un fichier complet des immigrés, incluant notamment une dactyloscopie et un enregistrement génétique», a déclaré ce responsable, Alexandre Bastrykine. Selon lui, cette mesure vise à réduire le nombre de crimes commis par les étrangers, et par conséquence la montée des violences racistes dans le pays.

En 2010, environ 49 000 crimes et délits ont été commis par des ressortissants étrangers en Russie, a assuré M. Bastrykine. Selon le Comité d'enquête, à Moscou, 186 000 crimes et délits ont été recensés, dont 12 000 ont été commis par des étrangers. M. Bastrykine juge que ces chiffres sont à l'origine de la montée des violences racistes. «Disons le ouvertement : comme nous l'avons déjà dit à plusieurs reprises, dans la majorité des cas, un des facteurs jouant en faveur de «l'incitation à la haine raciale» est la criminalité des immigrés», a-t-il affirmé.

Entre 2009 et 2010, les crimes et délits à caractère «extrémiste» ont augmenté de 20%, à 656 cas, et ceux-ci sont en majorité liés à la «haine raciale», a-t-il dit. Le racisme gagne du terrain en Russie depuis la chute de l'URSS. Le bureau pour les droits de l'Homme, une ONG russe, a recensé entre janvier et novembre 2010 un total de 293 agressions violentes à caractère raciste, qui ont fait 41 morts et 293 blessés. Des centaines de milliers de personnes du Caucase russe et d'Asie centrale viennent travailler dans les villes russes pour échapper à la misère dans leur région d'origine.

Depuis un rassemblement et des violences racistes le 11 décembre près du Kremlin, les autorités ont alterné les mises en garde aux extrémistes xénophobes, et les déclarations sur le nécessaire respect des us et coutumes de la population russe.

AFP