jeudi 11 décembre 2008

Des voix s’élèvent contre l’expulsion des requérants


Lu dans 24heures


MOTIVÉS 
  Les défenseurs des requérants déboutés ont bravé le froid pour faire part de leur engagement. Ils remettront ça samedi, sur la place du Marché. Ils demandent notamment la fermeture immédiate des Centres d’aide d’urgence.

 Des sections de la Coordination asile du canton de Vaud manifestent ces jours pour dénoncer des arrestations et des renvois de migrants déboutés. Deux cas à Vevey et un à Lausanne ces dernières semaines.
 
 CHRISTOPHE BOILLAT
 
M
algré l’interdiction de la police (la deman de adressée vendredi étant trop tardive), ils étaient une vingtaine à manifester de vant le 62 de l’avenue du Géné ral- Guisan à Vevey, hier en mi lieu d’après-midi. Issus principa lement des sections régionales de la Coordination asile Vaud, et des groupes ActionS nés des Etats généraux.
  Pourquoi cette mobilisation devant le Centre d’aide d’ur gence? «A cause de l’arrestation de deux personnes déboutées fin novembre et début décembre. Ainsi qu’une troisième, interpel lée à Lausanne et renvoyée le 2 décembre dans son pays, l’An gola », explique Danielle Mamin, l’une des responsables de la Coordination asile et migration
 Riviera. L’action de protestation s’est concentrée sur Vevey. Où Jac ques* a été contraint par la po lice à quitter le Centre d’aide d’urgence le 24 novembre. Le jeune Guinéen (21 ans), en Suisse depuis quatre ans et en traite ment en externe au CHUV, a été incarcéré à la prison de Frambois à Genève. Convoyé à l’aéroport, il a résisté puis a été ramené en prison. Selon la Coordination asile, il aurait été frappé.
  En revanche, les représentants de la maréchaussée ont eu la déconvenue de voir Martine* leur échapper alors qu’ils ve­naient l’arrêter le 1er décembre à Vevey. «Depuis, elle est cachée et attend de faire valoir ses droits à rester en Suisse. Elle a plus de 40 ans, réside depuis sept ans dans notre pays et y a travaillé durant plusieurs mois. Pour nous, elle remplit tous les critères pour demeurer en Suisse», es time Danielle Mamin. La ressor tissante en cavale serait hébergée par des membres de la Coordina tion asile et migration Riviera.
 
 Centres d’aide «illégaux»
 
  Les membres de collectifs de défense des migrants déboutés ont distribué des tracts devant la gare veveysanne, puis devant le Centre d’aide d’urgence. Ce type de structures est dénoncé par les
 coordinations et groupes Ac tionS. «Ce sont des non-lieux, illégaux de surcroît. Tellement déprimants que les personnes qu’on y a placées partent d’elles mêmes », assène Graziella de Coulon, de la Coordination asile Vaud.
 
 Les manifestants demandent tout simplement leur fermeture et l’autorisation pour les requé rants déboutés de vivre en ap partement. Ils exigent égale ment, entre autres, que leurs protégés puissent recevoir des autorisations de travail. Afinqu’ils puissent vivre de manière autonome et prétendre à demeu rer en Suisse. Les responsables des divers groupes animeront un stand sur la place du Marché de Vevey, ce samedi.

«Il faut garantir le droit à la formation des enfants sans papiers»

Paru le Jeudi 11 Décembre 2008 dans le Courrier

   PROPOS RECUEILLIS PAR PABLO DE ROULET    

GenèveCAMPAGNE - L'association «Pour les droits des enfants sans statut légal» vient de lancer une opération visant à défendre les droits des enfants «illégaux». Son président Pierre-Alain Niklaus évoque les enjeux de cette action. 
La Journée des droits humains a donné lieu hier soir à Genève à la projection du film Los invisibles d'Ingrid Wildi et à la table ronde «Comment grandir sans permis et sans droits?» Présent à ce débat, Pierre-Alain Niklaus, président de l'association «Pour les droits des enfants sans statut légal», qui initie une campagne nationale de deux ans «Aucun enfant n'est illégal»1,. 


Selon vous, quels articles des lois sur les étrangers et l'asile portent atteinte aux droits de l'enfant?

Pierre-Alain Niklaus: Il y a bien sûr l'article sur les mesures de contrainte. Il stipule que des mineurs peuvent être emprisonnés jusqu'à douze mois. Le regroupement familial est également rendu plus difficile. Des parents régularisés n'ont qu'un an pour faire venir leurs enfants en Suisse, et avant que ceux-ci aient douze ans. Les parents n'y arrivent pas forcément, si leur salaire est trop faible par exemple. Le résultat, c'est que beaucoup d'enfants viennent trop tard et se retrouvent dans l'illégalité. 


Comment le fait d'être sans statut légal affecte-t-il les enfants sans papiers?

En bas âge, entre 3 et 6 ans, ces enfants souffrent d'un grave isolement. Ils vivent à la maison. Dans le meilleur des cas, ils vont au jardin d'enfants et à l'école. Ils restent peu socialisés et les contacts avec les autres enfants se limitent au cadre scolaire. Souvent les très petits ont déjà peur de la police. Même s'ils ne comprennent pas la situation, ils la ressentent. 


Quel est l'effet de ces lois sur le droit à la formation?

Une loi-cadre fédérale stipule que chaque enfant a droit à la scolarité obligatoire et postobligatoire. Son application est régie par la Conférence des directeurs cantonaux de l'instruction publique. La scolarisation des enfants sans-papiers dépend beaucoup des cantons. 


L'application de cette loi-cadre est-elle respectée dans tous les cantons?

Elle est plus ou moins respectée dans tous les cantons pour l'école obligatoire. D'après le Syndicat des services publics, des enfants sans papiers ne sont pas scolarisés dans certaines petites communes des cantons de Soleure et Berne. Un autre problème se pose quand les familles sont forcées de changer continuellement de lieux d'hébergement. C'est le cas à Zurich, où les familles ne reçoivent pas l'aide sociale, mais seulement l'aide d'urgence. Ils se retrouvent à déménager chaque semaine, ce qui rend la scolarisation des enfants impossible. Dans le cas du postobligatoire, on sait que la loi est respectée dans les cantons romands et à Bâle. Mais pour le reste de la Suisse alémanique, où très peu d'associations s'occupent des sans-papiers, nous n'avons simplement pas d'informations. 


Au Grand Conseil de Genève, le Parti démocrate-chrétien a présenté une motion pour permettre aux adolescents sans papiers de faire un apprentissage.

La proposition du chèque apprentissage est une solution plus que légitime mais malheureusement en dehors du cadre des lois suisses. Les apprentissages en entreprise constituent une prise d'emploi nécessitant un permis. La plate-forme pour les sans-papiers et l'Union syndicale suisse ont essuyé un refus du Département fédéral de l'économie de Doris Leuthard, lorsqu'elles lui ont demandé de rendre possible ces apprentissages, en avril 2007. 


Votre association va lancer une campagne de deux ans pour garantir la défense des enfants sans statut légal. Quels sont vos objectifs?

Nous voulons réunir les citoyens autour de trois revendications: droit à la formation, pas de mesures de contrainte à l'encontre des mineurs et régularisations facilitées pour les familles. Il s'agira de garantir le droit à la formation du préscolaire au post-obligatoire. Nous cherchons à thématiser ce scandale des enfants qui n'ont pas droit à la formation par la médiatisation et le lobbying politique. Il faudra convaincre les cantons urbains davantage concernés, comme Zurich, Berne ou Genève de s'engager face à la Confédération. I 
Note : 1 Plus de d'informations sur le site www.keinkindistillegal.ch