samedi 24 septembre 2011

Simonetta Sommaruga, l’icône des procédures d’asile accélérées

La ministre veut un système d’asile crédible, avec un traitement plus rapide des demandes. Avant un projet de refonte totale du système, elle présente au parlement quatre premières mesures, applicables rapidement. Dont l’introduction de contrôles médicaux dans les centres d’enregistrement.

Simonetta Sommaruga est en passe de devenir la ministre socialiste qui aura rendu les procédures d’asile plus expéditives. Et elle l’assume. Elle l’a répété vendredi: pour avoir un système d’asile «crédible», la durée moyenne du traitement d’une demande devrait passer des 1400 jours à 120. C’est aussi au nom de la crédibilité qu’elle ne pense pas supprimer les vols spéciaux controversés, ultime moyen pour expulser de force des requérants déboutés récalcitrants. Mais la conseillère fédérale agit aussi sous la contrainte. Et c’est sous la pression d’une commission des Etats qu’elle s’attelle à une réforme complète du système. La ministre a présenté vendredi quatre premières mesures réalisables à court terme «pour renforcer l’efficacité des procédures d’asile et les accélérer». Mais l’ensemble de la réforme, ambitieuse, sera présenté d’ici à fin 2012 et prendra cinq à six ans pour être mis en œuvre. Car il s’agit d’une refonte totale du système. Au moins 80% des demandes d’asile devraient à l’avenir être prises en charge par la Confédération, dans des centres d’enregistrement fédéraux dont les capacités passeront de 1200 à 3000 places.

Les quatre mesures soumises au parlement sont les suivantes: l’instauration d’une «phase préparatoire» précédant la procédure d’asile, des «investigations d’ordre médical» dans les centres d’enregistrement, un renforcement ponctuel de la protection juridique et, enfin, la promesse d’un échange d’informations régulier entre le Département de justice et police et le Tribunal administratif fédéral. Tout cela a un coût. Ils sont évalués à 67 millions de francs les premières années, chiffre qui devrait se résorber au bout de 7 ans grâce aux économies engendrées.

Simonetta Sommaruga a rappelé que la phase préparatoire, qui n’excédera pas trois semaines, doit permettre de réunir les documents et de procéder aux clarifications nécessaires avant la première audition. Les «cas Dublin» (requérants qui ont déjà déposé une demande dans un pays européen, ndlr) sont surtout visés. Cette phase permettra d’adresser rapidement les demandes de prise en charge au pays concerné. La ministre a précisé que le traitement des «cas Dublin» est déjà passé de 120 à 80 jours et que le but est de ne plus les attribuer aux cantons, comme revendiqué par ces derniers. De son côté, la réintroduction des contrôles médicaux à l’arrivée – Christoph Blocher les avait supprimés – vise à éviter que des problèmes de santé ne soient déclarés plus tard, par exemple lors de recours. Mais la ministre a été claire: si de vrais problèmes surviennent après, ils pourront quand même être pris en compte. «Nous ne renverrons jamais une personne avec une maladie grave dans un pays où elle ne pourra pas être traitée correctement», a-t-elle ajouté.

Les critiques n’ont pas tardé à fuser; la ministre s’y attendait. Le PLR a ouvert le feu, l’accusant, dans un communiqué, de compliquer les procédures au lieu de les accélérer. Et juge qu’il faudrait appliquer les lois existantes plutôt que de proposer de nouvelles modifications. Même ton du côté de l’UDC, qui ne croit pas à l’efficacité des mesures et présentera ses propres thèses sur le sujet lundi. L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés se dit aussi «très déçue», alors que des défenseurs du droit d’asile réclament la tête de son secrétaire général, Beat Meiner, jugé trop favorable aux réformes de Simonetta Sommaruga.

Valérie de Graffenried dans le Temps

Simonetta Sommaruga veut accélérer les procédures d'asile

TSRinfo

Simonetta Sommaruga subit les foudres de la droite

Les mesures à court terme destinées à accélérer la procédure contestées. Il ne suffit pas de s'entendre sur le constat. Tout le monde admet que la durée moyenne de la procédure d'asile est trop longue, mais il n'y a pas de consensus sur les mesures permettant d'accélérer le tempo.

A peine la cheffe du Département fédéral de justice et police (DFJP), Simonetta Sommaruga, a-t-elle présenté hier les mesures à court terme censées constituer un premier pas que le projet vacille déjà sur ses bases. Bien que les oeuvres d'entraide émettent des réserves, l'opposition la plus virulente émane de la droite. Tant le parti libéral radical (PLR) que l'UDC estiment que l'accélération souhaitée peut être réalisée sans modification législative.

Actuellement, les procédures d'asile durent 413 jours en moyenne, voire 756 jours en cas de recours et 1400 jours jusqu'à l'exécution du renvoi. Une révision de la loi sur l'asile présentée l'an dernier devrait permettre de boucler la procédure en 120 jours. La commission préparatoire du Conseil des Etats a cependant décidé de scinder le projet en deux pour créer les bases légales permettant de traiter le plus grand nombre de cas possibles dans les centres fédéraux. Cela correspond à une demande des cantons qui veulent être déchargés de l'accueil des requérants.

Les mesures à long terme seront soumises à consultation fin 2012 et leur mise en oeuvre prendra cinq ou six ans. Simonetta Sommaruga imagine la création de dix à douze centres fédéraux d'environ 500 places chacun. Elle s'inspire de l'exemple de la Norvège, de la Hollande et de la Grande-Bretagne.

Les mesures à court terme adoptées hier par le Conseil fédéral seront examinées par le Parlement dès la session d'hiver. Il s'agit notamment d'introduire une phase préparatoire d'au maximum trois semaines permettant de distinguer les "cas Dublin" qui peuvent être renvoyés dans le pays de premier asile. C'est souvent l'Italie. Simonetta Sommuraga a rencontré la semaine passée son homologue transalpin pour tenter de renforcer la collaboration entre les deux pays.

Les requérants disposeront d'une meilleure assistance juridique dans la procédure de recours. Selon le DFJP, cela entraînera une amélioration de la qualité des documents et, partant, une accélération de la procédure. Par ailleurs, les demandeurs d'asile seront tenus de faire valoir immédiatement toute atteinte à leur santé en lien avec la procédure. Des examens médicaux seront menés dans les centres d'enregistrement. En dépit des garanties données par Simonetta Sommaruga, l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (Osar) craint déjà que les vrais réfugiés ne pâtissent de cette nouvelle règle. Selon elle, les personnes traumatisées ne sont pas toujours en état d'exposer immédiatement leurs problèmes de santé.

La socialiste bernoise voit dans ces différentes mesures un premier pas dont il ne faut pas attendre de miracle, mais l'UDC affirme déjà qu'elles ne permettront pas d'accélérer la procédure. "Elles auront pour seul effet de faire enfler davantage l'industrie de l'asile", écrit le parti dans un communiqué. Le PLR est tout aussi critique. Il estime qu'il suffirait d'appliquer le droit existant pour obtenir des résultats. L'opposition conjointe des deux partis est de nature à faire capoter le projet, mais on ne peut pas tirer de conclusions trop hâtives sachant qu'il sera traité par le Parlement après les élections.

Christiane Imsand dans le Nouvelliste