mardi 22 avril 2008

Suisse schizophrène



La collision entre l'Euro foot et la votation du 1er juin inquiète la Confédération. Elle veut à tout prix éviter un tollé international, comme celui provoqué par la campagne du mouton noir.

La suite de cet article dans le Matin.

France : Les grèves de salariés continuent. Hortefeux se fait plus conciliant.

LIBERATION - QUOTIDIEN : mardi 22 avril 2008
CATHERINE COROLLER

Sans-papiers : une porte s’entrouvre

Les grèves de salariés continuent. Hortefeux se fait plus conciliant.

Après plusieurs jours de dérobade, le ministère de l’Immigration a décidé, hier, de se saisir de la question des sans-papiers en grève depuis le 15 avril pour obtenir leur régularisation. Avec la volonté affichée de trouver une sortie de crise. «Nous sommes face à un point de crispation, il faut que nous regardions la situation, c’est pour cette raison que nous allons nous mettre autour de la table pour traiter ces dossiers, et voir lesquels entrent dans le champ d’application de la loi Hortefeux [qui permet la régularisation d’étrangers en situation irrégulière occupant des métiers dits «en tension», ndlr]», expliquait hier le chef de cabinet du ministre.

Les services de Brice Hortefeux, qui s’étaient contentés jusque-là de renvoyer la patate chaude aux préfectures, ont pris d’eux-mêmes contact avec les responsables CGT, à l’origine du mouvement, pour leur proposer une rencontre hier en fin de journée. Officiellement, bien sûr, il ne s’agit pas d’une régularisation massive et sans conditions. «On va regarder si les préfectures concernées sont en possession de l’ensemble des dossiers correspondant aux personnes actuellement en conflit», expliquait-on hier chez Brice Hortefeux. L’administration fera ensuite du «cas par cas». Selon quels critères ? «Il y a un certain nombre de critères qui découlent de l’article 40 de la loi», répond-on au ministère de l’Immigration.

Mardi dernier, ce même ministère avait prévenu que les travailleurs concernés devaient avoir «des compétences particulièrement recherchées sur le marché du travail». Sauf qu’une liste des métiers ouvrant la voix à une possible régularisation a été publiée en début d’année, et qu’il s’agit de postes plutôt qualifiés, ce qui n’est pas le cas de ceux qu’occupent la plupart des grévistes. «Il peut y avoir une appréciation locale de la tension», précisait hier le directeur de cabinet d’Hortefeux.

Le mouvement, qui a débuté il y a pile une semaine, ne donne aucun signe d’essoufflement. Vendredi, la CGT avait annoncé que 338 sans-papiers étaient en grève. Hier, ils étaient plus de 500. Samedi, neuf salariés d’un restaurant de Neuilly (Hauts-de-Seine), où Nicolas Sarkozy avait ses habitudes, ont rejoint la mobilisation. Et hier, une vingtaine de travailleurs sans papiers ont entamé à Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) l’occupation d’un magasin asiatique, Paris Store, dont une filiale a été condamnée pour avoir embauché des étrangers en situation irrégulière.

La position du gouvernement devenait d’autant plus inconfortable que les deux principaux syndicats du patronat de l’hôtellerie-restauration, l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie) et le Synhorcat (Syndicat national des hôteliers, restaurateurs, cafetiers et traiteurs) appellent depuis la semaine dernière à la régularisation des sans-papiers. Didier Chenet, président du Synhorcat, la souhaitant même «massive». Patron de Konex, entreprise de câblage informatique, Johann Le Goff a créé, de son côté, un «lobby» baptisé le Gers, Groupement des entreprises pour la régularisation de leurs salariés. Hier, ces patrons ont «demandé que des mesures rapides soient prises, car cette situation a de trop grandes répercussions sur leur économie».

Nationalité: le peuple a-t-il tous les droits?

Nationalité: le peuple a-t-il tous les droits?
Lire dans le Temps - 22.04.2008
L’UDC veut rétablir la possibilité pour les communes d’accorder la nationalité suisse par les urnes. Dans un débat organisé par Le Temps , les conseillers nationaux vaudois Jacques Neirynck (PDC, à droite) et Guy Parmelin (UDC) s’opposent sur une procédure qui fut bannie par le Tribunal fédéral, qui la jugeait arbitraire et discriminatoire. (photo Véronique Botteron)
Le débat des conseillers nationaux vaudois
Le dossier spécial du Temps naturalisations par les urnes

France:La grève des sans-papiers reçoit de nombreux soutiens


La grève des sans-papiers reçoit de nombreux soutiens
L'Express - Il y a 14 heures
Lundi, la Ligue des droits de l'Homme, la FSU, l'Unef et l'association France Terre d'asile se sont jointes à ces revendications et ont appelé à participer ...

Un requérant d’asile débouté a disparu en Libye

L’homme a été ramené de force dans son pays en novembre dernier.
Depuis, la Confédération n’a eu aucune nouvelle.
Où est passé le requérant d’asile débouté et renvoyé en Libye en novembre dernier? Depuis que cet homme a été ramené de force dans son pays, l’Office fédéral des migrations (ODM) est sans nouvelle de lui. L’ODM a confirmé hier cette information de la Basler Zeitung.
L’homme affirmait que les autorités de Tripoli le sur­veillaient car son frère s’était lié d’amitié avec les islamistes. L’ODM avait refusé sa de­mande d’asile pour des raisons qu’il ne donne pas au­jourd’hui. Cette décision avait été confirmée par la Commis­sion de recours en matière d’asile.
Quels risques cet homme en­courait- il en rentrant dans son pays? Brigitte Hauser-Süess, porte-parole de l’ODM, expli­que brièvement que son ser­vice a estimé «ce renvoi possi­ble ». Depuis, contact a été pris avec la représentation suisse en Libye pour tenter d’en sa­voir davantage.
Malgré cette disparition, l’Office n’a pas l’intention de stopper d’éventuels rapatrie­ments en direction de la Libye. «Nous n’agissons pas en fonc­tion des pays, mais au cas par cas», explique Brigitte Hauser­Süess.
ATS

L'intégration et l'éducation à coups de pied dans le ballon

renens foot intégration

Les adolescents qui fréquentent le Centre d’animation et de rencontre de Renens sont pour la plupart inscrits dans une équipe de foot. Et hors du terrain, ils dribblent au baby-foot ou sur leur console.

A Renens (19 000 habitants), ça joue au foot, ça discute foot, ça ne vibre que pour le foot. Sur les places de jeu, en cour de récréa­tion, sur les places ou les terrains de la ville. Et quand la nuit tombe, ça continue: les 10-20 ans s’exci­tent encore autour d’un baby-foot ou se défient sur pelouses virtuel­les, derrière leur console de jeux vidéo.
Un phénomène populaire qui frise le cliché, dans cette ville aux 120 nationalités et à la population à majorité immigrée? Pas si sûr: trois quarts des garçons qui fré­quentent le Centre d’animation et de rencontre (CRA) sont inscrits dans une équipe. Le FC Renens a 300 juniors dans ses rangs. Et l’hiver passé, lorsque la Munici­palité a mis une salle multisport à la disposition des adolescents, 80% des réservations ont été effec­tuées par des teams de quartier, fans de ballon rond.
«Avant d’entrer en fonction, je n’étais pas un féru de foot. Depuis, j’ai vraiment dû m’y mettre», sourit Nicolas Pe­relyguine. Une révision de con­naissances footballistiques in­dispensable au délégué jeunesse de Renens, s’il voulait tisser des contacts avec les jeunes et réus­sir à écouter leurs revendica­tions afin de les soutenir dans leurs projets.
«Ici,ilyalehip-hop, le rap et le foot!» confirme de son côté Valeria Mainini Schenk, coordinatrice du CRA, qui doit souvent jouer d’as­tuce pour qu’ils fassent autre chose que de shooter dans un ballon. Comme cet atelier créatif qui attire du monde surtout lorsqu’il permet de préparer des maillots pour une prochaine compétition sportive.
Moyen de reconnaissance

Mais pourquoi un tel engoue­ment? «C’est une discipline facile d’accès et bon marchée, qui est donc ouverte à toutes les couches sociales», avance sans hésitation Jean-Pierre Bonnet, président des juniors au club de la ville. Elle devient gage de reconnaissance lorsque la réussite est au rendez­vous. «Certains jeunes manquent nettement de projet de vie, de rêves, d’investissement associatif, note Valeria Mainini Schenk. Dès qu’ils peuvent s’illustrer un peu dans le foot, ça les valorise aux yeux des autres.» Un sport peu cher, mais aussi apprécié fanatiquement à travers le monde entier. «A l’entraîne­ment, on voit arriver parfois des étrangers qui débarquent tout juste en Suisse», témoigne Pino Vasquez, entraîneur au FC Renens qui réunit 60 nationalités différen­tes. «Le foot devient dès lors un excellent facteur d’intégration.» Et Jean-Pierre Bonnet d’expliquer: «A l’école, l’apprentissage de la langue, par exemple, est synonyme de tra­vail. Sur un terrain, ça devient un jeu.»
Une seule identité

La compétition entre nations constitue, bien entendu, le ressort principal des grands champion­nats. Mais dans une même équipe locale et sur le terrain, plus ques­tions de rivalités ethniques ou de fiertés nationalistes. L’espace d’un entraînement, l’Afrique redevient un seul continent. Et la prépara­tion à un match suffit à permettre aux Balkans de se redécouvrir une alliance. «En jouant, les jeunes n’ont plus qu’une seule identité, celle du football, indépendamment de leur pays d’origine», observe Marta Pinto, déléguée à l’intégra­tion dans l’ancienne cité ouvrière. Le sport remplit, alors, tout seul un rôle essentiel pour la cohésion entre suisses et étrangers.
Sans compter que le jeu devient souvent une école de vie pour les jeunes Renanais. A leur propre instigation, plusieurs groupes ont mis sur pied, l’an dernier, des tour­nois amicaux qui ont, à chaque fois, rencontré un impressionnant succès et réuni une centaine de joueurs et spectateurs. Nicolas Pe­relyguine: «Ils avaient une espèce de fierté à dire: «C’est notre tournoi. » Mais, surtout, ils assumaient entièrement l’organisation, veillant à la sécurité et aux règles de fair­play. Le football permet, là, de canaliser une énergie magnifiquement positive, tout en leur appre­nant à défendre des valeurs impor­tantes.»
Un article de Gérald Cordonier dans 24 Heures

Santé et sans-papiers un rapport d'un étudiant de l'IDHEAP

L'Institut des Hautes Etudes en Administration Publique de Lausanne vient de terminer une étude sur la santé des sans-papiers.

L'étude complète (47 pages) est disponible à l'adresse suivante:

En voici juste les conclusions

6. Conclusions
Les études montrent que les sans-papiers représentent en Suisse, à l’image du reste de l’Europe, une importante population et que l’accès de cette population au système de soins est défavorisé, au risque de prétériter leur santé.
La politique fédérale en termes de santé et migration est fédérée par la Stratégie Migration et Santé 2002-2006 et propose un catalogue de mesures, dont la mise en oeuvre est le plus souvent déléguée à des organismes tiers (cantons, privés). La question de l’accès aux soins des sans-papiers n’y est pas traitée explicitement.
La problématique étudiée dans le cadre de ce travail mêle étroitement gestion économique et financière, santé, droits de l’Homme et égalité des chances dans un environnement législatif contradictoire, illustrant la tension entre les impératifs de santé publique et les contraintes de la politique d’immigration.
A cet égard, cette situation schizophrénique explique que les politiques en faveur de la santé des sanspapiers sont issues d’initiatives privées et caritatives. La non reconnaissance du problème social par les autorités politiques implique une dynamique bottom-up. Le mouvement top-down reste discret, pour ne pas choquer la réglementation sur l’asile et les étrangers, et trouve sa légitimité dans l’obligation morale de respecter les droits de l’homme.
Dans les cantons de Vaud et de Neuchâtel les dispositifs de soins aux sans-papiers étudiés, font appel à du bénévolat et des fonds privés. Ils sont pour l’heure diversement soutenus financièrement par les pouvoirs publics. Bien que le canton de Vaud intègre tacitement le PEL à son réseau de santé en charge des populations vulnérables en général, et des sans-papiers en particulier, il ne participe pas pour autant à son budget. La subvention cantonale du RMS provient, elle, du budget général de la santé publique.
Nous avons ainsi constaté que si les différents acteurs privés et publics collaboraient effectivement sur le terrain, il manquait souvent une politique publique explicite quant à la reconnaissance des dispositifs et qu’aucune réglementation ne légitimait de fait les dispositifs en place et leur intégration à une quelconque politique publique.
On peut penser que la situation légale évoquée précédemment incite les Conseils d’Etat à une certaine prudence et que leur action publique en la matière est essentiellement pragmatique, sous la forme de soutiens financiers à des institutions en place. Il en ressort l’impression que la politique effective en matière de santé des sans-papiers est avant tout privée.
Il n’est pas certain qu’en l’absence des acteurs privés, ces dispositifs auraient pu prendre un tel essor. Il est douteux que ceux-ci puissent s’inscrire à moyen terme de manière pérenne dans les politiques cantonales, faute de base légale déterminante d’acceptabilité sociale de la présence d’une migration illégale.
Dans nos différentes propositions, nous nous sommes avant tout attachés à trouver des sources de financement, étant entendu que toute politique publique passe par son financement.
La question d’une prise en charge quelconque des populations étrangères en général et sans-papiers en particulier est potentiellement sujette à une exploitation politique (xénophobie, racisme, sentiment d’injustice de la part des populations suisse et résidentes par rapport à une prise en charge paraissant trop large et dont ils seraient exclus, etc.), c’est pourquoi nous avons cherché des sources de financement qui mettent à contribution les bénéficiaires eux-mêmes.
La LAMal est longtemps apparue comme une solution pour garantir l’accès aux soins pour les sans-papiers.
Il s’avère, selon notre étude, que ce mécanisme de solidarité entre biens portants et malades est mal adapté à une population paupérisée, dans l’illégalité et socialement en marge des mécanismes usuels de notre société, et ne permet pas, à lui seul, de financer une politique publique.
Une des limites de la LAMal est liée aux problèmes de financement des primes, des franchises et des quotesparts de la part de la population concernée.
Dans un premier scénario, nous proposons de baser le financement des soins de santé aux sanspapiers sur une institution tierce, garante à la fois des paiements et de l’anonymat des sans-papiers.
Cette proposition propose que l’accès aux soins des sans-papier soit prise en charge par le système de santé classique.
Hors administration, l’institution serait garante de l’anonymat des sans-papiers et devrait pouvoir les affilier sur la base de sa propre adresse et faire ainsi le pont entre les caisses d’assurance et les sanspapiers.

Cette solution devrait être subventionnée par les pouvoirs publics, de manière à pouvoir pallier les défauts de paiement de la part des sans-papiers, l’institution étant habilitée à récupérer les sommes dues auprès des bénéficiaires.
Dans un deuxième scénario, nous proposons de financer un réseau de santé parallèle dédié aux soins de premier niveau des sans-papiers, par l’intermédiaire d’une mutuelle que les bénéficiaires financeraient partiellement eux-mêmes, le solde étant à la charge des pouvoirs publics.
Un système de réassurance auprès des assureurs maladie permettrait de financer les cas devant être pris en charge par le système de santé classique.
Les expérience des dispositifs acquises dans le développement de compétences transculturelles et de méthodes de gatekeeping incitent à institutionnaliser la voie qu’ils ouvrent, de sorte à élargir et garantir à long terme leur existence. Cette institutionnalisation nous semble nécessaire pour la reconnaissance de la migration comme un problème de société, afin de dépasser l’équation simpliste du clandestinabuseur.
La migration illégale, l’accès aux soins de ces populations vulnérables posent un problème de
civilisation.