Michel Tubiana, Président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme, dénonce la discrimination envers les Roms exprimée dans une circulaire du ministère de l'Intérieur à destination des préfets, en date du 5 août dernier.
Que n'avons-nous entendu, quand nous avons dit et écrit que les pouvoirs publics, et le chef de l'Etat le premier, menaient une politique ouvertement xénophobe. Nous souvenons-nous de ce cœur des vierges, la main sur le cœur, nous affirmant que jamais le président de la République n'avait voulu stigmatiser une communauté, lors de la réunion qu'il avait convoquée en son palais le 28 juillet 2010? Propos excessifs et scandaleux, «gauche milliardaire», etc.
Pourtant, les documents sont là, écrits sous la responsabilité du Ministre de l'Intérieur, faisant explicitement référence aux «objectifs précis (fixés), le 28 juillet dernier» par le président de la République.
La circulaire du 5 août 2010, signée de Brice Hortefeux, enjoint aux préfets de procéder à l'évacuation d'au moins trois cents campements illicites sous trois mois, « en priorité ceux des Roms », formulation réitérée à plusieurs reprises ensuite.
Et de poursuivre: «En particulier, les opérations menées depuis le 28 juillet contre les campements illicites de roms n'ont donné lieu qu'à un nombre trop limité de reconduites à la frontière».
Est-ce par connivence ou par ignorance, le gouvernement lui ayant caché cette circulaire, que la Commission européenne s'est déclarée satisfaite des explications données par les autorités françaises ?
Et voulant, enfin, se prémunir de l'inévitable, la circulaire s'attarde ensuite sur les moyens pour empêcher « l'installation de nouveaux campements illicites de Roms ».
L'article 225-1 du Code pénal définit la discrimination comme « toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur appartenance ou de leur non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie.
Si les mots ont encore un sens, mais en ont-ils un pour Brice Hortefeux, comme qualifier autrement sa circulaire du 5 août 2010 que d'ouvertement discriminatoire ?
Si les faits ne subissent pas les distorsions de ces faiseurs de vérité manière «1984», comment qualifier autrement la réunion du 28 juillet 2010 convoquée part le président de la République que comme la stigmatisation d'une communauté à raison de son origine et de sa situation sociale ?
Il y a quelque chose qui va bien au-delà du scandale dans ce verbe administratif. Il y a l'angoisse de constater que d'auvergnats en maghrébins, de musulmans français forcément « accueillis » dans le pays où ils sont nés en Roms pique-assiettes de notre système social et gens du voyage forcément délinquants, se dessine le portrait d'une politique qui n'hésite pas à s'en prendre à des communautés entières sur la base de leur origine ou de leur religion.
Sans éthique, sans principes, l'actuel pouvoir politique se dispense de plus en plus de faux semblants au point de mettre par écrit ce qui hante ses pensées.