mercredi 3 novembre 2010

"S'intégrer et intégrer"

L'intégration est un contrat bilatéral. Le migrant doit faire l'effort de l'insertion et le pays d'accueil celui de l'intégrer. Léonard Bender est l'invité du Matin et livre son opinion sur les questions d'intégration.

Il s'agit d'abord, le plus souvent, d'apprendre la langue du lieu. C'est le sésame qui permet de nouer une vraie relation sociale. Et le moyen le plus sûr pour comprendre les habitudes, la façon de vivre, la culture de sa nouvelle «patrie». Je dis «patrie», car la plupart des étrangers qui résident en Suisse y feront leur vie.

Ce n'est plus comme une fois, à l'époque notamment du fameux statut des saisonniers, où le travailleur venait chez nous, seul, durant neuf mois consécutifs. Il se serrait la ceinture; déjà que sa paye n'était pas bien élevée. Il vivait en groupe, souvent cantonné dans des baraquements notamment dans l'agriculture et le bâtiment.

S'il voulait retourner au pays avec un pécule, sa priorité était d'aligner les heures de travail et non de s'intégrer. Les Suisses de cette époque ne le leur demandaient pas vraiment d'ailleurs. L'économie avait avant tout besoin de bras! Aujourd'hui, les temps ont changé, heureusement, même si le défi de l'intégration reste entier.

Léonard Bender
Avocat

Trouvé dans le Matin

"Les autres partis ne veulent que priver l'UDC d'un autre succès"

mouton noirChristoph Blocher a débattu hier soir à Genève avec Fulvio Pelli, le président du PLR. Il milite évidemment pour l’initiative UDC.

Les opposants à votre initiative sur les délinquants affirment qu’elle ne respecte pas le droit international. Que leur dites-vous?

C’est faux. Elle est compatible avec le droit international contraignant qui proscrit la torture et le refoulement de réfugiés reconnus. Mais, de toute manière, aujourd’hui, si quelqu’un n’est pas d’accord, il dit toujours que le droit international interdit ceci ou cela, mais c’est faux. On peut être amené à négocier tel ou tel point avec un pays, c’est tout.

S’il est condamné, un criminel étranger paie deux fois: une fois par la prison, une fois par l’expulsion. Un Suisse criminel ne paie qu’une fois. Est-ce normal?

Mais oui! Tous les pays expulsent les criminels étrangers, les Etats-Unis par exemple. C’est la responsabilité d’un pays de reprendre ses citoyens qui se conduisent mal. Et parfois un pays expulse même si un crime n’a pas été commis: on le voit en France avec les Roms.

Un étranger de la 2e ou de la 3e génération né en Suisse subirait le même sort. Est-ce toujours normal?

Oui, mais il peut tout faire pour ne pas être criminel et il peut demander sa naturalisation. Les chiffres sont très clairs: nous avons 22% d’étrangers en Suisse, or ils commettent 59% des crimes graves, 54% des lésions corporelles, 62% des viols. Il faut agir. Mais notre initiative a surtout un effet dissuasif. Parce qu’aujourd’hui, les étrangers criminels n’ont pas peur de faire de la prison ici, avec la télévision en cellule et un bon menu. Mais chez eux, c’est une autre affaire…

Vous liez le crime et la nationalité. Mais les étrangers sont aussi proportionnel-lement plus pauvres, moins formés que les Suisses.

Ces causes existent peut-être, mais il faut surtout diminuer la criminalité étrang ère qui est considérable et n’est pas engendrée par des Allemands, des Autrichiens ou des Français, il faut le dire. Les étrangers et l’ouverture des frontières sont liés à beaucoup de problèmes: ceux de l’assurance-invalidité, du chômage, du trafic routier. Il faut corriger la situation. Cela se fait en Hollande et en Allemagne, où Angela Merkel a dit que la société multiculturelle était finie. Ici, l’UDC est le seul parti à défendre la souveraineté suisse et la non-entrée dans l’UE .

En tant qu’entrepreneur vous savez que la prospérité suisse est aussi liée à la main-d’œuvre étrangère?

Oui et non. On doit chercher d’abord des employés en Suisse. Evidemment, c’est plus pratique pour un entrepreneur d’avoir plus de monde à disposition pour faire ses choix. Mais après c’est le pays qui paie.

Si votre initiative est conforme au droit international, pourquoi les Chambres présentent-elles un contre-projet?

Pour priver l’UDC d’un succès! Ils nous disent toujours: «Nous sommes d’accord avec vous, mais…» Mais quoi? Leur contreprojet ne dit pas combien de temps un étranger expulsé doit rester hors de Suisse. Il peut faire recours. Cela peut durer des années. Le contre-projet cherche en fait à ne renvoyer personne.

De plus en plus, des initiatives fédérales jouent avec les limites du droit international. Selon vous, la souveraineté du peuple l’emporte toujours sur le droit international ou y a-t-il une limite?

Il y a une limite, le droit international contraignant.

La peine de mort n’est pas interdite par ce droit. Vous auriez voté pour un rétablissement si l’initiative en sa faveur était passée devant le peuple?

Non, je suis contre. Il y a trop d’erreurs judiciaires possibles. Mais ce genre de proposition reviendra, c’est un sujet émotionnel et, quand des crimes horribles sont commis, certains y pensent.

Le PSS vient de publier son nouveau programme. Il réclame notamment la fin de l’armée et la rupture avec le capitalisme. Pour vous, ce parti garde-t-il sa place au Conseil fédéral?

Quand le PSS a annoncé qu’il voulait supprimer l’armée, j’ai cru que j’avais mal entendu! C’est absurde. Le PS veut retourner au communisme. Comment peut-on chercher des compromis avec lui? Cela dit, arithmétiquement, le PS a sa place au Conseil fédéral. Mais il faut voter pour nous bien sûr! Après les élections, je pense qu’il faudra discuter d’une réforme de notre système. La concordance a bien sûr des avantages, mais on peut envisager d’aller vers un système bipolaire, avec des majorités et des minorités. On verrait mieux les responsabilités des uns et des autres.

Marc Bretton et Frédéric Julliard pour 24 Heures

A propos de la votation sur le renvoi des criminels étrangers

Charlotte Iselin et Isabelle Moret sont les invitées de la page Opinion de 24 Heures où elles débatent des prochaines votations sur le renvoi des criminels étrangers.

charlotte iselinLa loi et la pratique actuelles sont déjà très dures

Le 28 novembre, nous voterons sur l’initiative «Pour le renvoi des étrangers criminels» et sur le contre-projet direct du Conseil fédéral. Ce qui se joue dans cette votation va bien au-delà de la question apparemment posée.

C’est certain: la législation actuelle permet déjà aux autorités d’expulser une personne étrangère lorsqu’elle met en danger de manière grave et répétée la sécurité et l’ordre publics. Cela concerne tous les types de permis, y compris les permis C; les ressortissant(e)s de l’Union européenne sont visés comme ceux d’autres Etats.

C’est aussi certain: en cas de condamnation pénale, les autorités font un usage fréquent de cette possibilité d’expulser. On peut donc affirmer que les lois et la pratique actuelles sont déjà très dures. A tel point d’ailleurs que la Suisse s’est fait blâmer à plusieurs reprises par la Cour européenne, car des décisions prononçant l’expulsion de personnes étrangères condamnées violaient la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH).

En substance, la Suisse a été condamnée pour n’avoir pas respecté le principe de proportionnalité. De quoi s’agit-il? Dit simplement: «On ne tire pas sur des moineaux avec un canon.» Ce principe fondamental protège les citoyen(ne)s face aux interventions étatiques, qui doivent éviter de porter aux droits fondamentaux une atteinte excessive par rapport au but visé. L’Etat ne peut pas prendre des mesures lourdes de conséquences sans effectuer une balance des intérêts en présence. Ce principe est ancré dans la Constitution fédérale, mais aussi dans plusieurs conventions internationales. Cette protection des individus face à l’Etat vaut pour tout le monde, et donc aussi pour les personnes étrangères.

En proposant un système d’expulsion automatique en cas de condamnation pour certains délits, y compris de simples «abus» à l’aide sociale, l’initiative sur le renvoi s’attaque frontalement au principe de proportionnalité. Les personnes étrangères seraient ainsi privées de cette protection fondamentale. Ce système conduit donc aussi à une violation du principe d’égalité, puisque certains êtres humains ne seraient pas mis sur le même pied que les autres. Les droits humains prévus par les conventions internationales ne pourraient plus être respectés. Sur tous ces points, le contre-projet du Conseil fédéral n’offre pas d’alternative, car il prévoit aussi l’obligation d’expulser sans respect du principe de proportionnalité.

Le projet politique derrière l’initiative «Pour le renvoi des étrangers criminels» apparaît ainsi clairement: supprimer la notion d’égalité, réduire les droits humains à une simple décoration. Fondés sur l’amalgame entre nationalité et délinquance, l’initiative et le contre-projet conduisent à la suppression de droits fondamentaux. La rhétorique des moutons noirs ne doit pas nous aveugler. C’est bien d’une transformation radicale de notre société dont il est question. C’est à cela que les Juristes progressistes vaudois disent deux fois non.


isabelle moret 2Le contre-projet a le mérite d’être clair et cohérent

A force de trop promettre, l’initiative sur le renvoi des étrangers criminels manque de crédibilité.

L’initiative est mensongère quand elle promet le renvoi de tous les moutons noirs. Nombre de personnes ne pourront être renvoyées: en vertu du principe fondamental de non- refoulement (pas de renvoi vers des pays où torture et traitements inhumains menacent), mais également en raison de problèmes pratiques, comme l’impossibilité d’établir la nationalité du délinquant ou le refus d’un pays de reprendre ses ressortissants. Les partisans de l’initiative ont beau bomber le torse, ils ne pourront changer cette donne.

L’initiative est également dangereuse pour la Suisse. En prônant un automatisme de renvoi, elle remet en cause les principes qui ont fait le succès et la solidité de notre Etat de droit. Sur un plan de politique extérieure, l’initiative mettra notre pays en grande difficulté politique vis-à-vis de l’UE. En effet, l’initiative entre en conflit direct avec l’accord sur la libre circulation des personnes – qui contient déjà des mesures strictes et précises quant au renvoi des criminels – comme l’a démontré encore récemment l’expertise indépendante du professeur Tobias Jaag, de l’Université de Zurich.

Soutenu par un large spectre politique – une partie de la gauche et l’ensemble des partis du centre-droite –, le contre-projet permet de pallier les graves défauts de l’initiative. Le principe inspirant le contre-projet est clair: les étrangers criminels ne respectant pas notre ordre juridique et les valeurs de notre Constitution doivent quitter la Suisse. A la différence de la législation actuelle, qui permet déjà des renvois, il a le mérite de stipuler un standard clair et cohérent, qui devra être appliqué de manière uniforme dans tout le pays. Le contre- projet va même plus loin que l’initiative, tout en étant plus conséquent. Le catalogue d’infractions y est, en effet, plus détaillé et plus complet. L’arbitraire est évacué au profit d’une meilleure prévention de la criminalité.

Une répression plus conséquente ne saurait résoudre l’entier du problème. Une meilleure intégration est une arme de prévention de premier plan contre la criminalité. Le contre-projet contient un article absolument central visant à une meilleure intégration: tout en clarifiant les compétences, il met en place des standards ambitieux, capables d’assurer une égalité des chances réelle pour tous. Cette intégration ne doit pas rester un simple vœu pieux. C’est sur le terrain, dans les villages, dans les clubs sportifs, que l’intégration doit être soutenue et portée.

En plus du renvoi des étrangers commettant de graves délits, seul un engagement pour une meilleure intégration permettra d’améliorer durablement la situation de tous. Que ceux qui sont tentés par le «deux fois non» y pensent au moment de voter et qu’ils n’oublient pas que, dans tous les cas, ils peuvent choisir à la question subsidiaire entre l’initiative et le contre-projet. C’est eux qui feront la différence.

La bataille gagnée de Christoph Blocher

Un oui confortable, un triomphe ou carrément un raz-de-marée? A quatre semaines des votations fédérales, c’est désormais la seule question qui se pose: quel score obtiendra l’initiative UDC qui réclame le renvoi des criminels dangereux? Que ce soit dans les sondages, les dîners de famille ou dans les discussions de bistrot, la victoire de l’UDC ne fait plus aucun doute.

La force des statistiques de la criminalité en Suisse, l’angoisse générée par la montée d’une nouvelle violence, et la multiplication de faits divers choquants, tout cela aura fait vaciller, puis tomber les dernières réticences à soutenir un texte porté par un parti que beaucoup jugeaient jusqu’ici infréquentable.

Voilà pour le contexte. Mais il n’explique pas tout. Rarement les adversaires de l’UDC auront fait preuve d’un pareil amateurisme. Pas de message clair, pas de chiffres précis, un contre-projet qui fleure bon la combinazione politicienne: bref, le contre-projet concocté à grand-peine par des stratèges en panne de stratégie ne fait pas illusion deux secondes. L’initiative serait inapplicable? Et contraire au droit international? Voilà bien l’argument tarte à la crème que l’on sort lorsqu’on n’a rien à dire sur le fond.

Car la question posée par l’UDC est assez simple: a-t-on ou non besoin d’un texte pour durcir, préciser et unifier la pratique des renvois? Si c’est oui, l’initiative de l’UDC ouvrira la porte à une loi d’application. Et si c’est non, alors il n’y a pas besoin d’un contre-projet.

En refusant de mettre un centime dans une bataille perdue d’avance, les milieux économiques rappellent, avec un cynisme parfaitement assumé, une règle pourtant connue: face au général Blocher et ses troupes en ordre de marche, on n’improvise pas une bataille en dernière minute.

Désormais, seul l’engagement de grandes personnalités ou d’une autorité morale pourrait infléchir le débat et, qui sait, réduire la portée du triomphe UDC.

Editorial de Judith Mayencourt dans 24 Heures

"Aux gros mots les gros remèdes"

HAu sujet du faux problème des « sans-papiers » en France, l’UMP a sorti le gros mot de trop. En effet, certains députés de la majorité réclament la révision de l’A.M.E. - l’Aide Medicale d’Etat, seule solution d’accès aux soins pour les immigrés en situation irrégulière.

Sans état d’A.M.E

Tout le monde le sait, il ne fait pas bon être clandestin en France. Expulsions à tout-và, reconductions à la frontière, les sans-papiers de l’hexagone sont actuellement la cible favorite de l’instrumentalisation de l’UMP concernant l’insécurité, en vue des prochaines élections.

Légalement, les sans-papiers n’ont n’a droit à rien, si ce n’est aux droits de l’homme, à la dignité, si toutefois l’Etat qui les accueille contre son gré veut bien leur octroyer. Dans ce domaine, l’accès aux soins est primordial. Mais comment régler une consultation médicale lorsqu’on n’a pas de quoi se loger ? En France, l’A.M.E est la couverture santé qui prend en charge les dépenses de soins de ces personnes. Elles seraient environ 200 000 à en bénéficier. Cependant cette situation est franchement pour déplaire à la majorité, qui considère que cette aide est un gouffre économique pour l’Etat. C’est pourquoi l’UMP, en la personne de Thierry Mariani, fait étudier la question à partir d’aujourd’hui à l’Assemblée Nationale.

Mariani, pour puiser ses idées politiques, il fait comme ses camarades de droite : il cherche dans le Figaro. Et il ne lui a pas fallu longtemps pour tomber sur un torchon d’inhumanité, masqué derrière de fallacieux arguments économiques, signé par Sophie Roquelle, qu’il s’est empressé de mettre en lien sur son blog :lire l’article en question

Son but est de faire passer aux yeux du public le « sans-papier » pour un profiteur, qui a accès aux soins gratuitement alors que le bon ouvrier à béret doit payer pour aller chez le docteur. Histoire de stigmatiser encore plus cette minorité et alimenter les discriminations ambiantes.

Le plus grave est que pour appuyer son argumentaire, Mariani affirme qu’il y a des fraudes, que certains abusent de l’A.M.E, comme d’autres fraudent le fisc à coups de millions. Mais c’est plus simple d’attaquer les plus faibles, et en plus ça permet de faire d’une pierre deux coups : on s’en débarrasse. Sauf que les fraudes qu’il dénonce sont considérées comme « marginales » par le ministère de la Santé ! (source l’Express)

L’UMP exige donc soit qu’on les fasse payer (Bachelot propose un forfait de 30 €/an, donc plus d’A.M.E quoi), soit qu’on limite les soins au minimum vital, pour éviter par exemple la propagation d’épidémies ou de virus. En clair, que les étrangers soient malades, on s’en fout, mais s’ils sont contagieux pour les bons Français, là il faut agir et les décontaminer.

Les associations de défense des minorités s’insurgent, et affirment qu’au contraire il sera bien plus onéreux de prendre en charges des personnes dont la maladie est à un stade avancé, réclamant souvent une hospitalisation, que de continuer à offrir l’accès aux consultations régulières. Prévenir plutôt que guérir en somme, ce que l’on apprend aux enfants dans les programmes pédagogiques !

Les 500 millions d’euros annuels que coûte l’A.M.E ne relèvent pas d’un problème budgétaire, mais éthique. Mariani et consors ne peuvent supporter l’idée d’une minorité assistée, et par leurs revendications réfutent l’idée même de solidarité. Ces politiques aveugles, nombrilistes et égoïstes, ne sont-ce finalement pas eux les véritables grands maux de notre état ? Qu’on éradique leurs pustuleuses idées, bien trop contagieuses au sein des masses sécuritaires ! Aux grands maux, les grands remèdes !

Lilian Elbé sur agoravox

Intrusion dans un camp rom: SOS Racisme dénonce

SOS Racisme a dénoncé mardi dans un communiqué une "conséquence de la stigmatisation ethnique" après l'intrusion de plusieurs hommes cagoulés et armés, dans la nuit de mercredi à jeudi, dans un camp de Roms situé dans la plaine de Triel-sur-Seine (Yvelines).

Se disant "consternée et indignée", l'association estime que "cette attaque s'avère être un terrible passage à l'acte, illustrant sombrement le contexte dangereux de libération d'une parole haineuse et raciste, que SOS Racisme dénonce depuis plusieurs mois".

"SOS Racisme interpelle les autorités quant aux potentielles responsabilités de celles-ci au regard de la politique menée actuellement de stigmatisation et de bouc-émissarisation visant les ressortissants communautaires, roumains et bulgares, en raison de leur origine ethnique (Rom), et concrétisée par le projet de loi Besson", écrit l'association.

Selon des témoignages recueillis par les enquêteurs, des hommes "habillés comme des policiers" ont fait irruption dans le camp de Triel, durant la nuit de mercredi à jeudi, à bord d'une voiture munie d'un gyrophare. Ils ont pénétré dans des caravanes avec des fusils et des matraques. Plusieurs personnes du camp ont affirmé avoir été molestées et menacées avec des armes à feu, une femme précisant avoir été obligée de se déshabiller. Une enquête, confiée au commissariat de Poissy (Yvelines), a été ouverte.

Une trentaine de familles roms, menacées d'expulsion, vivent depuis plusieurs années dans des conditions précaires sur un ensemble de terrains privés dans la plaine de Triel-sur-Seine.

AFP relayée par France3 Paris Ile-de-France

"J'ai payé 3000 dollars pour fuir Kinshasa"

Rose*, 30 ans est demandeuse d'asile à Beauvais. Craignant pour sa vie, cette professeur assistante en droit à été obligée de fuir son pays alors qu'elle venait d'être admise au barreau.

rose beauvais

BEAUVAIS, MERCREDI DERNIER. Rose vit en France depuis cinq mois. Elle a connu la rue et vit aujourd’hui dans un foyer. (LP/A.D.)

Elle est arrivée le 20 mai au petit matin devant la gare de Beauvais. Habillée d’un jean et d’un tee-shirt, avec quelques billets en francs congolais comme tout trésor. Rose, 30 ans, est demandeuse d’asile. « Je ne savais même pas où j’étais, se souvient-elle. J’avais atterri à Roissy deux jours plus tôt.

J’ai été hébergée dans une famille pendant deux jours, puis quelqu’un est venu me chercher pour me déposer devant la gare de Beauvais. On m’a dit : Tu es une grande fille. Maintenant, à toi de te débrouiller. » Ce matin-là, une autre jeune Africaine vient de débarquer. C’est elle qui va guider Rose dans ses démarches. « Je ne savais même pas qu’il fallait demander l’asile, se souvient-elle. Je n’avais rien préparé. J’ai fui pour sauver ma vie. » Rose n’est pourtant pas n’importe qui dans son pays. A Kinshasa, elle est professeur assistante en droit à l’université. Elle prépare en parallèle le concours pour devenir avocate.

« J’ai été choisie pour faire partie d’une commission de contrôle à l’université. Un parlementaire, ami du chef de l’Etat, avait voulu s’inscrire en deuxième cycle de droit dans une université privée en fournissant de faux documents. Les doyens ont étalé l’affaire au grand jour. Ils ont été déchus. Moi, je suis allée un mois en Afrique du Sud en attendant que l’affaire se tasse. » Rose apprend alors qu’elle est admise au barreau. « Mais depuis cette histoire, je n’ai eu que des blocages : je n’ai jamais pu remettre mon dossier. J’étais reconnue par mon université mais pas par le rectorat. Du coup, je n’avais pas de salaire. »

Avec les bénéfices de son petit business d’import-export de vêtements, elle fait vivre sa mère et ses trois sœurs étudiantes. « Mais je recevais des menaces par téléphone. Je craignais pour ma vie, je n’allais même plus au travail tellement j’avais peur. » Rose se réfugie dans de la famille éloignée et change de numéro de téléphone. C’est le père d’une de ses étudiantes qui va la faire sortir du pays. Un passeur ? « Pour moi, c’est un ami qui m’est venu en aide. Mais c’était payant : 3000 $. Un jour, il m’a appelée, une demi-heure plus tard, je l’attendais au bord de la grande route. » L’homme se charge des formalités. A l’aéroport, Rose ne sait même pas qu’elle embarque pour la France.

Son arrivée à Beauvais ressemble à un cauchemar. « J’ai vécu dans la rue pendant un mois. Je dormais sous le pont de Paris à Beauvais. On était une trentaine. Le froid, la promiscuité, la saleté… »
Du vivant de son père, la famille de Rose avait des domestiques à Kinshasa. Elle n’avait jamais connu la précarité. Depuis la fin du mois de juin, elle est hébergée dans un foyer. Elle gère au jour le jour ses 326 € mensuels d’allocation temporaire d’attente (ATA). « Le jour où je m’achète un manteau, je ne mange pas. Pour moi, aller voir une association, c’est dire que je suis pauvre. Je peux travailler, mais je n’en ai pas le droit. » Depuis cinq mois, son dossier est en cours d’instruction par l’Ofpra.

Adeline Daboval dans le Parisien


* Le prénom a été changé.