mardi 9 février 2010

L'Italie affirme son engagement à combattre le racisme et la xénophobie

L'Italie a affirmé mardi son engagement à combattre le racisme et la xénophobie lors de l'examen de son bilan en matière des droits de l'homme par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies, évoquant notamment des incidents racistes à Rosarno (sud).
"La stigmatisation de certains groupes ethniques ou sociaux reste un important sujet d'inquiétude pour le gouvernement, l'Etat et les autorités locales", a déclaré le vice-ministre italien des Affaires étrangères Vincenzo Scotti devant le Conseil réuni à Genève.



"Nous sommes pleinement conscients des défis que nous affrontons dans ce domaine et nous nous sommes fortement engagés à éradiquer les attitudes racistes et xénophobes de notre société", a-t-il ajouté au deuxième jour de la session d'examen périodique du Conseil, qui se poursuivra jusqu'au 19 février.
M. Scotti a annoncé qu'un projet visant à améliorer le logement et l'intégration de travailleurs migrants avait été lancé à Rosarno (sud) après des affrontements entre immigrés et habitants de cette ville en janvier qui ont fait 67 blessés.


Une véritable "chasse aux Noirs" avait été menée par certains habitants contre les ouvriers agricoles africains, employés pour la plupart illégalement pour ramasser oranges et mandarines. Un millier d'entre eux avaient quitté la ville et l'incident avait révélé les conditions déplorables dans lesquelles vivaient et travaillaient ces migrants.


"En Italie, une économie informelle est apparue dans laquelle les travailleurs, et en particulier les travailleurs immigrés, ne sont pas protégés car ils ne sont pas officiellement employés", a reconnu M. Scotti, précisant que la situation de 300.000 travailleurs non européens avait pu être régularisée après l'adoption de mesures en 2009.
S'inquiétant des "attitudes xénophobes croissantes contre les travailleurs migrants qui ont conduit (...) aux tragiques événements à Rosarno", deux experts des droits de l'homme de l'ONU avaient réclamé en janvier une réponse "vigoureuse" de l'Italie contre ces violences.


Au cours du débat de mardi devant le Conseil des droits de l'homme, plusieurs pays se sont montrés compréhensifs au sujet des "défis" qu'affronte l'Italie où le nombre d'immigrés vivant dans le pays a bondi de près de 250% en dix ans, mais la plupart ont appelé Rome à faire mieux.


Ils ont également été nombreux à critiquer les patrouilles de la marine italienne en mer Méditerranée pour intercepter les migrants illégaux qui sont immédiatement renvoyés en Libye, ainsi que les mesures prises contre les roms.
Le représentant des Etats-Unis John Mariz s'est ainsi inquiété du recensement des 160.000 Roma et Sinti vivant en Italie, y compris à l'aide d'empreintes digitales, qui selon lui "pourrait servir à perpétuer leur stigmatisation sociale".
Certains pays, comme le Canada, ont enfin exprimé "leur préoccupation au sujet de la concentration des médias", alors que le Premier ministre italien Silvio Berlusconi contrôle via le groupe Mediaset trois chaînes de télévision gratuites.

Une dépêche de l'AFP, reprise par Le Monde, le 09/02/2010 et relayée par France Terre d'Asile
Quel recours les femmes ont-elles contre la violence quand elles sont sans papiers? La Cimade retrace leurs difficultés. Un article de Noria Ait-Kheddache dans l'Express.

Beauty, une nigériane venue en France en 2003 pour avoir une vie meilleure, s'est vite retrouvée sur le trottoir pour rembouser les 60.000 euros qu'elle devait à celle qui lui a fait traverser la Méditerranée. En 2006, elle porte plainte contre sa "mama". Au pays, sa mère se fera assassiner en représailles. Aissetou, mariée à un Malien en situation régulière a voulu divorcer quand elle a appris que son conjoint était polygame. Elle s'est retrouvée dans un hôtel social, à faire des tresses pour nourrir ses enfants. Fadila, qui a suivi son mari en France a été battue puis abandonnée avec ses enfants quand ce dernier est retourné vivre au Maroc. Malgré plusieurs demandes de titres de séjour, elle n'a pas obtenu le droit d'asile et est morte de maladie quelques mois plus tard. Sans documents de circulation, ses enfants restés en France n'ont pu assister à l'enterrement de leur mère, rapatriée au Maroc.

Depuis 2004, la Cimade a accueilli dans ses locaux plus de 1800 femmes subissant mariage forcé, crime d'honneur ou esclavage moderne. Un chiffre qui ne comprend évidemment pas la totalité des victimes, puisque beaucoup n'osent pas témoigner de leurs souffrances. Devant leur détresse, l'association d'aide aux migrants a dû créer une cellule spécialement dédiée à ces femmes sans-papiers de tous les milieux sociaux. Aujourd'hui, elle va aller plus loin avec une campagne de sensibilisation.

"Se taire et subir"

"Quant on est victime de violences, il faut le prouver si l'on veut être protégé, explique Violaine Husson de la Cimade. Pour cela, il faut porter plainte." Comment faire alors quand on est sans papiers? Porter plainte est un droit en France. Quel que soit son statut administratif, que l'on soit français ou étranger, avec ou sans papiers. Mais la réalité est parfois bien différente comme l'explique Violaine. "Il arrive qu'une femme se rende dans un commissariat, et soit reçue par un officier de police judiciaire qui la voit comme une délinquante, car ils ne sont pas formés à ce genre de situations." En 2008, une femme marocaine venue porter plainte contre son conjoint de nationalité française a été placée dans un centre de rétention avant d'être expulsée vers son pays d'origine. Elle a pu revenir grâce au combat mené par les différentes associations d'aide aux droits des femmes. Mais ce n'est pas toujours le cas. La plupart du temps, elles subissent une double peine: parler et partir ou se taire et subir.

La Cimade prend donc à partie les politiques. "Nous profitons de la période éléctorale qui s'ouvre pour alerter les élus, locaux, régionaux, parlementaires et leur proposer une charte d'engagement", raconte Fred Carillon de l'association. Le document appelle les élus à s'impliquer davantage pour garantir l'application des lois et dispositifs existants pour la protection de ces femmes. Pour créer une mobilisation citoyenne, l'association a créé un site internet, mais surtout un compte twitter et facebook, pour appeler à des actions et des engagements: dans testing dans un commissariat, soutien à une cas particulier, etc.

La peur de perdre son titre de séjour

Mais de nombreuses difficultés subsistent. Trouver un hébergement d'urgence pour une femme battue, seule ou avec des enfants est souvent impossible. "Une femme en situation irrégulière ne peut accéder aux endroits spécialisés dans l'accueil des femmes battues", explique Violaine. Leur assurer un suivi médical, psychologique ou social est également loin d'être évident. La peur de perdre son titre de séjour est dans la plupart des cas le critère qui les fait supporter l'insupportable. "Les femmes sont enchaînées administrativement à leur conjoint. En théorie, une femme peut obtenir un titre de séjour ou son renouvellement si elle est victime de violences conjugales. Mais dans la pratique, ces droits restent soumis au pouvoir du préfet. Et il y a autant de décisions différentes qu'il y a de préfets."

Devant l'ampleur de ces difficultés, les bénévoles de la Cimade se montrent parfois impuissants. "Il arrive que l'on ne puisse pas aider certaines femmes, on se contente alors de leur parler. Parfois, il y a plus de risques pour une femme de quitter le domicile conjugal et faire une demande de titre de séjour puisque la préfécture apprend où elle habite... et peut l'expulser. C'est un peu comme le serpent qui se mord la queue".

La Cimade attend avec impatience le 25 février prochain. Date du débat parlementaire relatif à la proposition de loi renforçant la protection des victimes, la prévention et la répression des violences faites aux femmes.