vendredi 16 décembre 2005
Deux lois une seule exclusion
Lire ce texte de Ueli Leuenberger publié dans Le Temps, le jour du vote final de la LAsi et de la LEtr
Le durcissement de la loi sur l'asile confirmé
Après trois ans de débat, le Parlement a accepté les durcissements controversés de la Loi sur l'asile. La gauche a déjà annoncé le lancement d'un référendum
La nouvelle loi supprime notamment l'aide sociale aux requérants déboutés et double la durée de détention possible en vue du renvoi pour la porter à 18 mois.
Lire le dossier de Swissinfo et le communiqué d'AP
Ecoutez la séquence audio sur la Première (Journal de midi)
La position du PS
Lire le communiqué sur le site du PS
« Le PS refuse cette politique d’asile inhumaine, et par ailleurs inefficace», déclare Ursula Wyss, conseillère nationale et vice-présidente du PS. Après la votation finale de ce matin sur la révision de la loi sur l’asile, c’est maintenant définitif : le PS lancera le référendum à la fin de l’année. La tradition humanitaire de la Suisse est en jeu. Pour la sauver, le PS peut compter sur une large coalition de milieux de gauche et des Eglises, d’œuvres d’entraide, de milieux libéraux au sens propre du terme ainsi que de cantons et de communes, sur qui se reporteront les coûts et les problèmes.
Sur proposition du chef du DFJP, une majorité parlementaire PDC, PRD et UDC a approuvé sans broncher des durcissements inacceptables de la loi sur l’asile. Le droit d’asile se trouve vidé de sa substance, alors que les problèmes actuels ne sont pas résolus, mais reportés sur les cantons et les villes. Au chapitre des durcissements, l’admission humanitaire, encore acceptée un an et demi auparavant par le PDC et le PRD, a été supprimée cet automne. Les points suivants notamment sont contraires à la tradition humanitaire de la Suisse, aux droits de l’homme ou au droit
international :
* Pas d’admission pour les vrais réfugiés : Sans papiers, on est exclu de la procédure d’asile. Sont touchés les vrais réfugiés, qui ne peuvent souvent pas se procurer de papiers avant leur fuite. C’est contraire à la convention de Genève.
* Des procédures accélérées et inéquitables : les délais de recours sont souvent de cinq jours seulement. Pendant ce temps, les réfugiés peuvent être incarcérés. Comment pourraient-ils rédiger un recours, seuls en prison?
* Misère organisée : tous ceux qui ont reçu une décision négative ou de non entrée en matière – même les familles avec enfants ou les malades sont exclus de l’aide sociale.
* Des êtres humains de deuxième zone : Le logement des réfugiés peut être perquisitionné sans mandat, des requérants peuvent être interdits de travail et ceux qui ne quittent pas volontairement la Suisse être emprisonnés pendant deux ans – en violation de la Convention européenne des droits de l’homme.
Dans ces conditions, il ne restait plus au PS qu’à préparer le référendum contre la nouvelle loi sur l’asile. Les délégués ont donné le 26 novembre leur feu vert au lancement du référendum. La récolte de signatures commence à la fin de l’année.
Ecoutez l'interview d'Alain Berset, conseiller national sur La Première
Les textes de loi sont disponibles
Depuis la page spéciale du site de l'OSAR on peut consulter les textes complets des nouvelles lois comme elles vont être votées (LAsi et LEtr)
La bataille juridique est inévitable
Jean-Michel Jacot-Descombes présente la situation des travaux du Grand Conseil autour de la réponse du gouvernement à la motion de Serge Melly.
Nouvel épisode dans l’affaire des requérants déboutés du groupe dit des «523». Hier, le projet de décret déposé par le gouvernement en réponse à la motion du radical Serge Melly a été accepté par la commission ad hoc du Grand Conseil. Une acceptation qui préfigure une importante bataille juridique.
Un rappel du contexte s’impose. Adoptée le 5 juillet dernier par le parlement, la motion Melly demande notamment l’interdiction des mesures de contrainte contre les requérants déboutés, mais aussi de leur permettre de continuer à travailler. Vu le caractère contraignant d’une motion, le Conseil d’Etat a déposé un projet de décret allant dans le sens souhaité par le motionnaire, tout en demandant aux députés de le refuser. Voilà pour le contexte.
Hier, au terme de sa deuxième séance, la commission a donc approuvé le décret par 8 voix contre 7. Avec, sans surprises, un clivage gauche-droite, les premiers emportant finalement la mise grâce à la voix du radical Serge Melly: «Les débats se sont déroulés dans une ambiance saine, assure le motionnaire. Les deux parties diffèrent simplement sur l’interprétation des lois.» C’est précisément tout l’enjeu de l’affaire.
Deux amendements
Par rapport au projet du Conseil d’Etat, la commission a voté deux amendements. Le premier précise que le décret ne porte que sur le groupe des «523» ainsi que sur celui des 175 requérants d’Ethiopie et d’Erythrée. En d’autres termes, l’interdiction des mesures de contrainte, par exemple, ne concerne pas les autres «catégories » de requérants. Quant au second amendement, il a été proposé par la gauche de la commission. Serge Melly: «Il apparaît clairement que, dans le droit fédéral, les requérants ne peuvent pas travailler, sauf si le Conseil d’Etat en fait la demande auprès de la Confédération.
L’amendement va donc dans le sens d’une telle demande. » C’est dans le courant du mois de janvier que le décret sera discuté au Parlement. Logiquement, il devrait être approuvé par les députés. Avec pour résultat probable le début des hostilités juridiques. Outre le lancement possible d’un référendum, un recours à la Cour constitutionnelle devrait en effet être déposé par la droite. «Cette dernière doit être saisie par 18 députés ou par le Conseil d’Etat, explique le libéral Philippe Leuba, président de la commission. Je pense qu’il ne sera pas difficile de trouver 18 parlementaires. Il est possible aussi que le Conseil fédéral saisisse le Tribunal fédéral sur la question, puisque le canton violerait alors le droit fédéral en légiférant dans un domaine qui n’est pas de sa compétence.»
Bahtije Islami. Du Kosovo à Renens.
Elle sort d’une grippe. Et s’excuse pour son bouton de fièvre. Mais c’est surtout son moral hivernal que Bahtije Islami cache derrière son écharpe. «C’est dur. Tous les matins, je me réveille en me demandant si je serai encore là le mois prochain. Le Nouvel- An, on n’a plus envie de le fêter.» La jeune femme évoque avec un faible sourire son emploi dans une pizzeria de Renens, qu’elle ne le lâcherait pour rien au monde. «Sans travail, tu ne vis plus.» S’afficher comme requérante déboutée face aux clients n’est toutefois pas chose facile... Bahtije Islami restera donc anonyme sur la photo. Au Kosovo, cette universitaire était institutrice. «En Suisse, mon diplôme n’est pas reconnu. » Son rêve: obtenir une autorisation de séjour et reprendre l’Université pour «avoir enfin le droit d’enseigner en Suisse». En attendant, elle profite de se former et exhibe avec fierté ses certificats en français et informatique.
Texte de MARTINE CLERC, photo de Patrick Martin
Lien vers la description du projet de 24heures
Non aux lois sur l'asile et les étrangers
Jean-Michel Dolivo livre son opinion aux lecteurs de 24heures en page deux du quotidien.
Ce vendredi 16 décembre 2005, les Chambres fédérales vont adopter une nouvelle loi sur les étrangers (LEtr) et une révision de la loi sur l’asile (LAsi), qui sont parmi les plus dures d’Europe. Ces deux lois s’inscrivent dans une logique d’exclusion, de discrimination et de répression. Elles seront combattues par deux référendums lancés par celles et ceux qui veulent une Suisse ouverte et solidaire. La loi sur les étrangers (LEtr) ferme quasiment l’accès de notre pays aux ressortissants extra- européens, instituant une véritable politique de ségrégation en fonction de l’origine nationale. Elle accroît encore la précarité des étrangers qui vivent en Suisse: le droit à l’obtention d’une autorisation d’établissement après dix ans de séjour est supprimé, celui au regroupement familial réduit comme peau de chagrin. La LEtr jette la suspicion sur les couples binationaux: l’officier d’état civil pourra refuser de célébrer un mariage sur simple soupçon qu’il pourrait être «blanc». Cette loi condamne les sans-papiers à rester dans la clandestinité, soumis aux pires formes d’exploitation. A été supprimée l’obligation d’examiner les demandes de régularisation individuelle déposées par des personnes sans statut légal vivant en Suisse depuis quatre ans et répondant à tous les critères d’intégration, tant professionnelle que sociale. Dans son volet répressif, la LEtr institue notamment «un renvoi informel » permettant aux autorités de police de renvoyer l’étranger sans aucune exigence de forme. Une véritable machine à expulser sans respecter aucun des droits élémentaires de procédure!
La révision de la loi sur l’asile (LAsi) multiplie les mesures de dissuasion et d’exclusion à l’égard des réfugiés. Elle prévoit de refuser d’entrer en matière sur la demande d’asile de ceux qui ne peuvent présenter un passeport ou une carte d’identité: comment exiger d’une personne persécutée par les autorités de son pays qu’elle demande des papiers en bonne et due forme pour en sortir? Une liste de pays tiers, dits «sûrs», sera établie vers lesquels il sera possible de procéder à un renvoi sans examen de détail de la demande individuelle d’asile. Non content de fermer la porte aux arrivées par voie terrestre, les arrivées par voie aérienne seront aussi bloquées. Les aéroports vont être transformés en véritables souricières pour les nouveaux arrivants dans la mesure où la procédure menée à l’aéroport ne se limitera pas au seul examen préalable. Quant à ceux qui ont vu leur demande d’asile traitée mais déboutée, on leur coupera les vivres: plus d’aide sociale et interdiction de travailler, une façon de les contraindre à partir. Ils seront mis au même régime que celui des personnes victimes de non-entrée en matière (NEM) depuis avril 2004.
Ces deux lois pousseront dans la clandestinité des milliers de personnes pour en faire des sans-papiers, des travailleurs sans statut légal, corvéables et exploitables à merci. Simultanément, elles multiplient les mesures de contrainte permettant jusqu’à deux ans de détention sans avoir commis le moindre délit. La politique migratoire et la politique d’asile de la Suisse se sont de tout temps appuyées sur la peur de la «surpopulation » étrangère. A l’heure de la «libre circulation des personnes », cette logique d’exclusion et de discrimination est inacceptable et nous enferme dans les erreurs du passé. En matière de violation des droits fondamentaux, des libertés individuelles et des droits sociaux, la politique d’immigration et d’asile constitue un laboratoire très préoccupant de solutions autoritaires et de régression sociale
Ce vendredi 16 décembre 2005, les Chambres fédérales vont adopter une nouvelle loi sur les étrangers (LEtr) et une révision de la loi sur l’asile (LAsi), qui sont parmi les plus dures d’Europe. Ces deux lois s’inscrivent dans une logique d’exclusion, de discrimination et de répression. Elles seront combattues par deux référendums lancés par celles et ceux qui veulent une Suisse ouverte et solidaire. La loi sur les étrangers (LEtr) ferme quasiment l’accès de notre pays aux ressortissants extra- européens, instituant une véritable politique de ségrégation en fonction de l’origine nationale. Elle accroît encore la précarité des étrangers qui vivent en Suisse: le droit à l’obtention d’une autorisation d’établissement après dix ans de séjour est supprimé, celui au regroupement familial réduit comme peau de chagrin. La LEtr jette la suspicion sur les couples binationaux: l’officier d’état civil pourra refuser de célébrer un mariage sur simple soupçon qu’il pourrait être «blanc». Cette loi condamne les sans-papiers à rester dans la clandestinité, soumis aux pires formes d’exploitation. A été supprimée l’obligation d’examiner les demandes de régularisation individuelle déposées par des personnes sans statut légal vivant en Suisse depuis quatre ans et répondant à tous les critères d’intégration, tant professionnelle que sociale. Dans son volet répressif, la LEtr institue notamment «un renvoi informel » permettant aux autorités de police de renvoyer l’étranger sans aucune exigence de forme. Une véritable machine à expulser sans respecter aucun des droits élémentaires de procédure!
La révision de la loi sur l’asile (LAsi) multiplie les mesures de dissuasion et d’exclusion à l’égard des réfugiés. Elle prévoit de refuser d’entrer en matière sur la demande d’asile de ceux qui ne peuvent présenter un passeport ou une carte d’identité: comment exiger d’une personne persécutée par les autorités de son pays qu’elle demande des papiers en bonne et due forme pour en sortir? Une liste de pays tiers, dits «sûrs», sera établie vers lesquels il sera possible de procéder à un renvoi sans examen de détail de la demande individuelle d’asile. Non content de fermer la porte aux arrivées par voie terrestre, les arrivées par voie aérienne seront aussi bloquées. Les aéroports vont être transformés en véritables souricières pour les nouveaux arrivants dans la mesure où la procédure menée à l’aéroport ne se limitera pas au seul examen préalable. Quant à ceux qui ont vu leur demande d’asile traitée mais déboutée, on leur coupera les vivres: plus d’aide sociale et interdiction de travailler, une façon de les contraindre à partir. Ils seront mis au même régime que celui des personnes victimes de non-entrée en matière (NEM) depuis avril 2004.
Ces deux lois pousseront dans la clandestinité des milliers de personnes pour en faire des sans-papiers, des travailleurs sans statut légal, corvéables et exploitables à merci. Simultanément, elles multiplient les mesures de contrainte permettant jusqu’à deux ans de détention sans avoir commis le moindre délit. La politique migratoire et la politique d’asile de la Suisse se sont de tout temps appuyées sur la peur de la «surpopulation » étrangère. A l’heure de la «libre circulation des personnes », cette logique d’exclusion et de discrimination est inacceptable et nous enferme dans les erreurs du passé. En matière de violation des droits fondamentaux, des libertés individuelles et des droits sociaux, la politique d’immigration et d’asile constitue un laboratoire très préoccupant de solutions autoritaires et de régression sociale
Le libéral humaniste
Claude Ruey a tenu une position très claire sur cette révision. La voici expliquée par François Nussbaum
Le libéral vaudois Claude Ruey n’a pas ménagé ses efforts pour expliquer à ses collègues radicaux et démocrates-chrétiens que la révision du droit d’asile avait pris une tournure problématique du point de vue des droits humains. Il estime par ailleurs qu’il aurait mieux valu assouplir certaines mesures et éviter un référendum perdu d’avance. Le député vaudois refusera la révision ce matin, avec sa colistière genevoise Martine Brunschwig-Graf. Selon lui, la détention portée à deux ans est tellement disproportionnée qu’elle en devient absurde. Quant à la suppression de l’aide sociale, elle met des gens à la rue de manière inhumaine. Sans compter
qu’elle peut pousser à la délinquance. En outre, ajoute Claude Ruey, l’absence d’aide
sociale va multiplier les demandes d’aide d’urgence. Les oeuvres d’entraide, jusqu’ici, pouvaient faire face aux cas d’urgence, vu leur nombre relativement restreint. A l’avenir, ces organisations seront dépassées. Comment les cantons et communes géreront-ils ces situations de survie?
Quant à la non-entrée en matière lorsqu’un requérant n’a ni passeport ni carte d’identité, c’est éliminer du droit d’asile des gens qui, dans la plupart des
cas, n’ont pu en obtenir dans leur pays précisément parce qu’ils y étaient menacés. C’est donc une mesure grave. «On confond requérant et abuseur, comme aux sombres années Schwarzenbach», dénonce-t-il.
«L’UDC dit que moins de 10%des requérants obtiennent l’asile, en occultant le fait que 30 à 40% bénéficient de l’admission provisoire, soit parce qu’ils méritent protection pour diverses raisons, soit parce qu’on ne peut pas les renvoyer.Mais, pour ces derniers cas, qu’a fait M. Blocher pour obtenir des accords de réadmission? Rien!», constate Claude Ruey.
Au plan politique, le député vaudois estime que le centre-droit marque un autogoal. Le Parti socialiste montrera à son électorat que, par son référendum, il s’est battu pour le droit d’asile. Comme le peuple acceptera probablement la révision, l’UDC en tirera profit. Et les partis du centre, sans initiative dans ce dossier, devront expliquer pourquoi ils ont suivi l’UDC
Lire aussi d'autres prises de position de Claude Ruey
Le libéral vaudois Claude Ruey n’a pas ménagé ses efforts pour expliquer à ses collègues radicaux et démocrates-chrétiens que la révision du droit d’asile avait pris une tournure problématique du point de vue des droits humains. Il estime par ailleurs qu’il aurait mieux valu assouplir certaines mesures et éviter un référendum perdu d’avance. Le député vaudois refusera la révision ce matin, avec sa colistière genevoise Martine Brunschwig-Graf. Selon lui, la détention portée à deux ans est tellement disproportionnée qu’elle en devient absurde. Quant à la suppression de l’aide sociale, elle met des gens à la rue de manière inhumaine. Sans compter
qu’elle peut pousser à la délinquance. En outre, ajoute Claude Ruey, l’absence d’aide
sociale va multiplier les demandes d’aide d’urgence. Les oeuvres d’entraide, jusqu’ici, pouvaient faire face aux cas d’urgence, vu leur nombre relativement restreint. A l’avenir, ces organisations seront dépassées. Comment les cantons et communes géreront-ils ces situations de survie?
Quant à la non-entrée en matière lorsqu’un requérant n’a ni passeport ni carte d’identité, c’est éliminer du droit d’asile des gens qui, dans la plupart des
cas, n’ont pu en obtenir dans leur pays précisément parce qu’ils y étaient menacés. C’est donc une mesure grave. «On confond requérant et abuseur, comme aux sombres années Schwarzenbach», dénonce-t-il.
«L’UDC dit que moins de 10%des requérants obtiennent l’asile, en occultant le fait que 30 à 40% bénéficient de l’admission provisoire, soit parce qu’ils méritent protection pour diverses raisons, soit parce qu’on ne peut pas les renvoyer.Mais, pour ces derniers cas, qu’a fait M. Blocher pour obtenir des accords de réadmission? Rien!», constate Claude Ruey.
Au plan politique, le député vaudois estime que le centre-droit marque un autogoal. Le Parti socialiste montrera à son électorat que, par son référendum, il s’est battu pour le droit d’asile. Comme le peuple acceptera probablement la révision, l’UDC en tirera profit. Et les partis du centre, sans initiative dans ce dossier, devront expliquer pourquoi ils ont suivi l’UDC
Lire aussi d'autres prises de position de Claude Ruey
Chronique d'une révision chaotique
Voici les tribulations parlementaires de la LAsi tel que le Courrier nous la narre, par la plume de Francois Nussbaum:
L’arrivée de Christoph Blocher à la tête du DFJP s’est traduite par un durcissement du projet de révision, alors que la procédure parlementaire était engagée.
Le premier débat du Conseil national (mai 2004) s’est déroulé en présence du nouveau chef du Département fédéral de justice et police. Trop tard pour qu’il puisse intervenir: les travaux préparatoires en commission avaient débuté depuis longtemps,
sur la base d’un texte préparé par Ruth Metzler. Mais Christoph Blocher n’en a pas moins annoncé des changements. Effectivement, le projet soumis au Conseil des Etats en automne avait été passablement remanié durant l’été. Le texte initial portait notamment sur le refus d’entrer en matière pour les requérants ayant traversé un «Etat sûr» avant d’entrer en Suisse. Il était aussi question de geler l’aide au développement pour les pays refusant de reprendre leurs ressortissants.
La seconde version poussait à deux ans la durée maximale de la «détention aux fins de renvoi» et à un an pour les mineurs. L’assignation à résidence était étendue à ceux qui ne menaçaient pas l’ordre public. Les requérants sans documents officiels d’identité faisaient l’objet d’une nonentrée en matière (NEM). Et ils ne recevaient
plus d’aide sociale. Le Conseil des Etats a tenu son premier débat en mars 2005. Avec un zèle particulier, une majorité de sénateurs sont allés plus loin. De la suppression de l’aide sociale, on est passé à celle de l’aide d’urgence,
pour les NEM et, pourquoi pas, à tous les déboutés en procédure ordinaire. L’admission «humanitaire» est rebaptisée «provisoire», en cas de danger de mort.
Un arrêt du Tribunal fédéral est ombé juste après ce débat: l’aide d’urgence ne peut être refusée à quiconque, sinon en violant la Constitution fédérale (chapitre des droits fondamentaux). Il a fallu attendre les dernières négociations entre les deux
Conseils, cette semaine, pour qu’on renonce à des mesures aussi problématiques.
L’arrivée de Christoph Blocher à la tête du DFJP s’est traduite par un durcissement du projet de révision, alors que la procédure parlementaire était engagée.
Le premier débat du Conseil national (mai 2004) s’est déroulé en présence du nouveau chef du Département fédéral de justice et police. Trop tard pour qu’il puisse intervenir: les travaux préparatoires en commission avaient débuté depuis longtemps,
sur la base d’un texte préparé par Ruth Metzler. Mais Christoph Blocher n’en a pas moins annoncé des changements. Effectivement, le projet soumis au Conseil des Etats en automne avait été passablement remanié durant l’été. Le texte initial portait notamment sur le refus d’entrer en matière pour les requérants ayant traversé un «Etat sûr» avant d’entrer en Suisse. Il était aussi question de geler l’aide au développement pour les pays refusant de reprendre leurs ressortissants.
La seconde version poussait à deux ans la durée maximale de la «détention aux fins de renvoi» et à un an pour les mineurs. L’assignation à résidence était étendue à ceux qui ne menaçaient pas l’ordre public. Les requérants sans documents officiels d’identité faisaient l’objet d’une nonentrée en matière (NEM). Et ils ne recevaient
plus d’aide sociale. Le Conseil des Etats a tenu son premier débat en mars 2005. Avec un zèle particulier, une majorité de sénateurs sont allés plus loin. De la suppression de l’aide sociale, on est passé à celle de l’aide d’urgence,
pour les NEM et, pourquoi pas, à tous les déboutés en procédure ordinaire. L’admission «humanitaire» est rebaptisée «provisoire», en cas de danger de mort.
Un arrêt du Tribunal fédéral est ombé juste après ce débat: l’aide d’urgence ne peut être refusée à quiconque, sinon en violant la Constitution fédérale (chapitre des droits fondamentaux). Il a fallu attendre les dernières négociations entre les deux
Conseils, cette semaine, pour qu’on renonce à des mesures aussi problématiques.
Le nouveau droit d'asile sous toit
François Nussbaum dans Le Courrier et la LIberté présente ainsi les travaux du parlement:
Personne n’attend de surprise lors du vote final de ce matin. L’UDC fera bloc en faveur de la révision du droit d’asile, avec la grande majorité des radicaux et démocrates-chrétiens (quelques abstentions possibles). Seuls à droite de l’échiquier, deux libéraux ont annoncé qu’ils voteront non. Socialistes et verts s’y opposeront également, en bloc. Tout est prêt Le oui devrait donc l’emporter à deux contre un au National, à quatre contre un aux Etats. Comme décidé en assemblée des délégués, le parti socialiste lancera le référendum contre cette révision, dès sa publication officielle (en principe le 27 décembre). Toute l’organisation est prête et les listes de signatures seront imprimées avant Noël. Pour le conseiller national Christian
Levrat (soc/FR), cette révision est d’abord inadmissible sur le plan des mesures introduites dans la loi. En considérant comme «abuseur» tout requérant qui ne présente pas ses papiers d’identité, on s’attaque à ceux qui sont, en majorité, des gens réellement en danger et qui n’ont pas obtenu de documents en fuyant.
Code pénal dénaturé
La révision double aussi la durée possible de la détention «aux fins de renvoi». Une mesure qui s’adresse à des gens qui n’ont commis aucun délit pénal. «Pour écoper de deux ans de détention, en Suisse, il faut avoir commis un braquage armé, au cours duquel des personnes ont été blessées!», note le député fribourgeois. Le Code
pénal s’en trouve dénaturé. En outre, ajoute-t-il, on sait que plus la détention se prolonge, plus la probabilité du renvoi diminue, parce qu’il s’agit de requérants que les pays d’origine refusent de reprendre, ou à qui ils refusent un document ’identité.
Enfin, le refus de l’aide sociale à ceux dont la demande a été rejetée peut parfaitement toucher des familles et des enfants en bas âge. Surtout, s’insurge Christian Levrat, cette révision est de la poudre aux yeux. Elle masque, sous un durcissement formel, le fait que Christoph Blocher n’a pas fait son travail. La
seule difficulté réelle, dit-il, concerne l’exécution des renvois, rendus impossibles
en raisons du refus de collaborer des pays d’origine. A ce niveau, rien n’a été fait.
«Ce n’est pas facile», admet le député socialiste. Ruth Metzler avait négocié des accords, notamment avec des Etats d’Afrique de l’Ouest, qui se sont révélés fragiles. Mais au moins elle a essayé et aurait persévéré. «Christoph Blocher, lui, néglige totalement cette voie et, pour cacher ce fiasco, fait croire, sur le papier, qu’il
maîtrise le dossier de l’asile». A noter que le référendum du PS ne portera que sur la révision du droit d’asile, et non sur le dossier, traité en parallèle, de la révision du droit des étrangers.
La campagne de votation portera ainsi sur les questions fondamentales liées aux droits de l’homme, plutôt que de glisser sur le thème général de l’immigration, cher à l’UDC.
Personne n’attend de surprise lors du vote final de ce matin. L’UDC fera bloc en faveur de la révision du droit d’asile, avec la grande majorité des radicaux et démocrates-chrétiens (quelques abstentions possibles). Seuls à droite de l’échiquier, deux libéraux ont annoncé qu’ils voteront non. Socialistes et verts s’y opposeront également, en bloc. Tout est prêt Le oui devrait donc l’emporter à deux contre un au National, à quatre contre un aux Etats. Comme décidé en assemblée des délégués, le parti socialiste lancera le référendum contre cette révision, dès sa publication officielle (en principe le 27 décembre). Toute l’organisation est prête et les listes de signatures seront imprimées avant Noël. Pour le conseiller national Christian
Levrat (soc/FR), cette révision est d’abord inadmissible sur le plan des mesures introduites dans la loi. En considérant comme «abuseur» tout requérant qui ne présente pas ses papiers d’identité, on s’attaque à ceux qui sont, en majorité, des gens réellement en danger et qui n’ont pas obtenu de documents en fuyant.
Code pénal dénaturé
La révision double aussi la durée possible de la détention «aux fins de renvoi». Une mesure qui s’adresse à des gens qui n’ont commis aucun délit pénal. «Pour écoper de deux ans de détention, en Suisse, il faut avoir commis un braquage armé, au cours duquel des personnes ont été blessées!», note le député fribourgeois. Le Code
pénal s’en trouve dénaturé. En outre, ajoute-t-il, on sait que plus la détention se prolonge, plus la probabilité du renvoi diminue, parce qu’il s’agit de requérants que les pays d’origine refusent de reprendre, ou à qui ils refusent un document ’identité.
Enfin, le refus de l’aide sociale à ceux dont la demande a été rejetée peut parfaitement toucher des familles et des enfants en bas âge. Surtout, s’insurge Christian Levrat, cette révision est de la poudre aux yeux. Elle masque, sous un durcissement formel, le fait que Christoph Blocher n’a pas fait son travail. La
seule difficulté réelle, dit-il, concerne l’exécution des renvois, rendus impossibles
en raisons du refus de collaborer des pays d’origine. A ce niveau, rien n’a été fait.
«Ce n’est pas facile», admet le député socialiste. Ruth Metzler avait négocié des accords, notamment avec des Etats d’Afrique de l’Ouest, qui se sont révélés fragiles. Mais au moins elle a essayé et aurait persévéré. «Christoph Blocher, lui, néglige totalement cette voie et, pour cacher ce fiasco, fait croire, sur le papier, qu’il
maîtrise le dossier de l’asile». A noter que le référendum du PS ne portera que sur la révision du droit d’asile, et non sur le dossier, traité en parallèle, de la révision du droit des étrangers.
La campagne de votation portera ainsi sur les questions fondamentales liées aux droits de l’homme, plutôt que de glisser sur le thème général de l’immigration, cher à l’UDC.
Les requérants n'ont pas la vie de château
Lire l'article d'Antoine Grosjean dans la Tribune de Genève
Aujourd’hui, le parlement boucle le durcissement de la Loi sur l’asile. Les abus, les NEM, le trafic de drogue ont fait couler beaucoup d’encre. Mais qu’en est-il des requérants lambda? La «Tribune de Genève» est allée dans un centre d’hébergement voir quel accueil leur réserve la Suisse.
«Regardez, impossible de fermer.» Et le jeune homme claque la porte métallique de toutes ses forces. Deux fois, trois fois. Rien à faire, elle reste ouverte. Les courants d'air s'engouffrent dans le couloir, puis sous les portes des chambres. «On a déjà gueulé, mais rien ne change», s'emporte-t-il. Le vacarme attire d'autres résidents.
La discussion s'engage. «En logeant les gens dans ces conditions, on en fait des lions», remarque un autre jeune homme, Africain lui aussi.
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Aujourd’hui, le parlement boucle le durcissement de la Loi sur l’asile. Les abus, les NEM, le trafic de drogue ont fait couler beaucoup d’encre. Mais qu’en est-il des requérants lambda? La «Tribune de Genève» est allée dans un centre d’hébergement voir quel accueil leur réserve la Suisse.
«Regardez, impossible de fermer.» Et le jeune homme claque la porte métallique de toutes ses forces. Deux fois, trois fois. Rien à faire, elle reste ouverte. Les courants d'air s'engouffrent dans le couloir, puis sous les portes des chambres. «On a déjà gueulé, mais rien ne change», s'emporte-t-il. Le vacarme attire d'autres résidents.
La discussion s'engage. «En logeant les gens dans ces conditions, on en fait des lions», remarque un autre jeune homme, Africain lui aussi.
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