mardi 25 mars 2008

Mon-Repos dit non au renvoi des étrangers non intégrés

Peut-on retirer l'autorisation de séjour d'un ressortissant étranger parce qu'il ne manifeste aucune volonté de s'intégrer en Suisse? Dans un arrêt de principe rendu public il y a dix jours, et qui a immédiatement suscité des réactions jusque sous la Coupole fédérale à Berne, le Tribunal fédéral a répondu par la négative. Une décision qui s'impose désormais à tous les cantons, tant que la législation n'est pas révisée.
Le jugement de Mon-Repos casse une décision prise initialement par les services de la conseillère d'Etat radicale saint-galloise Karin Keller-Sutter, qui s'est illustrée bien au-delà de son canton par sa politique de fermeté en matière d'immigration. La magistrate ne cache pas qu'elle juge cette décision «préoccupante». Et avertit qu'il faudra probablement préciser davantage à l'avenir quel degré d'intégration la Suisse est en droit d'exiger des étrangers.


Karin Keller-Sutter: «Je ne trouve pas que le
Tribunal fédéral donne un bon signal en disant
qu'un comportement non intégré ne permet
en principe pas de révoquer le titre de séjour.»
(Photo: Keystone)



Pas d'expulsion vers Gaza

Réfugiés palestiniens, un père et son fils ne pourront pas être expulsés vers Gaza. Arafat, 22 ans, blessé à la gorge par une balle israélienne, devrait être expulsé vers la bande de Gaza. «Juridiquement fondé mais techniquement impossible», tranche le Service de la population.Un article d'Alain Walther dans 24 Heures.


Abdelharim et Arafat devraient être
expulsés vers la bande de Gaza.
Mais l'expulsion de Palestiniens ne
va pas sans difficultés. (Christian Brun)


Deux pièces, deux postes de télévision. Un père et son fils partagent un huis clos angoissant sur les hauts de Lausanne. Tout près du CHUV, Abdelharim, 47 ans, et Arafat, 22 ans, attendent d'être fixés sur leur sort. Seront-ils expulsés vers la bande de Gaza?
La nuit, dans l'appartement, le père, Abdelharim, veille car le fils, Arafat, a peur de suffoquer. De son côté, le jeune homme garde l'oeil sur le moral vacillant de son père. Arafat a été blessé à la gorge par une balle de l'armée israélienne. Opéré en Israël et en Egypte, c'est au CHUV, à Lausanne, en 2005, qu'il a retrouvé la voix. Grâce à l'opération mais aussi grâce à sa volonté. Les deux hommes, de source administrative, sont sans doute les seuls requérants d'asile palestiniens à Lausanne. Requérants, tous deux ont vu leur demande d'asile refusée. L'Office fédéral des migrations (ODM) a estimé, en 2006, qu'il n'y avait pas de situation de guerre civile, pas de violence généralisée, qu'on ne pouvait parler de mise en danger concrète de la population dans la bande de Gaza. Au canton de Vaud d'exécuter cette décision de Berne.
Raisons médicales
Abdelharim, père de onze enfants à Bethlaia, a fait recours. La décision qui le concerne est en suspens. Arafat, le fils, a fait de même. Le jeune homme est maintenant fixé sur son sort. Il a été définitivement débouté. Majeur et célibataire, Arafat devrait déjà se retrouver dans un centre collectif d'aide d'urgence à Vevey. Loin de son père qui veille sur son état de santé.
Au mur du logis est affiché le seul diplôme qu'ait jamais obtenu Abdelharim: un stage de français organisé par le Forum des étrangères et étrangers de Lausanne (FEEL). Cela n'a pas suffi au maçon palestinien pour trouver du travail. Le fils, lui, rêve de devenir mécanicien, mais il n'a pas le droit de travailler ni d'étudier. Il y a quelques jours, l'établissement vaudois d'accueil des migrants (EVAM) a prévenu les deux hommes qu'ils pourraient rester dans l'appartement. Le dossier médical du fils a suffi à convaincre l'EVAM. Il échappe ainsi au centre d'urgence, à la séparation d'avec son père, mais pas à l'expulsion. Du moins en principe...
Pas de liaison aérienne
Les difficultés d'expulsion sont telles pour les Palestiniens que le Service de la population (SPOP), sans porter de jugement sur la décision de l'OMD, se déclare techniquement incapable d'exécuter le renvoi.
«Juridiquement, ce jeune homme, explique Erich Durst, doit quitter la Suisse mais techniquement, c'est impossible.» Le chef de la division Asile du SPOP y voit, entre autres raisons, l'inexistence d'une liaison aérienne entre la Suisse et la bande de Gaza et la difficulté qu'ont les Palestiniens à obtenir des papiers.