vendredi 18 septembre 2009

La jungle de Calais dans les médias français

«JUNGLE» DE CALAIS : «CELA NE VA QUE DÉPLACER LE PROBLÈME»

«Jungle» de Calais : «Cela ne va que déplacer le problème»

| Photo Pascal Rossignol / Reuters

LA CONVENTION DE DUBLIN

Signée le 15 juin 1990, la Convention de Dublin ou «Convention relative à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée auprès d'un Etat membre des Communautés européennes» définit un certain nombre de principes directeurs qui vont servir de cadre juridique pour traiter les dossiers des demandeurs d’asile. Elle vise à éviter le phénomène de demandes multiples (c'est-à-dire à garantir que chaque cas de demande d’asile soit traité par un seul État membre, déterminé en fonction des liens familiaux, par exemple, ou du pays où l’immigré est arrivé en premier dans l’Union européenne…).

En réalité, cette convention a été remplacée le 1er septembre 2003 par un règlement européen (Dublin II), s'est substituée aux dispositions pertinentes de la Convention d'application de l'Accord de Schengen. Mais l’on continue de manière informelle à parler de la convention de Dublin.

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Eric Besson a annoncé mercredi la fermeture avant la fin de la semaine prochaine de la «jungle» de Calais, une zone où vivent des centaines de sans-papiers. Mariam Rachi et Jacky Verhaegen, deux animateurs du Secours catholique de Calais, ne sont pas surpris par cette décision qu’ils jugent inutile. Désemparés, ils ne peuvent qu’espérer que des solutions européennes seront prises un jour, et aider sur le terrain les immigrés à traverser cette nouvelle épreuve.

Interview Marie Desnos - Parismatch.com

Parismatch.com. Comment avez-vous réagi à l’annonce d’Eric Besson de fermer le village clandestin de Calais ?

Mariam Rachi. On s’y attendait. C’était en projet. Mais cela ne résoudra pas le vrai problème, les migrants trouveront un autre squat. La fermeture de la «jungle» ne va faire que déplacer le problème, car cela ne fera pas disparaître les immigrés afghans et irakiens.

Pourquoi et comment ces immigrés se retrouvent à Calais ?

Parce qu’ils fuient la guerre chez eux. La majorité des Afghans viennent même du Pakistan ; ils arrivent à Calais dans la continuité de leur exode, dans l’espoir d’atteindre l’Angleterre. Vous savez ce n’est pas par plaisir ! Parfois nous avons des enfants ! Il y a de plus en plus de mineurs qui quittent leurs pays. Le plus jeune ici a onze ans.

Pourquoi l’Angleterre ?

D’après ce qu’ils nous disent quand ils nous téléphonent en arrivant là-bas, ils sont accueillis dans des centres le temps de leur demande d’asile. Après est-ce qu’elles aboutissent ? On ne sait pas, mais je crois que le simple fait de se sentir considéré les motive, leur redonne espoir. Certains nous disent même qu’ils travaillent ! Je ne sais pas dans quelles conditions mais ils sont heureux de nous l’annoncer.

«LES IMMIGRÉS NEFERONT PAS MARCHE ARRIÈRE»

Eric Besson a fait valoir que les immigrés auront le choix entre le retour volontaire dans leur pays, la demande d’asile ou l’expulsion. Est-ce une solution ?

Ils ne retourneront pas chez eux. Une fois qu’ils sont arrivés ici et qu’ils ont dépensé tout leur argent pour cela, ils ne font pas marche arrière. Sauf quand ils ont un problème ou que leur famille accepte de les reprendre. En ce moment, depuis l’annonce de la fermeture du campement le 21 juillet, pas mal de Kurdes rentrent chez eux. Parce qu’il y a moins de problèmes qu’ailleurs. D’autres sont partis vers la Norvège par crainte d’être expulsés et avec toujours le même espoir de gagner l’Angleterre. De 1200 personnes on est passé à 400-500 en un mois et demi ! Quant à la demande d’asile, elle a peu de chances d’aboutir. Quand ils arrivent en Europe, ils passent trois jours en Grèce, on prend leurs empreintes digitales, et du coup, quand ils arrivent en France, on les renvoie en Grèce où une procédure est en cours. Mais ils n’aiment pas retourner là-bas, ils disent qu’ils sont mal traités. Alors ils pourraient former un recours mais cela prend beaucoup de temps, et encore de l’argent car ils ont intérêt à avoir un avocat…

LES PASSEURS, UN BUSINESS ÉNORME

Que préconiseriez-vous pour faire cesser cette clandestinité ?

Une solution internationale. Il faudrait aller voir ces pays d’où viennent ces gens. Agir sur place. Mettre en place une action européenne et modifier la convention de Dublin. Eradiquer les passeurs aussi, car ce sont eux qui les envoient là.

Vous êtes d’accord Jacky Verhaegen ?

Jacky Verhaegen. Oui, je pense que la fermeture ne va rien résoudre. La majorité des gens ne sont pas expulsables si ce n’est effectivement vers d’autres pays d’Europe en accord avec la convention de Dublin. Je pense que la meilleure solution serait de commencer par harmoniser les procédures de demande d’asile en Europe. Car si on avait les mêmes conditions d’accueil des demandeurs d’asile dans tous les pays d’Europe, ils n’iraient pas tous en Angleterre et on n’en arriverait pas là. Mais le ministère ne l’entend pas.

Et s’attaquer directement aux passeurs comme le préconise votre collègue ?

Bine sûr qu’il le faut. Mais c’est déjà le cas. Des passeurs sont arrêtés régulièrement. Mais c’est un commerce tellement juteux, un business tellement énorme, qu’il y en aura toujours…

Que vont devenir les immigrés de la «jungle» de Calais ?

D’après ce qu’on nous a dit, ils vont être hébergés dans des centres de demandeurs d’asile. C’est ce qui est prévu

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