samedi 25 novembre 2006

A Paris, le racisme ordinaire tourne au drame

Lire l'article de Mathieu Van Berchem dans 24heures

APRÈS MATCH Pourchassé, un policier noir tire sur un supporter du PSG, qui meurt sur le coup. Une tragédie prévisible. G rave incident à connotation raciste et antisémite? Dérapage policier en zone sensible – les abords du Parc des Princes? Bagarre entre supporters frustrés de victoires qui se termine mal? Le drame qui s’est produit jeudi soir près de la porte de Saint-Cloud résume, dans un condensé explosif, tous les maux du Paris-Saint-Germain, club désormais plus célèbre pour la violence d’une petite partie de son public que pour ses résultats sportifs. Le déroulement des faits est encore sujet à caution. On sait qu’à la fin du match opposant le PSG à Hapoël Tel-Aviv (2-4), une bande de jeunes sortie de la tribune «Boulogne » s’en prend à un supporter du club israélien. Présent sur les lieux, le journaliste de l’Express Philippe Broussard, fils du fameux commissaire, raconte la suite sur le site de l’hebdomadaire: «Le groupe en question rebrousse chemin et commence à menacer, à distance, un homme marchant à vive allure au milieu de la chaussée (…) c’est un Noir d’une trentaine d’années, assez grand, vêtu d’un pull en laine beige. Il a en main une grosse bombe de gaz lacrymogène et tente de faire face à une foule de plus en plus hostile. » Injures racistes Harcelé, il sort une arme, tire. Un supporter de 24 ans meurt sur le coup, un autre est grièvement blessé. En fait, l’homme est un policier en civil d’origine antillaise, qui a tenté de prendre le supporter israélien sous sa protection. Après le coup de feu, ils trouvent refuge dans un McDonald’s, tandis que dehors, on continue à hurler: «sale nègre» ou «Bleu Blanc Rouge, la France aux Français», rapporte Broussard. Hier, le procureur de Paris a confirmé le racisme ambiant: saluts nazis, injures racistes, etc. Rien de franchement neuf sur la planète PSG. Cela fait des années que des bandes de supporters salissent la réputation du club. L’automne dernier, la rivalité des «clans» — «Boulogne Boys» (extrême droite) contre «Tigris Mystic » (en majorité d’origine immigrée) ou «Karsud», tous partisans, faut-il le préciser, du même PSG! — a dégénéré en affrontements d’une violence extrême. Au point de faire réagir Nicolas Sarkozy. Fichés, les supporters les plus dangereux sont alors interdits de match, comme en Grande-Bretagne. La mesure, apparemment, n’a pas suffi. Les hooligans les plus fanatiques ont aujourd’hui tendance à déserter les associations. On les appelle les «indépendants ». Les dirigeants du club ont beau répéter que la violence est le fait d’une «minorité», celle-ci ne se prive jamais d’exprimer librement, et depuis des années, son racisme «ordinaire». BonpourLePen L’affaire ne tombe pas au meilleur moment pour le ministre de l’Intérieur. Sa politique n’a pas permis de résorber la violence aux abords des stades. Les critiques de la police, hier plutôt rares, se font de plus en plus vives. Aux élections professionnelles qui se sont tenues jeudi, c’est l’UNSA, un syndicat proche du Parti socialiste, qui l’a emporté chez les gardiens de la paix, avec 41% des voix. Ce genre d’incident fait surtout le jeu de Jean-Marie Le Pen. Sa cote de popularité bat déjà tous les records. Le leader du Front national obtient 17% d’intentions de vote, contre 9% en novembre 2001, selon un sondage CSA publié aujourd’hui par Le Monde