La libre circulation est visée par l’initiative «Contre l’immigration de masse». Au grand dam de l’économie.
En 2007, l’Union démocratique du centre (UDC) avait misé avec succès sur ses moutons noirs pour remporter les élections. Cette fois elle espère que ce seront les bottes noires de l’envahisseur étranger, foulant la bannière suisse, qui serviront de dopant électoral. Le plus grand parti du pays a lancé hier la récolte de signatures pour son initiative «Contre l’immigration de masse». Il a 18 mois pour récolter 100 000 signatures. L’accord sur la libre circulation des personnes avec l’Union européenne (UE) devrait être renégocié en cas de oui.
«La Suisse gère de manière autonome l’immigration des étrangers.» Telle est la disposition centrale du texte. Selon l’UDC la maison brûle. Guy Parmelin (VD), conseiller national: «Les 330 000 résidants supplémentaires sur les quatre dernières années constituent une immigration débridée faisant pression sur les infrastructures, les besoins en sol, la consommation d’énergie ou encore les logements.»
Instruments essentiels: l’introduction de «plafonds et de contingents annuels». Seraient concernées non seulement les personnes relevant de la législation sur les étrangers, mais également du domaine de l’asile et les frontaliers. Selon quels critères? «Les intérêts économiques globaux de la Suisse et dans le respect du principe de la préférence nationale.»
Pour concrétiser ces exigences, les traités internationaux «contraires» devraient être «renégociés et adaptés» trois ans après l’approbation de l’initiative par le peuple et les cantons. Dont celui sur la libre circulation des personnes avec l’UE. «On a l’impression que dans ce pays on signe des accords pour l’éternité», a ironisé Guy Parmelin, pour qui une nouvelle négociation est une question de volonté politique.
«Cette initiative doit être clairement rejetée, contre-attaque Delphine Jaccard, responsable de projets chez EconomieSuisse. Elle menace la voie bilatérale et réduirait inutilement la flexibilité du marché du travail. Ces derniers mois il est question surtout, pour ne pas dire exclusivement, des effets négatifs de la libre circulation des personnes, tandis que ses avantages sont totalement occultés.» Et de citer les nouveaux immigrés comme d’importants contributeurs nets au 1er pilier, en plus de permettre de combler «sur le marché du travail suisse les lacunes qui l’empêchent de croître. Il manquera ainsi 32 000 spécialistes des technologies de l’information et de la communication à l’horizon 2017.»
Ne pas fermer les yeux
Pour Delphine Jaccard, pas question toutefois de fermer les yeux: «Nous ne sous-estimons nullement les conséquences sur le marché de l’immobilier ni les contraintes imposées aux infrastructures ou au corps social. En pratiquant une politique adéquate, ces effets peuvent être atténués de telle sorte que le bilan général demeure clairement positif. Beaucoup des problèmes actuels sont à mettre sur le compte de la politique migratoire déficiente des années 80 et 90. La réintroduction des contingents serait un très mauvais choix politique!»
Pour le Parti libéral-radical, l’UDC commet une «attaque frontale contre la prospérité et la stabilité de la Suisse», ajoutant que «la droite isolationniste renonce définitivement à une politique économique bourgeoise. Les Verts parlent d’une initiative qui ne fait qu’attiser la xénophobie», oubliant qu’il faut avant tout «limiter le gaspillage de ressources».
Romain Clivaz, Berne, pour 24 Heures
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