Au moment où Sarkozy est reçu par le pape, deux nouvelles affaires enveniment les relations entre le gouvernement et les gens du voyage.
Deux nouvelles affaires qui n’ont pas de lien direct empoisonnent encore plus les relations entre le gouvernement français et les Roms. Elles interviennent au moment où le président Sarkozy est reçu au Vatican par Benoît XVI. Cet été, le pape s’était montré critique envers les dispositions prises par la France contre les nomades originaires de l’Europe orientale.
La première affaire se rapporte à la plainte pénale déposée au Parquet de Paris par quatre organisations de défense des gens du voyage et des Roms. Cette plainte accuse la gendarmerie d’avoir constitué un fichier ethnique sur les Roms et les gens du voyage – cette catégorie floue dans laquelle les autorités françaises rangent toutes les populations nomades. Ce fichier, intitulé MENS (Minorités ethniques non sédentarisées), engrangerait les données généalogiques de familles roms. Il s’agit donc clairement de les viser en tant que groupe ethnique, ce qui est rigoureusement interdit en France, pays encore traumatisé par les fichiers juifs que dressait le régime de Pétain durant l’Occupation.
La pression de Bruxelles
Cette affaire tombe d'autant plus mal que la France est actuellement sous enquête par l’Union européenne à la suite d’une circulaire du Ministère de l’intérieur ordonnant la destruction des camps de Roms, en priorité. Bruxelles avait fixé un délai au 15 octobre à la France pour qu’elle mette ses règlements en conformité avec le droit européen, qui garantit la libre circulation de tous les citoyens de l’Union, y compris les Roms. D’ailleurs, la commissaire européenne à la Justice, Viviane Reding – qui avait eu des mots très durs à l’endroit de Paris –, a annoncé, hier, que si l’existence d’un tel fichier était confirmée, il constituerait «un élément nouveau qui s’ajouterait à ce dossier».
Le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a déclaré tout ignorer de ce fichier et a demandé au Groupe de contrôle des bases de données – présidé par le criminologue Alain Bauer – d’enquêter à ce propos. Le ministre admet qu’il y avait eu jadis un fichier généalogique, mais il a été supprimé le 13 décembre 2007.
La deuxième affaire a été révélée, hier, par la chaîne télévisée France 24 . Plusieurs Roms vivant dans un camp à Méry-sur-Oise, non loin de Paris, ont fait l’objet de prises d’empreintes génétiques (ADN). Le Parquet de Pontoise affirme avoir détruit ces données.
«Ce n’est pas un cas isolé, explique à 24 heures Stéphane Lévêque, directeur de la Fédération nationale des associations solidaires avec les Tsiganes et les gens du voyage. D’autres cas nous ont été signalés. Ces informations sont en train de remonter vers nos associations.»
Le regard de Rome
La question des Roms a-t-elle été évoquée, hier, lors de la visite au Vatican du président français? Le communiqué officiel du Saint-Siège ne mentionne pas ce sujet parmi ceux abordés par Benoît XVI et Nicolas Sarkozy. Mais, lors de la «prière à la France» dite par le cardinal Jean-Louis Tauran, un compatriote du président, il a été fait allusion à «l’accueil des persécutés et des immigrés», ce qui dans la langue de bois vaticane signifie que le gouvernement français est sous sainte observation. Comme à Bruxelles .
Jean-Noël Cuénod dans 24 Heures
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