Mieux vaut tomber amoureux d’un ressortissant de l’espace Schengen.
C’est une loi passée un peu inaperçue mais qui va enlever aux citoyens suisses, et pas seulement à eux, une part de leur liberté individuelle. Elle stipule que dès le 1er janvier prochain, les officiers d’état civil ne pourront célébrer de mariage que si les deux fiancés sont titulaires de la nationalité suisse ou d’un titre de séjour valable. La manœuvre vise à empêcher les requérants d’asile déboutés, mais aussi les étudiants étrangers arrivés au terme de leur cursus, les touristes qui s’attardent plus de trois mois ou les travailleurs au noir, de légaliser leur présence en Suisse par le mariage.
Comme si tous les sans-papiers n’avaient que des motifs coupables pour se marier.
Or, pour quelques cas suspects que les dispositions actuelles, qui datent de 2008, permettent déjà de prévenir, cette nouvelle loi aura d’amères conséquences pour les citoyens de ce pays. Ils ou elles ne pourront plus épouser la personne de leur choix. Car les alternatives, mariage dans le pays d’origine ou obtention d’un visa spécifique, restent souvent illusoires. Essayez donc de suivre votre fiancé à Mogadiscio pour l’épouser ou de proposer à la femme qui pourrait être celle de votre vie de rentrer à Bassorah pour y demander un visa.
Mieux vaut tomber amoureux d’un ressortissant de l’espace Schengen.
Sans oublier la part d’arbitraire que cachent ces nouvelles normes: un cadre japonais aura plus de chances qu’un jeune Africain de franchir les obstacles que la Suisse dresse désormais sur le chemin du mariage, quelle que soit la force des sentiments qui les unissent à leur fiancée. Du côté des conjoints helvètes, il ne sera pas négligeable de disposer de relations au sein de l’administration pour surveiller une procédure assez obscure, et de revenus confortables pour couvrir les billets d’avion, l’attente du conjoint dans son pays et les garanties financières nécessaires pour le visa. Les Suisses sont-ils prêts à accepter ces nouvelles limites? A gauche comme à droite, certains qualifient cette loi comme relevant d’un Etat totalitaire.
Editorial de Serge Michel dans le Temps
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