Dans la guerre que mènent un certain nombre de partis pour la légalisation de ce qu'on appelle les «sans-papiers», l'opération de guérilla de la Ville de Lausanne aura connu, ces dernières semaines, un succès certain. Editorial de Michel Danthe, rédacteur en chef du Matin Dimanche.
Bien décidée à violer la loi en engageant comme apprentis des jeunes en situation irrégulière, la Ville de Lausanne joue sciemment la provocation. Et déclenche un débat aujourd'hui d'ampleur nationale.
Le thème est émotionnel. La démarche a pour soi d'être généreuse. De faire vibrer toute la gamme des ressorts humanistes qui animent quiconque a devant lui, concrètement, le cas d'un jeune en situation irrégulière à qui la loi refuse, aujourd'hui, d'entrer en apprentissage.
Face à cet océan de sentiments, des voix plus nuancées se font pourtant entendre. Elles pointent la complexité que cette dynamique d'ouverture implique.
A la Tribune de Genève, le conseiller d'Etat socialiste Charles Beer déclare: «Nous sommes d'accord sur le principe de l'engagement de sans-papiers pour un apprentissage, mais les modalités restent à définir. Ce que nous n'allons pas cautionner, ce serait de délivrer des autorisations qui ne seraient pas légales. Mais tout ce qui pourra être assoupli le sera.»
Voilà ce qui s'appelle marcher sur des oeufs, contrairement à sa collègue de parti Sandrine Salerno, qui fonce dans les traces de la Ville de Lausanne.
Au-delà, encore, de cette préoccupation légale, d'autres magistrats, comme le radical Pierre Maudet, voient pointer les effets pervers d'une telle guérilla: sur un marché de l'apprentissage souvent tendu, comment réagiront les jeunes Suisses et les jeunes étrangers légalement établis, à qui l'on préférerait, par discrimination positive, des sans-papiers?
Eh oui: la situation est complexe. Et l'on n'évitera pas un débat qui s'annonce complexe et rugueux.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire