Sylvie Perrinjaquet, ancienne cheffe des écoles à Neuchâtel, estime que la formation des sans-papiers compte plus que leur statut légal.
Enfants sans papiers à l’école. Tel est le nom de la brochure présentée hier à Berne par le Syndicat suisse des services publics et l’Association pour les droits des enfants sans statut légal. Objectif: formuler des recommandations et sensibiliser le corps enseignant comme les autorités scolaires. Les pratiques divergent entre cantons. Il arrive même que, par le biais de l’école, les autorités soient informées de la situation irrégulière des familles. La conseillère nationale neuchâteloise Sylvie Perrinjaquet (PLR) était présente. Interview.
Pourquoi soutenez-vous cette démarche?
La brochure pose un constat et présente bien la situation. Il est ici essentiel que l’on respecte la loi sur la protection des données et que chacun fasse son travail. L’école et les enseignants jouent leur rôle, qui est de former et non pas de dénoncer. Les autres services de l’Etat jouent le leur. Il ne faut pas tout mélanger. Neuchâtel a été le premier canton à reconnaître le droit à la formation d’enfants de sans-papiers. J’ai déposé des interventions parlementaires dans ce sens à Berne. Elles complètent les démarches de mon collègue démocrate-chrétien genevois Luc Barthassat.
N’est-ce pas paradoxal qu’une élue PLR, dont le parti veut un tour de vis migratoire, s’engage pour cette cause?
Non. Mon parti mise sur la valorisation de l’intégration. Les jeunes dont nous parlons ici sont justement souvent des exemples d’intégration. Ils sont d’ailleurs souvent nés ici. En fin de scolarité obligatoire, on est parfois confronté à des situations absurdes: un sans-papiers peut faire des études mais pas d’apprentissage car il ne peut pas signer de contrat vu son statut d’illégal.
Vos collègues radicaux alémaniques sont-ils aussi ouverts?
Il y a effectivement une différence de perception des deux côtés de la Sarine.
Dans la brochure, est-ce bien judicieux de pousser les enseignants à ne pas communiquer la présence d’enfants clandestins à certaines autorités, par exemple au Contrôle des habitants? Ne franchit-on pas la ligne rouge?
Mais dans mon canton les enseignants ne connaissent pas le statut des élèves et de leur famille. Et ils n’ont pas à le connaître. En Suisse alémanique, la pratique semble différente en matière d’information des directions et du corps enseignant. Chez nou,s le jeune est au centre. Pas question de jouer les auxiliaires des autorités migratoires. Pour moi c’est clair: dans le dossier des jeunes sans-papiers, le droit à la formation prévaut sur la question du statut légal de la famille. On ne peut pas théoriser sur l’importance de l’intégration, puis exclure des jeunes, souvent nés ici, qui veulent se faire leur place sur le marché du travail.
Ne repousse-t-on pas le problème à la fin de la formation?
Non. Car il faut être cohérent et ensuite admettre, sous certaines conditions, que ces jeunes puissent également rester en Suisse après leur formation.
Vous préparez des régularisations en masse, mais par la bande?
Absolument pas. Il est évident qu’une fois leur formation terminée ces jeunes n’auront pas automatiquement le droit de rester ici. Une procédure, semblable à celle pour une naturalisation, devra être mise sur pied. L’intégration ou la maîtrise de la langue joueront un rôle. Aucune forme de régularisation automatique pour les parents ne doit être prévue. Je demande juste un peu de pragmatisme et de sens des responsabilités à l’égard de jeunes qui se retrouvent dans de telles situations bien malgré eux.
Romain Clivaz et Kiri Santer dans 24 Heures
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