http://www.lemonde.fr/europe/article/2009/08/14/la-police-danoise-s-empare-de-dix-neuf-demandeurs-d-asile-irakiens-refugies-dans-une-eglise_1228546_3214.html
L'arrestation, dans la nuit du 12 au 13 août, de dix-neuf demandeurs d'asile irakiens réfugiés depuis mai 2009 dans l'église Brorson, à Copenhague, divise les Danois : 54 % d'entre eux estiment, selon un sondage de la radio danoise, que l'action de la police, jugée violente par de nombreux témoins, était légitime et normale. Mais 12 000 manifestants ont défilé calmement, jeudi soir, dans la capitale danoise pour condamner l'action des autorités considérée comme "non danoise" par plusieurs responsables politiques de l'opposition de gauche.
Il était environ 1 h 30 du matin lorsque de nombreux policiers sont entrés en force dans l'église Brorson. Ils étaient venus pour arrêter une vingtaine de jeunes hommes irakiens, et non des familles qui se trouvaient aussi sur place. Des sympathisants danois qui soutenaient depuis mai les Irakiens ont tenté de s'opposer, à l'intérieur de l'église puis à l'extérieur, aux policiers. Prévenus par SMS, ils ont été de plus en plus nombreux à venir pour stopper la violation du sanctuaire. Cinq militants ont été appréhendés tandis que les Irakiens arrêtés étaient emmenés vers une destination secrète.
Leur sort demeure incertain. "Les autorités irakiennes ne veulent accepter que trois des dix-neuf demandeurs d'asile", a déclaré le commissaire Hans-Viggo Jensen, chef du département étrangers de la police danoise. La raison en est que l'identité des autres ne peut être certifiée. Une délégation irakienne qui doit venir la semaine prochaine - "un simple hasard" de calendrier, selon la police - travaillera à l'établissement de leur identité. Depuis mai, une soixantaine d'Irakiens s'étaient réfugiés dans cette église. "Je suis un ancien milicien du parti Baas qui a combattu contre les Kurdes. Si je suis renvoyé chez moi à Kirkouk, je serai tué", avait expliqué au Monde, en juin, Hazhar Gaaf, au Danemark depuis neuf ans.
ACCORD AVEC BAGDAD
Le gouvernement de droite danois, soutenu par l'extrême droite, avait décidé, au printemps, de renvoyer 282 demandeurs d'asile irakiens. Le 13 mai, le Danemark avait signé un accord avec l'Irak permettant le renvoi de demandeurs d'asile expulsables.
Après cela, des dizaines d'Irakiens, parmi lesquels de nombreuses familles, avaient cherché refuge dans l'église. Selon Mone Rosenberg, du réseau Eglise asile, "le gouvernement danois veut continuer à montrer que le Danemark n'est pas un pays où les étrangers sont les bienvenus". De nombreux Danois s'inquiètent de fait de décisions européennes en faveur de la réunification familiale ou de l'accueil d'immigrés arrivés par la mer, et qui leur donnent à croire que l'Union européenne (UE) veut les obliger à accepter plus d'étrangers.
Sur les 282 Irakiens qui devaient être expulsés depuis ce printemps, la moitié a été renvoyée en Irak, selon la police. La plupart de ceux qui ont disparu ont probablement tenté leur chance en Norvège, en Suède et en Allemagne.
Vendredi, le quotidien danois Politiken a cité Andrew Harper, le responsable pour l'Irak de l'agence de l'ONU pour les réfugiés, disant que le Danemark montrait "le mauvais exemple" aux pays voisins de l'Irak et que cette expulsion de force ne faisait que "compliquer la tâche du gouvernement irakien".
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