vendredi 18 mai 2012

La peur des réfugiés climatiques

Des experts en climatologie tirent la sonnette d’alarme devant l’afflux des réfugiés africains: ils préconisent le verrouillage des frontières.

Au Congrès israélien sur la climatologie, les professeurs Arnon Soffer et Anton Berkovsky, du département de géographie de l’Université de Haifa, ont tiré la sonnette d’alarme. Selon eux, Israël n’aura pas d’autre solution pour endiguer le flux  des travailleurs immigrés ou des sans-papiers venus d’Afrique noire, des pays arabes voisins, que de clôturer toutes ses frontières, terrestres et maritimes (en Méditerranée, comme sur la mer Rouge).
Ces deux professeurs, dans un rapport de 200 pages soumis au Congrès de climatologie, affirment que le réchauffement climatique va entraîner et provoque déjà le déplacement de populations entières affamées et dépourvues de moyens d’existence à la recherche de terres d’accueil.
«Ces mouvements  de population de plus en plus vastes, font-ils aussi remarquer, auront des impacts socioéconomiques et géostratégiques d’une ampleur insoupçonnée.» Le professeur Soffer met l’accent sur ce qui se passe dans la vallée du Nil où, dit-il, la surpopulation et des changements climatiques drastiques incitent au départ  vers le nord des centaines de milliers de personnes.
Puis de souligner que les eaux du bassin du Nil, qui étaient naguère de 84 milliards de mètres cubes, sont maintenant en dessous des 51 millards de mètres cubes. Pour expliquer combien la situation devient dramatique en Afrique, Arnon Soffer révèle que 800 lacs, autrefois sources de prospérité, y sont totalement asséchés.

Raréfaction de l’eau
Le professeur établit également un lien entre les régions où  la rébellion en Syrie gagne du terrain et la raréfaction de l’eau. Le Printemps arabe serait, d’après lui, la conséquence directe des phénomènes d’appauvrissement général au Moyen-Orient liés aux conditions de réchauffement climatique.  Arnon Soffer poursuit en ces termes: «Israël est une île ( de prospérité ) dans la région et nous devons nous défendre contre le déferlement de vagues de réfugiés climatiques. Les Européens se sont empressés de verrouiller leurs frontières, nous devons faire de même.» Actuellement Israël érige une barrière dite de «sécurité» tout le long de sa frontière avec l’Egypte. Mais les passeurs bédoins trouvent toujours une faille par où faire franchir la frontière et conduire les réfugiés d’Afrique noire vers la terre promise.
Du côté de l’ancienne gare routière de Tel-Aviv, s’agglutinent un nombre croissant de sans-papiers. Un climat de xénophobie et d’incompréhension se développe dans ces quartiers de la métropole israélienne à forte densité de réfugiés africains. Des incidents violents y ont éclaté entre la population locale et les Africains. La police essaie de s’interposer, de maintenir le calme, mais sans grand succès jusqu’à présent.

Climat de xénophobie
Certains politiciens, comme Elie Ychai,  ministre de l’Intérieur et leader de la formation séfarade orthodoxe Shas, jettent de l’huile sur le feu en tenant des propos incendiaires. Elie Ychai en est venu à déclarer: «Il faut mettre tous ces réfugiés en prison jusqu’à leur expulsion.»
Dans les milieux antiracistes, on s’indigne face à de tels propos. On accuse aussi  les deux professeurs de l’Université de Haifa de propager la xénophobie. Dans ces mêmes milieux on parle de solidarité nécessaire avec ceux qui sont prêts à prendre tous les risques (les soldats égyptiens n’hésitent pas à tirer sur les réfugiés à l’arme automatique dans le désert du Sinaï) pour échapper à la pauvreté et à la faim. «Les Juifs, plus que d’autres, doivent savoir leur tendre une main secourable», dit l’extrême gauche israélienne.

Serge Ronen dans le Courrier

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