Le conseiller d'Etat Pascal Corminboeuf plaide en faveur d'un Béninois menacé de renvoi et de sa fille, établie à Domdidier (FR). Un article de Michaël Rodriguez dans le Courrier.
Le conseiller d'Etat fribourgeois Pascal Corminboeuf s'alarme de la situation d'un jeune Béninois et de son enfant. Il a écrit au ministre vaudois de l'Intérieur Philippe Leuba en lui demandant de faire tout son possible pour éviter que Dieudonné, un requérant d'asile menacé de renvoi, ne soit arraché à sa fille de 7 ans. Ministre fribourgeois des Institutions, Pascal Corminboeuf est aussi le parrain de la mère de la fillette.
«Il faudrait donner une chance à la petite de connaître son père, estime Pascal Corminboeuf, joint par téléphone. Je trouve choquant que l'on casse des liens autour d'un enfant. On connaît assez les dégâts dus au fait que des enfants n'ont pas eu de relation équilibrée avec leurs deux parents.» Dieudonné vit séparé de son ex-compagne, mais il entretien des liens étroits avec sa fille, établie à Domdidier (FR) avec sa mère et son grand-père (notre édition du 31 mars). La démarche de Pascal Corminboeuf a coïncidé avec la libération de Dieudonné et de plusieurs autres requérants d'asile incarcérés en vue de leur renvoi. Les juges de paix vaudois venaient de décider de ne plus reconduire les mesures de détention administrative jusqu'à nouvel ordre. Motif: les vols spéciaux affrétés pour les expulsions sont gelés suite à la mort d'un Nigérian à l'aéroport de Zurich-Kloten. Le département de Philippe Leuba a signalé cette libération à Pascal Corminboeuf. Mais le ministre vaudois ne lui a pas répondu sur le fond. Il a écrit en revanche au grand-père de la fillette, Bernhard Hugo, qui s'était adressé à lui et à la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf. La lecture comparée des deux réponses – cantonale et fédérale – vaut le détour. A propos d'une éventuelle régularisation humanitaire, le ministre vaudois note que «c'est l'autorité fédérale qui est compétente en la matière». Qu'en dit-on à Berne? «Dans la mesure où l'autorité cantonale n'est pas disposée à envisager un règlement des conditions de séjour (de Dieudonné, ndlr) dans notre pays, les autorités fédérales ne bénéficient d'aucune marge de manoeuvre dans ce dossier.» Ce hiatus illustre sans doute assez bien comment des situations humaines peuvent «disparaître» dans l'angle mort des administrations. Curieusement, les autorités n'évoquent pas la piste du regroupement familial, pourtant la plus logique. C'est celle, en tout cas, que prévoit d'emprunter le Service d'aide juridique d'aide aux exilés (SAJE). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un parent étranger peut prétendre à un permis de séjour au titre du regroupement familial, même en l'absence de vie commune. Pour cela, il doit prouver qu'il entretien un lien fort avec son enfant. La décision est normalement du ressort des cantons. Mais là aussi, Lausanne et Berne risquent de se renvoyer la balle. «D'après mes services, il s'agit d'une situation d'exception, qui est de compétence fédérale», indique Philippe Leuba.
En filigrane de l'histoire de Dieudonné se pose la question du respect du droit à la famille. Tout récemment, les autorités vaudoises étaient prêtes à expulser Pitchou, un jeune Congolais, et à l'arracher à son fils nouveau-né. Il a été libéré in extremis le 2 mars dernier sur ordre des autorités fédérales, et a obtenu depuis une admission provisoire. Selon le SAJE, plusieurs mères et leurs enfants sont également menacés de renvoi. L'interdiction, dès janvier 2011, du mariage pour les personnes établies illégalement en Suisse, contribuera encore à affaiblir la protection des liens familiaux des migrants.
mercredi 5 mai 2010
Renvoi forcé: un ministre fribourgeois écrit à Philippe Leuba
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