La présentation par l’extrême droite de Barbara Rosenkranz à l’élection présidentielle fait des vagues. Un article de Blaise Gauquelin, Vienne, pour 24 Heures.
«Ceci n’est pas une blague, c’est la réalité autrichienne», titrait cette semaine l’éditorialiste de l’hebdomadaire Profil, en révélant la proximité édifiante de la candidate de l’extrême droite (FPÖ) avec les milieux néonazis. Cette phrase illustre à la perfection la lassitude du milieu intellectuel viennois, qui voit se profiler une seconde «affaire Waldheim», du nom de l’ancien secrétaire général des Nations Unies, élu président de l’Autriche, en 1986… malgré son passé actif dans la Wehrmacht.
Et en effet, les «vieux démons» du pays refont surface. Pour affronter, le 25 avril prochain, le populaire chef d’Etat sortant Heinz Fischer, social-démocrate, les conservateurs chrétiens n’ont trouvé personne. Ils ont laissé le champ libre à Barbara Rosenkranz, candidate FPÖ, «mère de famille nombreuse», «représentante du peuple» et… femme de l’un des fondateurs du parti néonazi NDP! De quoi tester l’appétence des électeurs à un retour des idées brunes.
Levée de boucliers tardive
A peine intronisée, cette quinquagénaire, antiféministe, s’est d’ailleurs empressée de contester l’interdiction du NDP en Autriche. Une prise de position radicale, mais à la franchise inédite. Face à la polémique, Barbara Rosenkranz, créditée de 20% des suffrages, a dû jurer sous serment de son attachement aux lois contre le révisionnisme et condamner les crimes du national-socialisme. Mais sans convaincre. «Il est grotesque, a dit Josef Pröll, le jeune chef de file de la droite chrétienne, de devoir prendre ses distances avec une idéologie telle que la dictature nazie, et ce par une déclaration sous serment.»
Pourtant, cette levée de boucliers intervient tardivement. En 2008, le FPÖ a désigné à la vice-présidence du parlement un pangermaniste proche des milieux néonazis. Martin Graf a été élu avec les voix de l’ÖVP, et sans que la gauche ne s’y oppose, malgré ses dérapages verbaux antisémites. Selon le politologue Anton Pelinka, «ce qui était derrière les sanctions européennes il y a dix ans est en fait toujours là sur la scène politique: une approche négligente du rapport au nazisme et l’acceptation d’un style populiste contenant un antisémitisme plus ou moins caché, une xénophobie affichée et une justification nostalgique du régime nazi.»
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