Lundi soir, la droite modérée s'est montrée assez favorable à l'idée d'ouvrir la formation professionnelle aux sans-papiers. Mais de là à les régulariser... Un article de Michaël Rodriguez dans le Courrier.
Un municipal socialiste, deux syndicalistes, un patron de PME: le plateau d'orateurs qui était à l'affiche d'une conférence-débat lundi soir sur la formation des sans-papiers penchait vers la gauche. Personne, pas même dans la salle, n'a attaqué frontalement le principe d'un accès des sans-papiers à l'apprentissage. C'est que l'UDC brillait par son absence. Quant à la droite modérée, elle a préféré dévier le débat sur le nombre de places d'apprentissage à la Ville (lire ci-dessous).
De la parole aux actes
Devant une bonne soixantaine de personnes, réunies au restaurant Le Vaudois, «stamm» des radicaux à Lausanne, le municipal de la Jeunesse et de l'éducation Oscar Tosato a rappelé les prémices de la décision lausannoise: une motion d'Alain Hubler (A gauche toute!) en faveur de la formation professionnelle des sans-papiers, les efforts infructueux de la Ville pour se faire entendre des autorités fédérales et, après huit ans, la décision de «passer de la parole aux actes».
«Il n'y a pas de raison que les plus doués puissent faire le gymnase et que les autres restent sur le carreau», a appuyé le deuxième orateur, Guy Gaudard. Ce petit patron, élu de LausannEnsemble au législatif communal, fait le calcul suivant: «Un jeune qui travaille, c'est un jeune qui ne coûte pas cher à la société.» Dans la salle, le président du PDC lausannois Claude Mettraux a défendu l'«égalité de traitement», non sans avoir au préalable accusé l'exécutif de donner de l'eau au moulin de l'UDC.
Un excès nécessaire
Deux questions ont dominé le débat: celle de la légalité et de la légitimité, ainsi que celle de la régularisation. Parmi les orateurs, Aristides Pedraza, syndicaliste à SUD et enseignant à l'école professionnelle, a rappelé que tout changement nécessite de déborder du cadre établi. «Il faut toujours un excès d'initiative, de mouvement social, pour qu'un problème de type institutionnel puisse se résoudre. Les radicaux le savent, eux qui ont été les seuls à mener à bien un projet révolutionnaire dans ce canton...»
Dans l'assistance, une juriste a affirmé que la décision lausannoise est défendable du point de vue du droit. La Constitution fédérale prévoit que «les enfants et les jeunes ont droit à une protection particulière de leur intégrité et à l'encouragement de leur développement». Cela n'a pas suffi à rassurer tout le monde. «En engageant des apprentis sans-papiers, on peut se voir infliger une amende ou une peine privative de liberté, a lancé un employé du Contrôle lausannois des habitants. En tant que formateur, c'est moi qui signe le contrat d'apprentissage!» «La municipalité ne fera porter de conséquences pénales sur personne d'autre que sur elle-même», a promis Oscar Tosato.
L'échec du «cas par cas»
Peut-on offrir une formation aux sans-papiers sans parler régularisation? Certains craignent d'ouvrir la boîte de Pandore. Mais pour Aristides Pedraza, on ne fera pas l'économie d'un tel débat: «Il s'agira de se demander au nom de quoi certaines personnes sont maintenues hors du droit commun, alors que d'autres peuvent être régularisées.» A la table des orateurs, Beatriz Rosende, du Syndicat des services publics, a affirmé que la voie des régularisations au cas par cas est un leurre. «En 2009, l'Office fédéral des migrations a reçu quarante demandes des cantons et en a accepté 80%, mais dans le même temps, deux mille huit cents sans-papiers ont été renvoyés», a-t-elle souligné, citant des chiffres publiés par L'Illustré.
Côté public, Mathieu Blanc, vice-président du Parti libéral-radical lausannois, a mis en garde contre le risque de donner «des faux espoirs» aux sans-papiers. Pour lui, il s'agit de continuer à régulariser au cas par cas, «mais avec des critères élargis». Riposte d'Alain Hubler: «Aux vrais faux espoirs, préférez-vous le vrai désespoir?»
jeudi 25 mars 2010
Apprentissage: l’espoir est-il permis pour les jeunes sans-permis ?
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