vendredi 10 février 2006

Pourquoi Yves Christen a-t-il tourné sa veste ?



Michael Rodriguez dans Le Courrier La Liberté et La Côte s'interroge sur les raisons pour lesquelles Yves Christen s'est transformé en soutien de la loi sur l'asile, il semble qu'il n'a pas résisté aux pressions du grand vieux parti...


L’engagement du conseiller national vaudois Yves Christen en faveur de la Loi sur l’asile fait perdre son latin à plus d’un au sein de la droite humaniste. Le radical, connu pour ses prises de position souvent en porte-à-faux avec la direction de son parti, n’en a pas moins voté en décembre dernier la kyrielle de durcissements apportés au droit d’asile.
Le 27 février prochain, Yves Christen fera même le voyage de Genève pour appeler la section cantonale du parti à voter «oui» à un texte dont l’ancêtre n’est autre que l’initiative de l’UDC Contre les abus dans le droit d’asile, rejetée de justesse par le peuple en 2002.
La soudaine «conversion» d’Yves Christen aux vues de la droite dure sur l’asile étonne d’autant plus que l’homme avait, il y a un an, multiplié les interventions publiques en faveur des requérants d’asile déboutés du canton de Vaud. Yves Christen avait notamment décidé de parrainer la Maison des migrations de la Riviera, accueillant des requérants menacés de renvoi. A cette occasion, il fustigeait, le 2 décembre 2004 dans nos colonnes, la stigmatisation des requérants d’asile et la frilosité des élus bourgeois aux Chambres: plus personne ne défend les requérants, parce qu’on a changé de chef de département, déplorait-il.
Le premier étonné par la position d’Yves Christen, c’est son collègue Yves Guisan. Radical vaudois lui aussi, précédé de la même réputation de franc-tireur au Conseil national, l’homme a quant à lui refusé une loi qu’il juge inhumaine et inefficace. Il sera même parmi les contradicteurs d’Yves Christen lors du débat du 27 février à Genève. Au début des débats sur cette loi, nous étions tout à fait d’accord, s’étonne Yves Guisan. Il a changé d’avis en cours de route et je ne me l’explique pas. Le médecin vaudois hasarde toutefois une piste d’explication: Yves Christen serait plus politique, plus en relation avec la direction du parti.
Une direction qui, à en croire Yves Guisan, a exercé des pressions absolument considérables pour que ses troupes suivent le mot d’ordre du parti, ou tout du moins s’abstiennent. Le radical ne se souvient que d’un épisode similaire: le lavage de cerveau auquel avait procédé la direction du parti en faveur de l’élection de Christoph Blocher au Conseil fédéral.
Chez les libéraux, qui forment un groupe commun avec les radicaux aux Chambres fédérales, la position d’Yves Christen n’est pas passée inaperçue. Le Vaudois Claude Ruey se dit choqué et qualifie son revirement de catastrophe.
De par sa position de leader des radicaux au sein de la commission des institutions politiques, Yves Christen avait un rôle clé à jouer. Il aurait dû être de ceux qui feraient basculer le centre-droite, qui ouvriraient une brèche, tempête Claude Ruey.
Pour l’élu libéral, il faut peut-être voir dans ce revirement le fait d’un parti qui a l’habitude de la majorité et non de la minorité. Il observe aussi qu’Yves Christen avait perdu de son ascendant au sein de la Commission des institutions politiques, au profit du radical argovien Philippe Müller.
Qu’en dit le principal intéressé? Yves Christen admet qu’il a dû mettre de l’eau dans son vin. Je me suis effacé derrière la position majoritaire du groupe, reconnaît-il. Une obéissance au mot d’ordre qu’il justifie par la conclusion d’un «deal» entre radicaux et démocrates-chrétiens. Le centre-droite s’était en effet entendu sur les quelques assouplissements à apporter au texte. Même si l’une des clauses issues de la négociation – la suppression de la détention pour insoumission – n’a finalement pas été respectée, Yves Christen estime qu’il devait loyauté à cet accord.
Mais le conseiller national avance aussi des arguments de stratégie politique. Bien sûr que les requérants d’asile sont des boucs émissaires qui permettent à l’UDC de capitaliser des voix. Mais tant que l’on n’aura pas réussi à prouver à la population qu’il n’y a pas de laxisme en matière d’asile, l’UDC continuera à capitaliser des voix.

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