vendredi 7 octobre 2005

NEM : grève de la faim à Lausanne

Philippe Maeder


Camille Kraft a pu accéder à un requérant Tibétain apatride frappé d'un NEM et qui est au bout du rouleau...
«Je ne veux pas pense que c’est qu’on un suicide »Il garde une main appuyée sur sa hanche gauche, comme pour soulager ce corps qui le brûle de l’intérieur. Tenzin Palden Tongsheyakte a mal, mais ne ressent plus la faim. Assis dans sa chambre du centre Fareas, à la rue du Simplon, le jeune homme de 35 ans murmure son histoire d’un souffle court. Com-ment il a arrêté de manger il y a un mois, parce qu’il ne veut pas «retourner là-bas». «Je n’ai pas de pays. Il faut m’aider», répète obstinément ce Tibétain, né en exil en Inde.
En Suisse depuis 2003, le requérant d’asile a été frappé d’une décision de non-entrée en matière (NEM) par les autorités fédérales. En avril, il a déposé une demande de réexamen auprès de l’Office fédéral des migrations. Depuis lors, Tenzin attend. Mais le temps est long, trop long. Alors le jeune immigré a cessé de s’alimenter. «Cet été, il n’a pas supporté qu’on écrive sur son permis «en attente de renvoi»», explique Alain Plat-tet, secrétaire de l’association bouddhiste Ewam, qui tente de venir en aide au Tibétain. A bout de forces, ce dernier a été conduit à l’Hôpital psychiatrique de Cery, d’où il est ressorti il y a quelques jours, toujours aussi déterminé à continuer sa grève de la faim.
Si Tenzin ne veut pas retourner dans le sud de l’Inde, c’est parce qu’il n’a rien à lui là-bas. «J’ai attendu des années pour avoir un champ. Et lorsque j’ai enfin pu semer, on m’a tout volé», lâche le jeune homme en fixant ses mains d’un air hagard. «Il y a beaucoup de non-dits sur la situation des exilés tibétains en Inde. Non seulement ils sont très pauvres, mais ils n’ont aucun droit. L’impossibilité de se procurer des médicaments de base a par exemple coûté la vie à une partie de sa famille», assure Alain Plattet.
Paradoxe. Tenzin risque d’être renvoyé, mais pourrait bien ne pas être accepté par l’Inde, dont il n’a pas acquis la nationalité. Il n’a d’ailleurs aucun passeport. L’attente, avec pour uniques ressources l’aide d’urgence, menace de durer. Alors, le jeune immigré oscille, entre l’envie de se battre pour aider sa famille, et la tentation de tout laisser aller.
Dans la petite chambre aux volets fermés, une photo du dalaï-lama et un exemplaire du Nouveau Testament. Boudd-histe de naissance et protestant de coeur, Tenzin cherche une réponse à son tourment. «C’est la foi qui m’aide à résister. Si je meurs, je ne veux pas que les gens pensent que c’est un suicide. C’est Dieu qui décide.

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