Nouvelle polémique provoquée par l’hebdomadaire alémanique. Un journaliste autrichien a porté plainte vendredi. Ce dimanche, un avocat et chercheur en a appelé au Ministère public genevois.
La Une de la «Weltwoche», qui montre cette semaine un enfant rom armé, suscite une nouvelle fois de vives critiques. Un journaliste autrichien indigné a porté plainte vendredi contre l’hebdomadaire pour «incitation à la haine raciale» contre la communauté rom.
Sur la couverture du magazine paru jeudi, on peut voir un bambin à la peau cuivrée et aux cheveux noirs pointant un pistolet contre le lecteur. Juste en-dessous de la photo, le titre: «Les Roms arrivent: razzia sur la Suisse». Avec sa plainte déposée en Autriche, Klaus Kamolz désire opposer un «signe symbolique» clair au «jugement à l’emporte-pièce assimilant les Roms à des criminels» propagé par l’hebdomadaire, a-t-il expliqué samedi.
Le journaliste désire en outre encourager la justice autrichienne à se saisir elle-même du dossier, la «Weltwoche» étant vendue dans ce pays. L’incitation à la haine est un «délit officiel» en Autriche, a-t-il précisé, revenant sur des informations du Tages Anzeiger et du Bund.
L’auteur de la photo est l’Italien Livio Mancini. Le photographe indique avoir pris cette image en 2008 dans une décharge de la ville de Gjakova, au Kosovo, où des familles roms vivent avec leurs enfants, qui jouent sur les lieux.
S’il est prioritairement indigné par l’image de couverture, Klaus Kamolz dit pour sa part être également dérangé par l’article. Le «caractère absolu du dénigrement» présent dans cette dernière édition l’a particulièrement décontenancé. Le journaliste de 48 ans, qui écrit notamment pour le magazine d’actualité «profil», espère voir bientôt des réactions helvétiques: «Bien sûr que je suis d’avis que quelque chose devrait être entrepris également en Suisse».
En Suisse, les Jeunes Verts ont écrit une lettre ouverte à Roger Köppel, rédacteur en chef de la «Weltwoche», accusant la couverture d’être «complètement vaseuse». L’image suggère que «les Roms sont tous des criminels associaux», dénoncent-ils.
Philipp Gut, rédacteur en chef adjoint de la «Weltwoche» et co-auteur de l’article incriminé dit ne pas comprendre l’indignation suscitée par l’image de couverture. Cette photo symbolise «le fait que les bandes roms utilisent leurs enfants à des fins criminelles», a-t-il indiqué. Le vrai scandale est qu’aucun des «indignés» ne s’en soit pris à cette maltraitance, a-t-il ajouté. Quant à l’article, il présente sérieusement et de manière nuancée un problème gravissime, s’est-il défendu.
Adresse au ministère public genevois
Dimanche, c’est l’avocat et chercheur en Droit Christophe Germann qui est intervenu dans la polémique. Dans une lettre adressée au Ministère public genevois, et envoyée au «Temps», il demande à l’instance «d’initier les actions de droit pénal qui s’imposent contre les responsables de la couverture» du magazine. Il précise: «J’estime qu’il s’agit non seulement de considérer en l’espèce les normes pénales contre l’incitation à la haine raciale (art. 261bis CPS), mais également contre la provocation en public au génocide et aux crimes contre l’humanité (art. 264, 264a et 259 CPS).»
L’avocat rappelle notamment les agissements, dès 1926, de la fondation Pro Juventute, qui avait arraché 600 enfants yéniches à leurs parents pour les placer en familles d’accueil ou institutions. Une démarche assimilable à un «génocide», suivant une logique que renouvellerait l’hebdomadaire proche de l’UDC, selon l’expert.
Le Temps
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