Une seule Université suisse (Saint-Gall) impose des quotas d’étrangers. Ailleurs, on n’a pas serré la vis.
L’afflux d’étrangers dans les Hautes Ecoles suisses inquiète. Surtout l’UDC et EconomieSuisse, qui dénoncent une baisse du niveau de la formation et exigent des restrictions à l’admission des candidats étrangers. Depuis que la Conférence des recteurs des Universités suisses (CRUS) a jugé légale l’introduction de quotas d’étrangers, la question des restrictions continue à faire débat, principalement en Suisse alémanique. A trois semaines de la rentrée universitaire, quelques adaptations sont à signaler mais la réalité est loin du durcissement évoqué ces derniers temps.
Raymond Werlen, secrétaire général adjoint de la CRUS, temporise l’annonce du début de l’année: «La loi autorise les Hautes Ecoles à limiter les entrées mais seulement si un sureffectif s’avère problématique», souligne-t-il. Mais qu’en est-il vraiment sur le terrain?
Pour l’instant, seule l’Université de Saint-Gall, qui compte un tiers d’étrangers, impose un quota de 25%. Ailleurs, le seul changement immédiat concerne les étudiants allemands qui représentaient un tiers des candidatures étrangères en Suisse l’année dernière. Désormais, ils doivent prouver qu’ils ont obtenu une moyenne minimale de 2,5 à leur maturité (2 pour Berne et Zurich). Ce qui correspond à 4,5/6 et 5/6 en Suisse. A défaut, ils peuvent toujours produire une attestation d’entrée dans une Université allemande.
Une «simplification»
Pour la CRUS, c’est une simplification et non un durcissement. Le service des admissions de Berne justifie son exigence de note plus élevée: «C’est dû au fait que l’Allemagne a raccourci la durée de la formation gymnasiale d’une année et qu’à l’avenir, le nombre de diplômés augmentera fortement.»
Avec, selon l’Office fédéral de la statistique, un taux d’étrangers de 11,7% en 2010 à l’Université de Berne, 32,5% à Saint-Gall et moins de 20% à Zurich, les Universités suisses alémaniques ne sont pourtant pas celles qui accueillent le plus grand nombre de candidats venus de l’extérieur. L’Université de la Suisse italienne (USI) en accueillait 63,6%, l’EPFL 46,6%, et l’Université de Genève 35,3% .
Cependant, ces établissements ne durcissent pas leurs admissions. A titre d’exemple, les Universités exigent toujours un 12/20 au bac français, l’EPFL un 14/20. «Seul un afflux rapide d’étrangers qui pèserait sur le budget, les locaux et les enseignants justifierait d’agir. Rien de tel pour l’instant», précise Pascal Garcin, directeur de la division administrative et sociale des étudiants de l’Université de Genève. Les académies de Neuchâtel et de Lausanne, avec près de 20% d’étrangers, tiennent le même discours.
Des restrictions à l’étude
Néanmoins, les écoles polytechniques de Lausanne et Zurich (EPFL et EPFZ) surveillent d’assez près l’évolution des demandes. «Les candidats étrangers au niveau master atteignent déjà un seuil de 47% à Lausanne, précise le porte-parole de l’EPFL, Jérôme Grosse. Dès 50%, nous réfléchirons à des mesures.» Hubert Girault, doyen de l’école Bachelor et Master de l’EPFL, confirme: «La commission des EPF a demandé une modification de la loi fédérale, dans le sens d’un quota, mais rien n’a changé pour l’instant. L’augmentation des taxes avantagerait les riches, elle ne me semble pas appropriée.»
Un avis partagé par le conseiller national PDC Jacques Neirynck (VD), ancien professeur à l’EPFL: «Le manque de place invoqué par les Suisses alémaniques est un faux argument. Le tri doit se faire sur la qualité des candidats et non sur l’argent. Les notes restent le seul critère pertinent.»
Même position du côté du président de l’USI: «Je ne souhaite pas une université de masse. L’USI compte un total de 3000 étudiants, le jour où on atteint les 3500, la logistique ne suivra pas et il faudra retenir les meilleurs candidats étrangers», analyse Piero Martinoli. Une musique d’avenir qui se fonderait sur le critère de «capacité», jugé légal par la Conférence des recteurs.
Du côté de l’UNES, qui représente les étudiants suisses, toute restriction d’admission pour les étrangers est regrettable. «Notre tradition d’ouverture et d’égalité des chances doit perdurer. Promouvoir la mobilité et freiner l’admission des étrangers est contradictoire. Une note minimale de maturité n’est pas représentative du potentiel d’un étudiant», regrette Virginie Lapaire, du comité exécutif d’UNES .
Yannick Barillon dans 24 Heures
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