Depuis son ouverture, le 1er décembre, l’abri de la Vallée de la Jeunesse est pris d’assaut, notamment par les Roms. Chronique d’une soirée ordinaire dans un lieu d’accueil d’urgence à Lausanne. Un article de Claude Béda dans 24 Heures.
«Ici, à l’entrée, ça pousse tous les soirs et ça peut vite devenir le Bronx. Parfois, nous devons demander l’aide de la police.» Vendredi soir, 22 h: aux côtés des deux veilleurs de piquet, Daniel Simecek, responsable de l’abri PC de la Vallée de la Jeunesse, a toutes les peines à endiguer la trentaine de sans-abri qui se bousculent pour prendre un des 25 lits mis à disposition dans les deux dortoirs et la chambre destinée aux femmes. «Les Roms nous posent problème, car ils viennent en groupe, confie Daniel Simecek. Nous sommes régulièrement contraints de refuser l’entrée à un certain nombre d’entre eux. Ils s’en vont alors dormir dans leurs voitures, dont un bon nombre sont immatriculées en France. Nous acceptons en priorité les Suisses, les habitués, les aînés et les personnes fragilisées dans leur santé. Nous gardons aussi deux ou trois places pour les personnes que la police pourrait trouver en train de dormir dehors. Ici, c’est vraiment le lieu de dernier secours.» Depuis son ouverture, le 1er décembre dernier, l’abri PC a affiché complet tous les jours, sauf le 31 décembre et le 1er janvier. L’endroit accueille chaque soir en moyenne deux ou trois SDF de la région, une dizaine de requérants d’asile et une quinzaine de ressortissants d’Europe de l’Est, des Roms principalement. «Après, à l’intérieur, ça se calme, commente Grégoire, veilleur. Ils savent qu’ils ont à manger et qu’ils peuvent dormir au chaud.»
«Je rêve de trouver un travail et un logement»
Gilles, Français de 19 ans, de la région de Besançon, à la quête d’un travail en Suisse depuis six mois, fait, lui, partie des habitués.
Il vient de passer une dizaine de nuits dans l’abri. «Je viens directement ici, car je sais qu’il y a toujours de la place pour moi, explique-t-il. Je n’ai pas le choix: je cherche une place d’aide-cuisinier, mais présenter un CV sans adresse fixe, ça la fout toujours mal. Des petits boulots me permettent de payer les cinq francs d’entrée. Je me débrouille pour ne jamais dormir dehors. Je rêve de trouver un travail et un logement. J’essaie de garder espoir. Ici, ça ne se passe pas trop mal. On mange et on va se coucher.» Samedi matin, 7 h: les deux veilleurs réveillent leurs hôtes d’infortune. Les derniers s’en vont à 8 h 30, sans savoir où ils passeront la prochaine nuit.
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