Le gouvernement suisse a fait savoir aux Etats-Unis sa disponibilité à accueillir des détenus libérés de la base américaine de Guantanamo, sous réserve d'une étude approfondie. Une annonce qui fait suite aux premières décisions de Barack Obama.
Tout juste investi, le nouveau président des Etats-Unis a demandé la suspension des procédures judiciaires devant les tribunaux d'exception de Guantanamo pendant 120 jours, une décision qui pose la question de l'accueil des détenus.
Prenant la balle au bond, le gouvernement suisse a salué mercredi la volonté du president de fermer dès que possible Guantanamo et annoncé sa disponibilité à accueillir certains des 245 prisonniers encore détenus sur la base américaine.
L'offre suisse
«Pour la Suisse, l'incarcération de personnes à Guantanamo est contraire au droit public international. La Suisse est prête à étudier si - et dans quelle mesure - elle pourrait prendre en charge des réfugiés qui seraient libérés de Guantanamo», précise un communiqué du gouvernement suisse.
Avant de souligner: «Ceci nécessite une analyse détaillée et minutieuse - en particulier pour ce qui relève des aspects sécuritaires et juridiques.»
Si cette offre se concrétise, elle marquera un changement de cap des autorités suisses. En novembre, l'Office fédéral suisse des migrations avait en effet refusé l'asile à trois détenus de Guantanamo originaires de Libye, d'Algérie et de Chine.
Un refus qui fait actuellement l'objet d'un recours soutenu par Amnesty International. Aux yeux de l'ONG, la Suisse est un pays approprié pour l'accueil de détenus de Guantanamo. Elle offre des programmes de réhabilitation et d'aide aux victimes de la torture, selon Manon Schick, la porte-parole de la section suisse d'Amnesty International.
Un dossier kafkaïen
Quoi qu'il en soit, l'annonce du gouvernement devrait satisfaire le parlementaire Dick Marty. Ancien rapporteur du Conseil de l'Europe sur les vols secrets de la CIA, le juriste suisse a en effet demandé à «tous les pays (européens) qui ont critiqué Guantanamo (de) faire un effort» en accordant l'asile à des détenus du camp militaire américain.
«Le problème, c'est qu'on ne sait pas comment fermer Guantanamo», a declaré le sénateur à l'agence de presse suisse ATS. Cette situation est kafkaïenne, selon l'auteur de rapports remarqués sur les centres de détention de la CIA en Europe et les transferts illégaux de détenus vers la base de Guantanamo.
Comme l'explique Dick Marty, l'obtension de l'asile aux Etats-Unis semble difficile. Si les Etats-Unis les accueillaient, ils s'exposeraient à des complications juridiques car les prisonniers pourraient demander des compensations pour avoir été détenus illégalement, selon lui.
De plus, la plupart des 200 à 300 détenus de Guantanamo ne peuvent pas non plus rentrer dans leurs pays. Ils y seraient menacés de mort ou se verraient refuser d'y entrer, explique le sénateur suisse.
Toujours selon le juriste, la solution ne peut sortir des Conventions de Genève qui fixent les droits des prisonniers de guerre. Les détenus de Guantanamo sont en effet qualifié d'«ennemis combattants», un terme juridique créé par Washington pour ne pas avoir à se soumettre aux Conventions qui fixent l'essentiel du droit international humanitaire.
Positions européennes
D'autres pays européens se sont exprimés sur le devenir des détenus. L'Espagne, par la voix de son chef de la diplomatie Miguel Angel Moratinos, s'est dite disposée à «collaborer» au processus de fermeture.
De son coté, le ministre allemand de l'Intérieur Wolfgang Schäuble, membre du parti chrétien-démocrate de la chancelière Angela Merkel, s'est opposé à un accueil des anciens détenus, alors que le ministre des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, un social-démocrate, a écrit à Barack Obama pour lui proposer d'en accueillir.
Quant au porte-parole du gouvernement Ulrich Wilhelm, il a indiqué que Angela Merkel était prête à discuter de la question avec Barack Obama.
Le Portugal s'est aussi dit prêt à recevoir d'anciens prisonniers, tandis que le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner est pour un éventuel accueil «au cas par cas».
Par contre, la Suède, le Danemark ou les Pays-bas ont catégoriquement refusé cette option
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