jeudi 26 avril 2007

Néo-nazis repentis, il traque ses camarades sur la toile

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Le 1er Août 2002, c’était la première et dernière fois que je me suis rendu sur la prairie du Grütli. J’étais très impressionné par la force de mobilisation dé­ployée par mes camarades. Mais au fond de moi j’avais déjà rompu avec le mouvement», raconte Pa­trick Sandmeier. Un dernier salut hitlérien, le bras tendu, et une photo de presse dont il se serait bien passé.
A 25 ans, le jeune Argovien veut briser un tabou en parlant de son passé peu reluisant: quatre années dans la fange brune. Par son témoignage, il veut montrer qu’il existe une vie après le néona­zisme. Et peut-être convaincre d’autres jeunes d’emprunter le même chemin que lui.
«J’ai peu à peu réalisé que mon appartenance à l’extrême droite pouvait avoir des répercussions négatives sur ma vie privée, ra­conte le jeune homme aux sour­cils rasés. J’ai même risqué de perdre mon travail, dans la grande distribution, le jour où j’ai refusé de travailler avec un collè­gue tamoul.» Dans un premier temps, Pa­trick Sandmeier n’abandonne que les signes extérieurs du parfait petit néonazi: il laisse pousser ses cheveux ras et revend son blou­son bombers et ses bottes militai­res. Mais il gardera encore en lui la haine de l’étranger et s’inscrit chez les jeunes UDC. Peu à peu pourtant, il commence à mettre en doute ses idées fascisantes. «Le comportement de mes collègues étrangers ne correspondait pas au cliché véhiculé: ils n’étaient pas fainéants et malgré mes convic­tions, ils ont toujours été corrects avec moi. Toutes ces contradic­tions m’ont fait réfléchir.»
Forums de jeunes infiltrés
Le racisme, Patrick Sandmeier, a décidé aujourd’hui de le com­battre. Il s’est allié avec le célèbre chasseur alémanique de néonazis Heinz Kaiser et deux étudiants. Ensemble, ils viennent d’ouvrir le site internet zugera.ch. «Nous voulons surtout faire de la pré­vention: agir en amont en témoi­gnant de mon expérience, notam­ment, dans les écoles», dit l’ex­néonazi.
Une autre de ses activités con­siste à traquer ses anciens cama­rades sur le net. «Les extrémistes de droites infiltrent les sites et les forums de jeunes pour tenter de rallier de nouveaux membres. Je les repère facilement parce que je connais leurs codes d’identifica­tion. » Pour le site partyguide.ch, le jeune Argovien a déjà effacé une centaine de photos ou de citations à caractère raciste.
Son but est d’empêcher que les jeunes ne tombent comme lui dans le piège. «Le mouvement néonazi est comme une secte: il est facile d’y entrer, mais très difficile d’en ressortir.» Lui est tombé dedans à 16 ans, pendant son apprentissage. «Je viens d’un coin rural de l’Argovie, le Freiamt, très à droite et très conservateur, où les idées racistes sont répan­dues. » Les étrangers, Patrick Sandmeier ne les aimait déjà pas beaucoup à l’école. Puis un jour le grand frère d’un copain l’emmène voir un concert néonazi et ça a été le déclic. «Je suis rentré à la maison, je me suis rasé les che­veux et je me suis dit: je pense comme eux, je vis comme eux, je suis comme eux.» Il intègre une petite clique d’une quinzaine de personnes très soudée. «J’avais l’impression de faire partie d’une véritable fa­mille, d’un clan. Ce sentiment d’appartenance et de protection je ne l’ai plus jamais retrouvé.» D’ailleurs, lorsqu’il quitte le groupe, Patrick Sandmeier se re­trouve d’un coup très seul. «Mes amis d’avant m’avaient déjà tourné le dos, mes camarades d’extrême droite me traitaient de «cochon d’ex-nazi» ou de traître à la patrie.» Aujourd’hui, il a démé­nagé dans un autre coin du can­ton d’Argovie. Avec sa compagne d’origine slovène, il élève son fils de 2 ans. «C’est aussi pour lui que je témoigne. Même si ma mère ne supporte pas de me voir dans les journaux en tant qu’ex-néo­nazi.

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