mardi 31 mai 2011

Libye: 1000 réfugiés débarquent en Italie

Près d'un millier de réfugiés fuyant les combats en Libye sont arrivés ce matin à bord d'un navire de pêche à Pozzallo, près de Raguse, à l'extrême sud de la Sicile, ont annoncé les garde-côtes italiens.

Les réfugiés, 963 au total dont 130 femmes environ et une quarantaine de mineurs, sont originaires de l'Afrique sub-saharienne. Plusieurs vedettes de la police et des garde-côtes ont assisté les réfugiés qui voyageaient à bord d'un vieux bateau de pêche d'environ 25 mètres de long. Les réfugiés ont été répartis dans plusieurs centres d'accueil de cette région de l'île.

Après une trêve d'environ une semaine, les débarquements en provenance de l'Afrique du Nord ont repris le week-end dernier sur les côtes italiennes. Quelque 1.450 migrants, pour l'essentiel des réfugiés arrivant de Libye, ont ainsi débarqué entre vendredi et samedi soir sur la petite île italienne de Lampedusa.

Une embarcation avec 55 immigrés tunisiens a par ailleurs également été interceptée près de Pantelleria, une île à mi-chemin entre Lampedusa et la Sicile.

Le 6 avril, au moins 150 réfugiés somaliens et érythréens avaient trouvé la mort dans le naufrage de leur embarcation en provenance de Libye. Selon la protection civile italienne, quelque 40.000 migrants dont environ 20.000 immigrés tunisiens sont arrivés depuis le début de l'année sur les côtes italiennes.

AFP

lundi 30 mai 2011

Accueil de requérants dans un abri PC à Gland

Des requérants d'asile sont arrivés dans l'abri PC situé sous une école primaire

Journal télévisé de la TSR

Savièse ferme ses portes à Geert Wilders

Le Conseil communal craint les débordements. Organisateur de la conférence, Oskar Freysinger ne lâchera pas l’affaire.

«Une évaluation des risques a été faite, et nous en sommes arrivés à la conclusion que le danger de débordements était trop élevé.» C’est en ces termes que Michel Dubuis, président socialiste de Savièse (VS), a annoncé jeudi après-midi la décision du Conseil communal (exécutif) d’interdire la visite du politicien néerlandais Geert Wilders, prévue le 11 juin prochain dans son village. Le leader populiste avait été convié par le parlementaire UDC Oskar Freysinger à tenir une conférence dans la salle communale sur la thématique des «problèmes liés à l’islamisation de l’Europe» et à y présenter son film polémique, Fitna. Ce court métrage est actuellement sous le coup d’une procédure judiciaire pour comparaison entre le Coran et Mein Kampf d’Adolf Hitler (LT du 21.05.2011).

Le choix d’interdire cette manifestation se justifie, selon le président de commune, par une évolution rapide de la situation ces derniers jours. «Des rendez-vous en vue de l’événement se sont répandus sur Internet, et un appel à une contre-manifestation a été lancé, souligne Michel Dubuis. Face à un tel cas, les autorités communales sont démunies sur le plan sécuritaire.» La décision du conseil, réuni en assemblée extraordinaire, s’est faite à l’unanimité des voix. Seul l’élu UDC Jean-Luc Addor s’est récusé: chef de campagne d’Oskar Freysinger, l’homme est aussi celui qui avait réservé la salle en vue de l’événement.

Pour Oskar Freysinger, justement, cette interdiction est incompréhensible: «Nous avons agi dans la plus grande transparence. J’avais informé le président il y a deux mois, le contrat de location avait été signé à l’époque. Michel Dubuis ment clairement quand il fait mine de découvrir seulement maintenant de quoi il s’agit.» Autre son de cloche auprès des autorités saviésanes, qui rappellent que la halle des fêtes avait été réservée pour une réunion politique ordinaire, et non pas pour un «invité extraordinaire». Oskar Freysinger n’adhère pas à cet argument: «Geert Wilders est un personnage élu, qui joue le jeu de l’Etat de droit. Par contre, je constate que des individus tels que l’islamiste biennois Nicolas Blancho, qui prônent des mesures contraires à notre loi, peuvent se réunir sans problème. Il s’agit d’une restriction injuste de la liberté d’expression, et un signe inquiétant pour la démocratie.»

Face à cette accusation, Michel Dubuis tempère: «Nous n’avons aucune velléité de censure, il s’agit uniquement d’une question de sécurité. En tant que président de commune, je me dois d’assurer avant tout la sûreté de mes concitoyens. Le représentant de l’UDC (Jean-Luc Addor, ndlr) n’a pas pu nous donner de garanties suffisantes en ce sens jeudi matin.» Un argument balayé par Oskar Freysinger: «L’organisateur est tenu de garantir la sécurité à l’intérieur de la salle, et nous avions d’ailleurs prévu un service d’ordre à cet effet. Pour ce qui se passe autour, c’est à la police cantonale de jouer.» Le politicien assure d’ailleurs avoir reçu un préavis positif du commandant de la police valaisanne en début de semaine. Une affirmation démentie par le porte-parole des forces de l’ordre, Jean-Marie Bornet: «Nous n’avons absolument pas pris position sur ce cas. Nous ne nous substituons pas aux décisions des autorités. Il ne faut pas instrumentaliser la police cantonale.»

Malgré le camouflet communal de Savièse, Oskar Freysinger n’entend pas baisser les bras: «Il n’est absolument pas question que je cède. J’ai invité cette personne, j’ai tout fait dans l’ordre, et les autorités font un scandale de dernière minute alors que tout aurait pu se passer calmement.» Un nouveau lieu de rendez-vous a d’ailleurs déjà été trouvé: la cave à vins de Dominique Giroud, à Sion. Catholique traditionaliste et proche ami de l’élu UDC, l’encaveur s’est distingué ces dernières années par ses prises de position tranchées contre l’avortement ou la gay pride (LT du 20.04.2011). «Il s’agit d’un homme courageux, qui trouve cette restriction de la liberté d’expression scandaleuse», assure Oskar Freysinger. Contacté en cours d’après-midi, Dominique Giroud n’était pas disponible pour répondre à nos questions.

■ Le commentaire de Christoph Blocher, ancien conseiller fédéral, stratège de l’UDC

«Je ne peux pas comprendre cette décision de la commune de Savièse. En Suisse, on doit pouvoir inviter tout le monde. Je n’ai jamais manifesté contre les communistes qui sont invités en Suisse, alors que cette idéologie a fait plus de morts que les nazis! En Suisse, on doit avoir la possibilité de parler, et cela vaut pour tous les politiciens. Peut-être que Wilders est trop à droite, mais pourquoi ne peut-il pas parler? Je ne connais pas son film, je ne veux pas le voir, mais pourquoi inter­dire les choses?»

■ Le commentaire de Pierre Maudet, conseiller administratif libéral-radical de la Ville de Genève

«Sur ces questions, je suis par principe très libéral et hostile à des interdictions préventives. Ce fut le cas dans l’affaire Dieudonné [interdit par deux fois de spectacle à Genève, ndlr], alors même que je ne l’apprécie pas du tout. Dans ce domaine, c’est la norme pénale antiraciste qui fixe la limite. Mais interdire d’emblée, cela fait de la publicité et cela va à fin contraire.»

Nicolas Gschwind dans le Temps

L'UDC unanime pour combattre l'immigration

A l’unanimité, les délégués de l’UDC ont approuvé samedi le lancement d’une initiative visant à limiter l’immigration. Le parti, qui s’était réuni à Einsiedeln, souhaite réintroduire des contingents et renégocier l’accord de libre circulation conclu avec Bruxelles.

«L’immigration est aujourd’hui illimitée et incontrôlable», a déploré Walter Wobmann, président de la commission «étrangers» au sein de l’UDC. Elle doit à nouveau être dirigée de manière autonome. Pour le parti, l’immigration est responsable de nombreux problèmes démographiques comme la surcharge en matière de transports et d’approvisionnement énergétique.

Rappelant que le nombre d’immigrants a dépassé de 330 000 celui des émigrants ces quatre dernières années, le président Toni Brunner a attaqué le Conseil fédéral et la ministre de la Justice, en particulier, incapable, selon lui, d’apporter des solutions. «Madame Sommaruga n’est qu’une séductrice qui n’a jusqu’à présent produit que du vent.» De son côté, Christoph Blocher s’en est pris aux accords de Schengen, Dublin et à la libre circulation des personnes, «projets mégalomanes par excellence».

Pour réduire le solde migratoire, l’initiative de l’UDC prône la réintroduction de plafonds et de contingents de migrants. Ces limites seraient fixées annuellement en fonction des besoins et intérêts économiques de la Suisse. Toutes les catégories d’étrangers seraient concernées, frontaliers compris. A l’embauche, le principe de la priorité aux Suisses devrait s’appliquer. L’initiative réclame aussi des critères stricts pour l’octroi de permis de séjour. Pour être autorisé à s’établir ou à séjourner en Suisse, il faudrait prouver l’obtention d’un emploi, sa capacité d’intégration et les moyens de subvenir à ses besoins.

La loi devrait régler les détails. L’UDC songe à un système de points attribués, comme au Canada ou en Australie, selon une série de critères d’intégration. Le texte du parti refuse tout droit établi à un séjour durable, au regroupement familial et aux prestations sociales.

Des patrons à l’offensive

Cette initiative alarme d’ores et déjà les milieux économiques, concernés au premier chef. Dimanche, la NZZ am Sonntag a rapporté le contenu d’une lettre ouverte signée par 140 dirigeants économiques se disant «très inquiets» de cette démarche. Rédigée par les amis du Parti libéral-radical, la lettre est notamment signée, rapporte le journal dominical, par Peter Gomez, président du conseil d’administration de la bourse suisse, et Raymond J. Baer, président de la banque Julius Baer. Le succès de pareille initiative remettrait en question des centaines de milliers de places de travail, prévient le texte qui accuse «une attaque irresponsable» des bilatérales.

Vendredi, la direction de l’UDC avait convoqué ses cadres au Grütli. Cette réunion a suscité la critique de la Société suisse d’utilité publique qui gère les lieux. Son règlement prévoit que les partis n’ont pas d’autorisation pour se réunir au Grütli. Le conseiller fédéral Ueli Maurer a précisé qu’il voulait pouvoir s’exprimer partout, sans devoir demander d’autorisation.

ATS et Le Temps

Nouvelle initiative de l'UDC sur les étrangers en vue

L'UDC lance une nouvelle initiative sur les étrangers. A l'unanimité, les délégués du parti ont approuvé samedi à Einsiedeln (SZ) le lancement d'un texte visant à limiter l'immigration. Le parti de droite nationaliste souhaite réintroduire des contingents et renégocier l'accord de libre circulation.

Comme en 2007, l'UDC lance une initiative sur les étrangers pour rythmer sa campagne électorale en vue des fédérales d'octobre. Le parti a adopté samedi à l'unanimité (397 à 0) un texte prévoyant le retour aux contingents et la renégociation de l'accord de libre circulation.

"L'immigration est aujourd'hui illimitée et incontrôlable", a déploré, avant le vote des délégués, le Soleurois Walter Wobmann, président de la commission "étrangers" au sein de l'UDC. Elle doit à nouveau être dirigée de manière autonome.

Christoph Blocher s'en est quant à lui pris aux accords de Schengen, Dublin et de libre circulation des personnes. "Ce sont des projets mégalomanes par excellence", a estimé le vice-président du parti. La Suisse doit dénoncer ces accords.

Le Vaudois Guy Parmelin a, lui, souligné les problèmes démographiques que l'immigration accrue engendre, à son avis. Le conseiller national a ainsi évoqué la surcharge en matière de transports et d'approvisionnement énergétique, tout comme les effets de la hausse démographique sur l'environnement.

Emploi: priorité aux Suisses

Yvette Estermann, conseillère nationale lucernoise d'origine slovaque, devenue suisse par mariage, a elle dénoncé la surreprésentation des étrangers parmi les bénéficiaires des oeuvres sociales. Président des Jeunes UDC, Erich Hess a appelé les Suisses à "ne pas se laisser oppresser" par les étrangers.

Pour réduire le solde migratoire, l'initiative de l'UDC - lancée sur la base du sondage que le parti a mené en 2010 auprès de la population - prône la réintroduction de plafonds et de contingents de migrants.

Ces limites seraient fixées annuellement en fonction des besoins et intérêts économiques de la Suisse. Toutes les catégories d'étrangers seraient concernées, frontaliers compris. A l'embauche, le principe de la priorité aux Suisses devrait s'appliquer.

L'initiative réclame aussi des critères stricts pour l'octroi de permis de séjour. Pour être autorisé à s'établir ou à séjourner en Suisse, il faudrait prouver l'obtention d'un emploi, sa capacité d'intégration et les moyens de subvenir à soi-même. Système de points

La loi pour régler les détails

L'UDC songe à un système de points attribués, comme au Canada ou en Australie, selon une série de critères d'intégration.

Le texte du parti refuse par contre tout droit établi à un séjour durable, au regroupement familial et aux prestations sociales. La Suisse devrait renégocier voire résilier les traités en contradiction avec les exigences de l'initiative. L'accord sur la libre circulation des personnes avec l'Union européenne est ainsi visé.

ATS relayée par la RSR

Un laboratoire pour intégrer sans discriminer

En pleine crise sur les requérants d’asile, Nyon a accueilli les Assises vaudoises de l’intégration et une fête interculturelle.

nyon assises intégration

Ils n’avaient pas encore de visage que déjà ils alimentaient les peurs. Celles de la violence, de la drogue et même de la tuberculose. Les premiers requérants d’asile prennent aujourd’hui leurs quartiers à Gland dans l’abri PCi des Perrerets. A terme, ils seront une cinquantaine.

Si leur venue suscite ces réflexes émotionnels, c’est parce qu’ils seront logés dans le sous-sol d’une école. Et pour nombre de parents, l’étranger devient inquiétant dès qu’il s’approche de leurs enfants. Ainsi, 1300 citoyens (pour une ville de quelque 11 000 habitants) avaient signé une pétition exprimant le refus de cette promiscuité entre leurs têtes blondes et les exilés aux sombres parcours. Ils font écho à la contestation née à Nyon où un abri héberge plusieurs dizaines de migrants en attendant la construction d’un centre fixe près d’une école.

jm dolivo assises intégration«De manière générale, ces centres devraient être placés dans les grandes villes, là où la population est plus habituée», estime Me Jean-Michel Dolivo, membre du mouvement SolidaritéS. Et de rajouter qu’une meilleure intégration éviterait antagonismes et stigmatisation.

Les «cas Dublin»

«Mais là, on ne peut pas parler d’intégration, car la Suisse n’a pas de volonté pour qu’ils s’intègrent, constate amèrement Christiane Piazzini, répondante pour la ville de Nyon des projets liés à l’immigration. Il y a beaucoup de «cas Dublin» qui ont zéro chance de rester.» Car ils seront renvoyés dans un autre pays de l’Espace Schengen. Même si c’est pour revenir en territoire helvétique quelques jours plus tard.

Alors, peine perdue, ces efforts pour vivre en harmonie avec l’autre? De loin pas. Car l’immigration revêt les formes les plus diverses (mariage, travail ou encore asile politique) et, de fait, le chantier est vaste. Comme l’ont démontré samedi les 7es Assises de l’immigration se sont tenues à la salle communale de Nyon.

A commencer par l’école, premier facteur d’intégration des enfants. Là, tous les intervenants sont tombés d’accord sur l’importance de parfaire l’enseignement du français. Ensuite, la thématique de l’emploi a, entre autres, révélé que les travailleurs issus de l’immigration comprennent trois fois plus de working poor .

Aiglons récompensés

Les Assises ont également permis de remettre le Prix du Milieu du Monde couronnant un projet lié à l’intégration. Le jury a choisi l’établissement scolaire d’Aigle, récompensé pour son programme d’échange avec l’école de Junik, au Kosovo, et le travail sur l’interculturalité réalisé autant dans le corps professoral qu’avec les élèves.

Au final, ces Assises ont permis de faire le point. Il en est ressorti que, si les associations et les communes investissent une grande énergie dans les projets, l’Etat a encore du pain sur la planche.

Sur les 31 pays analysés dans l’étude MIPEX (index comparatif de l’intégration des migrants basé sur 148 critères), la Suisse finit avant-dernière. Dans son communiqué final, la Chambre cantonale consultative des immigrés recommande donc aux autorités fédérales de se doter d’une législation efficace pour lutter contre les discriminations et de structures de consultation professionnelles pour les victimes, à l’image des autres pays européens.

Anetka Mühlemann dans 24 Heures


assises intégration programme

"La recette de Mme Sommaruga est une triste farce"

Yves Brutsch, ancien porte-parole pour l'asile des Centres sociaux protestants, est l'invité de la rubrique Opinions de 24 Heures.

yves brutsch cspDans une interview publiée par 24 heures le 20 mai dernier, le président du Parti socialiste suisse PSS), Christian Levrat, exprimait notamment son soutien à la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga et au projet d’accélération de la procédure d’asile, «compensée» par une aide juridique qui serait apportée aux requérants. Selon lui, «les idées qu’elle présente étaient déjà défendues par les milieux de l’asile dans les années 90».

Cette affirmation appelle une mise au point.

L’idée de compenser le durcissement et l’accélération de la procédure d’asile par une aide juridique permettant aux réfugiés de mieux faire valoir leurs motifs a effectivement beaucoup été discutée autour de l’arrêté urgent sur la procédure d’asile voté en 1990 sous l’impulsion du démocrate-chrétien Arnold Koller.

J’étais alors porte-parole pour les questions d’asile des Centres sociaux protestants (CSP), lesquels ont revendiqué les premiers, dès 1988, une véritable assistance juridique pour les requérants. De son côté, Christian Levrat a été, dans les années 90, chef du service juridique de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), une organisation «faîtière» coupée des réalités et sans structure démocratique.

Malheureusement, celui qui est aujourd’hui président du PSS a la mémoire courte. Et loin de correspondre aux idées «défendues par les milieux de l’asile», le projet de Mme Sommaruga suscite une opposition farouche chez tous ceux qui défendent les réfugiés sur le terrain.

Seule l’OSAR – qui s’était opposée avec succès, en 1990, aux propositions des CSP afin de conserver les subventions que lui accordait l’Office fédéral des réfugiés pour organiser la présence d’un observateur aux auditions de demandeurs d’asile – offre aujourd’hui sa caution à une aide juridique censée justifier un nouveau durcissement de la procédure, qui va encore beaucoup plus loin que ce que M. Blocher et, plus récemment, la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf ont pu proposer. Comment comprendre ce paradoxe? Il vaut sans doute la peine de l’expliquer.

Lorsque j’ai eu l’honneur de présenter une proposition d’assistance juridique – appuyée à l’époque par la Fédération suisse des avocats, les Eglises protestantes et l’Union syndicale suisse notamment –, il s’agissait de trouver un équilibre dans une procédure d’asile n’ayant pas encore subi tous les outrages accumulés par les révisions législatives qui se sont succédé depuis vingt ans. De fait, il est scandaleux que des réfugiés, qui arrivent chez nous traumatisés, soient piégés par une procédure visant surtout à déclarer leurs motifs invraisemblables, sans même bénéficier de la pré- sence d’un défenseur, alors que le moindre malfrat bénéficie d’un avocat d’office s’il doit passer en jugement.

Le périodique Vivre Ensemble expliquait longuement, sous ma plume, en 1989 et 1990, que la présence d’un défenseur d’office permettrait d’améliorer qualitativement la procédure d’asile, et de la raccourcir. Car la longueur de cette procédure est essentiellement causée par l’arbitraire et la superficialité des décisions de l’Office fédéral des migrations (ODM), qui provoquent la multiplication des recours, demandes de réexamen et autres révisions. Le taux de succès (la moitié des requérants finissent par obtenir le droit de rester en Suisse, malgré une jurisprudence très restrictive) démontre que le problème réside bien dans la mauvaise qualité du processus initial de décision.

Le président du Parti socialiste et sa conseillère fédérale veulent aujourd’hui nous faire croire qu’ils entendent, vingt ans plus tard, reprendre cette idée. Mais la procédure qu’ils proposent n’a plus rien d’équitable. Elle tend systématiquement à entraver les recours et à priver le requérant du temps nécessaire pour organiser sa défense.

Le meilleur avocat du monde ne peut pas travailler sérieusement si on lui impose un délai de recours de quelques jours, au terme d’une ins- truction bâclée, là où toutes les procé- dures administratives prévoient un délai de recours de 30 jours. Cela d’autant moins que la procédure d’asile multiplie par ailleurs les chicanes (absence de droit de regard sur l’instruction du dossier, absence de féries pendant les congés de Noël, de Pâques et les vacances d’été, frais de procédure abusifs, etc.).

L’idée qu’il suffirait d’assurer la présence de conseillers juridiques de l’OSAR pour garantir l’équité de la procédure d’abattage que propose Mme Sommaruga, avec l’objectif de liquider en quelques semaines 80% des demandes d’asile en assignant les requérants à résidence dans des centres fédéraux à l’écart des agglo- mérations où ils pourraient trouver de l’aide, n’est hélas qu’une triste farce. Elle n’a rien à voir avec les propositions que j’ai eu l’honneur de défendre il y a vingt ans. Si l’OSAR, qui ne représente qu’elle-même, se rallie à ce projet, c’est encore pour des questions d’argent. Il s’agit pour elle de trouver de nouvelles subventions en s’alignant sur les désirs de l’ODM. Qui paie commande, c’est bien connu. Et le président du PSS, empêtré dans une stratégie électorale nauséabonde et cherchant à ménager la chèvre et le chou, ne fait que travestir la réalité quand il se réclame des «milieux de l’asile».

Ceux qui sont, sur le terrain, aux côtés des réfugiés, s’opposeront farouchement, aujourd’hui comme hier, à ce qu’on sacrifie la protection des personnes menacées de persécution aux dérives xénophobes qui ont envahi le débat politique suisse depuis des décennies.

dimanche 29 mai 2011

Tataouine, la ville des invisibles

En deux mois, 30.000 Libyens ont trouvé refuge de l'autre côté de la frontière, en Tunisie. Seules quelques centaines vivent dans un camp ; les autres se sont fondés dans la population tant bien que mal.

Ils sont là mais on ne les voit pas. Ou si peu. Même le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) a failli passer à côté. Pourtant, le HCR sait bien que depuis un mois et demi, 55.000 Libyens ont passé le poste frontière de Baouaba pour fuir les combats qui s’intensifient dans l’ouest de leur pays. Presque 800 se sont installés dans le camp de réfugiés de Dehiba, première ville tunisienne après la frontière. Près de 800 autres ont poursuivi la route jusqu’au camp de Remada. Mais tous les autres? "Ils passent la frontière et c’est comme s’ils disparaissaient", reconnaît Kamel Deriche, chef d’opérations au HCR. Cet humanitaire algérien est arrivé vendredi soir à Tataouine, préfecture du gouvernorat du même nom, un gouvernorat pauvre qui s’étend comme un entonnoir vers le Sahara, coincé entre la Libye et l’Algérie.

Alors où sont-elles, ces familles qui ont chargé leur pick-up à la hâte du peu qu’elles pouvaient avant de tout abandonner devant l’avancée des forces de Kadhafi? La grande majorité est là, à Tataouine, une ville de 75.000 habitants, étendue et écrasée de chaleur. Elles sont là, tellement discrètes que leur nombre exact échappe à toute rigueur. Les chiffres varient de 22.000 à 32.000. Tout a commencé début avril. Saïd Benghayed s’en souvient bien. Saïd sortait de chez lui, dans la route principale de la ville, celle qui vient de la frontière et file vers le nord-ouest du pays. La jambe dans le plâtre, un homme est sorti d’une voiture immatriculée en Libye et lui a demandé s’il connaissait une maison à louer. Aytham Saïd, un rebelle blessé, venait mettre sa famille à l’abri. Ils étaient sept. Le Tunisien leur a offert l’un des deux appartements vides au-dessus de son magasin de meubles. Aujourd’hui, il héberge cinq familles libyennes dans ses deux appartements et une maison.

L’histoire s’est répétée des dizaines de fois dans la ville. Avec toujours ce même élan de solidarité. En voyant des voitures libyennes garées devant le magasin de meubles, d’autres se sont arrêtées, chaque jour plus nombreuses. "J’ai alors décidé de créer une association, explique Saïd Benghayed. Cela faisait longtemps que je voulais aider des personnes. Sous le régime de Ben Ali, on ne pouvait rien faire. Depuis la révolution, on peut agir spontanément." L’association Ihsan [charité] n’a d’ailleurs toujours pas reçu d’autorisation officielle mais elle fonctionne. Des appels ont été passés sur les ondes de radios locales et nationales pour demander de l’aide. Ihsan met ainsi en relation des réfugiés libyens avec des Tunisiens propriétaires de maison ou d’appartement vides. Elle distribue aussi des colis alimentaires. Tous les week-ends, des camions de Tunis, Sfax, Monastir… apportent de la nourriture donnée par des habitants de ces villes.

Dans la crainte d’attaques de miliciens de Kadhafi

La famille de Salah Youssef n’est pas passée par Ihsan pour trouver la villa où elle est aujourd’hui installée avec deux autres familles. Dix-sept personnes vivent ici. Salah Youssef, un fonctionnaire de 52 ans de Nalut, en Libye, connaît depuis longtemps les Boutabba de Tataouine. En arrivant dans la ville, il est allé voir un des hommes de la famille. Spontanément, celui-ci lui a ouvert la villa de son frère, Moustapha, boulanger dans le 5e arrondissement de Paris.

Cet été, Moustapha voudra peut-être venir passer ses vacances au pays. Que vont-ils faire? "On sera obligés de retourner à Nalut sous les bombardements", craint le père. "Peut-être que Moustapha restera à Tunis…", espère la mère, Warda. "Kadhadi aura dégagé d’ici là!", lance la fille, Reba, 27 ans, un diplôme de médecin mais qui est resté dans la maison abandonnée et se révèle désormais inutile.

Dans le salon, assise sur un des matelas qui font le tour de la pièce, Warda parle d’une voix mal assurée. Elle s’inquiète pour son frère qui se bat à Nalut. Elle s’inquiète pour sa maison qui risque d’être détruite. "Je ne dors plus, reconnaît cette femme de 45 ans, le visage alourdi par l’anxiété. Je ne sors jamais. Il y a des hommes étrangers. Je ne peux pas marcher dans la rue comme ça. À Nalut, il y avait la famille, c’était plus facile d’aller chez eux."

"Je ne sais pas combien de temps va durer cette cohabitation, s’interroge Saïd Benghayed. On a beau être proches, on n’a pas les mêmes mentalités. Les Libyens ne sont pas habitués à travailler comme nous, ils avaient leurs employés égyptiens, pakistanais… Un peu comme les pétromonarchies. Leurs femmes ne sortent pas. Les hommes sont fiers et nous ont souvent regardés de haut. D’ailleurs, ils ne veulent pas aller dans des camps." Ici, aucun Tunisien ne prononce le mot de réfugié en parlant des Libyens. Ce sont des "frères", des "invités".

Il y a une semaine, un camp a tout de même ouvert à la sortie de Tataouine, sous la responsabilité du Qatar. Il n’y aurait plus de maison libre dans la ville et le Qatar a mis le paquet pour le confort… Électricité, et bientôt climatisation, sous les tentes, aire de jeux pour les enfants, salle d’opération : 580 personnes vivent là. Devant l’entrée, un cerbère avec l’uniforme de l’armée tunisienne aboie sur tout ce qui bouge, détecteur de métaux à la main. Les hommes d’une compagnie de sécurité qatarie fouillent les sacs que portent ceux qui entrent.

La crainte d’attaques de miliciens de Kadhafi plane. Le 9 mai, deux Libyens avec deux grenades ont été arrêtés à l’hôtel Médina du centre-ville, qui héberge des réfugiés. Le 15 mai, un Algérien et un Libyen avec des ceintures d’explosifs ont été interceptés à Nekrif, entre Tataouine et la frontière. Trois jours plus tard, une voiture sans plaque, conduite par un Libyen, était contrôlée avec des GPS et télescopes dans le coffre. Ces hommes seraient des membres d’Aqmi (Al-Qaida au Maghreb islamique) affirment les autorités tunisiennes. Des miliciens de Kadhafi, répondent certains habitants de Tataouine.

L’aide de la communauté internationale se fait attendre

La ville est devenue la base arrière des rebelles libyens et pourrait devenir une cible. Depuis que les insurgés ont pris le poste frontière de Baouaba aux forces de Kadhafi, le 21 avril, les allers et retours entre le djebel libyen et Tataouine se multiplient. Certains rebelles restent quelques heures, d’autres plusieurs jours. "On laisse un homme dans chaque famille pour protéger les femmes et les enfants, explique Abdel Hamid. Les autres se battent." Le jeune homme de 25 ans, pantalon militaire, regard franc, sait de quoi il parle. Il est arrivé il y a deux semaines pour voir sa femme et son frère handicapé, et faire des radios après une blessure à la tête lors d’un bombardement. Il repart demain matin pour Zenten avec du ravitaillement pour la rébellion. C’est un ami de Yassin Nouri, commerçant de Tataouine, qui lui aussi fait la navette entre Tataouine et Nalut, parfois Zenten. Pain, jus de fruit, eau, lait, fromage, orange. Mais aussi jumelles professionnelles, bidon d’essence…

Assis sur des nattes sous un olivier, dans le quartier de Reqba, les deux hommes parlent peu. Abdel Hamid est pressé. Il a des "affaires" à régler. Des réunions se tiennent régulièrement dans la ville entre les rebelles de passage et ceux qui restent. Yassin Nouri laisse partir son ami avant de parler de ses appréhensions si la guerre se prolonge. La solidarité des Tunisiens a été spontanée, évidente. Une dizaine d’associations ont vu le jour pour distribuer vivres, logements… "Un jour, on ne pourra peut-être plus les aider, lâche Yassin Nouri. Nous ne sommes pas riches ici, même si les habitants du reste du pays nous aident." La présence des réfugiés a déjà multiplié le prix des tomates par trois, de 0,35 à 1,3 dinar (70 centimes d’euros), l’essence se fait rare. À l’hôpital, une trentaine de malades venaient chaque jour pour une consultation d’urgence. Ils sont aujourd’hui 200.

"Où est l’aide de la communauté internationale?, s’emporte le docteur Moncef Derza, chef du service des urgences à l’hôpital. Les Libyens doivent pouvoir faire leur révolution mais pas en menaçant la nôtre ni en déstabilisant notre région. Nous devons aider ces gens mais là, la ville arrive à saturation." Hier encore, une bagarre est intervenue dans un hôtel du centre, impliquant quatre ou cinq hommes, des Tunisiens et des Libyens. Des miliciens de Kadhafi, selon la rumeur.

Garance Le Caisne, envoyée spéciale à Tataouine (Tunisie) - Le Journal du Dimanche

L'Europe dénonce les tests phallométriques tchèques

Jeudi, la Commission européenne a ouvert une enquête contre des pratiques des autorités tchèques pour vérifier l'homosexualité des demandeurs d'asile.

Indignée, la commissaire en charge de l'immigration, Cecilia Malmström, a fermement expliqué que le « test phallométrique » est dégradant et qu'il ne peut pas être accepté dans l'Union Européenne.

La République Tchèque tente de se défendre en assurant que ces méthodes ne sont plus appliquées. Mes explications sont insuffisantes selon la Commission, qui a donc décidé jeudi d'ouvrir une enquête. Cette décision a par ailleurs été annoncé dans une lettre destinée à l'ambassadeur tchèque mardi, lors de la Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie.

Le sujet est soumis à un film porno hétéro

Qu'est-ce que le « test phallométrique » ? Cet examen au nom barbare consiste à mesurer les réponses érectiles masculines déclenchées durant la présentation de divers stimuli sexuels et non sexuels. Pour vérifier l'homosexualité du demandeur d'asile, l'homme est alors soumis à des images pornographiques hétérosexuelles qui le feront « réagir » ou pas.

Ces actes qui ressemblent à de mauvais traitements ne semblent pas en conformité avec les articles 4 et 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui interdisent la torture et les traitements inhumains, signale Bruxelles.

La commission rappelle que l'examen des demandeurs d'asile doit toujours être mené dans le respect des droits fondamentaux et les principes généraux de la législation européenne.

Prague juge « inacceptables » les critiques de l'UE

A la suite de ces critiques, l'ambassadeur de la République tchèque auprès de l'UE, Milena Vicenova, a catégoriquement rejeté jeudi comme « inacceptable » et « fondée sur des faits non véridiques » les accusations, dans un communiqué publié sur le site de la représentation tchèque :

« Il n'y a pas de doute que la persécution des homosexuels et l'intolérance envers eux sont inacceptables dans l'Europe moderne. Mais l'accusation que la République tchèque les commettent est également tout aussi inacceptable. »

Selon elle, ces « graves accusations communiquées avec un langage assez fort » s'appuient sur des « affirmations non véridiques » et « déforment grossièrement la réalité ».

« Cela fait longtemps que la République tchèque a annoncé que cette méthode n'était plus utilisée », a souligné l'ambassadeur, selon qui une « poignée » de ces tests n'avaient été effectués qu'en 2008 et 2009, « avec le consentement écrit et parfois à la demande directe » (de demandeurs d'asile).

« Les autorités tchèques se sont alors retrouvées devant un choix : soit rapatrier ces demandeurs dans leur pays d'origine et les exposer ainsi à un danger de mort, soit leur offrir un examen sexologique, en tant qu'ultime possibilité de vérifier la véracité de leurs dépositions », a déclaré Milena Vicenova. « Grâce à cela, la menace de rapatriement a été conjurée et la République tchèque a accordé l'asile. »

Rue89 en partenariat avec le magazine Têtu

samedi 28 mai 2011

Lampedusa: 900 réfugiés débarquent sur l'île italienne

Après une accalmie d'une semaine environ, de nouveaux bateaux de réfugiés sont arrivés sur l'île italienne de Lampedusa. Essentiellement des migrants en provenance de la Libye. Selon la police douanière et les garde-côtes italiens qui leur ont porté secours, 900 personnes ont débarqué entre hier et ce samedi matin.

L'une des embarcations interceptées transportait 247 migrants dont 16 femmes et 5 enfants. Tous les migrants ont été conduits au centre d'accueil de Lampedusa où sont hébergées 1200 personnes.

 

euronews

L'UDC en campagne avec sa nouvelle initiative sur l'immigration

Le parti a adopté samedi à l’unanimité (420 voix à 0) un texte prévoyant le retour aux contingents et la renégociation de l’accord de libre circulation.

le 28 mai 2011, 17h18
LeMatin.ch & les agences

19 commentaires

Comme en 2007, l’UDC lance une initiative sur les étrangers pour rythmer sa campagne électorale en vue des fédérales d’octobre. Le parti a adopté samedi à l’unanimité (420 voix à 0) un texte prévoyant le retour aux contingents et la renégociation de l’accord de libre circulation.

«Les gens en ont marre de l’immigration sans limite», a lancé Toni Brunner aux délégués de l’UDC réunis à Einsiedeln (SZ). La faute à la libre circulation ainsi qu’aux accords de Schengen et de Dublin qui enlèvent à la Confédération tout contrôle dans ce domaine, a dénoncé le président du parti de droite nationaliste.

Rappelant que le nombre d’immigrants a dépassé de 330’000 celui des émigrants ces quatre dernières années, le Saint-Gallois a attaqué le Conseil fédéral et la ministre de la justice en particulier, incapable selon lui, d’apporter des solutions.

«Madame Sommaruga n’est qu’une séductrice qui n’a jusqu’à présent produit rien d’autre que du vent.» Dopant la croissance démographique, l’immigration contribue à surcharger le trafic routier et les transports publics, ainsi qu’à faire exploser les prix du logement, a dénoncé Toni Brunner. Elle entraînerait aussi une augmentation du besoin en électricité. Les «illusions et rêveries» d’un marché du travail sans frontière seraient en train de s’évaporer, également au sein de l’UE.

Instruments de contrôle

«Notre initiative pour la limitation de l’immigration nous rendra les instruments de contrôle», a promis le conseiller national. Le texte présenté lundi dernier exige la réintroduction de contingents et de plafonds migratoires. Les frontaliers seraient aussi touchés.

Ces limites seraient fixées en fonction des besoins et intérêts économiques de la Suisse. L’initiative réclame aussi des critères stricts pour l’octroi de permis de séjour. Pour être autorisé à s’installer en Suisse, il faudrait prouver l’obtention d’un emploi, sa capacité d’intégration et les moyens de subvenir à soi-même.

L’UDC songe en outre à un système de points attribués, comme au Canada ou en Australie, selon des critères d’intégration. Elle refuse tout droit établi à un séjour durable, au regroupement familial et aux prestations sociales.

En cas de «oui» en votation, la Confédération devrait renégocier voire résilier des accords internationaux dont celui sur la libre circulation des personnes. Et la priorité irait aux Suisses en matière d’embauche.

Veiller à ses intérêts

«La Suisse doit d’abord se préoccuper de ses citoyens», a soutenu Ueli Maurer. Et le conseiller fédéral UDC de mettre en garde: «Si nous ne veillons pas à nos intérêts, personne ne le fera pour nous.» Le Zurichois a accusé Schengen et la libre circulation d’avoir «sournoisement relativisé» l’indépendance de la Confédération.

Christoph Blocher a lui aussi critiqué les accords liant Berne à Bruxelles. «Ce sont des projets mégalomanes par excellence», a estimé le vice-président du parti qui a réclamé leur dénonciation.

La Lucernoise Yvette Estermann, conseillère nationale d’origine slovaque, devenue suisse par mariage, a elle dénoncé la surreprésentation des étrangers parmi les bénéficiaires des oeuvres sociales.

Autres initiatives

L’UDC n’est pas seule à thématiser l’immigration. L’association Ecologie et Population (Ecopop) a lancé une initiative pour limiter la hausse de la population due aux migrations à 0,2% par an. Le texte exige aussi qu’au moins 10% des moyens de la coopération au développement soient affectés à la planification familiale.

Les Démocrates suisses ont également annoncé le lancement d’une initiative réclamant que la Confédération s’efforce d’équilibrer le solde migratoire. Il y a quatre ans, l’UDC avait misé sur l’initiative pour le renvoi des étrangers criminels - adoptée en novembre dernier - afin de donner un coup de fouet à sa campagne électorale.

Le Matin

vendredi 27 mai 2011

Strasbourg: rassemblement contre le manque d'hébergement pour les demandeurs d'asile

Cent cinquante personnes se sont rassemblées vendredi soir à l'appel du Réseau éducation sans frontières (RESF) à proximité de l'hôtel préfectoral de Strasbourg pour demander des places d'hébergement supplémentaires pour les demandeurs d'asile, a constaté une journaliste de l'AFP.

Parmi elles se trouvaient des membres du réseau mais aussi de nombreux demandeurs d'asile avec leurs enfants.  Les manifestants, dont certains avaient apporté des sacs de couchage pour camper sur la place jouxtant l'hôtel, y ont finalement renoncé devant l'opposition des forces de l'ordre. Selon RESF, au moins une quinzaine de familles, avec une trentaine d'enfants, n'ont actuellement aucune solution d'hébergement, en raison de la réduction du nombre de places disponibles depuis la fin du plan hivernal, fin mars, et en sont réduites à des expédients. "Ces difficultés d'hébergement sont accentuées lors des sessions parlementaires et des manifestations culturelles et sportives sur Strasbourg, qui limitent fortement les places en hôtel", déplore RESF dans un communiqué.

AFP

Le publicitaire de l'UDC Alexander Segert dans le collimateur de la justice autrichienne

La justice du Land de Styrie a inculpé Alexander Segert pour le jeu internet qu’il a créé l’automne dernier pour le FPÖ, le parti populiste de feu Jörg Haider. Il consistait à tirer sur les minarets et mosquées qui surgissaient dans le ciel de Graz, la capitale de la région.

Alexander Segert, qui avec son agence de publicité Goal orchestre toutes les campagnes de l’UDC, est poursuivi par la justice en Autriche. Il est accusé par le Ministère public du Land de Styrie, dans le sud-est du pays, d’«incitation à la haine», écrit le Tages-Anzeiger jeudi. Dans le collimateur de la justice, le jeu interactif qu’il a créé en automne 2010 pour le parti FPÖ, le populiste parti de la liberté de feu Jörg Haider.

Dans ce jeu inspiré du jeu de la perdrix, les internautes étaient invités à tirer sur les minarets et mosquées qui poussaient dans le ciel de Graz, faute de quoi le chant des muezzins envahissait la paisible capitale de la Styrie. A la fin de la partie s’affichait le message suivant: «La Styrie est pleine de minarets et de mosquées. Pour que cela n’arrive pas, votez Ger­hard Kurzmann et FPÖ.»

Précédent suisse

Une version helvétique du jeu avait déjà fait son apparition en Suisse lors de la votation contre les minarets, campagne conçue par Alexander Segert. Le publicitaire est à l’origine entre autres des lampions piétinés et des moutons noirs. Interrogé sur les limites à ne pas franchir, il répondait que seul le succès comptait. Et que, n’ayant jamais été poursuivi pénalement, il restait donc dans les limites légales (LT du 05.02.2011).

Cela pourrait changer avec la procédure pénale ouverte par le procureur Thomas Mühlbacher contre Alexander Segert et le président du FPÖ Gerhard Kurzmann. Selon le Tages-Anzeiger, les deux hommes risquent jusqu’à 2 ans de prison. Plus une amende qui pourrait, dans le cas d’Alexandre Segert, s’élever au montant des honoraires reçus par le FPÖ. Après une longue enquête, le procureur a décidé de poursuivre pénalement les deux hommes parce que le FPÖ cherche systématiquement à provoquer un scandale avant les élections, rapporte le Tages-Anzeiger.

Suite à un mouvement de protestation des autres partis et des Eglises, un tribunal avait déjà interdit la diffusion du jeu sur Internet avant les élections régionales. Gerhard Kurzmann avait protesté contre cette forme de «censure». Le FPÖ avait récolté 10% des voix lors des élections régionales autrichiennes.

La justice de Styrie avait en 2009 déjà condamné une candidate du FPÖ pour incitation à la haine à 3 mois de prison et une amende de 30 000 francs, parce qu’elle avait parlé, à propos de l’islam, de «religion ennemie». Alexander Segert n’a pas pu être atteint jeudi pour une prise de position.

Catherine Cossy dans le Temps

Les Roms ne sont pas les bienvenus en Veveyse

Cet après-midi, à la sortie d'autoroute de Châtel-Saint-Denis, direction Vevey, le préfet de la Veveyse aurait parlementé avec des Roms, pour les convaincre de ne pas s'arrêter dans son district.

Cet après-midi, vers 14h30, une colonne de caravanes bloquaient la sortie de d'autoroute de Châtel-Saint-Denis. Les gens du voyage, roulant en direction de Vevey, ont été stoppé par la police cantonale fribourgeoise accompagnée du Préfet de la Veveyse, Michel Chevalley. Une longue discussion entre les autorités et les Roms a alors engendré un bouchon de plusieurs kilomètres, selon les témoins. M. le Préfet, injoignable à l'heure où nous écrivons ces lignes, les auraient convaincu de ne pas s'arrêter dans son district. Il semble avoir atteint son but car, selon la police, les gens du voyage ont continué leur route en direction du canton de Vaud.

Anne Hemmer dans le Matin

jeudi 26 mai 2011

Les renvois forcés de requérants d'asile par avion ont nettement diminué en 2010

Les renvois forcés de requérants d'asile par avion ont nettement diminué l'an dernier en Suisse. Au total, 136 personnes ont été expulsées sous la contrainte, contre 360 en 2009, selon le rapport sur la migration publié jeudi par l'Office fédéral des migrations.

Cette baisse s'explique par la suspension des renvois forcés de fin mars à fin mai 2010 suite au décès par arrêt cardiaque d'un requérant d'asile nigérian de 29 ans à l'aéroport de Kloten. Malgré la progression de 4% des départs volontaires en 2010, nombreux sont les étrangers qui préfèrent passer à la clandestinité, note encore l'ODM.

tsrinfo

Savièse ne recevra pas l'extrémiste de droite Geert Wilders

Invité le 11 juin par le conseiller national UDC valaisan Oskar Freysinger, le chef de file de l’extrême droite néerlandaise Geert Wilders ne viendra finalement pas à Savièse, suite à un refus de la municipalité.

Savièse, en Valais, n’accueillera pas dans sa halle des fêtes le chef de file de l’extrême droite néerlandaise Geert Wilders, invité le 11 juin prochain par le conseiller national UDC Oskar Freysinger. Le conseil communal invoque des problèmes de sécurité.

Dans un communiqué diffusé jeudi, la municipalité de Savièse indique que des menaces de débordements sont réels. Ils sont liés notamment à une contre-manifestation demandée et à des projets de rassemblements organisés sur internet.

«Ces éléments pèsent désormais lourdement sur les intérêts et la sécurité de notre commune. (...)Cette décision communale est fondée exclusivement sur l’aspect sécuritaire et ne saurait être assimilée à une atteinte à la liberté d’expression», précise encore la municipalité.

La commune rappelle que la halle des fêtes avait été réservée pour une réunion politique ordinaire. La venue d’un invité «extraordinaire, annoncée tardivement, modifie totalement les conditions liées à la mise à disposition des locaux».

Incitation à la haine raciale

Dans son pays, Geert Wilders est jugé pour incitation à la haine raciale et à la discrimination envers les musulmans. Il encourt jusqu’à un an de prison ou 7600 euros d’amende.

Le 23 mai dernier, le tribunal d’Amsterdam a rejeté une demande de la défense de Geert Wilders qui demandait l’abandon des poursuites à l’encontre du chef de file de l’extrême droite néerlandaise.

Geert Wilders est poursuivi pour avoir comparé le Coran au «Mein Kampf» d’Adolf Hitler dans des déclarations faites entre 2006 et 2008 dans les journaux néerlandais, sur des forums internet et dans son film de 17 minutes «Fitna» (»Discorde» en arabe). Film que le Valaisan Oskar Freysinger souhaitait projeter durant cette soirée à Savièse.

Le Matin

mercredi 25 mai 2011

Les musulmans victimes des urnes

Dans un livre qui vient de paraître, le politologue Adrian Vatter démontre que la démocratie directe a souvent maltraité les minorités religieuses en Suisse.

Le Tessin va-t-il interdire la burqa et le niqab? Le canton votera sur une initiative populaire déposée jeudi dernier et munie de plus de 10 000 signatures. Les musulmans ont du souci à se faire, car la démocratie directe pèse comme une épée de Damoclès sur les minorités religieuses en Suisse. C’est la thèse d’un livre (1) qui vient de paraître sous la direction d’Adrian Vatter, professeur en sciences politiques à l’Université de Berne. Cette étude historique retrace plus d’un siècle de votations, entre l’interdiction de l’abattage rituel (1893) et celle de la construction de nouveaux minarets (2009).

La démocratie directe est-elle un rempart ou une cage pour les minorités religieuses en Suisse?
Adrian Vatter: Pour les minorités religieuses non chrétiennes, soit les Juifs et les musulmans, elle présente un désavantage manifeste. Durant les 150 dernières années, leurs droits ont ainsi été successivement différés, refusés voire parfois réduits en votation. Contrairement aux minorités linguistiques, par exemple, ces communautés religieuses apparaissent aux yeux de la majorité comme des groupes extérieurs à la société suisse, et porteurs peut-être d’autres valeurs qui nous sont étrangères.

Seules 18 initiatives populaires ont été acceptées à ce jour, et deux concernent les minorités religieuses: l’interdiction de l’abattage rituel en 1893, et l’interdiction de nouveaux minarets en 2009. Quels parallèles peut-on tirer entre les deux?
Les deux initiatives concernent toutes les deux des minorités religieuses qui ne sont pas chrétiennes. Elles posent des questions culturelles, de valeurs, sur lesquelles la population est majoritairement sceptique. Elle est en revanche plus ouverte sur les libertés économiques. Ainsi, en 1866, les Suisses accordent en votation la liberté de commerce et d’établissement aux Juifs, tout en leur refusant dans le même temps la liberté de culte. Cette ouverture aux droits économiques s’explique par l’engagement du Parti radical qui, sur les questions de valeurs, se montre par contre plutôt conservateur.

En l’occurrence, les Juifs ont profité des pressions de la France...
Les libertés de commerce sont en effet accordées aux Juifs de Suisse pour ne pas les prétériter par rapport aux Juifs d’Alsace, à qui la Confédération a concédé des droits pour ne pas mettre en danger un accord commercial avec la France. Cette situation se répète sur d’autres objets, par exemple sur l’interdiction d’ériger en Suisse de nouveaux évêchés: il a fallu la pression de l’extérieur, en l’occurrence de la Cour européenne des droits de l’homme, pour que la Suisse daigne réviser cet article qu’elle avait maintenu par crainte de l’épée de Damoclès des droits populaires.

Car la démocratie directe a aussi parfois un effet indirect...
Et ce très fort effet indirect est même beaucoup plus significatif que l’effet direct. La pression du référendum décourage souvent les autorités à prendre des risques.

La démocratie directe est-elle plus dure envers les musulmans?
Depuis les années 1960, en tout cas, toutes les votations cantonales visant à améliorer la situation des musulmans se sont conclues par un rejet. Ce fut notamment le cas à Zurich en 2003, lors du vote sur la reconnaissance par l’Etat de minorités religieuses non chrétiennes, au terme d’une campagne marquée par le slogan: «Des impôts pour des écoles coraniques?»
Reste qu’au XIXe siècle, ce sont les Juifs qui tenaient un peu le rôle de «corps étranger». Et sur le long terme, la démocratie directe peut contribuer à la normalisation des relations entre communautés religieuses, comme le prouve le taux d’adhésion que remportent désormais les objets touchant la minorité juive.

Les musulmans font-ils les frais d’un sentiment anti-étrangers?
Ce réflexe joue. Mais ces réactions sont surtout l’expression d’une forte désécurisation au sein de la population, une forte expression que la Suisse traditionnelle aimerait freiner le changement culturel en cours, selon un schéma ouverture/fermeture qui imprègne la politique suisse depuis des décennies et qui a fait le succès de l’UDC.
Cela dit, dans des sujets comme les minarets, les motivations économiques n’interviennent pas, contrairement à d’autres votations liées aux étrangers (sur la libre circulation des personnes, par exemple). Ce n’est pas pour leur emploi que ces Suisses craignent, mais pour leurs valeurs. C’est d’ailleurs l’absence de possibles conséquences économiques qui a pu inciter des radicaux à voter pour l’interdiction des minarets.Mais il n’y a pas eu de conséquences économiques!
La question est ouverte. On peut notamment se demander s’il n’y a pas moins de touristes de pays musulmans qui viennent en Suisse. Quoi qu’il en soit, les conséquences économiques d’une interdiction des minarets auraient mérité d’être au moins thématisées dans la campagne.


«Ces conflits sont plus culturels que religieux»

Comment peut-on gagner contre une initiative dirigée contre les musulmans?
Une attitude très claire des partis est importante, essentiellement du PDC et du PLR, dont l’avis est déterminant pour les citoyens de sensibilité bourgeoise qui ne sont pas affiliés à un parti. D’autre part, dans la campagne, il ne faut pas insister sur les arguments juridiques, mais plutôt appuyer sur les émotions ou sur les arguments économiques pour convaincre les citoyens.

Les communautés musulmanes n’ont-elles pas elles aussi un rôle à jouer?
Tout à fait. A mon avis, elles ont fait l’erreur de ne quasiment pas se mêler de la campagne de votation sur les minarets, ce qui a permis à une toute petite minorité de musulmans radicaux d’occuper une place importante dans le débat. Les musulmans de Suisse devraient essayer de montrer qu’ils ne sont pas un corps étranger, mais qu’ils sont là depuis longtemps, qu’ils partagent les mêmes valeurs fondamentales et démocratiques que la société d’accueil, et que les différences culturelles avec la Suisse ne sont pas si grandes.

Finalement, c’est par la bande que les minorités religieuses ont souvent obtenu davantage de droits…
On le voit avec les Juifs par le passé, et longtemps avec les musulmans: ces communautés essaient de ne pas revendiquer trop fort en public, mais d’agir plutôt en coulisses et de profiter de révisions totales de constitutions pour y faire inscrire des solutions pragmatiques.
La Suisse est un «Sonderfall» politique. Traite-t-elle pour autant ses minorités religieuses différemment que les autres pays?
Nous n’avons pas analysé cette question de façon systématique. Mais je pense que les différences ne sont pas si grandes. Au XIXe siècle, les règles vis-à-vis des Juifs ressemblent ainsi à celles en vigueur dans les monarchies européennes. Le danger est toutefois plus grand en Suisse de voir des partis populistes se saisir de ces sujets via la démocratie directe. Même si, quand on regarde les votations sur les minorités (religieuses et autres), on constate que la majorité est toujours très sceptique vis-à-vis d’un élargissement des droits de la minorité, mais qu’elle est en revanche très réservée à l’idée de les restreindre. L’initiative sur les minarets constitue une petite exception, dans la mesure où elle a en fait cimenté le statu quo. Les quatre minarets existants resteront, il n’y en aura pas de nouveaux.

Et si toute cette histoire nous montrait que la Suisse se sent encore un pays chrétien?
Je ne le réduirais pas à cela, mais nous sommes en Suisse, comme dans les autres pays occidentaux, dans ce conflit fondamental entre une culture occidentale, et donc chrétienne, et d’autres cultures qui arrivent en Europe, via la globalisation. Et ces votations symbolisent selon moi des conflits qui sont plus culturels que ­religieux.

Serge Gumy dans la Liberté et le Courrier

1 Adrian Vatter (éd.), «Vom Schächt- zum Minarettverbot. Religiöse Minderheiten in der direkten Demokratie», NZZ Verlag.

lundi 23 mai 2011

Demandeurs d'asile: une admission provisoire plutôt que le statu quo

Lundi, la Commission fédérale pour les questions de migration a proposé que les demandeurs d'asile qui attendent une décision depuis longtemps sur leur sort soient admis provisoirement en Suisse.

Les demandeurs d’asile dont le sort est en suspens depuis longtemps devraient être admis provisoirement en Suisse. La Commission fédérale pour les questions de migration (CFM) a avancé lundi cette proposition. Elle soutient aussi la réduction des procédures proposée récemment par Simonetta Sommaruga.

Il est dans l’intérêt des requérants que les délais de traitement des dossiers soient abrégés, a relevé Marina Caroni, de la CFM, lundi lors de la conférence de presse annuelle. Néanmoins, les propositions de la cheffe du Département de justice n’auront d’effet positif que si les recours font aussi l’objet d’une décision rapide du Tribunal administratif fédéral, selon elle.

La commission propose d’admettre en Suisse les personnes dont la demande d’asile est en souffrance depuis longtemps. Seuls les requérants qui se sont montrés coopératifs avec les autorités seraient concernés. Cette solution permettrait de dégager des capacités pour le traitement des nouvelles demandes, d’après la CFM.

La proximité des élections fédérales d’octobre accentue le débat sur la migration, s’est inquiété le président de la commission consultative, Francis Matthey. Certaines craintes de la population sont compréhensibles, mais il faudrait traiter les défis que posent les étrangers dans un contexte plus large, selon lui.

Sans migrants, par exemple, l’AVS serait déficitaire depuis 1992, a rappelé le Neuchâtelois. «Et dire que l’économie suisse ne pourrait pas prospérer sans les travailleuses et travailleurs étrangers est une lapalissade».

Le Matin

Asile: le cap est maintenu

Les louanges sont à la hauteur des ambitions: le projet d’accélération drastique des procédures d’asile présenté par la cheffe du Département de justice et de police (DFJP) Simonetta Sommaruga a valu à la socialiste les éloges d’une grande partie de la classe politique, allant de la gauche rose-vert à l’UDC.


Que la droite xénophobe se réjouisse d’un tel plan de bataille devrait inviter la gauche à la prudence. Mais Christian Levrat s’est empressé de saluer «des solutions pragmatiques qui respectent les droits des personnes». Le président du PS fait référence à l’assistance juridique offerte en contrepartie des durcissements.

Pourtant, la lecture du projet et un rappel historique autorisent les plus vives inquiétudes et beaucoup de scepticisme. Car la volonté d’accélérer les procédures sent le rance tant elle a souvent servi de prétexte à des restrictions du droit sans aucun effet sur la rapidité et la qualité du traitement des dossiers.

Sur le principe, il est juste de laisser les requérants d’asile le moins longtemps possible dans une difficile situation d’attente. Mais seulement si l’on peut garantir le respect de leurs droits. Or tout indique que la protection juridique envisagée ne palliera pas les nouvelles restrictions –délais de recours très courts ou encore effets suspensifs supprimés. Pour éviter les recours et la multiplication des démarches, il ne suffit pas d’accuser les avocats des requérants d’abuser du droit, comme le fait insidieusement Berne. Il faut plutôt agir sur la qualité des décisions, lesquelles ne peuvent être rendues hâtivement ou sous l’influence du climat de suspicion face aux abus.

Le projet de révision n’évitera de toute façon pas deux écueils majeurs: à quoi bon des procédures rapides – pour ne pas dire bâclées – si les pays d’origine refusent de reprendre leurs ressortissants déboutés? Pour Berne, reprendre la main sur les cantons qu’il juge laxistes en termes de renvoi n’enlèvera pas cet obstacle majeur. Tout comme le fait d’enfermer toujours plus de récalcitrants au départ. Cela en poussera simplement davantage dans la clandestinité.

L’autre difficulté pour Mme Sommaruga sera de trouver des emplacements pour de nouveaux centres de procédures fédéraux. Car l’expérience montre que les populations locales sont hostiles aux structures regroupant des requérants. Ces jours à Gland, l’idée d’une pétition circule contre l’accueil de requérants dans un abri PC.

Mais qu’importent les «grains de sable»: depuis que Mme Sommaruga a pris la tête du DFJP, un consensus malsain s’est trouvé pour porter la conseillère fédérale aux nues. Année électorale oblige? A gauche, on se félicite qu’elle ait su imposer son agenda sur les thèmes de l’asile et de la migration, au nez et à la barbe de l’UDC. Et ce même si Mme Sommaruga a dit sa volonté de restreindre le regroupement familial, qu’elle a cherché à compliquer l’accès des non-Européens au passeport suisse ou que sa révision de la loi sur l’asile n’abandonne pas les pires mesures prévues par sa prédécesseur. Si l’étiquette partisane a changé, le cap est maintenu.

Edito de Rachad Armanios dans le Courrier

L'asile soumis à la vitesse grand V

Simonetta Sommaruga projette de condenser les procédures d’asile. La juriste Marie-Claire Kunz craint surtout un durcissement.

Juriste au Centre social protestant de Genève, Marie-Claire Kunz juge sévèrement l’accélération des procédures d’asile voulue par la conseillère d’Etat Simonetta Sommaruga et détaillée dans un rapport.

Les requérants y gagneront-ils avec ces nouvelles procédures?
Marie-Claire Kunz: Sur le principe, une accélération sert leurs intérêts. Mais seulement si elle respecte leurs droits et garantit une véritable protection. Or elle semble justifier de nouvelles restrictions.

Mais Mme Sommaruga promet une protection juridique complète, gratuite et professionnelle dans les futurs centres fédéraux.
Je doute qu’elle suffise à pallier les nouveaux problèmes. Le premier porte sur l’indépendance de ces juristes. Ils dépendront du Département fédéral de justice et de police (DFJP) – voire du Département de l’intérieur – et seront désignés par ce département. On ne sait ni sur quelle base ni avec quel mandat exact.

Quels autres problèmes?
Si l’accélération des procédures péjore l’instruction des dossiers, les recours se multiplieront, peut-être même devant la Cour européenne des droits de l’homme. Or, même s’il bénéficie tout de suite d’un avocat, un requérant peine à faire valoir tous ses motifs dans un délai très court. Ces gens, souvent traumatisés, peinent à raconter certains événements. Le contexte de cloisonnement des centres de procédures n’aidera pas à instaurer la confiance.

Les délais de recours seront plus courts...
En procédure ordinaire, ils seraient de sept jours (vingt dans une phase transitoire, ndlr), contre trente actuellement. Pour les 20% en procédure élargie, le délai serait de quinze jours. Pourtant, dans un domaine aussi sensible – des gens en danger de mort chez eux –, il faut du temps pour réunir des preuves, des documents ou demander des expertises médicales. De plus, retirer l’effet suspensif est grave, car cela suppose qu’on peut renvoyer quelqu’un en danger chez lui.

Les délais contraignants imposés au Tribunal administratif fédéral (TAF) et à l’Office des migrations (ODM) pour statuer sur un recours sont-ils une bonne solution?
On sent une attaque de l’ODM, la première instance, contre la deuxième instance qu’est le TAF. Car depuis un certain temps, celui-ci casse davantage les décisions de l’ODM, en particulier parce qu’il ne respecte pas sa jurisprudence. Dans le projet de révision, si le tribunal dépasse les délais, il ne pourra plus renvoyer la cause à l’ODM. Cela ressemble à la réponse du berger à la bergère. Mais le risque, c’est d’engorger le tribunal ou qu’il casse plus rapidement les décisions de l’ODM pour éviter à devoir trancher les recours sur le fond et obliger l’ODM à reprendre l’instruction de la demande. Cela rallongera les procédures et on n’aura rien gagné.

Justement, le rapport juge problématique que les avocats «s’emploient à épuiser les nombreuses possibilités
de recours afin de prolonger autant que possible le séjour du requérant»...

Le rôle d’un avocat est d’utiliser les lois! Et il y a très rarement des sanctions pour demandes abusives. Les services comme les nôtres sont submergés, on ne recourt pas pour le plaisir. Surtout, les avocats gagnent régulièrement! Le problème de ce rapport, c’est qu’il ne prend pas en compte ce que l’ODM pourrait lui-même améliorer pour éviter d’aboutir à la multiplication des procédures.

Attacher des médecins aux centres fédéraux, est-ce une bonne mesure?
On peut se demander si leur travail sera réellement indépendant. Il faudra faire appel à des contre-expertises... En outre, beaucoup d’admissions provisoires sont prononcées pour des pathologies, surtout psychiques, identifiées après coup. Or le projet s’attaque à cela. En estimant que la pratique du TAF est trop large en la matière. Et en restreignant la possibilité de réexamen médical si le requérant n’a pas utilisé l’opportunité de l’examen initial.

Que pensez-vous de centraliser les démarches dans des centres de procédures fédéraux?
Cela semble difficile, car les populations et les localités se braquent contre les centres regroupant beaucoup de requérants. Il est en outre critiquable de les retrancher de la société dans laquelle ils sont ensuite censés être accueillis.

Les cantons devront augmenter le nombre de centres de détention pour les requérants récalcitrants en attente de leur renvoi...
En Suisse romande, la détention administrative est marginale. En 2005, une étude comparative entre Genève et Zurich a montré qu’elle ne donne pas de meilleurs résultats. Le rapport le souligne: la difficulté ne vient pas des gens, mais des pays qui refusent de les reprendre.

A quoi bon raccourcir les procédures si on ne peut toujours pas renvoyer les requérants?
Exactement! La durée de mille quatre cents jours depuis le dépôt de la demande en Suisse comprend la longue période d’attente avant le renvoi. On pourra construire autant de centres de détention qu’on veut, on augmentera surtout la peur et par conséquent le nombre de requérants se réfugiant dans la clandestinité.

Berne cherche-t-il à reprendre la main sur les cantons «trop laxistes» en matière
de renvois?

On peut le penser puisque l’ODM pourra prononcer des détentions administratives en vue du renvoi. Il pourra aussi entreprendre sans le feu vert des cantons les démarches pour obtenir les documents de voyage auprès des ambassades, sans attendre qu’un recours soit tranché. Or, si des cantons se montrent prudents, c’est pour ne pas mettre le requérant en danger en signalant à son pays qu’il a demandé l’asile. I

Quadrupler les centres fédéraux
La cheffe du Département fédéral de justice et de police (DFJP), la socialiste Simonetta Sommaruga, veut, d’ici cinq à six ans, avoir drastiquement raccourci les procédures d’asile. Le projet de révision de la loi sur l’asile a été présenté dans un rapport du DFJP rédigé par l’Office des migrations (ODM) et soumis à un comité d’experts. Les délais sont actuellement de mille quatre cents jours en moyenne entre le dépôt de la demande d’asile et une autorisation de séjour, une admission provisoire ou le départ de Suisse. Dans 80% des cas (procédure ordinaire), la durée serait ramenée à cent vingt jours au plus.
Et ce notamment par la centralisation des démarches dans les centres de procédures fédéraux, qui devraient être quadruplés et dont le personnel serait augmenté. Une phase préparatoire de six jours à trois semaines précèdera la procédure d’asile. Celle-ci, de quelques jours, serait rythmée par des étapes (audition, examen, etc.) à respecter strictement. Les instances de recours – l’ODM puis le Tribunal administratif fédéral (TAF) – auront des délais accélérés et contraignants. Pour garantir le droit, une assistance juridique complète sera offerte.
Les cas plus complexes, 20%, seront traités en un an au plus (procédure élargie) et transférés dans les cantons, qui continueront d’exécuter les renvois. Les requérants qui ne satisfont pas à leur obligation de quitter le pays seront soumis à l’aide d’urgence.
L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) salue une protection plus rapide des réfugiés, qui évite en même temps de renvoyer des gens ayant eu le temps de s’intégrer. Le président des socialistes Christian Levrat a salué «des solutions pragmatiques qui respectent les droits des personnes».

Propos recueillis par Rachad Armanios dans le Courrier


Les Juristes démocrates de Suisse (JDS), en revanche, s’opposent au projet de loi. Le vœu d’une accélération des procédures, conforme aux principes de l’Etat de droit, n’est en soi pas criticable, ont écrit hier les JDS dans un communiqué. Mais à leurs yeux, le projet est dans la droite ligne du durcissement des mesures imposées aux requérants d’asile en 2009/2010. De plus, la légalité de nombreuses mesures est douteuse, dénoncent-ils.
La Commission des institutions politiques du Conseil des Etats a donné son feu vert à l’unanimité. La mise en place demandera beaucoup de préparation et une collaboration avec les cantons. Des mesures à court terme seront auparavant prises. Les parties initiales du projet de révision de la loi sur l’asile proposées avant l’arrivée de Mme Sommaruga aux affaires – pas d’asile pour les déserteurs, pas de demande d’asile dans les ambassades suisses à l’étranger, etc. – restent de mise.

Le Courrier

dimanche 22 mai 2011

La peur irrationnelle de l'invasion

La comédie franco-italienne qui s’est jouée autour des migrants tunisiens, celle qui valut à Paris de chanter le grand air de l’affligée de Schengen, a récemment débouché sur un compromis des ministres européens de l’Intérieur à Bruxelles : non à la remise en cause de Schengen, mais oui au renforcement des frontières extérieures et oui au rétablissement, dans certains cas exceptionnels, en cas de pression migratoire forte et inattendue, des contrôles aux frontières nationales. Autrement dit, rien de bien nouveau sous le soleil européen.

Si l’on considère avec Cecilia Malmström, commissaire européenne en charge des Affaires intérieures, qu’un flux de 25.000 migrants tunisiens n’est pas énorme, comparé aux 800.000 déplacés du conflit libyen, alors pourquoi tant d’agitation autour des frontières ? Pourquoi continuer à épouser le vent, celui qui entretient la peur de l’invasion, la montée des populismes européens et le repli sur soi de nations devenues frileuses, plutôt que d’affronter la question des migrations avec des arguments de raison ?

Pourquoi ? Parce que les États de l’Union européenne n’ont d’imagination que pour aborder les questions de sécurité, celles qui sont censées rassurer les électorats populaires. C’est ainsi qu’ils leur vendent un horizon sécuritaire national aussi factice que meurtrier.

Londres se "débarrasse" ainsi depuis dix ans des migrants afghans en les laissant errer sur les côtes françaises du Pas-de-Calais. Paris, qui les a délogés à coup de bulldozer, ne les a pas fait magiquement disparaître de l’espace en quelques jours. Elle les a simplement dispersés. Et quand les Tunisiens frappent à la porte, la France affirme s’en "protéger" par la seule intervention policière.

C’est ainsi que les exemples de renvoi de "patates chaudes" se ramassent à la pelle nationale. Et internationale aussi. Quand l’Europe externalise la gestion de ses flux migratoires, elle le fait vers des pays défaillants dans le domaine des droits de l’homme en général et des droits de réfugiés en particulier. En confiant à Kadhafi le rôle de gardien d’une immense prison, l’Union a cyniquement fait commerce des migrants.

Mais la Lybie a cessé d’être aujourd’hui le garde-frontière délocalisé de la forteresse Europe. Et c’est bien là que le bât blesse. Car il n’est plus question de migrants aux frontières mais bien de réfugiés, des réfugiés d’une guerre menée au nom de la "responsabilité de protéger".

Et c’est ainsi que près de 800.000 personnes se retrouvent déplacées, fuient par milliers en bateau et meurent par centaines en mer, s’entassent dans les camps de toile dans le désert tunisien et égyptien au risque d’amplifier la catastrophe humanitaire en cours.

Et que fait l’Europe ? Elle détourne la tête de sa frontière délocalisée. Enfin presque. L’Otan intensifie ses frappes et sort du mandat délivré par l’ONU. Il est en effet urgent de gagner la guerre, sinon "l’invasion" guette. La donne à nos frontières reste donc sécuritaire. Il nous semblait pourtant que la coalition, la France en tête, était partie en "guerre humanitaire" comme on disait alors au temps du Kosovo.

Comparaison n’est pas raison, mais on aurait aimé que des leçons soient tirées de cette "vieille" guerre contre Milosevic : menée du ciel comme en Libye, elle dura plus longtemps que prévu et provoqua, à la très grande surprise des nations engagées, l’exode de 450.000 personnes. Les pays de l'Otan, qui avaient tout prévu sauf une catastrophe humanitaire de cette ampleur, innovèrent en se répartissant et en accueillant, temporairement, 100.000 réfugiés kosovars, pour alléger la charge des pays frontaliers.

Il y a cette fois en Libye, selon le HCR, 24.000 demandeurs d’asile à répartir dans les pays développés. Personne ne se bouscule pour les accueillir : les promesses d’accueil atteignent environ 1000 places. Le Royaume-Uni et la France, parties prenantes du conflit, ne figurent pas sur la liste.

La guerre en Libye entame son troisième mois. Et la machine à fabriquer des réfugiés, des sans-papiers, des naufragés continue au rythme de ses bombardements.

La guerre est à nos frontières délocalisées. Mais cette invisibilité de la délocalisation ne doit pas inviter l’Europe à échapper à ses devoirs. Et à faire porter toute la charge de la protection et de l’accueil des migrants et des réfugiés sur des pays à la démocratie neuve et à l’économie fragile.

Pierre Henry, France Terre d'Asile, dans le Nouvel Observateur

William Hague pour une Europe plus "dure" envers les migrants nord-africains

Le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a appelé dimanche l'Europe à se montrer plus "dure" envers les migrants nord-africains, notamment après les flux migratoires qui ont suivi les révoltes en Tunisie, en Egypte et en Libye.

L'Europe " ne peut pas accepter " des centaines de milliers, voire des millions de migrants venant de l'Afrique du nord, a dit le ministre du Foreign Office dans une interview à la chaîne d'informations Sky. M. Hague a plaidé pour des efforts "courageux et ambitieux" visant la promotion du développement économique en Afrique du nord, " afin que les gens puissent gagner leurs vies là où ils se trouvent ". Il a rappelé que la communauté internationale, en particulier l'Europe et les Etats-Unis, ainsi que des institutions internationales telles que la Banque mondiale, s'est inscrite, depuis l'éclatement des révoltes en Tunisie et en Egypte, dans un effort visant à renforcer la reprise économique dans ces pays.

Il s'agit là, a-t-il poursuivi, d'une des méthodes de freiner le flux migratoire, ajoutant que " cela signifie aussi que nous avons besoins d'un système de contrôle efficace, et que nous devons se montrer dures à ce sujet ". " On ne peut pas accepter le flux de centaines de milliers, voire de millions de gens vers les côtes sud de l'Europe, et qui se dispersent après dans le reste du continent", a-t-il martelé. Il est donc nécessaire de faire preuve d'imagination pour assurer "le bien-être économique des pays nord-africains afin que les gens puissent gagner leurs vies là où ils se trouvent", a estimé le ministre.

Par ailleurs, craignant l'arrivée de nombres considérables de migrants nord-africains, le Danemark, l'un des pays de l'espace Schengen, a annoncé sa décision de réactiver très prochainement les mesures de contrôle de ses frontières avec l'Allemagne et la Suède. La gestion des flux migratoires a également provoqué des frissons entre Paris et Rome, après la décision de l'Italie de délivrer des permis de travail temporaires à plusieurs migrants francophones, leur permettant d'accéder légalement au territoire français.

Trouvé sur AuFait, portail d'information marocain

samedi 21 mai 2011

Accueil de requérants: les élus de Gland appellent les citoyens au calme

Choqués par l’attitude de citoyens face à l’accueil de requérants d’asile, des élus appellent la population à la raison.abri pc perrerets gland

Rarement on avait entendu tant de haine de propos déplacés dans un débat public sur les requérants d’asile. Lundi dernier, à Gland, ville qui se voit imposer l’accueil imminent de réfugiés, les inquiétudes de citoyens s sur la proximité de ce refuge avec l’école des Perrerets, a conduit à des dérapages verbaux qui ont choqué les élus.

Face à cette masse d’incompréhension, ces derniers ont décidé de réagir. Hier, lors de la fête de fin de législature, qui se déroulait fortuitement autour d’une exposition sur l'intégration des migrants et un spectacle de l’humoriste Pascal Légitimus (!), 38 conseillers communaux sur 53 présents, tous partis confondus, ont signé un appel au calme, à la raison et à la solidarité.

«Nous voulons dire qu'il ne faut pas paniquer et montrer à la Municipalité qu’on serre les rangs autour d’elle», explique Philippe Martinet. Le député Vert rappelle que pour une population de presque 12 000 habitants, accueillir une cinquantaine de requérants, ce n'est pas Vugelles-La Mothe…

24 Heures

Neuchâtel: l'Office de l’asile fait face à des burnouts en série

Le chef du service de l’asile, contesté par ses troupes, est en congé maladie. Le conseiller d’Etat Thierry Grosjean cherche une solution pour ramener le calme.

L’Office social de l’asile (OSAS) du canton de Neuchâtel navigue sans capitaine: deux employés sont absents pour burnout et le chef de l’office lui-même est en congé maladie depuis trois semaines. Ce dernier serait victime de la résistance de «quelques cadres intermédiaires», explique le conseiller d’Etat Thierry Grosjean: «Certains de ses cadres voulaient vraiment le voir partir et ont tout fait pour. Si on avait mis une pression semblable sur un collaborateur, on parlerait de mobbing.»

Le malaise ne doit rien aux récentes tensions générées par le refus de certains réfugiés des centres du Val-de-Travers et du Val-de-Ruz d’intégrer l’abri PCi de La Chaux-de-Fonds. Il serait endémique depuis la nomination du chef d’office en juin 2008. Selon le récit d’employés qui souhaitent garder l’anonymat, le chef de l’office ne serait pas fait pour diriger une équipe (48 personnes travaillent à l’OSAS) et peinerait dans la maîtrise des finances.

En clair: une erreur de casting. Parachuté de l’Office des migrations, à Berne, on lui reconnaît des compétences théoriques, analytiques, statistiques, mais guère d’efficacité sur le terrain. Thierry Clément, du SSP Neuchâtel, a enquêté sur ce litige: «Lorsque vous avez un problème avec des requérants dans un centre, vous attendez plus de votre chef qu’une statistique. Il y a eu des exemples où, face à des bagarres, le chef appelé sur les lieux, est reparti car c’était l’heure de dîner, tandis que les deux responsables se débrouillaient avec la situation.»

Pas question de se séparer de lui, nous a confirmé Thierry Grosjean. Mais il reconnaît «chercher une solution qui permette à ce chef d’office de retomber sur ses pattes». Un replacement dans le Service des migrations (dont fait partie l’OSAS), mais à d’autres fonctions? Peut-être. Une chose est sûre, dit Thierry Clément: «Il ne peut pas rester 720 jours en congé maladie même si le règlement l’y autorise.»

Dans le même département, alors dirigé par Frédéric Hainard, le Service de surveillance du travail (SSRT) avait connu de graves turbulences, notamment en raison de la présence de la maîtresse de M. Hainard en son sein. La surcharge de travail et le régime minceur imposé par l’Etat à l’administration fragilisent les personnes, admet un employé: «Il y a davantage de missions, davantage de pression, et la dotation en personnel est moindre. L’usure est là. Qu’un dysfonctionnement survienne et les dégâts sont immédiats.»

Yvan Radja dans le Matin

vendredi 20 mai 2011

Un abri pour les requérants à Gland, question d’«équilibre géographique»

A l’image du district de Nyon, la cité de la Côte accueille peu de requérants en regard de sa population. Philippe Leuba veut aussi ménager les communes plus petites.

L’ouverture prochaine de l’abri PC à une cinquantaine de requérants suscite une levée de boucliers à Gland. Lundi soir, une réunion publique tournait à la foire d’empoigne, alors qu’une pétition contre l’installation de demandeurs d’asile avait fait le plein de signatures. Chez les opposants, la réquisition de cet abri situé sous une école primaire cristallise les peurs. Ils menacent désormais de lancer une initiative cantonale pour en interdire le principe (lire ci-dessous).
Pour les autorités, il n’est toutefois pas question de faire machine arrière. «Les structures hors-sol de l’EVAM sont aujourd’hui pleines et il n’y a pas d’autre choix que de recourir à des solutions de fortune telles que les abri PC, ce que nous avons fait à Nyon, à Lausanne et maintenant à Gland et au Mont-sur-Lausanne (où 72 requérants seront bientôt hébergés, ndlr)», explique Philippe Leuba, conseiller d’Etat responsable du dossier asile.

«Il manque 200 places»
«Nous étions déjà extrêmement serrés au début de l’année, mais à ce jour, il nous manque entre 150 et 200 places pour fonctionner normalement», ajoute Pierre Imhof, directeur de l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM). Par rapport à 2010, les demandes d’asile ont augmenté de 20%, conséquence en particulier des événements en Tunisie, en Egypte et en Libye. «Au niveau des attributions, dans le canton, le dispositif était dimensionné pour 14 arrivées hebdomadaires. Toutes ces dernières semaines, on était plutôt entre 20 et 35», relate Pierre Imhof.
Le choix de Gland doit aussi contribuer à atténuer l’inégale répartition des places d’hébergement dans le canton. Selon les chiffres de l’EVAM, la ville, qui compte près de 12 000 habitants, accueille actuellement trois requérants, quand une ville de taille similaire comme Prilly en compte, elle, deux cents. Une disparité que l’on retrouve à l’échelle des districts: bien qu’étant le deuxième du canton en termes de population (86 000 habitants), celui de Nyon figure en queue de peloton au niveau du nombre de demandeurs d’asile hébergés.
A l’inverse, un district deux fois moins peuplé comme celui d’Aigle (39 000 âmes) accueille six fois plus de requérants. Il y a donc, pour Philippe Leuba, une recherche d’«équilibre géographique».
Mais la désignation de Gland et du Mont-sur-Lausanne répond aussi au souci d’épargner les communes plus petites. C’est que le souvenir de Vugelles-la-Mothe et d’une croix incendiée un soir d’hiver 2003, point d’orgue d’une véritable fronde villageoise, reste omniprésent. «Je ne veux pas commettre la même erreur que Pierre Chiffelle (alors conseiller d’Etat chargé de l’asile, ndlr) avait commise, en concentrant trop de requérants en regard de la population locale, déclare Philippe Leuba. A Vugelles-la-Mothe, il s’agissait de mettre cent requérants pour une population d’une centaine d’habitants, je considère que c’est _déraisonnable.»

Requérants encasernés?
En parallèle à ces démarches, le conseiller d’Etat a appuyé le projet de Berne visant à affecter des cantonnements militaires à l’accueil des nouveaux demandeurs d’asile. Philippe Leuba veut ainsi «que la Confédération conserve sous son autorité et n’attribue pas aux cantons les requérants d’asile qui viendraient pour des raisons économiques. Je pense notamment à ceux qui viennent des pays dont les tyrans sont tombés et dont les motifs politiques n’existent apparemment plus.»
Dans un premier temps, comme l’a annoncé la cheffe du Département fédéral de justice et police, Simonetta Sommaruga, mille places (pour l’ensemble de la Suisse) devraient être ouvertes sur des sites militaires dans les semaines à venir. Deux mille autres pourraient suivre. Reste à savoir où. Philippe Leuba dit n’en rien savoir encore. «Les cantons seront associés à la décision et à l’information liées au choix des places d’armes. Pour l’instant, je n’ai pas connaissance de places d’armes concernées dans le canton de Vaud», précise le magistrat.
«Je ne veux pas préjuger de la capacité de la Confédération, mais j’ai un peu des doutes sur la possibilité de trouver des sites, non pas du point de vue matériel mais du point de vue de l’acceptabilité: en Suisse, on n’est jamais très loin d’une localité», nuance Pierre Imhof.

Arnaud Crevoisier dans le Courrier


Vaud accueille plus de 4500 requérants
Au 30 avril, on dénombrait au total 4593 demandeurs d’asile dans le canton de Vaud. La carte ci-dessus tient compte uniquement des requérants logés dans les communes de plus de deux mille habitants et qui constituent l’immense majorité des cas (4391, soit 95,6%). Ils sont comptabilisés indifféremment de leur statut (admission provisoire, non-entrée en matière...) et de leurs conditions d'hébergement (structure collective ou appartement géré par l’EVAM, ou, plus rare, habitat autonome). AC

Les Tessinois devraient voter sur l'interdiction du voile intégral

Plus de 11 600 signatures contre le port de la burqa et du niqab. Mais le texte déposé hier à Bellinzone évite d’évoquer ces termes.

Entourés d’une femme couverte d’un voile intégral et d’un homme au visage caché par un passe-montagne «pour donner un signal fort», les initiants affichaient hier un large sourire. Plus de 11 600 signatures, alors que 10 000 sont nécessaires: le pari est réussi. Les promoteurs de l’initiative contre le port de la burqa ont déposé les paraphes en matinée à Bellinzone, avec six jours d’avance sur l’échéance impartie par la loi. Ils estiment d’ores et déjà que leur initiative populaire a abouti et qu’elle conduira les citoyens tessinois aux urnes. Une première en Suisse.
Le texte défendu par le comité évite toute référence directe à la burqa ou au niqab. Il se contente d’évoquer une simple interdiction de se couvrir le visage dans les lieux publics. Une interdiction qui concernerait, le cas échéant, aussi bien des hooligans ou des manifestants dont les traits seraient volontairement dissimulés, entre autres exemples.
Mais les promoteurs de l’initiative ne s’en cachent pas, leur but est de contrer la montée de l’islam «à titre préventif». C’est aussi ce qu’ils rétorquent à leurs détracteurs, qui les accusent de se focaliser sur «un problème inexistant au Tessin», puisqu’il est rarissime de voir des femmes voilées dans les espaces publics au sud des Alpes.

«Un signal fort»

Les neufs membres du comité d’initiative, encouragés par le pas franchi par la France le mois dernier, ne voient pas les choses sous le même angle. Pour eux, il s’agit de donner un «signal fort», notamment aux autres cantons, dont ils espèrent qu’ils suivront l’exemple tessinois. Les promoteurs soulignent en passant que s’ils avaient disposé des ressources nécessaires, ils auraient lancé «une initiative populaire fédérale». Le groupe réunit à la fois des personnalités de gauche, de l’UDC, de la Lega et même l’ancienne «dame de fer» du Tessin, la libérale luganaise Marina Masoni, ex-ministre des Finances et de l’économie, qui marque ainsi son retour en politique après son éviction du gouvernement en 2007.
Le Parlement tessinois dispose de deux ans pour valider, rejeter ou opposer un contre-projet à l’initiative, puisque celle-ci entraînerait une modification de la Constitution cantonale. En cas d’approbation du texte par les citoyens tessinois, ce sera au tour des Chambres fédérales de se prononcer sur la compatibilité de la loi tessinoise avec la Constitution fédérale.

Nicole della Pietra dans le Courrier et la Liberté