vendredi 31 décembre 2010

La Suisse plus sûre ?

L'accord de Schengen? «Un désastre», pour Toni Brunner. Le président de l'UDC suisse tirait hier un bilan négatif de l'accord entre la Suisse et l'Union européenne sur la coopération policière et judiciaire. Deux ans après la levée des contrôles systématiques des personnes aux frontières, le parti souverainiste estime que la faillite est consommée. Il demande donc au Conseil fédéral de renégocier l'accord de Schengen, voire de le dénoncer si Bruxelles n'accepte pas de rediscuter ses termes d'ici à une année. L'UDC noircit-elle le tableau à des fins électoralistes? Tentative de réponse.

Moins de sécurité? Pour le conseiller national UDC Yves Nidegger, les récents braquages dans la région genevoise montrent les lacunes de Schengen: les malfrats de France voisine passent la frontière sans être contrôlés; une fois leur forfait commis, ils échappent facilement à la police cantonale, qui doit, elle, s'arrêter à la frontière; enfin, les policiers français ne peuvent pas intervenir à temps, la faute aux lenteurs dans la communication.

«Nous sommes confrontés à des bandes françaises qui passent la frontière, agissent très vite et repartent dès leurs méfaits commis. Notre police de proximité ne suffit pas à contrer ce phénomène. Les frontières sont trop perméables», confirmait en novembre Christian Varone, commandant de la police cantonale valaisanne. Conseillère d'Etat genevoise en charge de la sécurité, la libérale Isabel Rochat relativisait dans la «Tribune de Genève»: «Il n'y a pas plus de brigandages que dans les années huitante, mais ils sont plus violents. Leurs auteurs ne sont pas des pros et compensent par un surarmement.»

Quant à la communication avec la police française, elle sera améliorée grâce à une fréquence radio unique.

Un peu plus d'arrestations

Malgré des bémols, pour une majorité de policiers ainsi que pour la hiérarchie des gardes-frontière, l'accord de Schengen a fait ses preuves, en particulier grâce au système de recherche de personnes. Entre le 1er janvier et le 30 novembre de cette année, le SIS a permis l'identification en Suisse de 2410 ressortissants d'Etats tiers interdits d'entrée dans l'espace Schengen (essentiellement des migrants illégaux) et de 179 criminels recherchés. «Les chiffres sont un peu plus hauts qu'avant l'entrée dans Schengen», explique Benedikt Scherrer, de l'Office fédéral de la police.

Alors, Schengen espace de sécurité ou d'insécurité? En raison d'un changement de système de comptage, les statistiques de la criminalité ne livrent aucune réponse. L'UDC n'en réclame pas moins le rétablissement des contrôles des personnes à la douane. Du miel aux oreilles de ces gardes-frontière tessinois qui, sous couvert d'anonymat, déclaraient récemment à la NZZ que pour eux, «c'était mieux avant Schengen».

Plus d'immigrés illégaux? Pour l'UDC, la frontière extérieure de Schengen est une passoire, ce dont profiteraient des milliers de migrants clandestins. La fin de l'obligation des visas pour les ressortissants de plusieurs pays des Balkans aurait par ailleurs provoqué la venue en Suisse de nombreux travailleurs au noir. L'UDC demande par conséquent au Conseil fédéral de «rétablir la souveraineté complète de la Suisse en matière d'octroi de visas», à l'image de la Grande-Bretagne et de l'Irlande.

Difficile d'évaluer

L'Office fédéral des migrations réplique que, par nature, il est très difficile d'évaluer l'ampleur de la migration illégale.

Impossible dès lors de faire un lien entre l'évolution du nombre de clandestins et l'accord de Schengen, qui offre «des instruments efficaces et performants pour combattre la migration illégale». La fin des visas pour les Etats des Balkans n'a quant à elle pas soulevé de grande difficulté.

Serge Gumy dans le Nouvelliste

samedi 25 décembre 2010

Des migrants africains dénoncent un projet de camp de rétention en Israël

Quelque 2.000 Israéliens et migrants africains ont manifesté vendredi à Tel-Aviv contre le projet du gouvernement israélien de construire un centre de rétention pour les immigrés clandestins, selon un journaliste de l'AFP sur place.

Certains Africains, dont beaucoup venant du Soudan et d'Erythrée, tenaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire: "Nous demandions un refuge, on nous a donné la prison". Le gouvernement israélien prévoit de créer un grand centre de rétention près de la frontière avec l'Egypte, où les immigrés seraient nourris et logés, mais n'auraient pas le droit de travailler. Quelque 35.000 migrants africains se sont installés illégalement en Israël depuis quatre ans, selon le ministère de l'Intérieur.

Le gouvernement israélien estime que les migrants ne sont pas des réfugiés ayant fui des persécutions mais qu'ils sont venus pour des raisons économiques, et pense donc que s'ils se voient interdire de travailler, ils ne viendront plus en Israël. L'Etat hébreu a aussi commencé la construction d'une barrière de sécurité de 250 km le long de la frontière avec l'Egypte, afin de bloquer les principales voies d'entrée des clandestins.

La vague des clandestins "grossit et menace les emplois des Israéliens. Elle modifie le visage de l'Etat et nous devons la stopper", avait déclaré le 28 novembre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. Mais, mercredi, il a exhorté ses compatriotes à la tolérance après de récentes manifestations contre les immigrés africains clandestins, insistant "pour qu'ils ne fassent pas eux-mêmes justice, qu'ils n'aient pas recours à la violence ou aux incitations (à la haine), parce que le gouvernement agit".

AFP

vendredi 24 décembre 2010

Istanbul, première halte pour les chrétiens qui ont fui l'Irak

chrétiens irak istanbulEn octobre 2010, l'association chaldéenne d'Istanbul a enregistré 1108 arrivants. Ils racontent presque tous la même histoire: un départ précipité après avoir reçu des menaces de mort.

Un «alleluia» s'élève, triste et réconfortant à la fois, sous les voûtes de l'église Saint-Antoine d'Istanbul. Le chant est à l'image de l'état d'âme des fidèles, des chrétiens d'Irak jetés sur les routes de l'exil et qui font en Turquie une première halte. À la messe, dimanche dernier, les derniers arrivants étaient aisément reconnaissables. Serrés sur les bancs, ils ont les traits tirés et le regard inquiet de ceux qui savent le cauchemar qu'ils ont quitté. Ils n'osent pas encore croire en un avenir meilleur. Au patriarcat chaldéen, dans la rue voisine, Hadeer Alkhawaja accueille six nouveaux venus, qui sortent d'un sac en plastique leur passeport et leur certificat de célibat : «Des réfugiés arrivent chaque jour.»

L'attaque contre la cathédrale Notre-Dame du Perpétuel secours, à Bagdad, le 31 octobre dernier, a déclenché une nouvelle vague d'exode de chrétiens. En moins de deux mois, plusieurs milliers d'entre eux ont dû quitter la capitale et la ville de Mossoul, plus au nord, selon le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Assiégé par un groupe se réclamant d'al-Qaida, le bâtiment a été le théâtre d'un carnage : au moins 68 personnes ont été abattues et plus d'une centaine blessées. Depuis, la communauté fuit vers la région du Kurdistan, dans le nord du pays, ainsi que vers la Jordanie, la Syrie ou la Turquie. À la mi-décembre, l'association chaldéenne d'Istanbul avait enregistré 1 108 arrivants. Ils racontent presque tous la même histoire : un départ précipité après avoir reçu des menaces de mort.

«À part l'Allemagne, l'Europe ne tient pas ses promesses»

Arrivé la semaine dernière, Behnam vient d'emménager avec son épouse et ses cinq enfants dans un appartement d'un quartier populaire. On tambourine à la porte. La famille se crispe, un réflexe. À Bagdad, le 11 décembre, raconte la jeune femme, «des inconnus se sont introduits dans la maison, ils m'ont battue et m'ont dit que si nous ne partions pas, ils nous tueraient tous». Jusqu'à ce jour, le chef de famille n'arrivait pas à se résoudre à quitter sa terre, à abandonner sa petite fabrique de viande hachée. Mais là, terrorisés, «nous avons fermé la porte derrière nous et nous sommes partis», dans l'heure, sans dire adieu aux voisins. «Alors que le nombre de victimes civiles a dans l'ensemble baissé cette année par rapport à l'an dernier, il apparaît que les minorités sont de plus en plus visées par des menaces et des attaques», s'inquiète le HCR. Après l'assaut contre la cathédrale, l'État islamique d'Irak a publié un communiqué dans lequel il précise que les «idolâtres» sont désormais des «cibles légitimes». Depuis, au moins six Irakiens de confession chrétienne auraient été tués à Bagdad et à Mossoul.

Plongés dans le chaos de la guerre civile comme les sunnites ou les chiites, les chrétiens étaient déjà confrontés à des discriminations dans leur vie quotidienne. Particulièrement les femmes. «Dans la rue, nous ne pouvions pas mettre de jeans, je subissais des insultes parce que je n'étais pas voilée et je ne pouvais même pas prendre le bus», raconte Rita Golan, une longue chevelure brune qui court dans son dos. Mais ce matin, la jeune femme arbore un sourire éclatant. Elle rentre d'un entretien à Ankara avec le HCR et a obtenu, avec sa famille, le statut de réfugié politique. La dernière étape consiste désormais à être acceptée par un pays d'accueil. Le séjour en Turquie n'est que provisoire. Les réfugiés chrétiens bénéficient d'un traitement de faveur de la part de l'administration turque qui leur délivre aisément un permis de séjour temporaire. Mais comme les autres demandeurs d'asile, ils pâtissent d'une application ultrarestrictive de la Convention de Genève. La nouvelle vie des Golan sera donc «aux États-Unis, inch'allah».

Avec le Canada et l'Australie, il s'agit des trois destinations majeures pour les chrétiens d'Irak. Car l'Europe se montre peu généreuse en la matière, même si l'arrivée à Orly de 36 Irakiens gravement blessés dans l'attaque contre l'église et de leurs proches en novembre dernier donne à penser le contraire. «C'était une opération médiatique pure et simple», fulmine Mgr Yakan, vicaire chaldéen de Turquie. «À part l'Allemagne, l'Europe ne tient pas ses promesses, critique-t-il. Les pays de l'Union européenne ne prennent des réfugiés qu'au compte-gouttes et le taux d'acceptation est tellement ridicule que nous ne perdons même plus de temps à leur soumettre des dossiers. Pourtant ces gens sont chassés d'Irak, ce sont des sans-patrie.»

«Un départ sans retour»

Depuis le déclenchement de la guerre en 2003, la communauté chrétienne enregistre une baisse continue de ses effectifs, qui met en péril sa présence millénaire sur ses terres. En sept ans, elle serait passée d'un million de membres à 300 000, la majorité vivant au Kurdistan irakien, un sanctuaire. À Bagdad, ils ne seraient pas plus de 100 000. À Istanbul, Wisam Golan prend des photos de sa famille devant la crèche de l'église Saint-Antoine. Il s'apprête à passer Noël à Istanbul, en transit. Il dit qu'il ne retournera jamais en Irak : «C'est un départ sans retour.»

Laure Marchand dans le Figaro

mercredi 22 décembre 2010

De nouvelles affiches racistes dans les rues

Sur l'axe de la rue de Carouge, plusieurs affiches vantent un ouvrage dénonçant le «complot juif mondial».

Petit regain d'antisémitisme à Genève. Des affiches ont été placardées ces jours-ci, principalement sur l'axe de la rue de Carouge. Elles reproduisent la couverture d'un auteur français, Hervé Ryssen, pseudonyme d'Hervé Lalin. Ce dernier a milité à l'extrême droite, notamment au Front national mais aussi à Unité radicale, un mouvement dont était membre Maxime Brunnerie, l'homme qui avait tenté de tuer Jacques Chirac en 2002. A la suite de cette tentative, Unité radicale avait été dissoute et une partie de ce mouvement s'est recyclée dans le Bloc identitaire, qui s'est distingué ce week-end en coorganisant des Assises sur l'islam. Avec comme invité de marque Oskar Freysinger, conseiller national udéciste1.

Hervé Ryssen a publié des ouvrages aux titres évocateurs: Psychanalyse du judaïsme (2006), Le Fanatisme juif, (2007), La Mafia juive, Miroir du judaïsme (2009), Histoire de l'antisémitisme [sous titré] vue par un goy et remise à l'endroit (2010). Ces ouvrages sont publiés aux éditions Baskerville et sont principalement vendus via internet. «Il y a eu une campagne similaire à Paris», explique Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la Cicad (Coordination intercommunautaire contre l'antisémitisme et la diffamation) à Genève. «Mais à notre connaissance, c'est la première fois que l'on retrouve de tels placards importés depuis la France.» Ce qui pourrait signifier que certains liens ont été tissés. La Cicad va-t-elle porter plainte? «L'affaire à été confiée à notre cellule juridique, explique M. Gurfinkiel. La question est toujours de savoir sur quelle base nous pourrions engager une action en droit.» La violation de l'article 261 bis du Code pénal suisse prévoit une poursuite d'office de ce genre de délit. Une dénonciation pourrait suffire. En revanche, sans auteurs clairement identifiés du collage, toute poursuite devient difficile. C'est notamment le cas de ces petits papillons négationnistes qui sont régulièrement glissés dans des boites aux lettres. Clairement contraire à la disposition pénale antiraciste, ils sont anonymes. Et personne n'a été pris la main dans le sac. A défaut d'une action en droit, la Cicad plaide pour un devoir d'hygiène. A savoir le retrait le plus rapidement possible de ces affiches des murs de Genève.

Philippe Bach dans le Courrier


Note : 1Le Courrier du lundi 20 décembre.

mardi 21 décembre 2010

Les sans-papiers ne sont pas égaux devant la loi

Suivant qu'ils vivent à Genève ou à Zurich, les clandestins n'ont pas les mêmes espoirs de régularisation. Des voix appellent la Confédération à la rescousse.

1201 demandes de régularisation déposées par Genève en dix ans, 737 par le canton de Vaud, 88 par Fribourg, 22 par Neuchâtel, 10 par Zurich, 0 par le Valais. Les étrangers vivant sans papiers en Suisse ne sont pas égaux devant la loi, comme le démontre l'étude présentée hier à Berne par la Commission fédérale pour les questions de migration (CFM).

Cette enquête révèle un large fossé entre Suisse romande et Suisse alémanique, particulièrement flagrant pour ce qui concerne les étrangers en situation irrégulière entrés hors filière de l'asile. Pour les demandes de régularisation de requérants d'asile déboutés ou frappés d'une décision de non-entrée en matière, les écarts entre cantons sont moins nets. Sur les 2431 dossiers transmis à l'Office fédéral des migrations entre janvier 2007 et décembre 2009, Vaud en a envoyé 806, Genève 418, Neuchâtel 155, le Valais 96 et Fribourg 88.

Le système mal fichu

La Commission fédérale pour les questions de migration voit dans ces grands écarts statistiques une inégalité de traitement. Les cantons possèdent en outre un large pouvoir: non seulement ce sont eux qui statuent sur les demandes de régularisation des sans-papiers, mais en plus, leurs décisions sont difficilement attaquables, selon la CFM. Président des Verts suisses, Ueli Leuenberger partage ce jugement: «Les clandestins qui savent que leur canton de résidence dépose peu de dossiers à Berne hésitent avant d'entreprendre une démarche de régularisation, voire s'autocensurent.»

A droite aussi, l'incohérence de la pratique actuelle des cantons interpelle. «Cela me dérange de savoir qu'une personne sera traitée différemment suivant le canton où elle habite. On assiste à une sorte de loterie», dénonce Yvan Perrin (udc/NE), président de la Commission des institutions politiques du Conseil national, qui est spécialisée dans les questions de migration. «Il est important que la régularisation ne devienne pas un droit pour les étrangers clandestins, et qu'elle demeure le fait du prince. A condition que le prince, en l'occurrence le canton, ne sombre pas dans l'arbitraire et que sa politique ne soit pas aléatoire», enchaîne Isabelle Moret (plr/VD).

La pratique actuelle est injuste, le constat est largement partagé sous la Coupole. Que faire pour corriger le tir? La CFM avance sa solution: elle propose que les demandes de régularisation soient directement déposées auprès de la Confédération. L'idée séduit, tous partis confondus. «C'est un pas dans la bonne direction», salue Ueli Leuenberger. «Cela permettrait de contourner la mauvaise volonté de certains cantons, qui font comme s'ils n'abritaient pas de sans-papiers», renchérit Isa- belle Moret.

Mais Berne refuse le cadeau empoisonné. «L'application du droit des étrangers est de la compétence des cantons» réplique ainsi Marie Avet, porte-parole de l'Office fédéral des migrations. L'argument ne décourage pas Yvan Perrin: «Mis à part les Dix Commandements, aucune loi n'est gravée dans le marbre».

Serge Gumy dans le Nouvelliste

Le collectif Migract, un regard jeune et neuf sur les migrations

Lancé par quatre étudiantes, le projet vise à contribuer à une meilleure connaissance des enjeux liés aux migrations. Sans délaisser l'action.

Les milieux genevois de solidarité avec les migrants comptent un nouvel acteur associatif. Il y a quelques semaines, en pleine campagne sur l'initiative UDC et le contre-projet pour le renvoi des «étrangers criminels», des étudiantes en relations internationales ont décidé de créer le collectif Migract – pour «migration» et «action». Le 14 décembre, une soirée publique a rassemblé une quarantaine de personnes. Au programme, la projection du documentaire de Charles Heller Home sweet home, consacré à la politique migratoire suisse, et une première discussion sur les futures orientations du groupe. Rencontre avec quatre jeunes femmes débordant d'énergie.
Si de nombreuses associations – professionnelles ou militantes – sont déjà actives sur les thématiques liées à l'immigration, Migract entend de son côté privilégier une approche différente. «La plupart oeuvrent dans le cadre de l'agenda politique et développent un discours idéologique. Elles se positionnent en quelque sorte en négatif par rapport au racisme et à la xénophobie véhiculées par l'UDC», explique Alina Calmac. «Pour notre part, nous souhaitons appréhender la réalité migratoire au-delà du clivage politique gauche-droite», ajoute Lorraine Cholodenko.
Tout cela dans un esprit de complémentarité, en collaborant et en profitant de l'expérience des associations plus traditionnelles. Des représentants de plusieurs d'entre elles, notamment de l'Observatoire romand du droit d'asile et des étrangers et de Stop Exclusion, étaient présents lors du lancement du collectif. A une époque où, politiquement, toutes les catégories d'étrangers subissent attaque sur attaque, la mobilisation de ces jeunes est forcément vue d'un très bon oeil.
Les fondatrices de Migract insistent beaucoup sur le besoin de se former. «Nous voulons acquérir une connaissance du terrain, aller à la rencontre des migrants dans une optique de dialogue et d'échange, comprendre leur diversité, qui n'a rien à voir avec l'image homogène qu'en renvoient souvent les médias», indique Stéphanie Nagy. Car les préjugés n'épargnent personne, poursuit Sophie Hodel: «En ce qui me concerne, j'avais par exemple tendance à penser que toutes les femmes voilées se sentaient oppressées. Le stage que je suis en train d'effectuer à l'association Camarada, qui accueille et forme des femmes migrantes, me démontre le contraire...»
Parallèlement, les quatre étudiantes espèrent que Migract puisse jouer un rôle dans la sensibilisation de la population aux thèmes touchant à l'immigration. «C'est la désinformation qui permet la montée du discours xénophobe. Si les gens étaient au courant ne serait-ce que des motivations qui poussent les migrants à venir en Suisse, je suis certaine que cela changerait beaucoup de choses», estime Sophie Hodel.

Olivier Chavaz dans le Courrier

Renseignements et contacts: collectifmigract@gmail.com

Caritas affligé par le retrait de son mandat d'aide aux réfugiés

Le transfert annoncé de cette tâche à l'Hospice général alarme l'oeuvre d'entraide, qui craint une «énorme perte» pour ses bénéficiaires.

Caritas Genève digère très mal la décision du canton de lui retirer son mandat d'aide sociale aux réfugiés statutaires – permis B et F (notre édition du 16 décembre). Dès juillet 2011, cette mission sera transférée à l'Hospice général, qui prend déjà en charge les requérants d'asile. Après avoir appris la nouvelle la semaine passée, l'oeuvre d'entraide fait aujourd'hui part d'une grande inquiétude. «Nous sommes avant tout préoccupés par le sort des réfugiés, dont beaucoup nous appellent pour signaler leurs craintes et leur déception», note son directeur, Dominique Froidevaux. Treize postes sont aussi menacés par la perte du mandat. A l'interne, la mobilisation s'organise. «Nous privilégions le dialogue et attendons une rencontre avec François Longchamp le plus tôt possible, poursuit-il. Mais tous les scénarios sont envisagés.»
De son côté, l'Etat défend sa position. Pour la Direction générale de l'action sociale (DGAS), la mesure vise à assurer la cohérence du système, entre la prise en charge des requérants et celle des réfugiés statutaires, sans changement d'institution.

«Sortir de l'assistance»
Au contraire, le directeur de Caritas estime qu'une «rupture» est essentielle: «Pour envisager leur futur en Suisse, ces personnes doivent sortir d'une logique d'assistance pour entrer dans une logique d'intégration, domaine dans lequel nous avons une solide expertise.» Dans le cadre d'une prise en charge globale et exigeante – apprentissage de la langue, formation professionnelle... –, un soin particulier est apporté à l'écoute, insiste-t-il: «Nous consacrons du temps à établir un lien de confiance, alors que l'Hospice, qui ne peut le faire, a plus d'expérience dans la distribution d'aide financière et la gestion des flux.»
Vito Angelillo, à la DGAS, n'est pas de cet avis et souligne un «changement de paradigme»: «L'Hospice veut aujourd'hui donner les moyens à ses bénéficiaires de sortir de l'assistance. Nous souhaitons investir dans l'intégration – la réinsertion professionnelle – au plus vite, dès l'arrivée d'un requérant d'asile. S'il passe à un statut de réfugié, la continuité de cette action doit absolument être garantie.» Et de rappeler que l'enveloppe du mandat restera identique: «Il n'y a aucune raison que l'Hospice consacre moins de temps à ces personnes. Mais il faut aussi stimuler les gens dans leur trajectoire, donner un déclic pour faciliter le passage en emploi.»

Reports de charges?
Pour l'instant, «cette approche reste un discours, rétorque Dominique Froidevaux. Pour un requérant qui ne sait pas s'il restera en Suisse, l'intégration est très difficile à envisager. Et les mesures intégratives qui lui sont proposées sont plus proches de l'occupation que de la formation.» Une fois le statut de réfugié délivré, la donne change, estime-t-il. «Sortir de l'Hospice offre une chance supplémentaire de rompre durablement avec l'assistance.»
Après l'obtention d'un permis C, certains souhaitent d'ailleurs poursuivre la démarche d'intégration entreprise chez Caritas et continuent à y venir, poursuit le directeur, alors même qu'ils sont à nouveau suivis par l'Hospice. Avec la perte du mandat d'aide sociale, les réfugiés risquent d'en faire de même: «Nous craignons des reports de charges, mais sans les moyens qui vont avec.»
Vito Angelillo pense, lui, que les deux démarches sont complémentaires: «Heureusement que les oeuvres d'entraide apportent un soutien que l'Etat ne peut pas accorder dans son cadre légal et bureaucratique. Elles sont d'ailleurs subventionnées pour cela. Mais il faut clarifier nos rôles respectifs.»
Concernant les impacts de cette décision sur le personnel de l'institution, le fonctionnaire assure que la DGAS tient à «accompagner au mieux le processus de transition» et envisage de réintégrer à l'Hospice les employés concernés. Mais l'absence de concertation autour de cette réforme suscite plutôt des réticences, répond Dominique Froidevaux. «Dans un climat de dialogue, cette perspective aurait peut-être été abordée différemment.»

Mario Togni dans le Courrier

samedi 18 décembre 2010

Non à la privation de l'aide d'urgence pour les débouté-e-s

Communiqué du collectif Droit de rester suite à la décision de retirer le droit à l'assurance maladie et à l'aide d'urgence pour les requérants du refuge lausannois.

main_tendueL'aide d'urgence est un régime de contrainte. Ce constat est avéré depuis son application dès le premier janvier 2008: l'aide d'urgence instaure un traitement discriminatoire, inhumain, viole les droits fondamentaux et atteint les débouté-e-s dans leur santé physique et psychique. De surcroît, la menace de supprimer l'aide d'urgence est utilisée de manière récurrente et contraire au droit par le SPOP, dans le but d'obliger des personnes à « consentir » à leur renvoi. Récemment, le SPOP accroît sa pression sur les personnes déboutées, et de manière ciblée sur celles qui sont protégées au refuge ouvert par le Collectif Droit de rester et la Coordination asile-migration Vaud depuis le 11 octobre 2010. En effet, le SPOP a supprimé pour ces personnes l'octroi de l'aide d'urgence ainsi que l'affiliation à une assurance-maladie obligatoire des soins de base. Motif: les personnes ne résident plus en centres ou en foyers d'aide d'urgence.

Or l'obligation de vie en centre d'hébergement pour bénéficier de l'aide d'urgence n'apparaît ni dans la Loi sur l'aide aux requérants d'asile et à certaines catégories d'étrangers (LARA), ni dans le Guide d'assistance édité par l'EVAM. Ce revirement arbitraire de politique pose en outre un problème d'égalité de traitement flagrant, car de nombreuses personnes qui reçoivent l'aide d'urgence résident dans un appartement. Cette mesure apparait donc comme une rétorsion administrative qui s'abat sur les débouté-e-s en lutte et protégé-e-s en refuge. Elle sanctionne ainsi ces personnes d'avoir trouvé un soutien et une dignité nouvelle en tentant de les précariser encore plus.

Climat de double peine oblige, afin d'être bien certain que la sanction produira ses effets, le SPOP redouble la mesure d'une privation de l'assurance-maladie. Les personnes qui résident au refuge se sont vues retirer la couverture maladie octroyée aux débouté-e-s par le biais de l'EVAM. Cette privation d'un droit de base, fort problématique au vu de la législation fédérale (LAMAL), avait affecté dans un premier temps l'ensemble des débouté-e-s célibataires. En décembre 2008, M. Phlippe Leuba assurait en conférence de presse qu'était désormais « garanti l’accès à l’assurance-maladie pour toute personne à  l’aide d’urgence » (http://www.evam.ch/). Pourquoi ce retour en arrière et pour une catégorie ciblée de personne? Comment est-il soutenable de refuser à des personnes leur affiliation à l'assurance-maladie de base alors que le droit fédéral prévoit son caractère obligatoire et qu'elles se trouvent sans ressources (interdites de travail, soumises au régime d'aide d'urgence)? Cette mesure n'est rien d'autre qu'une action de répression politique et administrative visant à « sans papiérisation » des personnes déboutées, leur renoncement aux droits et leur disparition.

Le refuge est un lieu public, connu des autorités. Les personnes n'y sont pas cachées, mais protégées, en toute connaissance de cause, politique et médiatique, des autorités. Il est ainsi parfaitement hypocrite et abusif de faire comme si les personnes n'existaient plus pour le SPOP. La privation d'assurance empêche les personnes de continuer leur traitement et fait obstacle à leur droit au réexamen de leur dossier, car sans assurance elles ne peuvent rassembler les rapports médicaux nécessaires à cette procédure. Nous exigeons ainsi que ces deux mesures soient immédiatement levées, que cesse le harcèlement administratif sur les personnes déboutées et que les autorités mettent leur zèle ailleurs, en particulier dans l'examen des demandes de régularisation de personnes qui habitent et font vivre ce canton depuis des années et ne sauraient être renvoyées dans un pays où ils et elles n'ont plus aucun lien.

Collectif Droit de rester

Les requérants d'asile du refuge privés d'assurance-maladie

Le collectif Droit de rester dénonce le «harcèlement administratif» des migrants qui ont obtenu la protection de l'Eglise. Les requérants déboutés actuellement hébergés à la paroisse catholique du St-Esprit, à Lausanne, ont été privés de l'aide d'urgence et de la couverture d'assurance-maladie. Hier en conférence de presse dans les locaux du refuge, les défenseurs des migrants ont demandé aux autorités vaudoises de lever immédiatement ces restrictions. Ils mèneront une action symbolique aujourd'hui à midi à la place de la Palud, à l'occasion de la Journée internationale des migrants.

Le refuge, ouvert le 11 octobre dernier, en est à sa quatrième paroisse différente. Toutes les trois semaines, il est forcé de déménager. Une précarité dont les migrants et le collectif Droit de rester se seraient bien passés. Mais elle leur a été imposée par les Eglises.
Selon la loi, un bâtiment qui n'est pas affecté au logement ne peut pas être occupé plus de trois semaines. Protestants et catholiques veulent respecter scrupuleusement cette règle. En offrant un refuge à des requérants déboutés, les Eglises s'exposent toutefois à un autre risque: celui d'être poursuivies pour aide au séjour illégal.
Le refuge accueille actuellement deux jeunes hommes: Didier, un Congolais arrivé en Suisse il y a huit ans, et Diallo, originaire de Sierra Leone. Ce dernier dit avoir fui son pays il y a près de douze ans pour échapper à sa condition d'enfant-soldat: «Mon village a été entièrement détruit, ce qui a été confirmé par la délégation sierra-léonaise lors de mon audition. Toute ma famille a été tuée.»
Comme tous deux sont en Suisse depuis plus de cinq ans, ils ont déposé des demandes de permis humanitaire. Mais le canton les a écartées, s'insurge le collectif Droit de rester. Les militants fustigent le cercle vicieux dans lequel sont jetés les requérants d'asile déboutés: forcés d'arrêter de travailler, privés de ressources financières, ils voient se convertir la moindre amende en jours de prison. «Du coup, le canton les considère comme des délinquants et refuse de leur accorder un permis», explique Fanny Jaquet, membre du collectif.
L'assurance-maladie de base est obligatoire et universelle. Personne ne devrait donc en être privé, quelle que soit sa situation administrative. Comment certains requérants d'asile déboutés peuvent-ils se retrouver sans couverture?
«L'assurance-maladie fait partie des prestations de l'aide d'urgence», explique Pierre Imhof, directeur de l'Etablissement vaudois d'accueil des migrants (EVAM). Sans aide d'urgence, pas d'assurance-maladie. Or, pour avoir droit à l'aide d'urgence, les migrants doivent se présenter régulièrement au Service de la population (SPOP). Ce qui reviendrait, pour certains, à se jeter dans la gueule du loup.
Deuxième problème: l'octroi de l'aide d'urgence est généralement conditionné à l'hébergement dans un foyer de l'EVAM. Ceci pour «éviter des abus de prestations», commente Pierre Imhof: «Nous n'avons jamais eu l'occasion de nous prononcer sur le cas d'un refuge, reprend-il. Mais je pense que si on nous avait fait la demande, on aurait pu trouver une solution.»

Michaël Rodriguez dans le Courrier

vendredi 17 décembre 2010

D’un canton à l’autre, la loterie des cas de rigueur

Les régularisations de personnes sans statut légal autorisées par Berne répondent à des critères peu précis. Et les pratiques cantonales sont très différentes. Des voix s’élèvent pour mettre fin à l’arbitraire.

Certains sont là depuis de nombreuses années, ont un travail, sont parfaitement intégrés et finissent par être régularisés. D’autres pas. Le sort des sans-papiers dépend aujourd’hui souvent du bon vouloir des cantons. Vaud et Genève font par exemple régulièrement recours à la législation leur permettant d’invoquer des «cas de rigueur» auprès de la Confédération et d’obtenir ainsi des permis de séjour; mais d’autres ne bougent pas. A cela s’ajoute le fait que les critères de l’Office fédéral des migrations (ODM) restent flous et laissent une large marge d’appréciation. Bienvenue dans le monde arbitraire des cas de rigueur.

Un monde dans lequel deux étrangers sans statut légal avec exactement le même parcours peuvent, dans un canton, obtenir un permis B, et dans un autre, être expulsés de force dans leur pays d’origine. A Berne, des voix s’élèvent pour tenter d’imposer des changements. Entre 90 000 et 250 000 personnes sans statut légal vivraient actuellement en Suisse. Comme nouvelle ministre de Justice et Police, la socialiste Simonetta Sommaruga va rapidement devoir se frotter au casse-tête, pour lequel aucune solution satisfaisante n’a été trouvée jusqu’ici.

Le cas de Musa Selimi à Genève (lire ci-contre) démontre à quel point la situation peut se révéler kafkaïenne. Menacé d’expulsion, avec sa famille, après avoir séjourné pendant près de vingt ans en Suisse, il n’a pu échapper à son renvoi qu’à la toute dernière minute. Dans ce cas précis, l’ODM a justifié son revirement en soulignant que, dans sa demande de réexamen, le canton de Genève a indiqué «plusieurs nouveaux éléments dont des raisons de santé». Mais le soutien de personnalités et la médiatisation de l’affaire ont certainement aussi pesé dans la balance.

Contrairement à l’Italie ou à l’Espagne, la Suisse ne recourt pas aux régularisations collectives, mais procède à une analyse «au cas par cas» et prévoit, dans ce domaine, trois types de dérogations aux conditions d’admission. Une personne sans statut légal peut par exemple recevoir une autorisation de séjour lorsqu’elle arrive à se faire considérer comme un «cas individuel d’une extrême gravité» (art. 30 de la loi sur les étrangers). Une notion que tente de préciser l’art. 31 de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA).

Deuxième catégorie: les personnes admises à titre provisoire. Après cinq ans, elles peuvent demander à ce que leur cas soit étudié de «manière approfondie» en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour, en fonction de leur niveau d’intégration, de leur situation familiale et de l’exigibilité de leur retour dans leur pays de provenance (art. 84 de la LEtr).

Enfin, il y a le fameux article 14 de la loi sur l’asile. Il prévoit que «les requérants d’asile peuvent, sur demande du canton, recevoir une autorisation de séjour, s’ils séjournent en Suisse depuis au moins cinq ans et qu’il s’agit d’un cas de rigueur en raison de leur intégration poussée». Cette disposition, qui dépend du bon vouloir des cantons à présenter des dossiers à Berne, s’applique indépendamment de l’état de la procédure: elle vise donc aussi les requérants déboutés.

En 2009, l’ODM a traité 181 demandes de «cas d’extrême gravité». 138 émanaient du canton de Genève, 39 de Vaud, une du Jura, une de Fribourg, une de Berne et une d’Argovie. 88 ont été approuvées. Cette même année, 2682 – sur 2787 demandes – personnes bénéficiant d’une admission provisoire et depuis plus de cinq ans en Suisse ont pu être régularisées. Enfin, 429 (458 demandes) requérants d’asile depuis cinq ans en Suisse, ont obtenu un permis de séjour. Et là encore, les dossiers provenaient surtout de Vaud (77), Genève (52), Valais (44), Berne (44) et Zurich (36).

Depuis la fameuse «circulaire Metzler» de 2001 et une jurisprudence du Tribunal fédéral, les conditions de régularisation ont été adaptées. Mais elles restent vagues. A partir de quel moment peut-on par exemple parler d’«intégration poussée»? Et comment définir objectivement une situation «d’extrême gravité» pour justifier un permis humanitaire?

Pour le conseiller national Antonio Hodgers (Verts/GE), ces critères peu précis dénotent clairement une «volonté politique de ne pas créer de droits individuels pour les requérants et éviter des actions en justice en cas de refus. Trop floue, notre législation crée un espace d’arbitraire administratif. Nous devons aller vers une précision de critères objectifs d’attribution ou de refus de permis», souligne-t-il.

Il ne serait pas contre le fait que certaines décisions d’expulsions soient prises plus rapidement, pour qu’en échange aucun requérant ou clandestin au casier judiciaire vierge ne soit expulsé au-delà de cinq ans. Une position qu’un Yvan Perrin (UDC/NE) arrive à faire sienne: il s’est déjà engagé en faveur d’étrangers bien intégrés et menacés de renvois.

«C’est clairement le règne de l’arbitraire. Et sachant qu’un requérant d’asile ne peut pas décider à quel canton il sera attribué, une harmonisation serait vraiment souhaitable», commente de son côté Adrian Hauser, porte-parole de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés.

Conscients du problème, Luc Barthassat (PDC/GE) et Jean-Charles Rielle (PS/GE), sont montés au front au parlement. Dans une motion déposée en septembre, ils demandent d’introduire la notion de prescription dans les conditions d’admission en Suisse. Un clandestin serait ainsi admis à titre individuel ou avec sa famille s’il peut prouver y avoir séjourné pendant au moins cinq ans – la version du socialiste – ou dix ans – celle du PDC. Pour autant qu’il ait eu un comportement irréprochable.

Mais voilà: le Conseil fédéral, contre toute forme de régularisation collective, propose de rejeter le texte. Tout en précisant vouloir explorer la piste de l’accès à l’apprentissage pour les sans-papiers, comme demandé par le parlement.

Valérie de Graffenried dans le Temps


Des cas emblématiques

Musa Selimi et sa famille ont frôlé leur expulsion à Genève. En Suisse alémanique, ce sont deux Ivoiriens, très bien intégrés et ayant suivi une scolarité, qui suscitent l’émotion.

La nouvelle est tombée le 8 septembre: Musa Selimi et sa famille, originaires du Kosovo, ont fini, après un long combat, par obtenir leur régularisation. Le père de famille, âgé de 40 ans, a passé la moitié de sa vie en Suisse, travaille depuis treize ans dans la restauration à Genève, paie ses impôts et ses charges sociales. Son épouse et ses deux enfants l’ont rejoint en 2005, illégalement. Bien intégrés, ils auraient tous dû quitter la Suisse le 5 juillet 2010, sans un ultime revirement de Berne et après un long bras de fer entre le canton et la Confédération. Dans ce cas concret, la forte mobilisation a permis de faire plier Berne.

En Suisse alémanique, deux Ivoiriens font actuellement parler d’eux: Emmanuel Gnagne et Olivier Cayo . Tous deux, requérants d’asile déboutés et donc sans statut légal, sont menacés d’expulsion alors que, depuis bientôt cinq ans en Suisse, ils se sont distingués par une bonne intégration et de très bons résultats scolaires. Olivier Cayo, venu seul à l’âge de 17 ans, est même l’auteur d’un des meilleurs travaux de maturité du canton d’Argovie. Alors qu’une épée de Damoclès pèse sur lui et qu’il fait tout pour être considéré comme un «cas de rigueur», il a commencé des études de droit à Neuchâtel. Emmanuel Gnagne, lui, est en Suisse avec sa mère et trois frères et sœurs. Après une longue procédure, leur expulsion était prévue le 28 juillet. Mais ils s’y sont opposés et, depuis, leur situation est réexaminée. Comme pour Olivier Cayo, même des élus UDC ont pris leur défense, jugeant un renvoi après une intégration réussie et un long séjour en Suisse injuste.

Valérie de Graffenried dans le Temps

En Syrie, les réfugiés irakiens enlisés dans une difficile attente

Oshana Khamo, 49 ans, a fui les violences en Irak et s'est réfugié en Syrie en 2004. Mais depuis plus de six ans, il attend sa réinstallation dans un pays tiers, en vain, et comme lui des centaines de milliers de réfugiés irakiens sont enlisés dans la république arabe. Convoqué en 2009 par le Haut Commissariat pour les réfugiés de l'ONU (HCR) pour les formalités d'un départ en Allemagne, Oshana affirme avoir subi "beaucoup de tracasseries" avant que son départ ne soit finalement reporté.

oshana khamo"A chaque fois, ils invoquent des raisons différentes", affirme-t-il. Comme Oshana, beaucoup de réfugiés irakiens, attendent avec impatience leur départ vers un autre pays et se plaignent de la dégradation de leurs conditions de vie en Syrie, où leur attente se prolonge. Après l'invasion américaine de l'Irak en 2003, près de 2 millions d'Irakiens ont quitté leur pays pour s'installer dans les pays voisins.

Outre les 150.000 Irakiens officiellement enregistrés auprès du HCR, l'agence de l'ONU pour les réfugiés estime que quelque 1,5 million d'Irakiens ont trouvé refuge en Syrie. Shamiran Youssef Agha Khan, 45 ans, est elle aussi coincée, alors que son frère, qui a fui l'Irak après elle et a choisi de se réfugier au Liban, est déjà réinstallé aux Etats-Unis. "Ils ont choisi de me rapatrier aux Etats-Unis il y a un an et demi, mais maintenant ils y ont renoncé parce que soi-disant, je ne remplissais pas les conditions", se plaint Shamiran. Même son de cloche pour Mohammad Youssef, 45 ans, inscrit au HCR en 2006: ses connaissances qui ont fui l'Irak après lui pour l'Egypte, la Turquie, la Jordanie ou le Liban, "ont déjà obtenu l'asile et sont installés aux Etats-Unis". "Les dossiers de la plupart des réfugiés en Syrie ne sont pas examinés. Le problème réside dans le service fourni par l'organisme de l'ONU", affirme Mohammad.
Depuis 2007, plus de 22.600 réfugiés irakiens ont quitté la Syrie pour s'installer dans différents pays, explique Roula Nasrallah, chargée de la communication du HCR à Damas. "Il reste encore bien sûr des réfugiés qui attendent leur tour, mais tous ne vont pas partir pour s'installer dans des pays tiers, et le HCR examine ces demandes au cas par cas", souligne-t-elle.

Comme des centaines d'Irakiens, Mohammad se rend régulièrement dans un centre de l'ONU près de Damas, pour recevoir l'assistance offerte par le Programme alimentaire mondial (PAM). Houda, 20 ans, préfère elle vendre ces rations pour acheter les vivres dont elle a besoin. Souraya Ghazi, 56 ans, reçoit une allocation de 7.000 livres syriennes (SYP), soit 112 euros par mois, dont 5.000 SYP sont consacrées au loyer. "Il ne me reste plus grand chose pour vivre", dit-elle.

En 2010, le PAM a accordé une aide alimentaire de 32 millions de dollars pour couvrir les besoins des quelque 150.000 Irakiens inscrits auprès du HCR. "Nous calculons les besoins quotidiens de chaque famille en calories", a explique Selly Muzammil, membre du bureau de presse du PAM. "Avant de les distribuer, nous soumettons les aides au gouvernement syrien qui donne son approbation". Selon un sondage réalisé auprès d'Irakiens par le bureau central des statistiques en Syrie, 52% se disent désespérés et 7,8% ont envisagé de se suicider.

AFP et le Parisien

jeudi 16 décembre 2010

Torture / migrants illégaux: l'UE épinglée

L'organisation internationale Human Rights Watch a dénoncé le recours à la torture et les mauvais traitement contre les migrants illégaux en Ukraine, tout en critiquant le laxisme de l'Union européenne sur la question, dans un rapport publié aujourd'hui.

"En Ukraine, beaucoup de migrants sont soumis à un traitement inhumain (par) les garde-frontière et de la police", accuse ce rapport basé sur les interviews de 161 clandestins, réfugiés et chercheurs d'asile, selon un communiqué de HRW. "Certains migrants ont raconté comment des fonctionnaires les ont torturés, y compris avec des électrochocs", d'autres ont dit avoir été "battus ou privés de nourriture", déclare l'ONG, mettant en cause "l'incapacité ou l'absence de volonté" de Kiev de contrer ce problème.

Frontalier de l'UE, ce pays sert de point de passage important pour les migrants d'origine africaine et asiatique en route vers l'Europe. De nombreux clandestins sont ainsi interpelés à la frontière entre l'Ukraine et ses voisins européens. Un accord de réadmission en vigueur entre Kiev et Bruxelles permet également aux membres de l'UE de renvoyer des migrants appréhendés sur leur territoire vers cette ex-république soviétique.

"Des Etats de l'UE renvoient ces personnes en Ukraine où elles sont confrontées aux abus", s'alarme HRW. L'ONG a appelé Bruxelles à "suspendre" l'accord de réadmission avec Kiev jusqu'à ce que la situation s'améliore. Ce document "ne libère pas les Etats membres de l'UE de leurs obligations (...) de fournir l'accès à l'asile et de ne pas renvoyer les gens là où ils sont confrontés à la torture ou aux mauvais traitement", souligne HRW.

AFP et le Figaro

mercredi 15 décembre 2010

La Libye et Malte manquent à leur devoir envers les réfugiés, les demandeurs d'asile et les migrants

« Il vaut mieux mourir en mer que retourner en Libye. » Farah Anam, une Somalienne arrivée à Malte en juillet 2010 après avoir traversé la Libye.

malte réfugiés prisonEn voulant fuir persécutions et conflit armé, les migrants, réfugiés et demandeurs d'asile qui tentent de se rendre en Europe en passant par la Libye se trouvent exposés à la torture et à la détention illimitée, affirme Amnesty International dans un rapport publié le 14 décembre. Intitulé Seeking safety, finding fear: Refugees, asylum-seekers and migrants in Libya and Malta, ce rapport souligne la détresse des personnes qui tentent d'atteindre les pays de l'Union européenne (UE), bien souvent dans l'espoir de trouver asile et protection, et met en lumière les atteintes aux droits humains dont elles sont victimes en Libye et à Malte.
« En Libye, les ressortissants étrangers, et plus spécialement les réfugiés, les demandeurs d'asile et les migrants, sont particulièrement vulnérables et vivent en permanence dans la crainte d'être arrêtés et d'être victimes de détentions prolongées, d'actes de torture ou d'autres mauvais traitements », a déclaré Malcolm Smart, directeur du Programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International.
« En outre, beaucoup ont peur d'être renvoyés dans leur pays d'origine, sans que le risque réel qu'ils courent d'y être persécutés ne soit pris en compte. »
D'après les autorités libyennes, il y aurait plus de trois millions de « migrants en situation irrégulière » dans le pays, dont beaucoup sont originaires d'autres pays d'Afrique. Mais elles affirment qu'il n'y a parmi eux aucun réfugié.
Chaque année, des dizaines de milliers de Somaliens quittent leur pays et entreprennent un long et périlleux voyage à travers des États comme la Libye pour fuir le conflit qui ravage la Somalie depuis 1991. Nombreux sont ceux qui dépensent la totalité de leurs économies afin d'embarquer pour une dangereuse traversée de la Méditerranée.
Les réfugiés et les demandeurs d'asile n'ont aucun statut juridique en Libye, quel que soit leur besoin de protection. Ce pays ne fait pas partie des signataires de la Convention de 1951 des Nations unies et ne dispose d'aucune procédure permettant d'obtenir l'asile. En novembre 2010, le gouvernement a ouvertement rejeté les recommandations faites à la Libye de ratifier la Convention de 1951 et de conclure avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) un protocole d'accord qui permettrait au HCR d'aider les réfugiés et les demandeurs d'asile en Libye.
« En Libye, les demandeurs d'asile et les réfugiés n'ont nulle part où aller pour obtenir de l'aide et ils sont encore plus vulnérables depuis que les autorités du pays ont ordonné au HCR de suspendre ses activités, en juin dernier. Le moins que puissent faire les autorités, c'est protéger les personnes qui fuient les persécutions et les conflits contre les arrestations, la violence et les atteintes à leurs droits, et veiller à ce qu'elles ne soient pas renvoyées dans des pays où elles sont persécutées ou exposées à de graves dangers », a déclaré Malcolm Smart.
Ahmed Mahmoud et Mariam Hussein, un couple somalien, ont fui leur pays ravagé par la guerre. Ils ont atteint la Libye et y ont vécu dans la peur constante d'être arrêtés par les autorités. Ils n'ont pas trouvé de travail et ont été volés à plusieurs reprises. Ils ont alors décidé de prendre un bateau pour l'Europe. Mariam Hussein était enceinte de sept mois.
Le couple faisait partie d'un groupe de 55 Somaliens interceptés en mer et secourus d'une embarcation en détresse par des navires maltais et libyens le 17 juillet 2010 alors qu'ils tentaient d'effectuer la dangereuse traversée de la Méditerranée entre la Libye et l'Europe. Mariam Hussein et 26 autres personnes ont immédiatement été ramenées en Libye. Les 28 autres migrants, dont Ahmed Mahmoud, ont été emmenés à Malte.
En Libye, Mariam Hussein et les 26 autres personnes ont immédiatement été placées en détention. Selon certaines informations, les hommes auraient été roués de coups et soumis à des décharges électriques. Deux mois plus tard, Mariam Hussein a accouché d'un enfant mort-né.
En Libye, réfugiés, demandeurs d'asile et migrants sont systématiquement victimes d'actes de torture ou d'autres mauvais traitements. Les gardiens frappent souvent les détenus à coups de poings ou à l'aide de matraques ou de barres en métal et ceux qui se plaignent des conditions de détention ou demandent une assistance médicale sont agressés ou punis d'une autre manière.
Malgré cela, en octobre, la Commission européenne a signé avec les autorités libyennes un « programme de coopération » pour une « gestion efficace des flux migratoires » et un « contrôle des frontières » jusqu'en 2013, au titre duquel l'UE va verser à la Libye 50 millions d'euros.
Dans le même temps, l'UE et la Libye sont en train de négocier un « accord-cadre » qui doit notamment permettre la « réadmission » en Libye de ressortissants de « pays tiers » qui se sont rendus en Europe en passant par la Libye.
« Les droits humains et le partage des responsabilités, principes fondateurs de la protection internationale, doivent être au centre de la coopération entre l'Union européenne et la Libye. L'UE et ses États membres ne doivent pas fermer les yeux sur les incessantes violations des droits humains en Libye en recherchant la coopération de ce pays dans le but de contenir le flux de migrants originaires d'Afrique qui arrivent en Europe », a souligné Malcolm Smart.
Selon les estimations, entre 2002 et mai 2009, 13 000 personnes seraient arrivées à Malte par bateau après avoir traversé la Libye. Malte n'est cependant pas le refuge qu'ils espéraient. Aux termes du droit maltais, tout nouvel arrivant, y compris lorsqu'il s'agit d'un demandeur d'asile, est susceptible d'être considéré comme « immigrant irrégulier » et placé en détention pour une durée indéterminée (en pratique, jusqu'à 18 mois).
Les recours légaux existants pour contester les détentions ont été jugés insuffisants par la Cour européenne des droits de l'homme.
« En raison de sa situation géographique, Malte doit faire face à d'importants flux de demandeurs d'asile et de migrants en situation irrégulière aux origines diverses. Il est évident que cela représente une difficulté majeure. Mais cela de relève pas Malte des obligations qui lui incombent aux termes du droit régional et international relatif aux réfugiés et aux droits humains, en particulier de la Convention européenne des droits de l'homme », a déclaré Malcolm Smart.
« Les autorités maltaises doivent veiller à ce que les opérations de recherche et de sauvetage n'aient pas pour résultat le renvoi forcé ou l'évacuation de personnes déjà vulnérables vers la Libye ou d'autres États où elles risquent véritablement de subir de graves violations des droits humains. »

Amnesty International

lundi 13 décembre 2010

"Dream Act" adopté

La chambre des représentants a donné son aval mercredi à un projet de loi controversé qui ouvre la voie de la régularisation aux clandestins arrivés aux Etats-Unis avant l'âge de 16 ans.

A l'issue d'un débat parfois houleux, les députés américains ont approuvé le texte baptisé "Dream Act", acronyme de Development, Relief, and Education for Alien Minors (Développement, aide et éducation pour les mineurs étrangers), par 216 voies contre 198. Le Sénat doit se prononcer jeudi sur un texte un peu différent, mais il est peu probable qu'il rassemble les 60 voix nécessaires à son adoption.

Europe1

Premier bilan de l'action de Frontex en Evros

Une baisse de 50% du flux de clandestins a été enregistrée dans la zone relevant de la direction de la police d'Orestiada, suite à l'implantation de la force de l'Agence européenne de surveillance des frontières extérieures (FRONTEX) dans cette partie de l'Evros (Nord-Est).

Par contre, dans la zone relevant de la direction de la police d'Alexandroupolis, plus au Sud, le taux est en hausse de 20%.

Ces données ont été communiquées à l'ANA-MPA par le président de l'Union syndicale des policiers de la région de l'Evros, Costas Hatzianagnostou, relevant que 300 policiers européens sont en patrouille actuellement dans la région de l'Evros, en majorité dans la section Nord de la frontière gréco-turque (région d'Orestiada), le reste supervisant la région de la compétence de la direction de la police d'Alexandroupolis.

M. Hatzianagnostou s'est dit satisfait de la collaboration avec la force de FRONTEX depuis novembre dernier, tout comme des résultats enregistrés jusqu'ici dans la répression de l'immigration clandestine.

ANA (Athens News Agency)

Rien n'arrête les harraga

Portés disparus en haute mer jeudi dernier, 36 candidats à l’émigration clandestine ont été interceptés et arrêtés, avant-hier dans l’après-midi, selon des sources sûres, par les gardes-côtes tunisiens de la ville de Tabarka.

Les familles des harraga, qui ont confirmé l’information, nous ont déclaré que leurs enfants avaient embarqué mardi dernier à partir des plages de Seybouse et Sidi Salem. Cette interception intervient quelques jours seulement après celle qui a concerné une centaine de harraga qui avaient pris le large mardi dernier à partir des côtes oranaises, pour tenter de rejoindre la rive nord de la Méditerranée, sur la côte ibérique.

C’est dire si le phénomène prend des proportions importantes ces derniers temps. Les familles des harraga interceptés à Tabarka, qui avaient perdu tout contact avec eux, ont décidé d’alerter le Groupement territorial des garde-côtes (GTGC) de Annaba. Aussitôt, d’importants moyens marins ont été déployés par le GTGC à la recherche des deux embarcations avec à leur bord 17 et 19 jeunes harraga. Appelés à la rescousse, deux avions militaires de la base aérienne 142 de Boufarik ont participé aux recherches qui ont concerné toute la façade maritime algérienne. Pour un bilan négatif, cependant. Les autorités italiennes et espagnoles ont été également saisies de la disparition des deux embarcations ; leurs recherches ont été aussi vaines.

Originaires de Skikda, El Tarf et Annaba, les 36 candidats à l’émigration clandestine, dont l’âge varie de 20 à 39 ans, ont dérivé vers les eaux territoriales tunisiennes vu le caractère de leurs embarcations de fortune, les vents en haute mer et surtout leur inexpérience dans le domaine de la navigation maritime.
La sœur d’un harrag de Skikda a appelé, avant-hier, les garde-côtes de Annaba pour leur dire : «A mon dernier appel, il m’a informé qu’ils sont près des plages tunisiennes. Depuis, j’ai perdu tout contact avec lui.» D’autres parents nous ont confirmé que les 36 clandestins ont été «accueillis» par les garde-côtes tunisiens et reconduits pour les besoins d’identification. Quel sera leur sort ? Seront-ils libérés ou enfermés dans les centres de rétention tunisiens, aux côtés de leurs compatriotes ?

Tant de questions que les parents et proches des 36 harraga se posent d’ores et déjà. Leurs craintes sont d’autant plus justifiées lorsqu’on sait que plusieurs ONG internationales militant pour la défense des droits des migrants ont déclaré que 300 harraga croupissent actuellement dans les centres de rétention tunisiens. Ces ONG ont même fait état de l’existence, en plus d’un centre à la périphérie de Tunis et d’un autre entre la ville de Gabès et la frontière libyenne, de 11 camps d’enfermement secrets dont la réalisation a été financée par l’Italie en contrepartie de sa coopération dans la lutte contre l’immigration clandestine. Une coopération instituée par deux accords bilatéraux dont le premier remonte à 1998. A l’époque, l’Italie, par cet engagement économique vis-à-vis de la Tunisie, a déboursé plusieurs milliards de lires en trois ans pour l’industrie, dont 500 millions de lires pour la réalisation en Tunisie de centres de rétention, précisent ces organisations humanitaires.

Kamel Belabed, porte-parole du collectif des familles de harraga disparus en mer, le confirme : «Ce chiffre de 300 est important et précis. Le nombre est accablant, mais reste probable et je ne serais pas surpris si on me disait qu’il y en a davantage.» Ainsi, les familles de harraga attendent toujours pour connaître le sort réservé à leurs enfants. Elles espèrent l’intervention de la représentation diplomatique algérienne dans le pays de Ben Ali pour le rapatriement des 36 jeunes harraga. 

Mohamed Fawzi Gaïdi dans El Watan

Contre le durcissement des lois sur l'asile

Quelque 60 personnes ont participé samedi matin sur la place St-Laurent à Lausanne à un «cercle de silence» organisé par les Eglises catholique et protestante du canton de Vaud.

La réunion samedi à Lausanne visait à protester contre le durcissement des lois sur d'asile. Interrogé par l'ATS, Laurent Zumstein, de l'Eglise évangélique réformée du canton de Vaud, s'est dit satisfait du nombre de participants. En général, beaucoup moins de personnes sont présentes à ce genre de manifestations à Lausanne, a-t-il estimé.

«Au lendemain de la journée mondiale des droits humains, les Eglises continuent d'attirer l'attention des autorités et des citoyens sur l'aide d'urgence aux demandeurs d'asile», écrivent- elles dans un communiqué. «Son application stricte a de graves conséquences pour la santé psychique et physique des personnes déboutées».

Les Eglises sont également préoccupées par la nouvelle proposition de révision de la Loi sur l'asile, qui selon elles, va durcir à nouveau l'accès à l'asile en Suisse. La nouvelle loi prévoit de réduire le délai de recours ordinaire de 30 à 15 jours et d'augmenter les avances de frais.

ATS relayé par 20minutes

Politique d'accueil et d'asile: qu'est-ce qui ne tourne pas rond ?

Politique d’accueil et d’asile: qu'est-ce qui ne tourne pas rond? Ce dimanche, l’émission Controverse parlait des politiques d’immigration et d’asile en Belgique, en présence de députés, d’avocats et de travailleurs sociaux.

La politique d’accueil et d’asile connaît une véritable crise en Belgique. Des milliers de personnes ne sont pas accueillies dans les délais imposés par la loi et les conventions internationales. D’autre part, l’annonce des mesures d’urgence telles que le placement des demandeurs d’asile dans des hôtels suscite des réactions extrêmement négatives de la part du peuple.

Un seul ministre pour toute la politique d'asile et d'accueil

Jacqueline Galant constate l’échec de la politique d’accueil et d’asile dans notre pays : "Il y a eu des appels d’air conséquents qui ont été faits vers l’extérieur mais quand on entend parler d’hôtels, d’astreintes... Il y a des choses aberrantes qui se sont passées dans notre pays et il y a eu un flux massif chez nous," explique-t-elle. La députée MR souhaite qu’un seul ministre s’occupe de toute la politique des étrangers : "Quand vous voyez le nombre de ministres et de secrétaires d’Etat qui s’occupent de cette problématique, il y a une dispersion de toutes les compétences", a-t-elle déclaré sur le plateau de Controverse.

Une "politique d'expulsion"

Patrick Dewael partage l’avis de Mme Galant sur ce point. Mais il ajoute qu’il serait nécessaire de mettre en place une "politique d’expulsion". "Les centres d’accueil comptent toujours des centaines et des centaines d’étrangers qui ont épuisé leur procédure et que l’on pourrait éloigner, parfois par force. On ne le fait pas, ce qui fait que les centres sont pleins. Cela fait un appel d’air car on sait que si en Belgique on continue les procédures, on sera à un moment donné régularisé," explique-t-il.

Plus de 8000 expulsions en 2010

Mais Melchior Wathelet refuse que l’on dise qu’il n’y a pas d’expulsions. A la fin de l’année, on comptera plus de 8000 expulsions selon lui : "J’ai expulsé, cette année 2010, plus qu’en 2009 et en 2008. Les expulsions sont donc en hausse. On renvoie plus les personnes vers leur pays d’origine". Toute la difficulté semble résider dans les procédures, qui impliquent une prise de contact avec les pays d’où proviennent les demandeurs : "Quand vous avez un Afghan, un Iranien, un Irakien, un Guinéen, que l’on doit renvoyer vers son pays d’origine, c’est effectivement plus difficile. Il faut que je puisse démontrer l’identité et la nationalité de la personne. Il faut que j’aie un laissez-passer du pays d’origine. Or vous imaginez bien que prendre contact avec ces pays-là, ce n’est pas ce qu’il y a de plus simple", explique-t-il.

Logés dans des hôtels

Philippe Courard (PS), explique quant à lui pourquoi on en arrive à loger les demandeurs d’asile dans des hôtels: "Je ne contrôle pas les flux entrants, ni les flux sortants, on me demande d’accueillir. C’est la loi et je fais le maximum. C’est pour ça qu’on a procédé à l’utilisation de l’hôtel, que je réprouve, parce qu’il ne fallait pas que les gens soient à la porte". Il explique que des bâtiments publics et des casernes lui ont été accordés pour le logement des demandeurs d’asile, mais que cela a été fait trop tard. 

Des avocats pour les demandeurs d'asile

Alexis Deswaef, avocat et président de la commission "Etranger" de la Ligue des droits de l’homme, explique que cette crise de l’accueil, on l’a vue arriver, et que les politiques ne font que se rejeter la responsabilité : "Le monde associatif, les avocats, ont averti le gouvernement en disant, vous allez avoir un problème". Il y a quelques temps, lors de la première grande vague de froid, des centaines de personnes étaient à la rue à Bruxelles. Maître Deswaef fait partie d’un groupe d’une vingtaine d’avocats qui interviennent à titre humanitaire et bénévole pour leur venir en aide : "Nous trouvons inacceptable que des personnes qui ont un droit qui est inscrit dans la loi belge mais qui relève aussi des obligations internationales de la Belgique, se retrouvent ainsi jetées à la rue, sans autre solution que de dormir à la gare du Nord, et quand on décide de fermer cette gare, ils se retrouvent à la rue," explique-t-il.

A propos des astreintes

Mais pourquoi les demandeurs d’asile réclament-ils des astreintes ? L’avocat rappelle que dans les 6 premiers mois de leur arrivée en Belgique, ces derniers ne peuvent pas travailler et ne reçoivent pas d’allocations sociales de remplacement de revenu. "Ce ne sont pas des dommages et intérêts qu’on donne aux demandeurs d’asile. Les astreintes ont été prononcées par le tribunal parce que la partie qui perd le procès n’exécutait pas le jugement". En d’autres termes, comme l’Etat belge n’a pas répondu à son obligation de loger ces demandeurs d’asile, elle doit s’acquitter d’astreintes. "On a fait de la victime un coupable. On dit que c’est le méchant demandeur d’asile qui demande des astreintes. Mais c’est quand même grave que dans un Etat de droit, le gouvernement ne respecte pas des jugements basés sur des lois qu’il a lui-même voté au parlement," explique-t-il.

Un fond d’urgence solidaire a été créé et les astreintes y seront collectivisées. Elles vont par exemple servir à chauffer le squat de Laeken, où logent également des sans-abris, explique Me Deswaef.

RTLinfo

Marine Le Pen pourrait inciter la droite à durcir le ton

L'offensive de Marine Le Pen était ce week-end au cœur des débats lors du conseil national de l'UMP et Jean-François Copé a clairement appelé la droite à en tenir compte.

La droite traditionnelle est consciente du danger que représente pour elle la montée en puissance de Marine Le Pen et pourrait riposter en occupant plus fermement le terrain sur les thèmes de prédilection du Front national que sont l'insécurité et l'immigration.

La dernière sortie médiatique en date de la vice-présidente du FN, qui a comparé vendredi 10 décembre à Lyon les "prières de rue" des musulmans à l'Occupation, n'a pas tardé à susciter des réactions dans la majorité, notamment dans les rangs de l'UMP. Après avoir paru vouloir rendre sa formation plus présentable, la numéro deux du FN, bien placée pour prendre en janvier la tête du parti avant de se lancer dans la course à la présidentielle de 2012, semble soucieuse désormais de se rapprocher des thèses défendues depuis toujours par son père.

"Je suis très surpris de l'étonnement de certains", a déclaré dimanche Brice Hortefeux sur i>Télé et France Inter. "Il s'agit en réalité de propos très classiques tenus par son père. Elle s'inscrit dans la filiation." Le ministre de l'Intérieur a ajouté "ne pas partager du tout" les propos de Marine Le Pen et a appelé à la vigilance sur "des idées qui peuvent se banaliser".

Au cœur des débats à l'UMP

L'offensive de Marine Le Pen était ce week-end au cœur des débats lors du conseil national de l'UMP et Jean-François Copé a clairement appelé la droite à en tenir compte. Le secrétaire général du parti majoritaire a évoqué une situation de "danger électoral" créée par la remontée du FN et estimé que le meilleur moyen pour l'UMP d'y répondre était "un retour à fond" aux fondamentaux de la droite et à ses valeurs, notamment "la fermeté."

"A nous d'être très offensifs, à l'image de ce que fait Brice Hortefeux dans le domaine de la sécurité et de la lutte contre l'immigration clandestine", a dit Jean-François Copé, qui s'est prononcé en outre pour une relance du débat sur l'identité nationale, abandonné au printemps dernier après avoir créé de vifs remous. Cette nouvelle stratégie que Jean-François Copé appelle de ses voeux risque de poser un problème à Nicolas Sarkozy.

Après une séquence sécuritaire marquée notamment par son discours de Grenoble liant immigration et délinquance et la polémique sur les expulsions de Roms, le président semblait en effet vouloir donner une tonalité plus apaisée et plus consensuelle à la dernière phase de son quinquennat.

Un danger pour Sarkozy

Pour le politologue Dominique Reynié, Marine Le Pen représente une menace bien réelle pour le chef de l'Etat dans la perspective de la présidentielle de 2012. "Elle représente un danger pour Nicolas Sarkozy", estime Dominique Reynié dans les colonnes du Journal du Dimanche. "Elle peut fragiliser son score au premier tour et gêner le report des voix au second. Si le FN réalise un score élevé, cela signifiera qu'il a pris des voix à la gauche. Celles-ci n'iront pas forcément vers le candidat de droite ensuite."

Pour Ségolène Royal, c'est le gouvernement, par l'échec de son action, qui est responsable de l'écho rencontré par la radicalisation du discours du FN. "Si le Front national est écouté aujourd'hui c'est parce que le pouvoir en place n'a pas tenu ses promesses", a déclaré dimanche sur Europe 1 la candidate à la primaire socialiste. "La responsabilité de l'impact des discours que vous venez d'évoquer, c'est Nicolas Sarkozy et son gouvernement qui la portent", a-t-elle ajouté. La popularité grandissante de Marine Le Pen résulte, selon Dominique Reynié, d'une évolution structurelle de la société française, devenue selon lui "plus âgée, plus craintive, plus conservatrice."

Arnaud Montebourg, autre candidat à la primaire socialiste, déplore pour sa part, en toile de fond du dernier coup d'éclat de la vice-présidente du FN, une montée des antagonismes religieux et du racisme dans l'Hexagone. "On s'est étripé pendant des siècles pour des questions religieuses et nous sommes en train de redécouvrir les guerres de religion sur notre territoire", a-t-il déclaré sur Radio J. "Le racisme s'installe dans notre pays, tout le monde le sait, à tous les étages", a-t-il ajouté.

Un article du Nouvel Observateur avec Reuters

dimanche 12 décembre 2010

Des milliers d'Israéliens défilent à Tel Aviv pour les droits de l'Homme

Des milliers d'Israéliens juifs et arabes, auxquels se sont joints des demandeurs d'asile étrangers, ont manifesté vendredi à Tel Aviv pour une vie dans "la dignité et la liberté" et contre la montée de l'extrémisme, pour la journée internationale des droits de l'Homme.

Les manifestants -- 10.000 selon les organisateurs -- ont défilé dans le centre de la métropole en brandissant des banderoles proclamant "Les droits de l'Homme s'appliquent pour tous les hommes", ou fustigeant la poursuite de l'occupation israélienne des Territoires palestiniens.

Plusieurs centaines de demandeurs d'asile et travailleurs immigrés originaires d'Afrique ont participé à la manifestation derrière le slogan: "Les demandeurs d'asile ne sont pas des criminels", selon un photographe de l'AFP.

"C'est une expression de protestation contre la vague grandissante de racisme", a expliqué à l'AFP Hagaï Elad, directeur de Association pour les droits civiques en Israël (ACRI), organisatrice de la marche à laquelle des dizaines d'ONG avaient appelé.

"Ce qu'il se passe en Israël depuis 18 mois est très grave. La discrimination est partout (...). La démocratie subit des attaques sur tous les fronts, et ces attaques proviennent du gouvernement lui-même", a-t-il déploré.

Les organisations israéliennes de défense de droits de l'Homme sont régulièrement accusées par le gouvernement de droite de Benjamin Netanyahu de "faire le jeu du terrorisme", comme l'a encore affirmé vendredi le vice-ministre des Affaires étrangères, Danny Ayalon.

En Israël, les autorités redoublent d'efforts pour endiguer l'afflux de migrants africains, en majorité Soudanais et Erythréens. Et l'extrême-droite, représentée au gouvernement, poursuit sa campagne contre la minorité arabe accusée de déloyauté envers l'Etat juif.

Une vive polémique a éclaté cette semaine après que 300 rabbins ont signé un appel contre la location et la vente de maisons à des non-juifs, une mesure qui vise d'abord les Arabes israéliens.

AFP

Le débat sur la politique d'asile, véritable guerre des chiffres

Depuis quelques jours, la politique d'asile est au centre des débats. Cette politique est-elle trop laxiste ou inhumaine ? Les invités sur le plateau de Mise au Point de ce dimanche midi n'ont pas réellement apporté de réponse claire et précise .

Des demandeurs d'asile dans les gares, dans des casernes ou faisant la file devant chez Fedasil, les images ont marqué les esprits ces derniers jours. Une véritable crise de l'accueil... Mais c'est toute la politique d'asile qui crée la polémique.

Certains partis durcissent le ton. C'est le cas notamment du libéral flamand Patrick Dewael. "On attire les gens", affirme-t-il en faisant clairement référence aux astreintes et chambres d'hôtel mises à disposition des demandeurs d'asile. "On leur laisse croire qu'ils vont être régularisés", continue-t-il. "Et puis ils sont régularisés trois ans plus tard, ils ne parlent pas la langue et ne sont pas prêts pour le marché du travail". Pour le représentant de l'Open VLD, la Belgique est clairement laxiste dans le domaine de la politique d'asile. Et il prévient, cette politique "de générosité n'est soutenue nulle part en Flandre".

Et c'est justement le fait de répéter ce genre de choses qui ferait le "meilleur appel d'air", estime Melchior Wathelet (cdH). Selon le secrétaire d'Etat à la Politique de migration et d'asile, il faut donc arrêter de considérer la Belgique comme une véritable terre d'accueil.

Alors, la Belgique serait-elle un eldorado ? Le débat est chaud sur le plateau de Mise au Point, le ton monte rapidement. Notamment lorsque les chiffres de demandes de régularisations sont évoqués. Les chiffres brandis par un virulent Alain Destexhe ne correspondent pas à ceux de l'écologiste Zoé Genot. Personne n'est d'accord, tout le monde parle de manipulation des chiffres. Même débat lorsque sont abordés le nombre d'expulsions des candidats déboutés. Un débat sur l'asile qui se mue rapidement en guerre des chiffres.

Tout au long du débat, le ton restera le même. Qu'il soit question du regroupement familial, de l'accès à la nationalité ou que l'on aborde des critères de régularisation, les discussions partent dans tous les sens.

Le tout sous le regard dépité de Samba, un demandeur d'asile venu du Cameroun il y a deux mois à peine. Il a certainement compris à quel point le débat sur l'asile est loin d'être terminé.

A. Fogli pour la RTBF

vendredi 10 décembre 2010

Le HCR inquiet des politiques contre l'immigration de l'UE

Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) s'est dit préoccupé vendredi des politiques de lutte contre l'immigration clandestine en Europe qui menacent le droit d'asile de personnes réellement en danger dans leur pays.

Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) s'est dit préoccupé vendredi des politiques de lutte contre l'immigration clandestine en Europe qui menacent le droit d'asile de personnes réellement en danger dans leur pays. L'Union européenne, dans sa tentative de lutter contre l'immigration clandestine, "ne doit pas oublier que parmi ces personnes qui cherchent à entrer (sur son territoire), il y en a qui ont besoin d'une protection internationale et dont les vies sont en danger", a expliqué un porte-parole du HCR, Andrej Mahecic, lors d'un point de presse.

Selon l'agence onusienne, l'évolution des chiffres sur le nombre d'arrivées par mer parlent d'eux-mêmes des difficultés pour trouver l'asile sur le continent européen. "L'Italie, la Grèce, Chypre et Malte (principaux pays d'arrivée de ces migrants) ont tous constaté une réduction drastique des arrivées par mer" cette année, a poursuivi le porte-parole.

Ainsi d'après les estimations du HCR, 8.800 personnes sont arrivées par mer au cours des dix premiers mois de l'année contre 32.000 durant la même période en 2009, soit une chute de 72,5%. Il est "pratiquement certain que cela résulte d'un renforcement des contrôles aux frontières, des patrouilles conjointes et des renvois sur la mer" d'embarcations avant qu'elles n'atteignent les eaux territoriales de ces pays, estime le HCR. Il appelle ainsi les membres de l'UE à faire en sorte que le droit d'asile en Europe ne soit pas menacé par les politiques visant à renforcer les frontières du continent.

L'agence onusienne se dit également préoccupée de la situation en Grèce où se retrouvent près des deux tiers des migrants arrivés par la mer. "Empêcher les arrivées par la mer ne résoud pas le problème et le fait juste déplacer ailleurs", comme le montre l'afflux de migrants dans la région de la frontière terrestre gréco-turque d'Evros qui a vu 38.992 candidats à l'immigration arriver entre janvier et octobre contre 7.574 sur la même période en 2009. Le HCR, qui s'est montré à de nombreuses reprises inquiet de la situation humanitaire de ces migrants en Grèce, a enjoint une nouvelle fois l'UE à venir en aide au pays pour faire face à une situation de plus en plus problématique.

AFP et Tribune de Genève

Israël: le rabbin à l'origine d'un appel discriminatoire persiste et signe

Le rabbin Shmuel Eliahu, à l'origine d'un appel contre la cohabitation avec les non-juifs, a promis de poursuivre sa campagne en dépit des accusations de racisme et de la polémique provoquée en Israël, rapporte vendredi un site internet religieux.

"Les attaques de la gauche et de ses suppôts (contre l'appel) ont eu pour effet contraire de renforcer le mouvement", a écrit le principal rabbin de la ville Safed dans le nord d'Israël, selon "Kikar Shabbat", un site orthodoxe. "Nous espérons recueillir des centaines de signatures supplémentaires la semaine prochaine", a-t-il dit à l'adresse des co-signataires de l'appel.

Toutefois, quelques rabbins sur la liste -sur plusieurs centaines- sont revenus sur leur signature à la suite de la tempête de protestations et des critiques de dirigeants spirituels du judaïsme orthodoxe. Le rabbin Eliahu avait déjà défrayé la chronique en octobre en appelant les habitants de Safed à ne pas louer ou vendre des appartements à des Arabes. Il avait été inculpé il y a six ans pour "incitation au racisme" à la suite d'appels identiques qu'il avait lancés, mais en fin de compte les poursuites avaient été abandonnées. Quelque 300 rabbins israéliens sont signé la lettre publique dans laquelle ils exhortent à interdire la vente ou la location de maisons ou de terrains à des non-juifs, ce qui vise particulièrement la minorité arabe en Israël.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, le président Shimon Peres et le président du Parlement Reouven Rivlin ont condamné ce manifeste, qualifié de "raciste" par des représentants de la communauté arabe israélienne et des associations de défense des droits de l'Homme. Les médias se sont aussi indignés de l'appel. Le principal dirigeant spirituel du judaïsme ultra-orthodoxe, le rabbin Yosef Shalom Elyashiv, s'est dissocié de l'initiative de son coreligionnaire de Safed, estimant qu'il "serait bon de confisquer les stylos de certains rabbins".

Pour l'heure, aucune sanction n'a été prise à l'encontre des signataires de l'appel --des fonctionnaires de l'Etat assurant les services religieux (dont les mariages) dans les municipalités, ou des directeurs de yéchivot (séminaires talmudiques) en Israël ou dans les colonies de la Cisjordanie occupée.

AFP

Vols spéciaux: toujours pas d'experts indépendants

L’Office fédéral des migrations cherche toujours des experts neutres pour surveiller le renvoi d’étrangers sous la contrainte. L’OSAR postule malgré le fait qu’elle ne réponde pas aux critères. Précisions sur les coûts de ces vols controversés.

Alard du Bois-Reymond, le patron de l’Office fédéral des migrations (ODM), tiendra-t-il ses engagements? Dès le 1er janvier, nouvelle directive liée à Schengen oblige, un ou des observateurs indépendants feront partie des vols spéciaux chargés d’expulser de force des requérants déboutés, a-t-il assuré à plusieurs reprises. Mais voilà: alors que le temps presse, l’ODM cherche toujours la perle rare. Et vient de le faire savoir via une offre d’emploi parue la semaine dernière dans la presse.

Contactées, plusieurs organisations, dont la Croix-Rouge, ont répondu négativement. Par crainte de devoir cautionner ces vols controversés. L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), interrogée par Le Temps, avait, elle, montré son intérêt (LT du 13.10.2010). Alors pourquoi l’ODM cherche-t-il encore une ou des personnes pour participer à «au moins 25 vols spéciaux par an» et «veiller à ce que les interventions de l’Etat soient conformes au droit»?

L’OSAR persiste

L’offre précise que le prestataire de services ne doit pas avoir d’autres mandats «émis par des services fédéraux ou cantonaux dans le domaine de la migration». «Nous ne répondons effectivement pas à ce critère car nous travaillons avec l’ODM lors des auditions de requérants d’asile», répond Beat Meiner, secrétaire général de l’OSAR. «Mais nous allons malgré tout postuler, sans lâcher nos autres mandats. Comme organisation faîtière qui revendique depuis des années la présence d’observateurs neutres sur ces vols (l’OSAR travaille avec Caritas Suisse, l’Entraide protestante, l’OSEO, l’Union suisse des comités d’entraide juive et la section suisse d’Amnesty International, ndlr), nous sommes prêts à endosser cette responsabilité. Le fait que nous travaillons pour la Confédération ne nous empêche pas de rester indépendants.»

Drôle de situation. L’ODM risque bien de ne pas trouver de structure répondant à ses critères en si peu de temps. La solution provisoire? Recourir à des collaborateurs de la Commission de prévention de la torture, comme nous l’affirmait jeudi l’ODM? «Nous participons déjà à certains vols, mais, avec nos douze bénévoles, nous ne sommes pas en mesure de les assurer tous, même pour une période transitoire», réagit son président, Jean-Pierre Restellini. «L’ODM ne nous a d’ailleurs jamais demandé de remplir ce rôle en attendant de trouver quelqu’un capable d’assurer le mandat…»

29 millions en 2009

Concernant les coûts de ces vols, l’ODM vient d’apporter des précisions. Dans sa réponse à une interpellation d’Antonio Hodgers (Verts/GE), le Conseil fédéral dit ne pas être en mesure de calculer le coût exhaustif d’une procédure de renvoi entre le moment de la décision et son exécution effective. Mais il souligne qu’en 2009, 360 personnes ont été rapatriées par vol spécial et que ces coûts se sont élevés à environ 3 millions de francs (9470 en moyenne par personne). Il précise que sur l’ensemble des renvois, la part des rapatriements par vols spéciaux est assez faible. «En 2009, le total des versements accordés aux titres des frais d’exécution des renvois s’est élevé à 29,2 millions de francs», dont 16 millions versés aux cantons pour les mesures de contrainte, ajoute-t-il.

Le gouvernement explique surtout que renoncer aux vols spéciaux permettrait des économies de 9470 francs par personne, auxquelles s’ajouteraient les 140 francs par jour de détention. Mais sans renvoi sous contrainte, les cantons auraient à escompter des coûts d’aide d’urgence «beaucoup plus importants», alors qu’ils ont déjà dépensé 57,3 millions de francs en faveur de ses bénéficiaires en 2009. Une manière de dire que Berne n’est pas prête à renoncer à ces vols, aussi controversés soient-ils.

Valérie de Graffenried dans le Temps

Les étranges pratiques de policiers lausannois

Un jeune Erythréen affirme avoir été embarqué dans un fourgon et abandonné dans un endroit désert après avoir reçu une dose de spray au poivre. Les agents jugés contestent.

C’est sa parole contre celle de cinq policiers lausannois. Ali, de son deuxième prénom, un jeune Erythréen toujours aussi révolté par le traitement qui lui a été réservé alors qu’il n’avait que 16 ans, tente depuis jeudi de convaincre le tribunal qu’il a bien été emmené manu militari dans un bois et abandonné dans cet endroit désert après avoir reçu une bonne dose de spray au poivre. Le plaignant a trouvé un allié improbable en la personne d’un ancien inspecteur pour qui «ces pratiques n’ont rien d’invraisemblable».

Il a visiblement la langue bien pendue et l’insulte facile à l’égard des forces de l’ordre. «J’ai traité ces agents de tous les noms et je leur ai fait un bras d’honneur», se rappelle Ali. De quoi sidérer le président Pierre Bruttin. «Ce n’est pas des manières de s’en prendre ainsi aux policiers», dit le juge. «Je sais», répond le plaignant. Ce dernier estime toutefois qu’il avait de bonnes raisons d’être hors de lui en cette nuit agitée du réveillon 2006.

Les versions sont bien entendu diamétralement opposées. Ali explique avoir déjà été copieusement bousculé et humilié lors d’une première interpellation plus tôt dans la soirée. De retour au cœur de la vie nocturne lausannoise, l’adolescent a croisé un fourgon et fait comprendre à ses occupants tout le mal qu’il pensait de cette police. «Ils m’ont emmené en direction des bois de Sauvabelin. Je les ai suppliés de ne pas me laisser là. Ils m’ont dit de dégager.» En descendant du véhicule, un des agents, assure-t-il, lui a encore giclé une dose de spray en guise de rétorsion.

Ali explique être revenu en ville, le visage en feu. Deux de ses amis confirment. «Il pleurait et avait les yeux tout rouges.» Les deux garçons l’ont accompagné au poste de police où il voulait porter plainte. A travers la vitre, ils l’ont vu s’énerver encore plus, être emmené un moment à l’arrière, puis ressortir sans avoir pu se faire entendre. «Il s’est calmé en recevant l’appel de sa mère sur son portable», se rappelle cet ami.

Les accusés racontent une tout autre histoire. Le chef de cette patrouille admet avoir embarqué Ali à bord du fourgon. «C’était pour éviter une émeute car il était très agité.» Le véhicule s’est ensuite dirigé en direction du nord de Lausanne. Il s’agissait d’éloigner l’intéressé du centre tout en le rapprochant de chez lui, assure le responsable. Ali ne leur aurait pas donné d’adresse précise, ce que ce dernier conteste. Appelés en urgence sur une autre intervention, ils auraient alors fait descendre le fêtard à un arrêt de bus dans le calme et sans jamais user du méga-spray qui se trouve dans le fourgon.

Les cinq policiers impliqués ont fait front commun durant l’enquête. Seul celui qui conduisait a montré un semblant de mauvaise conscience en se disant «peu fier» de ce qui s’était passé. Au procès de Nyon, l’intéressé nuance. «J’étais au plus bas. Le juge d’instruction me traitait de menteur et me disait que j’allais nuire à l’ensemble de l’institution. C’est comme si le sol s’effondrait sous mes pieds. Dans ce contexte, mes propos ont peut-être été mal interprétés. En fait, je me sentais coupable de l’avoir éloigné du centre, rien d’autre.»

Il y en a un dont les propos ne prêtent à aucune confusion. Cet ancien de police-secours, passé à la brigade des mineurs avant de quitter la profession pour le privé, affirme avoir entendu une protagoniste de cette opération – la seule femme parmi les accusés – dire qu’une version avait été «arrangée» pour faire face à la justice. Une autre inspectrice, présente lors de cette confession, dénoncera ce mensonge organisé plusieurs années plus tard. C’est sa lettre qui va relancer l’enquête et l’élargir à tous les agents présents aux côtés du présumé sprayeur.

Pour l’ancien policier, Ali ne décrit pas des choses impensables. «Quand j’ai débuté dans l’intervention d’urgence, les anciens avaient l’habitude de déposer des personnes dans les bois de Prilly. J’ai bien dû suivre. La commune a fini par s’en plaindre, alors on a opté pour Sauvabelin», se rappelle le témoin. Il explique aussi que les petites vengeances – un coup de spray au poivre par exemple pour se défouler – n’étaient pas exceptionnelles.

La hiérarchie – deux lieutenants ont été appelés à la barre – n’a jamais cautionné, ni entendu parler de tels «raccompagnements forcés». Ces responsables préfèrent parler de conduite de rapprochement au domicile même si l’un d’eux finit par concéder que cette pratique avait peut-être cours dans des temps reculés. Quant aux accusés, ils semblent avoir gardé toute la confiance de leurs supérieurs. Ce n’est pas le cas d’Ali, qui est volontiers présenté comme un affabulateur. «Mais pourquoi mentirait-il? s’est interrogé son copain de virée. Tout le monde sait bien que gagner contre la police, c’est très dur.» Il en aura peut-être une nouvelle démonstration lundi prochain, à l’heure du jugement.

Fati Mansour dans le Temps

jeudi 9 décembre 2010

Un Turc renvoyé dans un pays qui lui est étranger

Attila Y. avait violemment frappé un Suisse de 76 ans à la gare de Bâle il y a deux ans. Hier le Tribunal fédéral a tranché: cet homme de 32 ans sera renvoyé en Turquie, pays qu'il a quitté à l'âge de 4 ans et avec lequel il n'a aucun lien. La décision a été prise avant la votation du 28 novembre.

Un de ses avocats a bien tenté d'expliquer au tribunal que le jeune homme n'avait aucun lien avec la Turquie, la décision est tombée: il sera renvoyé vers sa patrie d'origine, qu'il a quittée il y a vingt-huit ans, explique le "Blick".

Le 26 janvier 2008 en gare de Bâle, Attila Y. avait attaqué Heinz P. parce que le retraité lui avait demandé d'éteindre sa cigarette dans une zone non-fumeur. L'homme avait terminé la soirée aux soins intensifs avec une fracture du crâne. Il a depuis perdu l'usage de son odorat.

Il faut noter que la décision du Tribunal fédéral est tombée le 9 novembre, bien avant l'acceptation en votation populaire de l'initiative de l'UDC "Pour le renvoi des criminels étrangers".

Trouvé dans le Matin

mercredi 8 décembre 2010

Appel discriminatoire de rabbins israéliens

Cinquante rabbins Israéliens ont signé une lettre ouverte avertissant les Juifs de ne pas louer ou vendre des propriétés aux non-juifs, disant que ceux qui le font devraient être « ostracisés », selon une copie de la lettre apparue mardi.

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Rav Shmuel Eliahu.. fleuron de l’extrême-droite raciste et xénophobe

« En réponse aux nombreuses questions, nous disons qu’il est interdit dans la Torah de vendre une maison ou une terre à un étranger dans la Terre d’Israël. Le texte, signé principalement par des rabbins employés d’Etat, avertit « celui qui vend ou loue un logement dans une zone où vivent les Juifs cause un grand tort à ses voisins ».

« Après que quelqu’un ait vendu ou loué un seul logement, la valeur de tous les logements avoisinants chute...Celui qui vend ou loue (à des non-juifs) cause une grande perte à ses voisins et son péché est grand », dit la lettre, dans ce qui est compris pour se référer largement à la minorité arabe d’Israël. « Quiconque vend (une propriété à un non-juif » doit être mis à l’écart !! »

D’après le site Web israélien Ynet, la lettre devait être publiée dans des journaux religieux et distribué dans les synagogues du pays en cours de semaine. L’Association pour les Droits Civils en Israël (ACRI) a traité la lettre des « Raciste » et appelé le Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahou à condamner « l’incitation exprimée par les rabbins ».

Appel à une intervention de Netanyahou

« Les rabbins qui sont fonctionnaires ont une obligation envers toute la population, y compris les citoyens Arabes d’Israël. Il est inconcevable qu’ils fassent usage de ce statut public pour promouvoir le racisme et la provocation », dit le groupe dans un communiqué. L’organisation a appelé Netanyahou à prendre des mesures disciplinaires contre les rabbins fonctionnaires signataires du document. La lettre est arrivée alors que la tension monte entre Juifs religieux et habitants Arabes Israéliens dans la ville de Safed au nord, où le rabbin Shmuel Eliahu a appelé les Juifs à éviter de louer ou de vendre des propriétés aux Arabes.

A Safed, un collège attire les étudiants Arabes-Israéliens de la région voisine, dont beaucoup recherchent un hébergement en ville pendant leurs études. En octobre, un groupe de jeunes Juifs a attaqué plusieurs étudiants Arabes-Israéliens du collège, criant « mort aux Arabes » lors d’un incident que la police a dû disperser.

Quelque 1,3 millions d’Arabes Israéliens vivent en Israël, représentant 20% de la population. Ils sont constitués des Palestiniens restés sur leurs terres après l’établissement d’Israël en 1948, et de leurs descendants.

AFP sur Info-Palestine.net